ARRET N°
N° RG 21/01923 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJTY
[I]
[I]
C/
S.A.R.L. MBMO
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 21 MARS 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01923 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJTY
Décision déférée à la Cour : décision du 17 mai 2021 rendue par le Tribunal de Grande Instance des SABLES D OLONNE.
APPELANTS :
Monsieur [L] [I]
né le 30 Décembre 1955 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Madame [H] [M] épouse [I]
née le 11 Mai 1952 à [Localité 4]
[Adresse 2]
[Localité 5]
ayant pour avocat Me Stéphanie GUEDO, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
INTIMEE :
S.A.R.L. MBMO
[Adresse 1]
[Localité 3]
ayant pour avocat Me David DURAND de la SELARL CNTD, avocat au barreau des SABLES D'OLONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 09 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,
ARRÊT :
- Contradictoire
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ :
Les époux [I]/[M] ont fait construire en 2017 un pavillon d'habitation au [Localité 5], en Vendée.
Ils ont confié la maîtrise d'oeuvre des travaux à la SARL MBMO par contrat du 18 septembre 2017 stipulant une rémunération de 25.000 euros TTC au total.
Celle-ci leur ayant vainement réclamé paiement d'une facture de 2.250 euros émise le 4 octobre 2018, et déclarant se heurter de leur part à des immixtions inacceptables dans le champ de sa mission et à une remise en cause de sa compétence lors de réunions de chantier a, après mise en demeure du 10 décembre 2018, cessé d'intervenir sur le chantier.
Elle a fait assigner [L] [I] et [H] [M] épouse [I] devant le tribunal par acte du 10 juin 2020 pour les voir condamner solidairement à lui payer 2.250 euros au titre de sa facture restée en souffrance, 3.000 euros de dommages et intérêts et 4.500 euros d'indemnité de procédure.
Les défendeurs se sont opposés à ces prétentions et ont reconventionnellement sollicité l'institution d'une expertise en arguant d'une mauvaise exécution de sa mission par le maître d'oeuvre.
Par jugement du 17 mai 2021, le tribunal judiciaire des Sables d'Olonne a :
* rejeté la demande de jonction présentée par les époux [I]
* condamné solidairement les époux [I]/[M] à payer à la société MBMO
.2.250 euros avec intérêts légal à compter de la mise en demeure du 10 décembre 2018
.2.000 euros en indemnisation des préjudices subis
* condamné solidairement les époux [I] aux dépens
* condamné solidairement les époux [I] à payer 3.500 euros à la société MBMO en application de l'article 700 du code de procédure civile
* dit que les intérêts dus au moins pour une année entière produiraient intérêts
* rejeté le surplus des demandes
* rappelé que la décision était exécutoire à titre provisoire.
Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu, en substance :
.que le défaut de paiement de la facture litigieuse était avéré
.que l'immixtion des maîtres d'oeuvre l'était aussi et légitimait la suspension du contrat
.qu'ainsi empêché d'exécuter sa mission jusqu'à son terme conventionnel, qui incluait l'assistance à la réception des travaux lui ouvrant un honoraire auquel il ne pouvait plus prétendre, la société MBMO subissait un préjudice financier du fait du comportement fautif des maîtres de l'ouvrage.
.qu'une expertise judiciaire ordonnée parallèlement en référé par le tribunal judiciaire à la requête d'un locateur d'ouvrage et à laquelle les époux [I] et la société MBMO étaient parties ayant conclu à l'absence de désordre, il n'y avait pas lieu d'ordonner l'expertise reconventionnellement réclamée par les maîtres de l'ouvrage au vu des conclusions d'un expert amiable soutenant l'existence de désordres imputables à la maîtrise d'oeuvre
Les époux [I] ont relevé appel le 21 juin 2021.
Les dernières écritures prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile ont été transmises par la voie électronique :
* le 9 décembre 2021 par les époux [I]
* le 3 mars 2022 par la SARL MBMO.
Les époux [I] demandent à la cour d'infirmer le jugement entrepris, et avant dire droit d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise de leur maison afin d'examiner notamment tous les désordres relevés par le Cabinet Arthex et repris dans leurs conclusions, d'en évaluer le coût de reprise, de chiffrer leurs préjudices annexes et de faire les comptes entre les parties.
Dans cette attente, ils demandent de débouter MBMO de ses prétentions et de la condamner aux dépens et à 4.000 euros d'indemnité de procédure.
Ils relatent la dégradation de leurs relations avec le titulaire du lot gros-oeuvre, l'entreprise CMB, qui exigeait des paiements en liquide, ne justifiait pas être assurée pour les travaux de piscine, facturait des travaux supplémentaires non commandés en les présentant comme 'obligatoires' et a commis sur le chantier des malfaçons objectivés par l'expert amiable.
Ils affirment que MBMO s'est désintéressée du chantier lorsqu'elle a vu comment les choses tournaient.
Ils indiquent être dans une situation matérielle et morale catastrophique, se retrouver avec un chantier abandonné par CMB et par MBMO, et se heurter au refus d'intervenir des entreprises contactées pour achever le chantier, personne ne voulant terminer des prestations mal commencées.
Ils critiquent les conclusions du rapport d'expertise de M. [G], et considèrent que celui-ci s'est fait le défenseur de MBMO.
Ils invoquent le rapport établi en décembre 2020 par un expert de justice mandaté par leurs soins, M. [W] faisant état de désordres.
La SARL MBMO sollicitent la confirmation pure et simple du jugement déféré et réclament 4.500 euros d'indemnité de procédure.
Elle relate le déroulement du chantier, et les difficultés rencontrées avec les maîtres de l'ouvrage.
Elle indique s'être conformée au contrat conclu avec eux pour suspendre sa mission qu'elle ne parvenait plus, de leur fait, à remplir.
Elle constate que le défaut de paiement de sa facture est reconnu.
Elle fait valoir que l'expert judiciaire [Y] [G] a fait litière des reproches que les époux [I] lui adressent, et que rien ne justifie que ceux-ci retiennent leur règlement ni qu'une contre-expertise soit ordonnée.
Elle fonde sa demande de dommages et intérêts sur le dénigrement dont elle a fait l'objet auprès des intervenants sur le chantier de la part des maîtres de l'ouvrage, et par la privation des honoraires que lui auraient procurés la poursuite et l'achèvement arrêté par la faute des époux [I].
L'ordonnance de clôture est en date du 7 novembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
La facture litigieuse correspond à des prestations de maîtrise d'oeuvre pour lesquelles MBMO était en droit de réclamer des honoraires compte-tenu du contrat conclu entre les parties et du stade d'avancement du chantier.
Il n'est pas contesté qu'elle n'a pas été réglée.
La société MBMO justifie s'être conformée aux stipulations du contrat de maîtrise d'oeuvre la liant aux époux [I], en les mettant préalablement en demeure de cesser leur immixtion et leurs critiques l'empêchant d'oeuvrer, ainsi que d'acquitter la facture exigible restée en souffrance.
La réalité d'interventions directes de M. et Mme [I] auprès d'entreprises titulaires de lots, pour leur adresser des critiques et/ou des instructions, est attestée par les productions, et ressort, notamment, de leur courrier du 19 décembre 2018 à la société MBMO (pièce n°27) dans laquelle ils reconnaissent avoir reproché au maçon les fissures affectant selon eux son travail sur la piscine et lui avoir demandé de démonter les plaques du placoplâtre.
La multiplicité des griefs d'incompétence, de retard, de connivence à leur détriment avec les entreprises, contenus dans ce courrier, confirme la réalité et la gravité de la perte de confiance qui, assortie au refus délibéré de payer une facture intermédiaire d'honoraires, a justifié l'interruption de sa mission par le maître d'oeuvre, lequel s'est conformé aux stipulations du marché en y procédant après une mise en demeure préalable non suivie d'effets.
Le rapport déposé en juin 2020 par l'expert judiciaire [G], qui a minutieusement pris en considération tous les griefs de malfaçons, non-façons ou méconnaissance des règles de l'art formulés par le cabinet Arthex, et qui a répondu de façon argumentée aux critiques adressées aux conclusions provisoires de son pré-rapport, réfute de façon convaincante les griefs formulés par les maîtres de l'ouvrage, et conclut à l'absence de désordres véritables en indiquant, pour nombre de points invoqués, qu'ils tiennent simplement au fait que le chantier n'est pas terminé.
Le rapport déposé quelques mois plus tard en décembre 2020 par M. [W] ne remet pas en cause de façon probante les conclusions motivées et circonstanciées de l'expert judiciaire en leur incidence sur le présent litige, relatif aux relations entre maîtres de l'ouvrage et maître d'oeuvre, et il n'y a pas à ordonner la contre-expertise sollicitée par les appelants.
Ainsi, le contrat liant les parties est résilié, et la SARL MBMO est fondée à obtenir paiement de sa facture, et l'indemnisation du préjudice financier et moral que lui ont causé les reproches non avérés de ses cocontractants et l'interruption anticipée d'une mission facturable selon l'état d'avancement du chantier qui la prive des honoraires escomptés.
Le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions, y compris en celles allouant le bénéfice de l'anatocisme -qui est de droit lorsqu'il est réclamé en justice- et en celles, adaptées et pertinentes, afférentes aux dépens et à l'indemnité de procédure.
Les époux [I] succombent devant la cour et supporteront donc les dépens d'appel.
Ils verseront à l'intimée une indemnité de procédure en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
la cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:
CONFIRME le jugement déféré
ajoutant :
REJETTE toutes demandes autres ou plus amples
CONDAMNE in solidum les époux [I]/[M] aux dépens d'appel
LES CONDAMNE in solidum à verser 1.500 euros à la SARL MBMO en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,