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21/03/2023 | FRANCE | N°21/01791

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 2ème chambre, 21 mars 2023, 21/01791


ARRET N°130

FV/KP

N° RG 21/01791 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJI6













S.A.R.L. CABINET [L]



C/



S.A.R.L. GEO 3D



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



2ème Chambre Civile



ARRÊT DU 21 MARS 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01791 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJI6



Décision d

éférée à la Cour : jugement du 25 mai 2021 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de NIORT.





APPELANTE :



S.A.R.L. CABINET [L], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 1]



Ayant pour avocat ...

ARRET N°130

FV/KP

N° RG 21/01791 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJI6

S.A.R.L. CABINET [L]

C/

S.A.R.L. GEO 3D

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 21 MARS 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01791 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GJI6

Décision déférée à la Cour : jugement du 25 mai 2021 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de NIORT.

APPELANTE :

S.A.R.L. CABINET [L], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 1]

Ayant pour avocat postulant Me Bruno MAZAUDON de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Christophe POUZIEUX, avocat au barreau de COGNAC.

INTIMEE :

S.A.R.L. GEO 3D prise en la personne de son gérant, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés ès-qualité audit siège.

[Adresse 2]

[Localité 11]

Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Jérôme MERENDA de la SCP MERENDA-BLAIN MERENDA-GILLET, avocat au barreau de DEUX-SEVRES,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 29 décembre 2016, la S.A.R.L. GEO 3D a cédé à la S.A.R.L. CABINET [L] un fonds libéral dont l'activité est l'aménagement foncier, les études préalables d'aménagement foncier et les travaux connexes liés aux aménagements fonciers.

L'acte de cession prévoyait un prix de 15.000 €, stipulé payable à la S.A.R.L. GEO 3D, au plus tard, le 1er juin 2017.

Par courrier en date du 20 décembre 2017 de Maître [F], Huissier de justice à [Localité 11], la S.A.R.L. GEO 3D a mis en demeure la S.AR.L. CABINET [L] de procéder au règlement des sommes dues en vertu de l'acte de cession du fonds.

Par lettre recommandée avec avis de réception, reçue le 12 mars 2018, le Conseil de la S.A.R.L. GEO 3D a mis en demeure la S.A.R.L. CABINET [L] de procéder au règlement de la somme totale de 32.863,07 €, correspondant au prix de cession du fonds et aux salaires et charges patronales du mois de décembre 2016.

Par acte en date du 23 décembre 2019, la S.A.R.L. GEO 3D a fait assigner la S.A.R.L. CABINET [L] devant le tribunal de commerce de Niort.

Par jugement en date du 25 mai 2021, le tribunal de commerce de Niort a statué ainsi :

- Condamne la S.A.R.L. CABINET [L] à payer à la S.A.R.L. GEO 3D la somme totale de 32.863,07 € en exécution des obligations mises à sa charge aux termes de l'acte de cession du 29 décembre 2016 ;

- Condamne la S.A.R.L. GEO 3D à verser à la S.A.R.L. CABINET [L] la somme de 1.971,75 € correspondant à la prise en charge par la société GEO 3D de 50 % des indemnités de sécurité sociale perçues par elle et à la valeur nette des véhicules classés en épaves pour 1.300€;

- Condamne la S.A.R.L. CABINET [L] au paiement des intérêts aux taux légal, sur la somme nette de 30.891,32 € à compter du 12 mars 2018 avec anatocisme ;

- Condamne la S.A.R.L. CABINET [L] à payer à la S.A.R.L. GEO 3D la somme totale de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamne la S.A.R.L. CABINET [L] aux entiers dépens, incluant les frais de greffe liquidés pour 63,36 € TTC ;

- Ordonne l'exécution provisoire du jugement.

Par déclaration en date du 07 juin 2021, la S.A.R.L. CABINET [L] a fait appel de cette décision en visant ses chefs expressément critiqués.

Par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 23 décembre 2022, la S.A.R.L. CABINET [L] demande à la cour de :

Vu l'acte de cession du 29 décembre 2016 et les pièces versées au débat,

Vu les dispositions des articles 1103, 1104, 1105, 1194, 1217, 1231 et suivants du Code civil,

- Dire et juger la S.A.R.L. CABINET [L] recevable et bien fondée en son appel,

- Dire et juger la S.A.R.L. GEO 3D recevable mais mal fondée en son appel incident,

En conséquence,

- Réformer le jugement du 25 mai 2021 en ses chefs entrepris selon déclaration d'appel en date du 8 juin 2021,

Et statuant à nouveau,

- Débouter la S.A.R.L. GEO 3D de l'ensemble de ses demandes,

- Condamner la S.A.R.L. GEO 3D à verser à la S.A.R.L. CABINET [L] la somme de 78.406,07 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2019,

- Condamner la S.A.R.L. GEO 3D à verser à la S.A.R.L. CABINET [L] la somme de 5.000 € en réparation de son préjudice financier,

- Condamner la S.A.R.L. GEO 3D à verser à la S.A.R.L. CABINET [L] la somme de 5.000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la SARL GEO 3D aux entiers dépens.

Par dernières conclusions RPVA du 27 décembre 2022, la S.A.R.L. GEO 3D demande à la cour de :

Vu l'article 1103 du Code civil,

Vu l'acte de cession du 29 décembre 2016,

Vu les pièces versées aux débats,

Juger la S.A.R.L. CABINET [L] mal fondée en son appel,

La débouter en conséquence de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer le jugement déféré en ce qu'il :

- Condamne la SARL CABINET [L] à payer à la SARL GEO 3D la somme totale de 32.863,07 € en exécution de ses obligations mises à sa charge aux termes de l'acte de cession du 29 décembre 2016.

- Condamne la SARL CABINET [L] au paiement des intérêts au taux légal, sur la somme nette de 30.891,32 € à compter du 12 mars 2018 avec anatocisme.

- Condamne la SARL CABINET [L] à payer à la SARL GEO 3D la somme totale de 3.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Condamne la SARL CABINET [L] aux entiers dépens, incluant les frais de greffe liquidés pour 63,36 € TTC.

- Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement. »

Juger la S.A.R.L. GEO 3D recevable et bien fondée en son appel incident ;

En conséquence, y faisant droit,

Infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

- Condamne la SARL GEO 3D à verser à la SARL CABINET [L] la somme de 1.971,75€ correspondant à la prise en charge par la société GEO 3D de 50% des indemnités de sécurité sociale perçues par elle et à la valeur nette des véhicules classés en épaves pour 1.300€.

Statuant à nouveau,

Débouter également la S.A.R.L. CABINET [L] de cette demande,

Condamner la S.A.R.L. CABINET [L] à payer à la S.A.R.L. GEO 3D la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner la S.A.R.L. CABINET [L] aux entiers dépens d'appel, lesquels seront recouvrés par la S.E.L.A.R.L. LEXAVOUE POITIERS en vertu de l'article 699 du Code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

La clôture de l'instruction de l'affaire est intervenue suivant ordonnance datée du 04 janvier 2023 pour être plaidée à l'audience du 18 janvier 2023, date à compter de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les obligations des parties et l'exception d'inexécution

1. Aux termes de l'article 1103 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L'article 1104 du même code dispose :

'Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Cette disposition est d'ordre public.'

2. Selon l'article 1219 du Code civil, une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave

3. L'article 1195 du même code dispose :

'Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.

En cas de refus ou d'échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu'il fixe'.

4. Aux termes de l'article 1353 du Code civil, Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation

5. Enfin, en vertu de l'article 9 du Code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au soutien de ses prétentions ;

9. La cour rappelle qu'aux termes de l'acte de cession du fonds libéral en date du 29 décembre 2016, la société CABINET [L] s'était engagé à régler au cédant, la SARL GEO 3D, le prix de cession mentionné au contrat, soit la somme de 15.000 € au plus tard le 1er juin 2017.

S'agissant des salaires et charges patronales de décembre 2016

10. La S.A.R.L. CABINET [L] fait valoir, de manière générale, que bien qu'il a été stipulé dans l'acte du 29 décembre 2016 que la propriété et la jouissance du fonds cédé aurait lieu au jour de la signature de l'acte de cession du 29 décembre 2016, il était curieusement indiqué que la société acquéreur devait rembourser à la société venderesse les salaires et les charges sociales du mois de décembre 2016, et cela, au plus tard le 31 mars 2017 et devait en outre supporter les congés payés acquis au 1er juin 2016.

Le cessionnaire explique qu'en méconnaissance des dispositions combinées des articles 1104, 1105 et 1194 du Code Civil, la cour doit constater que la SARL GEO 3D, tant pour le problème de la fixation des salaires de décembre 2016, que plus généralement dans le cadre de l'ensemble du litige, a fait preuve d'une singulière mauvaise foi dans l'exécution de sa part contractuelle.

11. La cour indique que la SARL CABINET [L] était bien en possession des bulletins du personnel, y compris ceux du mois concerné, puisque la SARL GEO 3D les lui a communiqués immédiatement après la cession, puis une nouvelle fois à l'occasion du courrier recommandé adressé le 12 mars 2018 par son conseil et qu'un décompte détaillé de sommes dues à ce titre à hauteur de 17.863,07 € a été communiqué à la SARL CABINET [L] par courrier daté du 12 mars 2018 et qu'ainsi, cette société ne peut se prévaloir d'une exception d'inexécution.

Concernant les avances perçues par la SARL GEO 3D sur les marchés en cours

12. L'appelante reproche au cédant de :

- ne pas avoir fourni l'ensemble des documents nécessaires à l'établissement des bulletins de salaire de décembre 2016, et donc, de déterminer définitivement les modalités financières des obligations contractuelles réciproques ;

- la perception d'avances forfaitaires par l'acquéreur à hauteur de 11.916,34€ TTC lui revenant (pour les marchés de [Localité 12], avance de 3.385 € HT, de [Localité 10], avance de 1.293,33 € HT, de [Localité 5], avance de 1.553,33 € HT et de [Localité 4], avance de 3.698,63 € HT) ;

- la perception indue sur un marché inachevé à hauteur de 29.040 € TTC (marché de [Localité 9] : achèvement du bornage, soit 484 heures à 50 € HT, pour 24.200 € HT) ;

- le non-paiement d'un travail réalisé après cession au bénéfice de Monsieur [G], dirigeant de la SARL GEO 3D, d'un levé topographique pour la SAS ALOHA, commune de Le Teich pour un montant de 3.811,03 € HT, soit, 4.573,23 € TTC ;

13. Toutefois, observe la cour, le cessionnaire n'avait aucune autre obligation à restitution que celle contenue à l'acte de cession listant précisément, au titre des éléments incorporels, tous les marchés en cours au moment de la cession, représentant la somme de 723.800 € HT à encaisser par la SARL CABINET [L], lequel précisait pour chaque marché l'état d'avancement au 1er décembre 2016 et l'étape à réaliser, étant rappelé que l'acte de cession, en son article 10, stipulait que l'acquéreur prendra le fonds cédé dans son ensemble, dans l'état où le tout se trouve au jour de l'entrée en jouissance, de sorte que par la signature de cette clause, le cessionnaire a validé les sommes et travaux restant à fournir.

14. Plus singulièrement, la cour précise qu'en ce qui concerne la perception indue sur un marché inachevé à hauteur de 29.040 € TTC, l'acte prévoyait bien la cession de ce marché pour un montant restant à facturer, au bénéfice de l'acquéreur, d'une somme de 52.000 € HT et que s'agissant de la facture d'un montant de 4.573,23 € TTC qui serait établie au nom de M. [G], gérant de la société ALOHA et de la société GEO 3D, pour des travaux post cession, celle-ci ne concerne pas l'affaire en cours mais le CABINET [L] et la SAS ALOHA au regard des éléments produits aux débats.

15. Qu'ainsi, il y a lieu de confirmer la décision entreprise au titre des avances perçues par la société GEO 3D sur les marchés en cours.

S'agissant des indemnités journalières d'assurance maladie

16. L'acte de cession stipulait que le cessionnaire s'engageait, au titre des charges et conditions de la cession, en son article 10 :

'Le VENDEUR s'oblige, dès à présent, à rembourser à l'ACQUÉREUR les dettes justifiées qu'il aurait gardées à 1'égard des salariés et qui resteraient impayées après 1'entrée en jouissance de l'ACQUÉREUR tenu d'en faire l'avance aux salariés en vertu de l'article L. l224-2 du Code du travail.

En ce qui concerne les congés payés, compte tenu de ce que la modification juridique de l'employeur telle qu'elle est définie par l'article L. 224-1 du Code du travail, se situe au cours de la période de référence des dits congés, l'ACQUÉREUR s'engage à prendre en charge les congés payés acquis au ler juin 2016 (et non encore utilisés) par les salariés transférés dans le cadre des présentes sans recours contre le VENDEUR. Un état contradictoire des dits congés ayant été arrêté contradictoirement entre les parties dès avant ce jour ;

Le VENDEUR prend l'engagement d'assumer toutes les obligations qui lui incombent envers ses salariés jusqu'au jour de rentrée en jouissance de l'ACQUÉREUR.

Les primes et gratifications éventuelles de fin d'année seront remboursées à l'ACQUÉREUR, dans les 30 jours des présentes, au prorata du temps d'exploitation, tout comme les primes d'embauche prévues pour l'emploi de certains salariés, pour la période du contrat à accomplir sous la direction de l'ACQUÉREUR afin de répondre aux obligations qui ont justifié le versement des primes.'

17. L'appelante critique l'absence de remboursement des indemnités journalières d'assurance maladie encaissées par la SARL GEO 3D pour le compte de deux salariées, Madame [Z] et Madame [D], réglées par elle mais non remboursées à ce jour à hauteur de 1.343,50 € ;

18. La société à responsabilité limitée CABINET [L] soutient, à la suite, que si le traité de cession ne faisait pas mention de ces indemnités journalières, il emportait transfert du personnel et des obligations incombant à l'employeur cessionnaire, y compris s'agissant d'indemnités à verser aux salariés.

La SARL GEO 3D réplique que l'appelante, d'une part, se fourvoie sur le montant des indemnités qui ont été versées aux salariées, d'autre part, que les indemnités journalières évoquées par la SARL CABINET [L] portent, pour Madame [D], sur les mois d'octobre et novembre 2016, soit des périodes antérieures à la cession, pour laquelle les salaires ont été réglés par la SARL GEO 3D, de sorte qu'il est normal que ce soit cette dernière qui perçoive les indemnités journalières correspondantes.

19. La cour observe, à la suite des parties, que l'acte de cession est muet sur le point de savoir si une charge de remboursement des indemnités journalières au cessionnaire pesait sur le cédant. A défaut d'éléments supplémentaires et tenant compte des clauses précitées, il y a lieu d'infirmer la décision sur ce point du premier juge.

Sur le virus informatique

20. L'appelante explique que l'importation par M. [G] d'un virus informatique depuis son serveur utilisé pour ses besoins personnels a causé l'arrêt complet de l'activité pendant 7 jours et le changement total des logiciels a généré une perte d'exploitation à hauteur de la somme de 17.640 € TTC et l'obligation d'acquérir de nouveaux matériels pour un montant total de 30.451,20 € TTC.

21. Mais la cour rappelle que si le plus ancien fichier exécutable du virus a bel et bien été trouvé sur le poste de direction de Monsieur [G], dans un mail, cet élément ne suffit pas à lui seul à démontrer la responsabilité de ce dernier, d'autant plus que l'antivirus de l'entreprise était selon le rapport d'intervention de TDI Services « parfaitement à jour et actif de son abonnement et de sa licence », et qu'en outre, ce même rapport indique qu'il est « difficile d'affirmer avec certitude quel poste a diffusé la source ».

22. Par ailleurs, observe la cour, le devis accepté en date du 12 septembre 2017 visant au 'renouvellement infrastructure informatique site de [Localité 11]' (pièces 10.1 et 10.2) n'est pas en lien avec l'apparition de ce virus dès lors que le compte-rendu d'intervention sur site (pièces 9.1 et 9.2), les 31 juillet et les 02 et 03 août 2017, préconise comme solution 'l'arrêt du serveur et la mise en place d'un serveur provisoire avec la restauration des fichiers de la sauvegarde externe' et conclut que cette manoeuvre a permis 'leur nettoyage et le remise en réseau de l'ensemble sur le serveur provisoire'.

23. Au regard ce qui précède, et de manière surabondante, l'utilité d'un remplacement du parc informatique n'était aucunement justifié par la présence d'un virus sur l'ordinateur du gérant de la société à responsabilité limitée GEO 3D.

24. La décision entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur la cotisation à l'Ordre des géomètres experts

25. La SARL CABINET [L] fait valoir qu'elle a dû faire face à un surcoût de cotisation à l'Ordre des géomètres Experts en raison de deux travaux effectués par M. [G] sur des dossiers conservés après la cession mais comptabilisés par l'Ordre à la concluante à hauteur de 2.273 €.

26. L'intimée rappelle qu'il ressort des pièces versées aux débats, et plus précisément d'un courriel du 25 janvier 2018 d'un des membres de l'Ordre des Géomètres que cette somme de 2.273 € correspond pour un montant de 713 € à la cotisation due, pour l'année 2017, par la SARL CABINET [L] en raison de l'activité de son bureau secondaire situé à [Localité 11].

En toute état de cause, l'intimée soutient que la cession étant intervenue en 2016, la SARL GEO 3D ne peut être tenue de régler les cotisations ordinales de la SARL CABINET [L] pour son bureau secondaire au titre de cette année 2017.

27. La cour observe ainsi que le concède l'appelant, que l'acte de cession qui ne concerne strictement que le fonds situé à [Localité 11], ne contient aucune disposition sur ce point, et qu'ainsi, en l'absence de preuves contraires, les cotisations ordinales qui ont réclamées la SARL CABINET [L] ne peuvent que concerner son activité durant l'année précédent ladite cession et sont, en tant que telles, dues par elle.

28. Il s'ensuit que la décision sera, là encore, confirmée sur ce point.

Sur les négociations, démarches et transmissions de documents administratifs

29. L'appelante explique que le cédant a commis une série de manquements lui ayant occasionné un préjudice ayant trait à :

- des négociations et démarches afin de pouvoir reprendre des abonnements d'antennes GPS auprès de la société EXAGONE, du fait de l'inertie volontaire de M. [G] pour un coût de travail supplémentaire de 1.440 € TTC ;

- le refus par M. [G] de donner les codes des « trackings » des véhicules, soit un surcoût de travail pour les récupérer auprès de la société de « tracking » ;

- une perte sur récupération de taxe sur la valeur ajoutée sur rétrocession d'honoraires dès lors que si la rétrocession de 18.000 € TTC a bien été effectuée à M. [G], ce dernier s'est refusé à lui transmettre une facture pour la récupération de la TVA, générant une perte de 3.000 € ;

- le refus de transmettre les documents des téléphones portables et obligation corrélative de la SARL CABINET [L] de souscrire de nouveaux contrats et de diffuser les nouveaux numéros corrélatifs ;

- l'obligation de reconstituer les dossiers du personnel auprès, en particulier, de la CARSAT Limoges et de « APIVIA MUTUELLE », M. [G] n'ayant pas transmis les documents concernant ledit personnel ;

- le refus systématique de la SARL GEO 3D de transmettre l'ensemble des documents administratifs nécessaires à une poursuite sereine de l'activité et pourtant habituellement transmis entre cédant et cessionnaire, avec demande renouvelée pour les recevoir de la part de la SARL CABINET [L] ;

- des anomalies dans la transmission des dossiers en cours comme, [P] et [H] sur la commune de [Localité 13], AFAFAF-GOUILLY sur la commune d'[Localité 7], Dossier [Localité 8],et dossier [X], obligeant à reconstituer le dossier à hauteur de 5.880 € TTC ;

- des problèmes de transferts de contrats JEAPY pour les photocopieurs ;

- des problème d'assurance des locaux pour 950 m² alors qu'elle n'utilise que 250 m² ;

- des problèmes de répartition des frais de maintenance informatique, M. [G] souhaitant lui faire régler des charges pour des matériels qu'elle ne conservait pas lors de la cession et qui restaient de la responsabilité de la société cédante ;

- des problèmes concernant les contrôles techniques des quatre véhicules automobiles de la société cédante, lesquels n'étaient pas à jour, dont deux devaient être déclarés en épave, leur valeur nette devant être remboursée lui être par la SARL GEO 3D à hauteur de 1.300 € ;

30. Selon le cessionnaire, il s'agirait là d'une inertie volontaire anormale et injustifiée de M. [G] au vu des dispositions de l'article 1194 du Code Civil, mais également au vu des règles de bonne confraternité.

31. La SARL GEO 3D explique que l'acte de cession mentionnait dans son article 1er au titre des éléments incorporels cédés « le bénéfice de tous traités, abonnements, conventions' ». Selon elle, les démarches de reprise d'abonnements incombaient à la SARL CABINET [L] qui avait en sa possession tous les documents nécessaires pour effectuer celles-ci, tel que l'a justement rappelé le tribunal.

32. Mais la cour rappelle qu'en vertu de l'acte de cession et plus particulièrement son article 10 sur les charges et conditions que les parties avaient convenu au sein d'un paragraphe 'Mise au courant - suivi et assistance', que :

'A titre de condition déterminante des présentes, Monsieur [R] [G], s'engage[ait] à accompagner et à mettre l'ACQUÉREUR au courant de la marche de la branche d'activité cédée, et à le présenter loyalement à la clientèle comme son successeur, durant six mois à compter de ce jour.

Monsieur [R] [G] s'engage[ait] ainsi à se rendre disponible sur cette même période à première demande de l'ACQUÉREUR.

Monsieur [R] [G] s'engage[ait] à achever techniquement, conjointement avec l'acquéreur et à l'exclusion des phases de terrain, les marchés en cours correspondants aux communes d'[Localité 6] (79) et de Marne (79), cette exécution [étant] réalisée à titre gracieux ou regard de la spécificité de ces opérations.

Cette mise au courant [était en outre stipulée] effectuée gracieusement par le VENDEUR'.

33. Ainsi, les griefs reprochés à la SARL GEO 3D doivent être examinés à l'aune de cette clause.

34. S'agissant des négociations et démarches, la cour observe que les pièces 14.1 à 15.3 produites par l'appelante ne s'adressent pas directement à la SARL GEO 3D mais à des sociétés (détenteurs d'abonnement divers) à qui il est parfois rappelé que M. [G] serait réticent à fournir des éléments demandés.

35. Au vu des pièces produites, la cour observe qu'il en est de même des autres griefs (pièces 16.1, 17.1, 18.1 à 20.1) et que jamais, il n'est justifié une demande adressée à M. [G] de se rendre disponible ou d'accompagner le cessionnaire (pièces 21.1 à 23.2).

36. A défaut de demandes au sens du contrat de cession, l'appelante ne peut se prévaloir des manquements dont elle allègue l'existence, étant rappelé que d'une manière générale, il était stipulé que l'acquéreur (article 10) devait faire de ces contrats et abonnements son affaire personnelle.

37. La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Sur le contrôle technique des véhicules

38. L'appelante fait valoir qu'une vente forfaitaire n'empêche nullement la sincérité de la transaction et l'obligation de prévenir le cessionnaire des défauts de tel ou tel élément cédé. Selon elle, cette absence de formalité lui a fait perdre le bénéfice de deux véhicules;

39. La SARL GEO 3D objecte que tous les contrôles techniques étaient bien à jour et qu'en outre, la cession a été conclue pour un prix forfaitaire de 15 000 €, incluant 10 000 € pour les éléments corporels comprenant une longue liste de matériel tels que des tables, chaises, casiers, vidéo projecteur, bureaux, armoires, imprimante, ordinateurs, photocopieur, GPS' et quatre véhicules et qu'il est évident que la valeur forfaitaire de 10 000 € fixée pour les éléments corporels est bien inférieure à la valeur réelle des biens cédés.

40. Au titre des éléments corporels, la cour observe qu'il a été cédé, comme faisant partie de l'annexe 1 au contrat, les véhicules peugeot 308, fiat scudo, fiat doblo et Kangoo pour lesquels le vendeur a déclaré qu'ils lui appartenaient en totalité et qu'il n'existait pas de clause de réserve de propriété et que l'acquéreur, et ainsi l'appelante, a accepté de reprendre à ses risques et périls le matériel cédé.

41. Par ailleurs, aux termes de cet acte, les parties ont déclaré que la négociation du prix convenu tenait compte de l'état du matériel et de la branche d'activité cédée.

42. Ainsi énoncé, il ne s'avère pas que cette cession à personne morale devait être précédée d'un contrôle technique, ce d'autant, que la preuve d'une impossibilité d'immatriculer lesdits véhicules par la suite, résultant d'une absence de contrôle technique 6 mois avant la vente, n'est pas rapportée.

43. La décision sera réformée sur ce point.

Sur les demandes de dommages et intérêts

44. La SARL CABINET [L] explique avoir un préjudice financier devant être réparé en application des dispositions des articles 1231 et suivants du Code civil.

45. La SARL GEO 3D ne conclut pas sur ce point.

46. La cour rappelle qu'en vertu du dernier alinéa de l'article 1231-6 du Code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.

47. En l'espèce, il y a lieu de constater que le débiteur de l'obligation à paiement du solde du prix est la SARL CABINET [L] qui ne peut se prévaloir d'aucun préjudice. Il s'ensuit qu'elle ne peut prétendre bénéficier des textes qu'elle invoque.

48. Elle sera déboutée de la demande formée de ce chef.

Sur les autres demandes

49. Il apparaît équitable de condamner la SARL CABINET [L] à payer à la SARL GEO 3D une indemnité de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et de rejeter la demande formée l'appelante au même titre.

50. La SARL CABINET [L] qui échoue en ses prétentions supportera la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Niort sauf en ce qu'il a :

- condamné la SARL GEO 3D à verser à la SARL CABINET [L] la somme se 1.911,75€ correspondant a 1a prise en charge par la société GEO 3D de 50% des indemnités de sécurité sociale perçues par elle et à la valeur nette des véhicules classées en épaves pour 1.300€;

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à remboursement des indemnités journalières d'assurance maladie encaissées par la SARL GEO 3D pour le compte de deux salariées, Madame [Z] et Madame [D],

Déboute la SARL CABINET [L] de sa demande en paiement d'une somme de 1.300 € pour défaut de contrôle technique effectué par la SARL GEO 3D sur deux des véhicules cédés,

Y ajoutant,

Condamne la SARL CABINET [L] à payer à la SARL GEO 3D une indemnité de 3.000€ en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile

Rejette les autres demandes

Condamne la SARL CABINET [L] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/01791
Date de la décision : 21/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-21;21.01791 ?
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