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21/02/2023 | FRANCE | N°21/01590

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 21 février 2023, 21/01590


ARRET N°68



N° RG 21/01590 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GIZJ













S.A.S. ENGIE HOME SERVICES



C/



[F]

S.A. AXA FRANCE IARD

Société HDI GLOBAL SE ÉNOMMÉE HDI GLOBAL SE

S.A.S. K.LINE

S.A.S. OUEST ALU

S.A.S. SAS PRIMA-PREFABRICATION INDUSTRIELLE DE MENUISERI ES ALUMINIUM

S.A. ALLIANZ IARD

Compagnie d'assurance MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PE

UPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 21 FEVRIER 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01590 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GIZJ



Décision déférée à la Cour : jugement du 16 a...

ARRET N°68

N° RG 21/01590 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GIZJ

S.A.S. ENGIE HOME SERVICES

C/

[F]

S.A. AXA FRANCE IARD

Société HDI GLOBAL SE ÉNOMMÉE HDI GLOBAL SE

S.A.S. K.LINE

S.A.S. OUEST ALU

S.A.S. SAS PRIMA-PREFABRICATION INDUSTRIELLE DE MENUISERI ES ALUMINIUM

S.A. ALLIANZ IARD

Compagnie d'assurance MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 21 FEVRIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01590 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GIZJ

Décision déférée à la Cour : jugement du 16 avril 2021 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LA ROCHE SUR YON.

APPELANTE :

S.A.S. ENGIE HOME SERVICES

[Adresse 1]

[Localité 10]

ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Bertrand DELCOURT, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

S.A.S. OUEST ALU

[Adresse 12]

[Localité 7]

S.A.S. K.LINE

[Adresse 12]

[Localité 7]

S.A.S. PRIMA-PREFABRICATION INDUSTRIELLE DE MENUISERIES ALUMINIUM [Adresse 13]

[Localité 7]

ayant toutes les trois pour avocat postulant Me Marion LE LAIN de la SCP DROUINEAU-BACLE-LE LAIN-BARROUX-VERGER, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Florent LUCAS, avocat au barreau de NANTES

S.A. AXA FRANCE IARD

[Adresse 3]

[Localité 11]

ayant pour avocat postulant Me Marion LE LAIN de la SCP DROUINEAU-BACLE-LE LAIN-BARROUX-VERGER, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Florence NATIVELLE, avocat au barreau de NANTES

Monsieur [K] [F]

[Adresse 6]

[Localité 7]

Compagnie d'assurance MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS [Adresse 2]

[Localité 5]

ayant tous les deux pour avocat postulant Me Maud NAVENOT, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON et pour avocat plaidant Me Sébastien GOULET, avocat au barreau de PARIS

Société HDI GLOBAL (ancienenment dénommée HDI Gerling Industrie

Versicherung)

[Adresse 14] '

[Adresse 14] '

[Localité 9]

S.A. ALLIANZ IARD

[Adresse 8]

[Localité 4]

ayant toutes les deux pour avocat postulant Me Yann MICHOT de la SCP ERIC TAPON - YANN MICHOT, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Christian LAMBARD, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Cindy MIRABEL, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Décembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre qui a présenté son rapport

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ :

Les sociétés Ouest Alu, K. Line et Préfabrication Industrielle de Menuiseries Aluminium (Prima) appartiennent toutes les trois au groupe Liebot Fenêtres Façades.

Ouest Alu et Prima fabriquent des fenêtres qu'elles vendent à K. Line, laquelle les commercialise. Ouest Alu fabrique en outre des éléments de façade pour ses propres chantiers.

Ouest Alu exerce son activité sur un site implanté aux Herbiers, en Vendée, comprenant six halls de fabrication -cinq édifiés dans les années 1973 et le sixième construit en 2002 sous la maîtrise d'oeuvre de l'architecte [K] [F]- dont elle est propriétaire et qui sont chauffés par un ensemble de générateurs d'air chaud équipés de brûleurs fonctionnant au fioul pour lesquels elle avait signé le 18 mai 1999 un contrat d'entretien et de maintenance de la chaufferie avec la société CGST-SAVE, aux droits de laquelle est ensuite venue la société Savelys, qui est aujourd'hui dénommée Engie Home Service.

La société Ouest Alu a demandé début mars 2006 à la société Savelys d'intervenir pour remédier au dysfonctionnement d'un des générateurs d'air chaud situé entre les halls 4 et 5.

Durant l'intervention du technicien de Savelys, le 8 mars 2006, une explosion s'est produite dans le générateur, qui a pris feu.

L'incendie ainsi déclenché s'est propagé à l'ensemble du site, et les halls 1, 2, 3, 4 et 5 ont été détruits, soit 17.000 m² de locaux sinistrés, induisant une interruption de l'exploitation du site.

Une expertise amiable a été mise en place entre Ouest Alu et ses assureurs AXA et AGF, et la société Savelys et ses assureurs Allianz et HDI Gerling France.

Saisi par Ouest Alu et AXA d'une demande d'expertise au contradictoire de Savelys et ses assureurs, le juge des référés du tribunal de grande instance de La-Roche-sur-Yon y a fait droit par ordonnance du 22 mars 2006 désignant M. [U] [M], dont Savelys et ses assureurs ont vainement sollicité par la suite le remplacement.

Les opération de l'expert judiciaire ont ultérieurement été étendues par ordonnance de référé du 25 juillet 2007 d'une part à l'architecte [K] [F] et son assureur la MAF, et d'autre part à la société Bernard Francis, qui était intervenue sur le site en 2002 pour remplacer la cuve à fioul en juin puis pour installer un nouveau générateur d'air chaud en décembre.

Parallèlement, la société Savelys obtenait par ordonnance du 28 décembre 2006 du juge des référés du tribunal de commerce de Paris l'institution d'une autre expertise, au contradictoire de Ouest Alu, visant à rechercher si l'activité de celle-ci sur le site relevait des dispositions de la loi du 19 juillet 1976 sur les installations classées pour l'environnement, M. [S] [N] étant commis pour y procéder. Ces opération ont ultérieurement été déclarées communes à M. [F], la MAF et la société Bernard Francis.

M. [N] a déposé son rapport définitif le 5 mai 2008.

L'expert [M] a déposé le sien le 23 février 2010.

Les parties à l'expertise amiable mise en place peu après le sinistre se sont accordées sur une évaluation des dommages aux bâtiments, matériels et marchandises, et un accord de règlement a été signé le 25 janvier 2008 entre Ouest Alu et son assureur AXA.

S'agissant des pertes d'exploitation, AXA France en a indemnisé son assurée Ouest Alu à hauteur de 13.600.000 euros franchise déduite, outre 83.036 euros de frais d'expert, soit au total 13.683.036 euros aux termes d'un protocole d'accord conclu le 20 mars 2008 entre Ouest Alu et ses assureurs, AXA en qualité d'apériteur à hauteur de 60% et AGF en qualité de co-assureur à hauteur de 40%.

Ouest Alu a toutefois sollicité en référé, et obtenu par ordonnance du 1er décembre 2010, l'institution d'une expertise visant à évaluer son préjudice d'exploitation consécutif au sinistre, M. [Z] étant commis pour y procéder, ses opérations étant ultérieurement étendues aux société K Line et Prima par ordonnance du 7 septembre 2011.

M. [Z] a déposé son rapport définitif le 30 avril 2012.

Les sociétés Ouest Alu, K.Line, Prima et AXA France IARD ont alors fait assigner devant le tribunal de grande instance de La-Roche-sur-Yon par actes des 12, 13 et 17 septembre 2012 la société Savelys ensuite devenue Engie Home Services, les compagnies Allianz IARD et HDI Gerling, M. [F] et la MAF, aux fins de voir juger engagée la responsabilité de la société Savelys d'une part, solidairement avec ses assureurs, et de M. [F] d'autre part, solidairement avec la MAF, et pour les entendre condamner à les indemniser de leurs préjudices :

.Ouest Alu, K. Line et Prima réclamant 4.656.000 euros

.AXA, subrogée dans les droits de son assurée Ouest Alu, réclamant dans le dernier état de ses conclusions :

-13.683,036 euros au titre des dommages indirectes, soit pertes d'exploitation

-9.910.077 euros au titre des dommages directs.

La société Savelys et ses assureurs ont soulevé par voie d'incident devant le juge de la mise en état d'une part la nullité de l'assignation, et d'autre part l'incompétence du tribunal de grande instance de La-Roche-sur-Yon au profit à titre principal, du tribunal de commerce de Paris et subsidiairement du tribunal de grande instance de Paris, ce dont elles ont été déboutées par ordonnance d'incident en date du 8 avril 2014 confirmée par un arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 5 décembre 2014 contre lequel les contestantes ont formé un pourvoi en cassation qui a été rejeté le 23 juin 2016.

Entre-temps, le juge de la mise en état avait refusé par ordonnance du 2 juillet 2015 de surseoir à statuer.

À la suite d'un incident installé devant le juge de la mise en état par Engie Home Services et ses assureurs, les sociétés Ouest Alu et K Line, qui sollicitaient jusqu'alors une somme globale, ont ventilé leurs demandes respectives dans leurs conclusions.

Dans le dernier état de leurs écritures, la société Ouest Alu -qui précisait avoir reçu 13.600.000 euros d'AXA au titre des pertes d'exploitation- réclamait à Engie Homme Services et ses assureurs, le cas échéant in solidum avec [K] [F] et la Maf :

.2.745.000 euros de dommages et intérêts pour ses pertes d'exploitation non indemnisées

.70.898,36 euros à parfaire au titre des frais de location d'une salle pour y entreposer la chaudière, qu'elle demandait l'autorisation de détruire

K. Line réclamait aux mêmes la somme d'1.911.000 euros.

AXA IARD concluait au rejet des fins de non-recevoir et réclamait aux mêmes 23.593,113 euros.

Prima se désistait de ses demandes.

La société Engie Home Services soulevait l'irrecevabilité d'AXA France IARD pour toute demande excédant 7.004.421,60 euros au titre des seules pertes d'exploitation, soutenant que l'assureur ne pouvait agir :

.à due concurrence de la part de l'indemnité d'assurance de K Line, soit 2.009.000 euros, au motif que celle-ci n'était pas l'assurée d'AXA

.à due concurrence de la part de l'indemnité d'assurance supportée par son co-assureur Allianz portant sur 40% de la co-assurance, au motif que nul ne plaide par procureur

.à due concurrence de son entière réclamation au titre des dommages directs, au motif que ce chef de prétention était prescrit.

Elle soulevait l'irrecevabilité à agir de Ouest Alu au motif qu'elle avait été intégralement indemnisée par son propre assureur.

Elle demandait que l'indemnisation susceptible de revenir à K. Line n'excède pas 1.291.000 euros, soutenant que l'entreprise n'était pas assurée au jour du sinistre et qu'elle n'avait été indemnisée qu'à titre commercial.

Sur le fond, elle contestait sa responsabilité en critiquant les trois rapports d'expertise judiciaire et en soutenant que la faute de son technicien n'était pas démontrée avec certitude.

Elle s'opposait à la demande d'autorisation de détruire la chaudière.

Subsidiairement, elle demandait à être relevée de toute condamnation par M. [F] et son assureur la MAF.

Elle demandait au tribunal de constater que Ouest Alu ne s'était pas conformée aux dispositions impératives de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées, et de condamner l'entreprise à la relever et garantir de toute condamnation dans une mesure de 50%.

M. [F] et la MAF sollicitaient leur mise hors de cause en soutenant que seule la responsabilité de Engie Home Services devait être retenue.

Subsidiairement, ils demandaient à être relevés par Engie Home Service de toute condamnation, la MAF faisant valoir que le plafond de sa garantie s'élevait à 5.233.480 euros.

Les sociétés Allianz et HDI Global SE (anciennement HDI Gerling) déclaraient s'associer aux conclusions d'Engie Home Services.

Subsidiairement, elles sollicitaient l'entière garantie de M. [F] et de la MAF.

Plus subsidiairement, elles soutenaient ne pouvoir être tenues que dans les limites de leur contrat soit un plein de garantie de 5 millions d'euros avant l'application de la franchise, opposable aux tiers.

Par jugement du 16 avril 2021, le tribunal -entre-temps devenu tribunal judiciaire- de La-Roche-sur-Yon a :

* constaté l'absence de demande par la société Prima

* déclaré recevable l'action d'AXA dirigée contre Engie Home Services et ses assureurs d'une part, et M. [F] et son assureur d'autre part

*déclaré recevable l'action d'Ouest Alu tendant à l'indemnisation de ses pertes d'exploitation complémentaires

* déclaré Engie Home Services responsable du sinistre survenu le 8 mars 2006 du fait de l'intervention de son technicien de maintenance

* mis hors de cause [K] [F]

* rejeté en conséquence l'ensemble des demandes dirigées contre M. [F] et son assureur la MAF

* condamné solidairement la société Engie Home Services avec ses assureurs HDI Global SE et Allianz IARD à payer à AXA France IARD 23.593.113 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2013 et capitalisation

* condamné solidairement la société Engie Home Services avec ses assureurs HDI Global SE et Allianz IARD à payer à Ouest Alu 2.745.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2013 et capitalisation

* condamné solidairement la société Engie Home Services avec ses assureurs HDI Global SE et Allianz IARD à payer à K Line 1.911.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2013 et capitalisation

* autorisé Ouest Alu à disposer librement de la chaudière litigieuse

* condamné solidairement Engie Home Services avec ses assureurs HDI Global SE et Allianz IARD à payer à Ouest Alu 70.897,73 euros à titre de dommages et intérêts

* dit que les compagnies Allianz et HDI Global SE ne pouvaient être tenues que dans les seules limites de leur contrat

* condamné solidairement les sociétés Engie Home Services, HDI Global SE et Allianz IARD à payer à Ouest Alu, K. Line et AXA France IARD 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

* condamné Ouest Alu, K. Line et AXA France IARD à payer 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à M. [F] et à la MAF

* rejeté les demandes autres ou contraires

* condamné solidairement les sociétés Engie Home Services, HDI Global SE et Allianz IARD aux dépens, incluant les frais d'expertises judiciaires.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu :

-que les conditions particulières applicables étaient celles signées le 14 mars 2006

-qu'en vertu de ces conditions, comme de celles du 21 novembre 2003, K Line avait bien la qualité de bénéficiaire des indemnités d'assurance versées par AXA

-qu'AXA a constamment fait état de sa co-assurance avec les AGF, et qu'elle était recevable en sa qualité d'apéritrice, bénéficiant comme telle d'un mandat de représentation du co-assureur, à agir en remboursement des sommes versées par chacun des co-assureurs

-que l'action, qui est une action en responsabilité contractuelle y compris pour AXA, subrogée dans les droits de son assurée et qui tient de celui-ci ses droits, était soumise à un délai de prescription quinquennal expirant le 19 juin 2013 et n'était donc pas prescrite au jour de l'assignation, délivrée le 12 septembre 2012 et dont l'effet interruptif avait porté sur l'ensemble des dommages, les écritures ultérieures n'ayant fait que préciser le montant total des indemnités d'assurance versées

-qu'Engie Home Services ne pouvait se prévaloir du protocole d'accord auquel elle n'était pas partie, et dans lequel Ouest Alu n'a au demeurant aucunement renoncé à agir contre les tiers responsables mais s'en est au contraire expressément réservée le droit

-que l'architecte [F], qui s'était contenté de déposer un permis de construire pour le hall n°6, non concerné par le sinistre, devait être mise hors de cause, aucun rôle causal dans la survenance du sinistre n'étant établi avec un éventuel manquement à son devoir de conseil au titre de l'installation de coupe-feu et de dispositifs d'évacuation des fumées

-qu'il ressortait des rapports [M] et [N] que l'explosion du générateur d'air chaud à l'origine de l'incendie était directement liée à l'intervention de M. [A], le technicien dépêché par Engie Home Services sur le site, qui ne s'était pas assuré en préalable de l'absence de gaz imbrûlé et n'avait pas éliminé le fioul restant avant d'intervenir, et dont les multiples démarrages de l'installation le jour des faits ont augmenté le volume de fioul dans le fond de la cuve, de sorte que son intervention n'a fait qu'amplifier le problème qu'il devait résoudre

-que les experts avaient éliminé de façon convaincante toute faute des préposés d'Ouest Alu ainsi que toute incidence d'un mauvais nettoyage des installations dans le sinistre

-que s'agissant de l'incidence de la loi sur les installations classées, l'expert avait conclu au respect par Ouest Alu des dispositions de l'arrêté au niveau des conditions d'exploitation du site, et indiqué que compte-tenu de la date de construction des bâtiments sinistrés, bâtis en 1973, ils n'avaient pas à respecter l'arrêté type de 2000

-que la responsabilité d'Engie Home Services était bien engagée en vertu de son obligation de sécurité de résultat

-qu'avec ses assureurs, elle devait réparer l'ensemble des préjudices.

La société Engie Home Services a relevé appel le 19 mai 2021.

Les sociétés Ouest Alu, K. Line et AXA France IARD ont saisi le tribunal judiciaire de La-Roche-sur-Yon d'une requête en rectification d'erreur ou réparation d'omission matérielle en lui demandant :

.d'ordonner l'exécution provisoire sollicitée, qu'il indiquait dans les motifs prononcer, sans le reprendre dans son dispositif

.d'accorder le bénéfice sollicité de la faculté de l'article 699 du code de procédure civile à la Selarl Bodin-[E] et non comme il l'avait fait à la SCP Bodin-Michenaud.

Le tribunal a rejeté ces requêtes par jugement du 1er juin 2021 en indiquant :

-qu'il ne pouvait plus réparer l'omission de statuer sur la demande d'exécution provisoire

-que la distraction des dépens avait été accordée conformément à ce qu'il lui était demandé.

Les sociétés Ouest Alu, K. Line et AXA France IARD ont saisi la Première présidente de la cour d'appel pour voir ordonner l'exécution provisoire omise.

Par ordonnance du 21 octobre 2021, la Première présidente s'est déclarée incompétente au profit du conseiller de la mise en état.

Par ordonnance du 8 février 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné l'exécution provisoire du jugement entrepris.

Par ordonnance du 10 mai 2022, le conseiller de la mise en état a :

-déclaré irrecevables à l'égard de la SAS Engie Home Services les conclusions et les pièces n°1 à 7 transmises par la voie électronique le 27 janvier 2022 par [K] [F] et la MAF

-précisé que M. [F] et la MAF

* n'étaient plus recevables à transmettre des conclusions ni des pièces à l'égard de la société Engie Home Services

* étaient fondés à faire valoir qu'à l'égard d'Engie Home Services, ils sont légalement réputés s'approprier les motifs du jugement

-déclaré recevables à l'égard des sociétés AXA France IARD d'une part, et Allianz et HDI Global SE d'autre part, les conclusions et les pièces n°1 à 7 transmises par la voie électronique le 27 janvier 2022 par [K] [F] et la MAF.

Les dernières écritures prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile ont été transmises par la voie électronique :

* le 4 novembre 2022 par la société Engie Home Services

* le 7 avril 2022 par les sociétés HDI Global SE et Allianz

* le 15 mai 2022 par [K] [F] et la MAF

* le 19 octobre 2022 par la société AXA France IARD

* le 17 mai 2022 par les sociétés Ouest Alu, K. Line et Prima.

La société Engie Home Services demande à la cour :

* de juger que le jugement déféré est légalement réputé non avenu ou, subsidiairement, entaché d'une nullité de fond

En conséquence :

* de l'annuler en toutes ses dispositions

À titre subsidiaire, d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant constaté l'absence de demande de la société Prima, non déférée à la cour

En toute hypothèse, statuant à nouveau :

* de juger la société AXA France IARD irrecevable, faute de qualité à agir, en toutes ses demandes fins et prétentions formulées à concurrence de la part de l'indemnité d'assurance correspondant aux pertes d'exploitation de la société K Line représentant 2.009.000 euros

* de juger la société AXA France IARD irrecevable, faute de qualité et d'intérêt à agir, en toutes ses demandes fins et prétentions formulées à concurrence de la part de l'indemnité d'assurance payée par la société Allianz IARD et représentant la somme de 9.437.245,20 euros

* de juger la société AXA France IARD irrecevable en toutes ses demandes fins et prétentions formulées à concurrence de la part de l'indemnité d'assurance correspondant aux dommages directs et représentant la somme de 9.910.077 euros, la demande de ce chef étant prescrite depuis le 19 juin 2013

En conséquence :

* de juger la société AXA France IARD irrecevable en toutes ses demandes fins et prétentions dirigées à l'encontre d'Engie Home Services excédant la part de 60% lui incombant au titre de l'indemnisation des seules pertes d'exploitation de la société Ouest Alu et représentant la somme de 7.004.421,60 euros

* de juger la société Ouest Alu irrecevable, faute de qualité et d'intérêt à agir, en toutes ses demandes fins et prétentions dirigées contre Engie Home Services et excédant la mesure du découvert d'assurance d'un montant de 850.109 euros qui serait prétendument demeuré à sa charge

Au fond, et sous réserve de l'incident soumis au conseiller de la mise en état relatif à l'irrecevabilité des conclusions remises et notifiées par M. [F] et la MAF le 27 janvier 2022

¿ à titre principal :

* juger Engie Home Services recevable et bien fondée en ses contestations opposées aux conclusions des rapports d'expertise déposés par MM. [M], [N] et [Z]

ce faisant :

* constater qu'en l'état de nombreuses contestations qui affecte la portée des rapports déposés par MM [M] et [N], l'intervention fautive du technicien d 'Engie Home Services le 8 mars 2006 n'est pas démontrée avec certitude

* débouter comme étant mal fondées les sociétés AXA France IARD, Ouest Alu et K. Line de toutes leurs demandes fins et prétentions dirigées à l'encontre d'Engie Home Services sur le fondement de l'article 1231-1 nouveau (anciennement 1147) du code civil

* débouter comme étant mal fondés M. [F] et la MAF de leur appel en garantie dirigé contre Engie Home Services sur le seul fondement des conclusions de M. [M]

¿ subsidiairement :

* condamner in solidum M. [F] et la MAF à relever et garantir la société Engie Home Services des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre sur le fondement de l'article 1240 nouveau (anciennement 1382) du code civil

* constater que la société Ouest Alu ne s'est pas conformée aux dispositions impératives de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour l'environnement et de ses décrets d'application qui étaient pourtant applicables à l'établissement sinistré

En conséquence :

* condamner la société Ouest Alu à relever et garantir la société Engie Home Services de toute condamnation susceptible d'être mise à sa charge dans une mesure de 50%, sur le fondement de l'article 1240 nouveau du code civil, en considération des fautes résultant du non-respect de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées et de ses décrets d'application

* juger qu'aucune indemnisation complémentaire ne saurait être allouée à Ouest Alu dès lors qu'elle a été intégralement indemnisée par ses assureurs et que l'indemnité qui lui a été payée au titre de ses pertes d'exploitation excède en définitive l'évaluation qui en a été faite par M. [Z] après qu'aient été apportés à cette évaluation les correctifs qui s'imposent,

En conséquence :

* débouter Ouest Alu de toutes ses demandes fins et prétentions dirigées contre Engie Home Services

* juger que l'indemnisation susceptible d'être allouée à K. Line, au titre des préjudices immatériels, ne peut excéder la somme d'1.291.000 euros

En conséquence

* débouter K Line du surplus de ces demandes excédant la somme d'1.291.000 euros

* juger qu'une bonne administration de la justice commande que la chaudière litigieuse soit conservée en l'état, à toutes fins, la destruction sollicitée étant de nature à faire disparaître un élément de preuve utile à la solution du litige

* débouter en conséquence les sociétés Ouest Alu et K Line de leurs demandes relatives à la destruction de la chaudière et au paiement de dommages et intérêts complémentaires à titre d'indemnisation des frais afférents à la location d'une salle pour l'entreposer

* débouter AXA France IARD, Ouest Alu et K. Line de leurs demandes au titre des intérêts au taux légal, subsidiairement les réduire à de plus justes proportions

* réduire à de plus justes proportions le montant des indemnités allouées en première instance à AXA, Ouest Alu et K Line sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

En toute hypothèse :

* débouter toutes parties de toutes demandes contraires aux présentes conclusions

* juger AXA, Ouest Alu et K. Line mal fondées en toutes leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

* condamner AXA France IARD, Ouest Alu et K. Line à lui payer 50.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

* condamner AXA, Ouest Alu et K. Line aux dépens d'instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise.

L'appelante soutient au visa des articles 369 et 372 du code de procédure civile que le jugement est légalement réputé non avenu, pour avoir été rendu au mépris de l'interruption de l'instance, survenue de plein droit le 25 août 2020 du fait de la dissolution, publiée le 28 août 2020, de la SCP BODIN-MICHENAUD, avocat constitué depuis l'origine pour le compte des quatre sociétés demanderesses.

Elle affirme au visa de l'article 5 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 et des articles 369 et 372 du code de procédure civile que ce jugement est légalement réputé non avenu ou entaché d'une nullité de fond, en ce qu'il a été obtenu au mépris de l'interruption d'instance consécutive à la dissolution, en cours d'instance de la SCP d'avocats Bodin-Michenaud qui représentait les quatre sociétés demanderesses, aucun avocat pouvant postuler au barreau de La-Roche-sur-Yon ne s'étant constitué pour elles de façon à reprendre l'instance interrompue, et la société d'avocats qui se constitua ensuite, la 'Selarl Bodin-[E], ne pouvant pas occuper puisqu'elle est inscrite au barreau des Sables d'Olonne. En réponse aux moyens de réponse adverses, elle maintient que l'instance a bien été interrompue car la dissolution de la société postulante intervint avant l'audience des plaidoiries du 2 avril 2021 seule à prendre en compte, et elle réfute toute confirmation de sa part de la nullité en indiquant qu'une partie ne peut confirmer le vice affectant un jugement, et toute nécessité de prouver un grief, s'agissant d'une nullité de fond. En réponse à l'objection adverse, elle soutient être recevable à invoquer ce moyen.

Elle argue d'irrecevabilité l'action d'AXA :

-à due concurrence de la part de l'indemnité d'assurance de K. Line, soit 2.009.000 euros, au motif que celle-ci n'était pas l'assurée d'AXA, et que la compagnie a indûment couvert les pertes d'exploitation de cette société, faisant valoir :

.que c'est par un avenant au contrat en date du 14 mars 2006, soit postérieurement au sinistre, que K Line est devenue assurée, mais qu'elle ne l'était pas au jour du sinistre, où les conditions particulières applicables étaient celles du 17 février 2006

.que c'est par un pur geste commercial, dont elle ne peut solliciter la prise en charge, et non en vertu de ses obligations contractuelles, qu'elle a pris en charge ces 2.009.000 euros

-à due concurrence de la part de l'indemnité d'assurance supportée par son co-assureur Allianz portant sur 40% de la co-assurance, au motif que nul ne plaide par procureur, et qu'AXA n'ayant supporté dans le cadre de la co-assurance que 60% de l'indemnisation ne peut recourir pour la part de 40% qu'elle n'a pas supportée, et pour laquelle la subrogation n'opère pas, l'appelante ajoutant qu'Axa est irrecevable à invoquer sa prétendue qualité -au surplus contestée et non établie- d'apériteur, n'en ayant pas argué initialement et ne pouvant intervenir sous une autre qualité après l'expiration du délai de prescription

-à due concurrence de son entière réclamation au titre des dommages directs, au motif que ce chef de prétention est prescrit, car il n'a jamais été invoqué avant les conclusions du 14 octobre 2013 alors que l'action devait être initiée avant le 19 juin 2013, l'appelante récusant l'argumentation adverse selon laquelle l'interruption de la prescription attachée à l'assignation aurait opéré pour l'intégralité du dommage et donc aussi pour la demande additionnelle qui aurait prétendument été contenue virtuellement dans les demandes initiales.

Elle argue d'irrecevabilité les demandes de Ouest Alu au motif que si celle-ci a accepté d'être indemnisée par AXA de ses pertes d'exploitation à hauteur de 13.683,036 euros alors que le plafond des garanties pour pertes d'exploitation de sa police était loin d'être atteint puisqu'étant de 28.395,431 euros, c'est parce qu'elle était dûment remplie de l'intégralité ses droits, sous la seule et unique réserve du découvert d'assurances de 850.109 euros qu'elle aurait éventuellement subi dont 300.000 euros de franchise, de sorte qu'elle est sans intérêt à agir en indemnisation pour une somme qui excède ce découvert, découvert qu'elle n'a pas supporté.

Sur le fond, elle conteste sa responsabilité en affirmant que son obligation était une obligation de moyens, et en récusant les analyses et conclusions de l'expert [M], en soutenant qu'elles reposent sur des postulats et hypothèses techniquement contestables ; qu'elles sont pour partie contradictoires ; qu'elles occultent les déclarations qui n'allaient pas dans le sens de son hypothèse ; et qu'elles sont incomplètes. Elle invoque la note technique établie par M. [T], ancien expert incendie près la cour d'appel de Versailles.

Elle considère que les demanderesses ne démontrent pas avec certitude qu'une intervention fautive de son technicien M. [A] serait à l'origine du sinistre.

Elle prétend que l'explosion aurait pu avoir des effets limités, si la configuration des halls de fabrication -dépourvus de dispositifs d'évacuation des fumées et de portes coupe feu, et avec une toiture réalisée en matériaux combustibles- et si les conditions d'exploitation -n'assurant pas l'élimination des poussières d'aluminium par des dispositifs d'évacuation- n'avaient pas considérablement aggravé les conséquences de l'incendie, ainsi qu'il ressort selon elle du rapport établi par l'expert judiciaire [N].

Elle estime que la responsabilité du maître d'oeuvre pour manquement à son devoir de conseil est engagée, et que sa mission était bien plus large que ce qu'il prétend, et elle demande subsidiairement à être garantie de toute condamnation par M. [F] et son assureur la MAF.

Sur le quantum des demandes, elle soutient au visa de l'article 1200 du code civil qu'elle est en droit d'opposer à Ouest Alu les termes du protocole d'accord que celle-ci a conclu avec AXA ; qu'il ressort de ce protocole que Ouest Alu a été indemnisée de la totalité de ses pertes d'exploitation, en ce compris le découvert d'assurance qui serait prétendument resté à sa charge dès lors qu'elle a aussi perçu l'indemnisation, supérieure au montant de ce découvert, revenant à K Line, et dont il faut tenir compte ; qu'elle ne saurait donc réclamer que l'indemnisation de pertes complémentaires ; et qu'elle n'établit pas la réalité de telles pertes.

Elle conteste les conclusions de l'expert judiciaire [Z], critiquables et surévaluées, et se prévaut de la note critique établie à cet égard par M. [B], expert-comptable auquel elle a soumis le rapport, notamment en ce que celui-ci pointe l'absence de prise en compte des économies sur charges variables.

Elle déclare maintenir son opposition formelle à la destruction de tous éléments de preuve susceptibles d'expliciter les causes et origines du sinistre, au premier rang desquels la chaudière, quand bien même le rapport d'expertise a été déposée en 2010, et elle forme les plus expresses réserves sur le coût de location d'une salle municipale où cette chaudière se trouve remisée.

Elle juge inique la condamnation prononcée du chef des intérêts et leur capitalisation, alors que les demanderesses ont laissé s'écouler plus de six années entre le sinistre et leur assignation. Elle signale que la date des conclusions contenant ventilation des demandes entre les demanderesses est le 28 avril 2016 et non la date du 14 octobre 2013 que les premiers juges ont retenue comme point de départ des intérêts.

Elle conteste l'octroi par le tribunal du bénéfice de la faculté prévue par l'article 699 du code de procédure civile à un avocat qui n'avait pas été constitué pour les demanderesses.

Les sociétés HDI Global SE et Allianz demandent à la cour d'infirmer le jugement, de déclarer irrecevables et ou mal fondées les demandes dirigées contre elles, de les mettre hors de cause, de condamner les sociétés Ouest Alu, K. Line et AXA France IARD à leur rembourser les sommes versées au titre de l'exécution provisoire.

Subsidiairement, elles demandent à la cour de dire et juger qu'en toutes hypothèses, elles ne peuvent être tenues que dans les limites de leur contrat soit pour chacune d'elles, un plein de garantie de 5 millions d'euros avant déduction de la franchise contractuelle opposable aux tiers, soit 7.500 euros pour la compagnie Allianz et 20.000 euros pour la compagnie HDI Global SE et avant déduction des frais de défense exposés par lesdites compagnies.

Elles sollicitent le rejet de toutes demandes plus amples ou contraires.

En tout état de cause, elles réclament 5.000 euros d'indemnité de procédure à tout succombant.

Elles indiquent faire leur l'argumentation d'Engie Home Service sur l'irrecevabilité et le rejet des demandes adverses, et en déduisent qu'elles devront être mises hors de cause.

Elles redisent que chacune des polices souscrites comporte un plein de garantie de 5 millions d'euros, soit 10 millions au total, avec une franchise contractuelle opposable aux tiers de 7.500 euros pour la police Allianz et de 20.000 euros pour la police HDI , et avec déductibilité des pleins de garantie des frais de défense, ce que personne n'a jamais contesté ni ne conteste.

M. [F] et la compagnie MAF demandent à la cour de dire que seule la responsabilité de la société Savelys, à ce jour Engie Home Services, doit être retenue, et en conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle les a mis hors de cause.

Subsidiairement, ils demandent à la cour

* de dire et juger que la responsabilité de Ouest Alu sera retenue à hauteur de 50%, les 50% restants étant mis à la charge d'Engie Home Services

*de dire et juger que le plafond de garantie de la police souscrite s'élève à la somme d'1.750.000 euros pour les dommages immatériels consécutifs à un désordre et à la somme de 500.000 euros pour les dommages immatériels non consécutifs à un désordre

En tout état de cause :

* de condamner Engie Home Services à garantir M. [F] et la MAF de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre au profit des sociétés Ouest Alu et K. Line

* de condamner Engie Home Services et ses assureurs Allianz et HDI Global SE, ainsi que Ouest Alu, K. Line et Prima à verser 3.000 euros à chacun d'eux en application de l'article 700 du code de procédure civile

* de condamner Engie Home Services aux dépens.

Ils déclarent prendre acte de l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 10 mai 2022.

Ils s'en remettent à justice sur la question de l'intérêt et de la qualité d'AXA à agir en remboursement des sommes payées par Allianz, représentant 40% du montant des indemnités.

Sur le fond, ils notent que les deux experts judiciaires concordent à retenir la responsabilité du préposé d'Engie, qui intervenait sur un brûleur situé entre les halls 4 et 5.

Ils relèvent qu'Engie a elle-même écrit que la mise en cause de l'architecte était artificielle et ne se comprenait que pour justifier la saisine par Ouest Alu du tribunal judiciaire de Paris, et indiquent que de fait, M. [F], uniquement intervenu sur le hall n°6, n'est pour rien dans le sinistre, qui a épargné ce bâtiment. Ils ajoutent que M. [F] n'a au demeurant fait que déposer le permis de construire du hall n°6, sans aucune démarche auprès du service des installations classées, comme l'a vérifié l'expert [N].

Ils font subsidiairement valoir que le descriptif établi par M. [F] prévoyait expressément des 'blocs portes coupe-feu entre l'atelier et les bureaux-sanitaires, y compris ferme porte', et que le maître de l'ouvrage en répond s'il n'a pas mis en oeuvre ce dispositif.

Très subsidiairement, ils demandent si une condamnation était prononcée à leur encontre qu'une part importante demeure à la charge de Ouest Alu et son assureur AXA.

Ils ajoutent que le contrat d'assurance souscrit par M. [F] contient une clause d'exclusion de solidarité, et un plafond de garantie d'1.750.000 euros pour les dommages immatériels consécutifs à un désordre, et de 500.000 euros pour les dommages immatériels non consécutifs, plafond opposable à tous.

La société AXA France IARD demande à la cour :

* de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a

-déclaré recevable l'action d'AXA dirigée contre Engie Home Services et ses assureurs d'une part, et M. [F] et son assureur d'autre part

-déclaré Engie Home Services responsable du sinistre survenu le 8 mars 2006 du fait de l'intervention de son technicien de maintenance

-condamné solidairement la société Engie Home Services avec ses assureurs HDI Global SE et Allianz IARD à payer à AXA France IARD 23.593.113 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2013 et capitalisation

* de le réformer en ce qu'il a

-mis hors de cause M. [F]

-rejeté l'ensemble des demandes dirigées contre celui-ci et son assureur la MAF

statuant à nouveau :

* de dire et juger recevable et bien fondée AXA en l'ensemble de ses demandes formées contre Engie Home Services et de ses assureurs, d'une part, et M. [F] et son assureur d'autre part

* de débouter Engie Home Services et ses assureurs de leur demande de voir dire le jugement légalement réputé non avenu, ou subsidiairement entaché d'une nullité de fond

* débouter M. [F] et son assureur de toute demande de fins de non-recevoir

* de dire et juger que M. [F] en sa qualité d'architecte a manqué à son devoir de conseil à l'égard d'Ouest Alu, et de ce fait engagé sa responsabilité contractuelle

En conséquence :

* condamner M. [F] solidairement avec la MAF, les deux in solidum avec la société Engie Home Services et ses assureurs, à lui payer la somme de 23.593.113 euros correspondant au montant de l'indemnité d'assurance qu'elle a versée à la société Ouest Alu

* dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation, avec capitalisation

* condamner M. [F] solidairement avec la MAF, les deux in solidum avec la société Engie Home Services et ses assureurs, à lui payer 50.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

* condamner M. [F] solidairement avec la MAF, les deux in solidum avec la société Engie Home Services et ses assureurs, aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris l'intégralité des frais d'expertise.

La société AXA France IARD objecte que la société Engie Home Services et ses assureurs n'ont pas qualité pour prétendre que le jugement serait non avenu, seules Ouest Alu, K. Line et elle-même AXA ayant qualité pour invoquer l'interruption d'instance ; elle conteste subsidiairement que l'instance ait été interrompue, en faisant valoir que la dissolution de la SCP Bodin-Michenaud est postérieure à l'ouverture des débats, matérialisée par la première audience du 16 juin 2020.

Elle oppose l'absence d'un grief selon elle requis, à l'argumentation d'Engie Home Services et ses assureurs tirée de ce que ni la SCP Bodin-Michenaud ni a fortiori la Selarl Bodin- [E] n'ont jamais été maîtres de l'affaire.

Elle soutient que seules les conditions particulières émises le 14 mars 2006 s'appliquent au sinistre car ce sont elles qui sont complètes, datées et signées, les précédentes versions du 17 février et du 10 mars n'étant que des projets, soit incomplets, soit non signé. Elle fait observer que dans toutes les versions, K.Line est stipulée bénéficiaire de la garantie pertes d'exploitation.

Elle affirme que toutes les parties ont été parfaitement informées de la co-assurance entre AXA et Allianz, et de la double qualité d'AXA, faisant valoir que l'assignation se réfère expressément à la co-assurance, que le contrat témoignant du statut d'apériteur d'AXA fut communiqué dès le début des opérations d'expertise judiciaire, et qu'initialement Allianz, à la fois assureur dommage de Ouest Alu et assureur RC de Savelys devenue Engie, avait le même conseil en ces deux qualités, de sorte qu'Engie a toujours connu le rôle de co-assureur d'Allianz.

AXA fait valoir que l'article 3 du titre IV des conditions générales du contrat stipule qu'en sa qualité d'apériteur, elle bénéficie d'un mandat de représentation des co-assureurs, à la fois dans la gestion du contrat au titre du versement des indemnités mais aussi dans le cadre d'une action en justice pour solliciter le remboursement des indemnités versées par chacun des assureurs. Elle conteste que ce mandat soit limité aux seules relations de l'assureur avec son assuré. Elle récuse les jurisprudences invoquées par Engie exigeant cumulativement un mandat spécial et un mandat apparent dans les actes de procédure, en affirmant qu'ils ne correspondent pas à la spécificité d'un assureur ayant la qualité d'apériteur, et en faisant valoir que la Cour de cassation juge que le pouvoir de représentation de la société apéritrice se présume. En réponse aux contestations de l'appelante, elle fait observer que c'est en sa qualité d'assureur d'Engie Home Services qu'Allianz s'est associée aux contestations de celle-ci sur cette question.

AXA conteste être prescrite en sa demande au titre des dommages directs d'un montant de 9.910.077 euros, en soutenant que l'action était soumise à un délai décennal de prescription en vertu de l'article L.110-4 en sa rédaction applicable au jour du sinistre, antérieur à la loi du 17 juin 2008 ; qu'en vertu de l'article 26-II de cette loi, l'action devait être introduite dans les cinq ans de l'entrée en vigueur de la loi, soit avant le 19 juin 2013 ; que son assignation du 12 septembre 2012, délivrée avant ce terme, a interrompu la prescription de l'action en indemnisation de l'ensemble des dommages consécutifs au sinistre puisqu'elle sollicitait la condamnation des défendeurs au titre de leur responsabilité contractuelle sans limitation quant aux dommages objet de cette demande, et qu'elle n'a fait ensuite qu'augmenter le quantum de sa demande ; que de plus, sa demande formalisée au titre des dommages directs dans ses conclusions du 14 octobre 2013 était comprise dans la demande initiale au titre des dommages immatériels, car elles sont de même nature, tendent au même but, et sont formées dans le cadre de la même instance.

Sur le fond, la société AXA soutient qu'Engie Home Services, chargée de l'entretien d'une chaudière à gaz, était tenue d'une obligation de résultat.

Elle invoque les conclusions de l'expert judiciaire [M] caractérisant les fautes du technicien de maintenance de Savelys, devenue Engie, qui n'a pas vérifié l'état du brûleur et de ses accessoires, ni la présence de fioul dans le foyer, avant d'effectuer un démarrage du générateur, ce qui aurait pu éviter l'explosion, l'existence de petites explosions déjà constatées avant son intervention étant caractéristique de la présence de gaz imbrûlés dans la chambre de combustion, et Les multiples démarrages auxquels il s'est livré n'ayant fait qu'augmenter le volume du fioul, de sorte qu'il a amplifié le problème.

Elle maintient qu'il est avéré qu'il y eut deux explosions, une première non suivie de flammes qui aurait dû alerter le technicien, et que celui-ci a volontairement occultée lors de l'enquête puis de l'expertise, puis la seconde suivie de flammes qui constitue le sinistre.

Elle réfute les critiques formulées par les appelantes contre le rapport d'expertise.

Elle fait valoir que les deux experts judiciaires [M] et [N], ont fait litière de la prétention d'Engie et ses assureurs à soutenir que la propagation de l'incendie s'expliquerait par un défaut d'entretien du site, de même que de l'argumentation tirée de l'absence de dispositif de désenfumage.

Elle rappelle qu'à l'instar de Socotec présente aux opérations, les deux experts ont conclu que du fait de sa date de construction, le bâtiment n'avait pas à être mis aux normes définies par l'arrêté type n°2560, la dérogation étant systématique pour les constructions antérieures.

Affirmant que l'architecte avait une mission de conception du hall n°6, elle invoque la responsabilité de l'architecte [F] pour manquement à son devoir de conseil envers le maître de l'ouvrage au titre de l'état de l'existant, et la garantie de la MAF, au cas où la cour retiendrait que la Drire aurait dû être consultée sur la nécessité d'installer ou non des dispositifs d'évacuation des fumées conformes à la réglementation postérieure à l'édification des bâtiments et des portes coupe-feu. Elle tient pour inapplicable à son action la clause d'exclusion de la solidarité contenue dans la police d'assurance en soutenant qu'elle n'a pas vocation à limiter le recours d'un maître de l'ouvrage ou de son assureur à l'encontre d'un tiers, mais uniquement à l'encontre de son assureur.

Elle détaille les dommages directs -aux bâtiments, aux matériels et aux marchandises- et indirects -perte d'exploitation- dont elle poursuit le remboursement de l'indemnisation, en rappelant que le principe de la réparation intégrale et en se prévalant des évaluations de l'expert judiciaire [Z].

Les sociétés Ouest Alu et K. Line demandent à la cour de confirmer le jugement déféré, sauf à actualiser à 101.166,20 euros au 31 décembre 2021 la somme de 70.897,73 euros allouée à Ouest Alu à titre de dommages et intérêts du chef des frais de location d'un local pour y entreposer la chaudière litigieuse.

Pour le cas où la cour jugerait toutefois que Ouest Alu a manqué à ses obligations au titre de la législation sur les installations classées, et que ce manquement a contribué à l'aggravation du sinistre, elles sollicitent alors l'entière garantie de M. [F] et de la MAF.

Elles demandent à la cour de dire que les sommes qui leur ont été ou leur seront allouées sont assorties des intérêts au taux légal depuis le 12 septembre 2012, avec capitalisation.

Elles réclament chacune 50.000 euros d'indemnité de procédure.

Elles relatent les circonstances dans lesquelles un technicien de la société Savelys, chargé de la maintenance et de l'entretien de la chaufferie de l'ensemble du site industriel des Herbiers, intervint le 8 mars 2006 après que des salariés avaient signalé les jours précédents une insuffisance de chaleur du générateur d'air chaud situé entre les halls n°4 et n°5 et des bruits anormaux évoquant de petites explosions. Elles décrivent les conséquences du sinistre survenu lors de cette intervention, qui a totalement détruit les halls n°1 à 5 et causé le chômage technique de 170 salariés ; la mise en place d'une expertise judiciaire ; et les tentatives de Savelys et ses assureurs de déstabiliser l'expert commis, M. [M].

Elles contestent les griefs adressés au jugement par les appelants, en soutenant

* que la Selarl Bodin-[E], qui a succédé comme postulant à la Scp Bodin-Michenaud lorsque celle-ci a été dissoute, à effet du 20 août 2020, était à effet de cette même date inscrite au tableau de l'ordre de La-Roche-sur-Yon, section des personnes morales, de même que l'un de ses membres, maître [H] [E], de sorte que par application de l'article 8 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, elle était habilitée à postuler devant cette juridiction, quand bien même elle n'était pas maître de l'affaire

* que les appelants sont irrecevables à arguer de l'interruption d'instance pour soutenir que le jugement serait non- avenu, seule la partie au profit de laquelle l'interruption a été prévue pouvant invoquer le caractère non-avenu des actes accomplis ou du jugement rendu

* subsidiairement, qu'elles ont ratifié les actes de procédure et confirmé le jugement prétendument non-avenu, en procédant à sa signification, en sollicitant du tribunal sa rectification puis en engageant une procédure devant le conseiller de la mise en état et le premier président afin que l'exécution provisoire lui soit conférée

* que le jugement n'est pas nul, les causes de nullité de l'article 117 du code de procédure civil concernant les actes de procédure et non les jugements dont la nullité est régie par les articles 450 et suivants du même code, et la Selarl Bodin-Coué, avocat constitué pour elles, pouvant postuler devant le tribunal judiciaire de La-Roche-sur-Yon.

Elles affirment la recevabilité de leurs demandes, en répondant aux moyens adverses

.qu'elles ont individualisé leurs demandes

.que Ouest Alu a qualité et intérêt pour formuler à hauteur de 2.745.000 euros une demande d'indemnisation complémentaire, les appelants ne pouvant lui opposer le protocole transactionnel qu'elle a conclu avec son assureur et auxquels ils ne sont pas parties, et Ouest Alu, non intégralement indemnisée par son assureur dans le cadre de cette transaction, n'ayant pas renoncé à solliciter l'indemnisation de la part de son dommage non réparée,

.que K. Line était assurée au titre de la perte de marge brute au même titre que Ouest Alu et ce, tant par les conditions particulières du 14 mars 2006 que par celles, non signées, du 10 mars et que par celles antérieures, du 21 mars 2003 comprenant une extension de garantie à son profit.

Elles font valoir que Savelys était tenue d'une obligation de résultat, et que sa responsabilité dans le sinistre est entière.

Elles se prévalent des conclusions de l'expert judiciaire [M] selon lesquelles l'intervention du technicien de Savelys, devenue Engie Home Service, est à l'origine exclusive de la déflagration, du second expert judiciaire, M. [N], selon qui le maître de l'ouvrage n'a pas méconnu les règles de sécurité ; et du troisième, M [Z], qui a chiffré les préjudices.

Si la cour retenait que les normes de sécurité applicables aux ICPE n'ont pas été respectées à la date du sinistre, et que ces éventuelles non-conformités ont pu contribuer à l'aggravation du sinistre, elles soutiennent que l'architecte [F] et son assureur la MAF devraient alors assumer les conséquences de ces manquements, consistant pour l'architecte, chargé contrairement à ce qu'il prétend d'élaborer le projet de conception générale du hall n°6, à n'avoir pas pris en compte la construction existante et conseillé au maître de l'ouvrage Ouest Alu notamment sur la nécessité de consulter la DRIRE au sujet des dispositifs d'évacuation des fumées et des portes coupe-feu, de sorte qu'il devrait être condamné avec son assureur in solidum avec Engie Home Services et ses assureur à les indemniser.

Elles justifient leurs demandes indemnitaires en faisant valoir

.que le protocole d'accord conclu entre Ouest Alu et AXA est sans incidence sur leur droit à être indemnisé de la totalité de leur dommage

.que l'expert [Z] retient que les pertes d'exploitation sont directement liées au sinistre, et que la réorganisation interne au groupe Liebot est sans aucune incidence sur ces pertes; qu'il a bien tenu compte des charges variables dans ses calculs, et que la pertinence de ses analyses n'est pas réfutée par la note non contradictoire produite par les appelants.

Elles demandent à la cour de leur allouer par application de l'article 1153-1, alinéa 1er, du code civil, des intérêts de retard à compter de l'assignation, pour compenser le préjudice que leur ont causé les manoeuvres dilatoires multipliées par Savelys et son assureur depuis seize ans, et répondent à l'objection adverse que le temps qu'elles ont mis à individualiser leurs demandes respectives n'y change rien.

Elles rappellent que l'anatocisme est de droit lorsqu'il est sollicité.

Ouest Alu rappelle que c'est en raison de l'obstination des appelants qu'elle continue, ce dont elle justifie, à devoir payer des loyers pour le local où la chaudière est conservée depuis des années, alors même qu'aucune demande de contre-expertise n'est formulée, et elle actualise sa demande en indiquant que cette dépense s'est poursuivie depuis la première instance.

L'ordonnance de clôture est en date du 7 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

* sur la prétention de la société Engie à voir déclarer non avenu le jugement déféré

La société Engie soutient au visa de l'article 372 du code de procédure civile que le jugement entrepris est non avenu car il a été obtenu au mépris de l'interruption d'instance consécutive à la dissolution, en cours d'instance, de la SCP d'avocats Bodin-Michenaud qui représentait les quatre sociétés demanderesses.

Mais l'article 372 du code de procédure civile édicte une règle qui protège la partie au bénéfice de laquelle l'interruption a eu lieu, et qui pourrait souffrir des conséquences du litige où elle n'aurait pas été légalement représentée, et en vertu d'une jurisprudence assurée, qui contrairement à ce que soutient l'appelante n'est pas limitée à la seule matière des procédures collectives, ses dispositions ne peuvent être invoquées que par la partie au bénéfice de laquelle l'instance est interrompue (Cass. Civ. 1° 24.06.2015 P n°14-13436).

La société Engie n'est donc pas habile à invoquer cet article.

* sur la nullité du jugement tirée du défaut de capacité pour les représenter de l'avocat des parties demanderesses

Selon l'article 117, alinéa 3, du code de procédure civile, constitue une irrégularité de fond le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice.

Il est de jurisprudence assurée que la méconnaissance de la territorialité de la postulation constitue un vice de fond (ainsi Cass. Civ. 2° 09.01.1991 P n°89-12457 ou 23.10.2003 P n°01-17806).

Selon les articles 118 et 120 du code de procédure civile, les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure ont un caractère d'ordre public, et elles peuvent être proposées en tout état de cause.

La société Engie Home Services soutient que les sociétés Ouest Alu et K. Line n'étaient pas régulièrement représentées en première instance par un avocat postulant inscrit au barreau de La-Roche-sur-Yon.

Il ressort des pièces de procédure et des productions que les sociétés Ouest Alu, K. Line et Prima, demanderesses à l'action, étaient d'abord représentées devant le tribunal de grande instance de La-Roche-sur-Yon par la Selarl Lefevre-Raynaud, dans l'assignation et les débuts de l'instance, puis par la Scp Bodin-Michenaud, l'une et l'autre inscrites au barreau de La-Roche-sur-Yon, et en dernier lieu, comme en fait foi l'en-tête du jugement, par la Selarl Bodin-[E] (cf pièces n°18 et 20 d'Engie).

Les société Ouest Alu et K. Line justifient par leur pièce n°58, constituée d'un extrait de procès-verbal du conseil de l'ordre du barreau de La-Roche-sur-Yon en date du 23 juin 2020, que la Scp Bodin-Michenaud, inscrite à ce barreau, en a été radiée à effet du 25 août 2020 et qu'y a été inscrite à compter de cette même date à la section des sociétés inter-barreaux la Selarl Bodin-[E], structure inter barreaux ayant son siège social à La-Roche-sur-Yon et un établissement aux Sables d'Olonne.

L'instruction devant le tribunal -devenu tribunal judiciaire- de La-Roche-sur-Yon ayant été clôturée avec fixation pour plaider à l'audience du 16 juin 2020, les dernières conclusions des sociétés Ouest Alu, K. Line et Prima sur lesquelles le tribunal devait statuer et a statué étaient en toute logique celles transmises sous la constitution comme postulant de la Scp Bodin-Michenaud, qui n'était pas radiée, et c'est ce qui explique que le tribunal ait rejeté dans son jugement du 1er juin 2021 la requête de ces sociétés en rectification d'une prétendue erreur matérielle tenant à ce qu'il avait prononcé la distraction des dépens au profit de la Scp Bodin-Michenaud et non pas de la Selarl Bodin-[E], les premiers juges écrivant que ce chef de décision 'répond très exactement aux termes des dernières conclusions produites par les sociétés demanderesses', prises sous la constitution de la Scp Bodin-Michenaud (cf pièce n°24 d'Engie).

Pour autant, ainsi qu'en atteste l'en-tête du jugement, les sociétés Ouest Alu, K. Line et Prima ont, après la radiation du barreau de cette Scp, été représentées par la Selarl Bodin-[E], et donc régulièrement, puisque celle-ci, inscrite au barreau de La-Roche-sur-Yon, avait le pouvoir d'y postuler.

La contestation est ainsi dénuée de toute pertinence, et la demande d'annulation du jugement entrepris sera rejetée.

* sur la demande de dommages et intérêts au titre du caractère prétendument dilatoire de la fin de non-recevoir d'Engie contenue dans les motifs des conclusions d'AXA

Selon l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties.

La société AXA France IARD demande à la cour dans les motifs de ses conclusions (page 27) au visa de l'article 123 du code de procédure civile de condamner la société Engie Home Services à lui verser la somme de 9.437.245,20 euros à titre de dommages et intérêts en raison de son intention dilatoire, pour avoir soulevé pour la première fois la fin de non-recevoir tirée de son défaut de qualité à agir le 15 octobre 2015, postérieurement au délai pour régulariser la formalisation de sa qualité d'apériteur.

Cette demande -qui paraît formulée à titre subsidiaire, pour le cas où il serait fait droit à la fin de non-recevoir invoquée par Engie Home Services- n'étant pas énoncée au dispositif de ses conclusions, la cour n'a pas à statuer de ce chef.

* sur la recevabilité à agir de la société AXA France IARD

¿ sur un défaut de qualité à agir d'AXA France IARD en ses demandes formulées à concurrence de la part de l'indemnité d'assurance correspondant aux pertes d'exploitation de la société K Line représentant 2.009.000 euros

La société Engie Home Services soutient qu'à la date du sinistre seule Ouest Alu avait la qualité d'assurée au titre de la police souscrite en co-assurance auprès des compagnies AXA et AGF devenue Allianz ; que la société K. Line n'avait pas la qualité d'assurée ni de bénéficiaire du contrat d'assurance ; que c'est donc à titre de simple geste commercial qu'AXA a accepté de prendre en considération à hauteur de 2.009.000 euros la perte d'exploitation subie par K. Line et non en vertu de ses obligations contractuelles ; et qu'AXA ne peut ainsi se prévaloir d'aucune qualité, ni personnelle ni par l'effet d'une subrogation, pour prétendre exercer un recours à son encontre à raison de l'enrichissement sans cause qu'elle a ainsi procuré à son assurée Ouest Alu.

Cette argumentation est contraire à la teneur des contrats d'assurance successivement souscrits, selon lesquels la société K. Line bénéficiait de la garantie 'pertes d'exploitation' soit,

.l'avenant régularisé le 21 novembre 2003 à effet du 8 septembre 2003 (pièce n°8 d'AXA), qui stipule en page 6 au chapitre II 'PERTES D'EXPLOITATION' :

'Pour l'application de cette garantie, il est précisé que

-les garanties du contrat sont étendues au cas où l'assuré subirait des pertes financières à l'occasion d'un sinistre garanti et survenu dans les locaux du centre administratif du groupe Briand et sis, [Adresse 12]

-la garantie est également acquise pour la STE K. LINE au cas où cette dernière subirait des pertes financières par répercussion d'un sinistre garanti et survenu dans les locaux de la société Ouest Alu. Il est toutefois précisé que cette garantie s'exerce dans la limite de 30% de la marge brute annuelle de la sté K. Line.'.

.les 'conditions particulières' à effet du 12 octobre 2005 signées le 14 mars 2006 par l'assureur et le souscripteur (cf pièce n°13 d'AXA), qui énoncent qu''il s'agit d'un remplacement qui annule et remplace le contrat précédemment émis sous le même numéro ainsi que les conditions particulières émises le 10/03/2006', et qui stipulent dans les mêmes termes à la rubrique 'pertes d'exploitation' une 'EXTENSION DE GARANTIE' :

'la garantie est également acquise pour la STE K. LINE au cas où cette dernière subirait des pertes financières par répercussion d'un sinistre garanti et survenu dans les locaux de la société Ouest Alu. Il est toutefois précisé que cette garantie s'exerce dans la limite de 30% de la marge brute annuelle de la sté K. Line.'.

Il est sans incidence sur l'application de ces conditions particulières au jour du sinistre qu'elles aient été conclues quelques jours plus tard, puisqu'elles l'étaient à effet du 12 octobre 2005 soit à une date antérieure au sinistre, et qu'il n'est justifié ni fait état d'aucune fraude à ce titre, étant ajouté :

-que la garantie perte d'exploitation étant précédemment acquise à K. Line exactement dans les mêmes termes en cas de sinistre dans les locaux de Ouest Alu, il est en tout état de cause indifférent que l'un ou l'autre de ces contrats soit regardé comme en vigueur au jour du sinistre puisqu'ils sont similaires sur ce point

-que la société Engie Home Services n'est pas fondée à présenter comme s'appliquant au jour du sinistre le document 'conditions particulières' daté du 10 mars 2006 qui est versé en un exemplaire non signé (pièce n°10) et en un exemplaire seulement signé de Ouest Alu (pièce n°9), qui est expressément dénommé 'projet' ; dont il ressort des échanges de courriels entre le rédacteur chez AXA et l'agent général en réponse à diverses objections qu'il était affecté d'un 'bug informatique' (pièce n°12) ; et qui, de fait, est un document lacunaire dont plusieurs rubriques ne sont pas renseignées alors qu'elles ne pouvaient pas ne pas l'être, tels le taux de perte ou le nombre de jours de franchise, ce qui explique que ce document n'ait pas été signé par AXA et donc pas par les deux parties et implique qu'il n'a pas de valeur contractuelle, contrairement à celui, complété et conforme, qu'elles ont signé le 14 mars

-étant observé que ce document incomplet et non contractuel vise, à la rubrique 'pertes d'exploitation', une extension de garantie et se réfère à la marge brute annuelle de la société K. Line (cf page 3).

La société K. Line était ainsi par une clause d'extension de garantie, contractuellement bénéficiaire de la garantie 'pertes d'exploitation' souscrite par Ouest Alu auprès d'AXA, qui n'a donc fait qu'exécuter son obligation et non agir par geste commercial en l'indemnisant.

La société AXA France IARD n'est donc nullement irrecevable à recourir à ce titre contre Engie Home Services pour la somme de 2.009.000 euros correspondant à l'indemnisation de la perte d'exploitation de K. Line, et le jugement, qui l'a dit, sera confirmé de ce chef.

¿ sur un défaut de qualité et d'intérêt à agir d'AXA France IARD en toutes ses demandes formulées à concurrence de la part de l'indemnité d'assurance payée par la société Allianz IARD et représentant la somme de 9.437.245,20 euros

Il est stipulé tant sur le contrat du 21.11.2003 (page 9) que sur celui à effet du 12.10.2005 conclu le 14.03.2006 (page 5), et au demeurant constant aux débats (cf conclusions d'Engie page 26,) que 'les garanties du présent contrat sont accordées en coassurance selon les dispositions prévues Titre IV article 3 des conditions générales'.

L'engagement comme coassureur d'Allianz est d'ailleurs produit (pièce n°11 d'AXA), et confirmé en tant que de besoin par une attestation qu'elle a établie le 4 avril 2022 (pièce n°19).

La société Engie Home Services soutient qu'AXA France IARD est irrecevable à agir contre elle à due concurrence de la part de l'indemnité d'assurance supportée par Allianz portant sur 40% de la co-assurance, au motif que nul ne plaide par procureur, et qu'AXA n'ayant supporté dans le cadre de la co-assurance que 60% de l'indemnisation ne peut recourir pour la part de 40% qu'elle n'a pas supportée, et pour laquelle la subrogation n'opère pas.

Elle conteste la qualité d'apériteur invoquée par AXA, et prétend que celle-ci n'en a pas argué initialement, puis qu'elle ne pouvait plus intervenir sous cette autre qualité après l'expiration du délai de prescription.

La qualité d'apériteur d'AXA est expressément mentionnée sur le contrat du 21.11.2003 et sur celui à effet du 12.10.2005 conclu le 14.03.2006, qu'elle a tous deux signés en cette qualité expresse (cf pièce n°8 page 10 et pièce n°13 page 6).

L'assignation au fond du 12 septembre 2012 délivrée à la requête des sociétés Ouest Alu, K. Line Prima et AXA énonce en sa page 4 (cf pièce n°18 d'Engie) que 'la société Ouest Alu est assurée auprès de la société AXA France IARD en co-assurance avec la compagnie Allianz', et AXA y sollicitait le remboursement de la totalité des indemnités d'assurance versées à Ouest Alu et K. Line, y compris la part prise en charge par Allianz.

Les conditions générales du contrat d'assurance stipulent au chapitre 3 du titre IV (pièce n°14 d'AXA, page 30) à la rubrique 'coassurance' :

'Si mention en est faite aux conditions particulières, la présente convention s'applique. La société désignée par le souscripteur comme apériteur a mandat des coassureurs de les représenter dans les limites prévues par le contrat. Les assureurs, sans solidarité entre eux, garantissent l'assuré à concurrence de leur participation indiquée sur l'état de coassurance des conditions particulières.

...

Le montant de l'indemnité due par chaque coassureur est centralisé par l'apériteur aux fins de versement à l'assuré.

En cas de litige, l'apériteur représentera les assureurs, soit en demande, soit en défense.

...'.

Ainsi qu'il a été dit, mention en est bien faite aux conditions particulières, tant de 2003 que de 2006.

Le mandat de les représenter ainsi donné à AXA par les coassureurs, en l'occurrence par Allianz, n'est nullement limité à leurs rapports avec l'assuré.

Il est, en tout état de cause, de jurisprudence établie que la société apéritrice est présumée être investie d'un mandat général de représentation dès lors qu'aucun des co-assureurs ne le conteste (cf Cass. Civ. 2° 08.06.2017 P n°16-19973 et Com. 21.11.2018 P n°17-23598).

Engie Home Services n'est pas fondée à soutenir qu'Allianz aurait contesté ce mandat en tirant argument de ce que cette compagnie a déclaré dans ses conclusions de première instance du 15 mars 2019 s'associer aux écritures signifiées pour le compte de la société Engie Home Services en tant qu'elles tendaient à l'irrecevabilité et au rejet des demandes des sociétés Ouest Alu, K. Line, Prima et AXA France, ainsi qu'à la garantie de M. [F] et de la MAF', alors qu'Allianz indique expressément dans cette phrase le faire en sa qualité d'assureur de responsabilité civile de la société Engie Home Services, cette qualité étant distincte, et pouvant induire des intérêts opposés, à celle de coassureur avec AXA de Ouest Alu et K. Line.

La société Allianz IARD confirme au demeurant par une attestation du 4 avril 2022 (pièce n°19 d'AXA) 'avoir effectivement donné mandat à la société AXA France IARD d'agir en justice et de la représenter en justice aux fins de remboursement des indemnités versées à hauteur de 40% au titre du sinistre incendie survenu le 6 mars 2006 et ce, conformément aux clauses du contrat à l'encontre des responsables et de leurs assureurs respectifs'.

En cette qualité de mandataire qui est ainsi avérée, et qui ressortait de son acte introductif d'instance même si le terme n'y était pas expressément utilisé, AXA France IARD a donc bien qualité à agir contre Engie Home Services en paiement de la part de l'indemnité d'assurance supportée par Allianz à hauteur de 40% des indemnités versées soit 9.437.245,20 euros.

La décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle en a jugé ainsi.

¿ sur une prescription des demandes formulées par AXA à concurrence de 9.910.077 euros au titre de la part de l'indemnité d'assurance correspondant aux dommages directs

La société Engie Home Services soutient qu'AXA est prescrite en son entière réclamation au titre des dommages directs, au motif qu'elle a formulé cette prétention pour la première fois dans des conclusions additionnelles du 14 octobre 2013 soit après l'expiration du délai quinquennal de prescription expirant, en application de la loi du 17 juin 2008 ayant réduit les délais de prescription, le 19 juin 2013.

La société AXA France IARD est fondée à opposer à ce moyen que son assignation du 12 septembre 2012, délivrée avant cette date du 19 juin 2013 qui constituait en effet l'échéance du délai de prescription, en a interrompu valablement le cours y compris au titre de l'action en indemnisation des dommages directs, dès lors qu'elle y sollicitait la condamnation des défendeurs au titre de leur responsabilité contractuelle 'à indemniser intégralement les sociétés Ouest Alu, K. Line et Prima des préjudices consécutivement au sinistre du 8 mars 2006' et qu'elle n'a fait ensuite qu'augmenter le montant de sa réclamation.

Elle fait en outre pertinemment valoir que sa demande au titre des dommages directs, formalisée dans ses conclusions du 14 octobre 2013, était comprise dans la demande initiale dont le chiffrage correspondait aux seuls dommages immatériels, car ces demandes sont de même nature, qu'elles tendent au même but, et qu'elles sont formées dans le cadre de la même instance.

L'appelante n'est pas fondée à objecter qu'AXA aurait expressément circonscrit dans son acte introductif d'instance du 12 septembre 2012 sa demande aux pertes d'exploitation et à l'homologation du rapport de l'expert judiciaire [Z] et qu'elle aurait formellement laissé en dehors du litige le volet matériel du préjudice qui avait été instruit dans un cadre amiable, l'assignation n'énonçant rien de tel, l'indication qu'elle contient que les parties avaient chiffré dans le cadre d'opérations d'expertise amiable les dommages aux bâtiments, matériels et marchandise, n'impliquant aucunement que l'action des parties demanderesses -et s'agissant d'AXA que son recours subrogatoire à l'égard d'Engie, qui contestait le principe même de sa responsabilité et n'avait rien payé ni offert- ne portent pas sur l'ensemble des dommages consécutifs au sinistre.

La société AXA France IARD n'est donc pas prescrite en son chef de demande afférent aux dommages directs, et le jugement, qui l'a dit, sera confirmé de ce chef.

¿  sur un défaut d'intérêt à agir de la société Ouest Alu au titre de l'indemnisation de ses pertes d'exploitation

La société Engie Home Services argue d'irrecevabilité l'action indemnitaire de la société Ouest Alu au titre de ses pertes d'exploitation, au motif qu'elle a nécessairement été remplie de ses droits et qu'elle ne subit plus de préjudice de ce chef, puisqu'elle a accepté de son assureur à ce titre une indemnité de 13.683,036 euros très inférieure au plafond de la garantie des pertes d'exploitation stipulé au contrat d'assurance, qui est de 28.395.431 euros, ce dont il faut déduire qu'elle était remplie de ses droits.

Pareille déduction est dénuée de toute portée.

La société Ouest Alu fait pertinemment valoir que la société Engie Home Service ne peut lui opposer le protocole transactionnel conclu entre l'assuré et son assureur, auquel elle n'est pas partie, et dans lequel l'appelante -s'il constitue pour elle un fait juridique- ne trouve rien qui interdise ou limite le droit de Ouest Alu, victime du sinistre, à agir en réparation à son encontre.

Elle fait de même valoir à bon droit qu'en acceptant à titre de transaction l'indemnisation que lui proposaient ses co-assureurs, elle n'a pas renoncé à agir contre Engie Home Services pour la part de préjudice résiduel qu'elle estimerait rester à sa charge, et au contraire, le protocole d'accord énonce que les experts respectifs de Ouest Alu et d'AXA et Allianz étaient en désaccord sur le chiffrage des pertes d'exploitation, que la transaction consistait pour ces trois sociétés à s'accorder sur le versement d''une somme globale, forfaitaire et définitive d'un montant de 13.600.000 euros', et qu'AXA informerait Ouest Alu 'de toute action engagée à l'encontre du ou des responsables du sinistre et leurs assureurs afin que la société Ouest Alu puisse éventuellement intervenir volontairement pour faire valoir ses droits' (cf pièce n°9 de Ouest Alu).

La somme de 2.745.000 euros que Ouest Alu réclame à Engie Home Services ne recouvrant en rien celle qu'elle a reçue d'AXA en exécution du contrat d'assurance au titre de la garantie pertes d'exploitation, mais étant présentée par elle -à tort ou à raison, ce qui relève de l'examen du fond du litige, et non d'une fin de non-recevoir- comme correspondant à la part de sa perte d'exploitation non indemnisée par son assureur, sa demande n'a rien d'irrecevable.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette fin de non-recevoir.

* sur les responsabilités dans le sinistre ou dans ses conséquences

¿ la responsabilité de la société Engie Home Services

Il ressort des productions que durant la première semaine du mois de mars 2006, les employés de la société Ouest Alu ont signalé que l'un des générateurs d'air chaud, situé entre les halls 4 et 5, ne produisait pas suffisamment de chaleur et qu'il émettait des bruits suspects pouvant correspondre à de petites explosions.

Les témoignages recueillis contradictoirement sur le site par l'expert judiciaire [M] auprès du personnel présent à proximité du générateur d'air chaud défectueux la semaine précédant le sinistre ont confirmé ces 'explosions', le dégagement de fumée et, pour certains, d'odeur de fioul (cf rapport p. 6, 10, 11, 37).

Ouest Alu en a avisé la société Savelys, en charge de la maintenance et de l'entretien de la chaufferie en vertu d'un contrat conclu le 18 mai 1999 avec une entreprise CGST-Save aux droits de laquelle elle se trouvait (cf annexe 8-261 du rapport [M]) en lui demandant d'intervenir pour y remédier.

Dans le cadre d'un tel contrat, la société Savelys, devenue Engie Home Service, était tenue envers son cocontractant d'une obligation de résultat.

Or l'expertise judiciaire confiée à M. [M] a établi de façon convaincante, et non réfutée, que le dysfonctionnement pour lequel il lui était demandé d'intervenir relevait du champ de sa mission d'entretien et maintenance, et d'autre part que l'intervention de son préposé M. [I] non seulement n'a pas permis d'y remédier mais était l'unique cause avérée du sinistre.

Il ressort en effet des explications recueillies par l'expert, de ses constatations et analyses, que l'explosion qui a communiqué l'incendie aux halls n°1 à 5 s'est produite dans la chambre de combustion du générateur d'air chaud ; qu'elle était due à la présence de gaz imbrûlés qui s'étaient formés suite à une mauvaise combustion, elle-même consécutive à un mauvais réglage entre fioul et air suite à un déréglage du brûleur ; que les premières explosions qui s'étaient produites avant l'intervention de M. [A], le technicien de Savelys, en étaient un signe évident ; que ce technicien n'a pas été capable de déceler ne serait-ce que l'origine de ces explosions qui lui avaient été signalées; a continué son intervention alors qu'il ne savait pas ce qu'il recherchait ; a continué à démarrer la chaudière, provoquant ainsi une nouvelle explosion identique à celles entendues 8 jours auparavant ; qu'il n'a pas fait pour autant la corrélation entre explosions, présence de gaz imbrûlés et présence de fioul dans la chambre de combustion ; n'a donc pas appliqué les différentes mesures de sécurité qui s'en évinçaient, à savoir en tout premier lieu s'assurer de la présence de fioul dans la chambre, puis procéder pour déterminer l'origine du problème à toute une série de manipulations, lesquelles mesures lui auraient permis d'une part, de trouver l'origine du problème, et d'autre part d'éviter la déflagration finale avec ses conséquences de propagation des flammes ; qu'au lieu de cela, il a fait plusieurs démarrages qui ne firent qu'aggraver le phénomène dont il recherchait la cause, et provoquèrent eux-mêmes une nouvelle explosion, sans que cela l'amène à modifier son mode opératoire (cf rapport p. 39, 42, 63, 64).

L'expert [M] a précisé après avoir mis hors de cause les gicleurs, que tous les éléments (pompe, électro-vannes, ventilateurs..) pouvant être mis en cause au niveau du déréglage du brûleur faisaient partie intégrante du brûleur, et donc étaient 'couverts' par le contrat d'entretien signé entre Ouest Alu et Savelys (cf rapport p.39).

Il a indiqué en réponse à un dire et au vu de l'audition des intéressés : 'M. [A] ne peut se retrancher derrière une pseudo-absence de renseignements concernant le dysfonctionnement constaté 8 jours auparavant. En effet, dans sa déposition à la gendarmerie, il a déclaré 'on nous avait dit que la chaudière fumait et qu'il y avait eu des petites explosions'. Ainsi retranscrits...(ces) propos de M. [A] montrent que celui-ci savait parfaitement à quoi s'en tenir, et qu'il aurait dû faire son intervention en conséquence...' (cf p. 58).

Toujours en réponse à un dire, il a indiqué, de façon convaincante et non réfutée, : 'il existait bien sûr un problème préalablement à l'intervention de M. [A], sinon il n'aurait pas été fait appel à la société Savelys. Par ailleurs, c'est ce dernier qui est le professionnel, et c'est à lui qu'il incombait, d'une part de poser toutes les questions lui semblant utiles à la description des phénomènes (explosions) rencontrées 8 jours auparavant, et d'autre part de prendre les bonnes mesures nécessaires à leur résolution.

En réponse à un dire, il a maintenu que c'était M. [A] le professionnel, l'homme de l'art, et nul autre, et que s'il estimait ne pas avoir suffisamment d'informations, il lui appartenait de les rechercher (cf p. 44).

Il a bien identifié deux explosions le jour du sinistre, une petite explosion alors que M. [A] venait de remettre en marche le brûleur qu'il avait coupé, et dont il dit qu'elle a libéré la surpression accompagnée d'un flux thermique, puis la déflagration, dont il évalue la puissance et les effets à ce qu'aurait produit 1,4 kg de dynamite.

Il recense les témoignages faisant état de deux 'boum' (cf rapport p. 43).

Il a ajouté que les témoignages montraient que les personnels de Ouest Alu avaient pris la mesure conservatoire qui s'imposait pour faire cesser le dysfonctionnement, avant de s'adresser à Savelys, qui en assure la maintenance et le nettoyage.

La société Engie Home Services -et ses assureurs Allianz et HDI Gerling Industrie, qui déclarent s'associer à ses contestations- ne réfutent pas ces constatations et analyses, argumentées et motivées, auxquelles elles opposent les mêmes contestations que celles qu'elles ont présentées à de multiples reprises sous forme de dires auxquels il a été répondu de façon circonstanciée et non contredite.

Les griefs de dénaturation de propos ou de pièces que l'appelante continue d'adresser au travail de l'expert judiciaire sont totalement dépourvues de pertinence, et reposent elles-mêmes sur une dénaturation de son rapport.

Les mises en cause de sa compétence ne reposent sur aucun élément probant, et la qualité de ses analyses et conclusions n'est pas prise en défaut.

Il ressort de ces éléments que la société Savelys devenue Engie Home Services, est responsable de l'explosion et de l'incendie survenus le 8 mars 2006 dans les locaux de l'entreprise Ouest Alu.

¿ la responsabilité de Ouest Alu dans la propagation de l'incendie

La société Engie Home Services affirme que l'explosion aurait pu avoir des effets limités, si la configuration des halls de fabrication -dépourvus de dispositifs d'évacuation des fumées et de portes coupe-feu, et avec une toiture réalisée en matériaux combustibles- et si les conditions d'exploitation -n'assurant pas l'élimination des poussières d'aluminium par des dispositifs d'évacuation- n'avaient pas considérablement aggravé les conséquences de l'incendie, ainsi qu'il ressort selon elle du rapport établi par l'expert judiciaire [N].

Ni le rapport de M. [M], ni celui de M. [N], ne mettent en évidence avec un lien de causalité avéré, un facteur de propagation de l'incendie qui aurait procédé d'une faute, négligence ou méconnaissance des normes, imputables à la société Ouest Alu.

S'agissant de la présence de copeaux d'aluminium dus à l'usinage de profilés, l'expert [M] indique sans être réfuté qu'il s'agit d'un métal incombustible, classé A1 dans le classement de réaction au feu (rapport p.33). Il a consigné (rapport p.58, 59) que les cinq employés de Ouest Alu entendus à ce sujet -Mme [W], M. [J], Mme [X], M. [D] et Mme [P]- avaient tous parlé seulement de 'copeaux'.

Il a de façon très minutieuse catégoriquement exclu que la déflagration ait été consécutive à la présence de poussières d'aluminium dans l'air, en réfutant cette hypothèse d'une façon très argumentée, qui n'a pas été et n'est pas contredite (rapport p. 53, 57).

L'expert [V] [N] a lui aussi retenu que les déchets provenant de la fabrication des pièces d'aluminium ne produisaient pas des poussières mais des copeaux, et en a conclu qu'on ne pouvait parler d''atmosphère explosive' (cf rapport p. 20).

M. [M] a plus généralement 'exclu tout problème de nettoyage comme étant le vecteur ayant favorisé la propagation du sinistre' (cf son rapport p.58).

M. [N] a conclu que l'établissement d'Ouest Alu constituait une installation classée pour la protection de l'environnement et qu'il se trouvait, à ce titre, soumis aux obligations de la loi du 19 juillet 1976 (cf son rapport, p. 14 et 22), qu'il relevait à ce titre sans aucun doute de la rubrique 2560 et qu'un doute subsistait concernant les rubriques 2910 et 2662.

S'agissant de la rubrique 2560 'travail mécanique des métaux et alliages', il a indiqué :

-que ses prescriptions concernant les dispositions constructives n'avaient pas été totalement appliquées, mais pour ajouter aussitôt que 'tenir compte de l'antériorité des existants est une position généralement admise par l'administration', et 'qu''une mise en conformité' n'est pas exigée sur ce point dans les établissements existants'

-et que pour celles qui concernaient les mesures d'exploitation de l'établissement (entretien, surveillance, consignes et procédures), rien ne permet de dire que les mesures de sécurité prescrites par l'arrêté type ne sont pas respectées'.

S'agissant de la rubrique 2910, relative aux installations de chauffage dont la puissance thermique totale est compris entre 2 et 20 MW, M. [N] a conclu qu'elle n'était pas suffisamment explicite pour permettre de préciser si des appareils de chauffage répartis dans une surface de 15.000 m², comme en l'espèce, constituaient une 'installation' au sens de ce texte, et que seule la DRIRE aurait pu se livrer à l'interprétation requise, si elle avait été sollicitée, ce qui n'avait jamais été le cas.

M. [M] a indiqué quant à lui que 'rien ne dit que l'activité de la société Ouest Alu relevait de la rubrique 2910' et a ajouté que 'seule la DRIRE aurait pu le dire, et que nul ne peut préjuger de ce qu'aurait été sa réponse' (cf p. 52 et 54).

S'agissant de la rubrique 2662, M. [N] estime incertaine, et sujette à interprétation, la question de savoir si le stockage d'éléments en polymères sur le site fait que l'établissement en relève.

L'expert [N] note que les halls 1 à 5 étaient équipés d'un dispositif de désenfumage.

La Socotec a catégoriquement estimé que les locaux sinistrés ne relevaient pas de l'obligation de disposer de portes coupe-feu (cf rapport [M] : dire annexe D2-1).

L'expert [M], auquel ont été soumis par la société Engie Home Services de nombreux dires relatifs à une possible incidence de l'état des bâtiments ou de leurs matériaux sur la propagation de l'incendie, ne retient pas une telle incidence, et clôt son rapport en indiquant avoir longuement répondu sur ce point, et que la seule thèse possible sur la propagation de l'incendie et d'une part, la conséquence de la déflagration qui avait produit un choc thermique important avec une température de 700 à 800°, et d'autre part des modes de propagation normaux de la chaleur qui avait trouvé dans la sous-face des panneaux de toiture et dans l'ensemble de la charpente métallique de bons vecteurs (cf rapport p. 65).

Au vu de ces conclusions, dégagées par l'expert à partir de ses propres analyses et conclusions mais aussi de la prise en compte du rapport de M. [N], et en l'absence d'élément probant, il n'y a pas lieu de retenir une quelconque responsabilité de la société Ouest Alu dans la propagation de l'incendie, ni donc de laisser à sa charge tout ou partie des conséquences dommageables du sinistre qui a ravagé son site.

¿ la responsabilité de l'architecte [K] [F]

La société Engie Home Services estime engagée la responsabilité du maître d'oeuvre pour manquement à son devoir de conseil envers sa cocontractante Ouest Alu, pour ne pas avoir conseillé à celle-ci de mettre en place des cloisons coupe-feu et un dispositif d'évacuation des fumées, et elle demande à être garantie de toute condamnation par M. [F] et son assureur la MAF.

Il ressort des productions, et des rapports d'expertise, que le site industriel exploité aux Herbiers par la société Ouest Alu comprend six halls, cinq réalisés en 1973 et le sixième en 2002, pour l'édification duquel M. [F] est intervenu en qualité de maître d'oeuvre, non seulement afin de déposer le permis de construire du bâtiment, comme il le soutient et qu'il en a convaincu les premiers juges, mais également ainsi qu'il ressort du contrat d'architecte conclu avec Ouest Alu (sa pièce n°3), pour établir les études d'esquisse, l'avant-projet sommaire, l'avant-projet détaillé, le projet de conception générale et l'assistance du maître de l'ouvrage à la passation des marchés, pour des honoraires de 4,10% du marché soit de 24.600 euros HT.

Le périmètre de sa mission contractuelle ne portait aucunement sur les halls 1 à 5.

Il résulte des indications non contredites du rapport de M. [M] (p. 30) que les halls 1 à 5 communiquent entre eux, et que le hall n°6 est séparé des autres par un bardage métallique.

Le sinistre ne concerne pas le hall n°6, qui n'a pas été affecté par l'incendie, et dont il n'est ni démontré, ni prétendu, que l'incendie provenait.

La société Engie Home Services ne justifie d'aucun élément probant à l'appui de son affirmation qu'à l'occasion de sa mission relative au hall n°6, l'architecte aurait dû soit consulter la DRIRE, soit conseiller à sa cocontractante Ouest Alu de le faire, relativement à la conformité aux normes anti-incendie des autres halls, édifiés presque trente ans plus tôt, sur lesquels il n'intervenait pas et dont rien n'établit qu'ils étaient impactés par la construction du hall n°6, distinct, autonome et séparé d'eux, particulièrement du chef, ici en cause, de leur résistance au feu, de leur aptitude à communiquer un incendie, ni plus généralement de leur conformité aux normes en matière de sécurité incendie.

Il est significatif à cet égard de constater que le gigantesque incendie qui a ravagé le site de l'entreprise sur 17.000 m² ne s'est aucunement communiqué au hall n°6.

Aucun des experts n'exprime l'avis que la responsabilité de M. [F] dans le sinistre du 8 mars 2006 pourrait être engagée en quoique ce soit.

M. [N] écrit, à l'inverse, que 'Monsieur [F], à l'occasion de l'étude d'une extension de l'usine en 2002, avait pris soin d'examiner l'application de la loi sur les installations classées' (cf rapport p.16).

Le conseil a été manifestement donné en 2002 à la société Ouest Alu -à qui l'expert [N] écrit que cette démarche incombait- de consulter la DRIRE au titre de la conformité du hall n°6 à la législation relative aux installations classés, puisqu'il ressort des pièces n°3, 4 et 5 de M. [F] que le président directeur général de la société Ouest Alu avait informé par courrier du 4 avril 2002 la DRIRE de son projet de construire un nouveau bâtiment de 1.780 m² afin de stocker des profils aluminium et de miroiterie et de construire des murs-rideaux, en lui envoyant une copie du projet et en lui demandant si cette construction entrait dans le champ d'application de la législation sur les bâtiments classés et s'il devait faire une déclaration réglementaires, puis que suite à la réponse de la DRIRE lui demandant des explications et pièces, il avait transmis les unes et les autres par courrier du 28 mai 2002, ce qui établit le respect par l'architecte du chef du hall n°6 de son obligation de conseil invoquée par l'appelante.

Celle-ci ne démontre pas qu'alors que sa mission ne portait nullement sur ces bâtiments, M. [F] aurait néanmoins dû prodiguer à sa cocontractante un quelconque conseil du chef des halls 1 à 5.

Il n'existe aucun lien avéré de causalité quelconque entre l'incendie ni l'ampleur de ses conséquences dommageables, et le fait que M. [F] ne prouverait pas avoir conseillé en 2002 à la société Ouest Alu d'effectuer une démarche auprès du service des installations classées de la DRIRE, l'obligation de conseil pesant sur le professionnel s'appréciant en considération de sa mission, laquelle ne concernait en rien les halls 1 à 5, au sujet desquels il n'avait nul motif de dispenser un conseil, et la question de l'incidence d'une absence de conseil au titre de démarches relatives au hall n°6 étant inopérante puisque celui-ci est étranger au sinistre.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formulées contre M. [F] et son assureur.

* sur les préjudices

L'auteur d'un dommage est tenu à la réparation intégrale du préjudice causé, de telle sorte qu'il ne puisse y avoir pour la victime ni perte, ni profit.

Il a été dit à l'occasion de l'examen des fins de non-recevoir opposées par l'appelante à la société Ouest Alu comme à la société AXA France IARD, que le protocole transactionnel en vertu duquel Ouest Alu a reçu des indemnités de son assureur était sans incidence sur son droit à réparation, comme sur celui de K. Line, bénéficiaire de la garantie 'pertes d'exploitation' consécutive à un sinistre affectant les locaux d'Ouest Alu;

La seule incidence tient à ce qu'AXA France IARD, co-assureur et apériteur, est subrogée dans leurs droits envers la société Engie Home Services, entièrement responsable des conséquences dommageables du sinistre, à hauteur des sommes qu'elle justifie leur avoir versées en vertu du contrat d'assurance.

Le préjudice consécutif au sinistre a été chiffré contradictoirement par l'expert judiciaire [Z], commis à cette fin.

Ses analyses et conclusions, solidement argumentées, sont convaincantes et ne sont pas contredites, y compris par la note critique produite par l'appelante, aux objections desquelles le rapport répond.

L'expert judiciaire caractérise le lien de causalité direct entre le sinistre et les pertes d'exploitation qu'il retient, et la circonstance qu'il ait modifié sur certains points sa position de ce chef, comme sur d'autres (cf p. 36 ; de même que p. 54, 60, 61) après avoir reçu des parties pièces et explications dont il écrit qu'elles ont 'conforté le lien entre les pertes alléguées et le sinistre' jusqu'alors invoqué sans suffisamment de précision, loin de disqualifier ses conclusions, témoigne au contraire de ce qu'elles ont été élaborées en tenant compte des observations des parties, et dans un esprit ouvert et non arrêté, comme il sied à un expert judiciaire.

L'appelante n'est pas fondée à reprocher à l'expert de n'avoir pas retenu qu'une partie de la diminution du chiffre d'affaires d'Ouest Alu avait pour cause non pas l'arrêt de son exploitation induite par l'incendie mais le transfert, antérieur, d'une partie de son activité à une autre entreprise du groupe, en l'occurrence Prima, dans le cadre d'une réorganisation engagée au sein du Groupe Liebot, alors que M. [Z] a examiné cette argumentation et a estimé qu'elle n'était pas vérifiée (p.60,61), sans qu'il soit rapporté d'élément contredisant cette position.

La société Engie Home Services reproche également sans pertinence à M. [Z] de ne pas avoir tenu compte des économies sur charges variables, alors qu'il a réclamé les pièces comptables pour les intégrer et qu'il en a tenu compte (cf rapport p. 35).

Elle est de même mal fondée à soutenir que les pertes d'exploitation ne concernent pas la société K. Line, alors qu'il a été dit que la police stipule au profit de celle-ci une extension de la garantie 'pertes d'exploitation'.

Quant à la société Prima, elle ne formule aucune demande, de sorte que la question de ses pertes d'exploitation consécutives au sinistre ne se pose pas.

Le tribunal a pertinemment indemnisé les dommages matériels à la somme totale de (3.785.513 + 3.786.485 + 2.338.079) = 9.910.077 euros au titre des dommages aux bâtiments, aux matériels et aux marchandises chiffrés par voie d'expertise, et il a alloué à raison cette somme à la compagnie AXA, subrogée dans les droits de son assurée, qu'elle avait indemnisée pour ces montants.

Pour ce qui est des dommages immatériels, la société Engie Home Services n'est pas fondée à prétendre les voir cantonner à la somme d'1.291.000 euros au vu de considérations inopérantes tirées de sa lecture du contrat d'assurance.

Ces dommages s'établissent au vu des conclusions de l'expert [Z] et des productions à la somme totale de 18.256.000 euros.

Compte-tenu de l'indemnisation de 13.683,036 euros versée par la société AXA France IARD en vertu du contrat d'assurance, c'est à bon droit que le tribunal a condamné la société Engie Homme Services solidairement avec ses assureurs Allianz et HDI à payer

* à AXA France Iard, subrogée dans les droits de ses assurées, 23.593.113 euros

* à Ouest Alu : 2.745.000 euros

* à K. Line : 1.911.000 euros

en disant que ces deux compagnies ne pouvaient être tenues que dans les limites de leur contrat, et le jugement sera confirmé de ces chefs.

S'agissant de la chaudière, c'est à raison que les premiers juges ont autorisé la société Ouest Alu à en disposer librement, dès lors que les causes techniques ont été établies par voie d'expertise d'une façon qui n'est ni contredite, ni susceptible d'être remise en cause par la voie d'une nouvelle mesure technique que personne n'a sollicitée.

La société Engie Home Services qui, en toute connaissance du caractère onéreux des frais de garde de cet élément, s'est catégoriquement opposée après le dépôt du rapport d'expertise à sa destruction (cf pièces n°10 et 11 de Ouest Alu) au motif qu'il était hors de question de laisser disparaître un élément de preuve, a été pertinemment condamnée à rembourser ce coût, qui est une conséquence directe du sinistre, et la société Ouest Alu est fondée à solliciter l'actualisation de cette indemnisation à la somme, justifiée sur factures (ses pièces n°51 à 55), de 101.166,20 euros selon décompte arrêté au 31 décembre 2021.

* sur les intérêts

Le tribunal a fixé à bon droit le point de départ des intérêts moratoires à la date des premières conclusions ventilant le préjudice invoqué, et le jugement sera confirmé de ce chef.

La capitalisation des intérêts est de droit lorsqu'elle est sollicitée en justice, et le tribunal l'a ordonnée à raison.

* sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Les chefs de décision du tribunal afférents aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile sont pertinents et adaptés, et seront confirmés.

La société Engie Home Services succombe en son appel et supportera les dépens d'appel.

Elle versera en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité de procédure aux parties qu'elle a intimées et qui lui en réclament une, à l'exception de ses assureurs Allianz et HDI Global SE.

PAR CES MOTIFS

la cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:

DÉCLARE la société Engie Home Services irrecevable en sa prétention à voir déclarer non avenu le jugement rendu le 16 avril 2021 par le tribunal judiciaire de La-Roche-sur-Yon

REJETTE sa demande d'annulation de ce jugement

CONFIRME le jugement déféré sauf à porter par voie d'actualisation au 31 décembre 2021 de 70.897,73 euros à 101.166,20 euros le montant de la condamnation prononcée contre la société Engie Home Services au titre des sommes à payer à Ouest Alu du chef des frais de location d'un local pour entreposer la chaudière sinistrée

ajoutant :

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres ou contraires

CONDAMNE la SAS Engie Home Services aux dépens d'appel

LA CONDAMNE à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile :

* 30.000 euros à la société Ouest Alu

* 5.000 euros à la société K. Line

* 20.000 euros à la SA AXA France Iard

* 3.000 euros à [K] [F]

* 3.000 euros à la MAF

DIT n'y avoir lieu à autre indemnité de procédure

ACCORDE à maître LE LAIN et à maître NAVENOT, avocats, le bénéfice de la faculté prévue à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01590
Date de la décision : 21/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-21;21.01590 ?
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