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21/02/2023 | FRANCE | N°21/01445

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 21 février 2023, 21/01445


ARRÊT N°56



N° RG 21/01445





N° Portalis DBV5-V-B7F-GIOR















S.C.I. APREM



C/



E.U.R.L. [X] - IMMO





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 21 FÉVRIER 2023









Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 mars 2021 rendu par le Tribunal J

udiciaire des SABLES-D'OLONNE





APPELANTE :



S.C.I. APREM

[Adresse 3]

[Localité 4]



ayant pour avocat postulant Me François-Hugues CIRIER de la SCP CIRIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON













INTIMÉE :



E.U.R.L. [X] - IMMO

[Adresse 1]

[Localité 5]



aya...

ARRÊT N°56

N° RG 21/01445

N° Portalis DBV5-V-B7F-GIOR

S.C.I. APREM

C/

E.U.R.L. [X] - IMMO

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 21 FÉVRIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 mars 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire des SABLES-D'OLONNE

APPELANTE :

S.C.I. APREM

[Adresse 3]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me François-Hugues CIRIER de la SCP CIRIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

INTIMÉE :

E.U.R.L. [X] - IMMO

[Adresse 1]

[Localité 5]

ayant pour avocat postulant Me Jimmy SIMONNOT de la SELARL ADLIB, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par assignation en date du 17 juillet 2019, l'EURL [X] IMMOBILIER a fait citer à comparaître la S.C.I. APREM devant le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE à l'effet d'obtenir paiement de la somme de 5.000 euros au titre d'une commission de frais de négociation de la vente d'un immeuble et celle de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'EURL [X], par ses dernières écritures, a repris la teneur de sa demande introductive d'instance en portant sa réclamation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 2.500 euros.

La S.C.I. APREM concluait au débouté de l'EURL [X] IMMOBILIER de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et à la condamnation de cette dernière au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 29/03/2021, le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE a statué comme suit :

'Condamne la S.C.I. APREM à payer à l'EARL [X] IMMOBILIER la somme principale de 5.000 euros au titre de la commission due, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 24 décembre 2018 ;

Condamne la S.C.I. APREM à payer à l'EARL [X] IMMOBILIER la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêt ;

Rappelle que la présente décision est exécutoire à titre provisoire ;

Condamne la S.C.I. APREM en tous les dépens'.

Le premier juge a notamment retenu que :

- l'EURL [X] IMMOBILIER a conclu un mandat sans exclusivité avec la société SALSY concernant la vente d'un local commercial situé [Adresse 2] aux [Localité 5] moyennant le prix de vente de 100.000 euros et une rémunération de l'agence immobilière pour un montant de 5.000 euros toutes taxes comprises à la charge de l'acquéreur.

Le mandat de vente, non daté, a été signé par les co-contractants.

- L'EURL [X] IMMOBILIER a trouvé un acquéreur en la personne de la S.C.I. APREM, un compromis de vente étant signé entre les deux parties le 12 mars 2018, les acquéreurs revêtant le document de la mention « Lu et approuvé. Bon pour accord au prix de 105.000 euros frais d'agence incluse.

- le compromis de vente, page neuvième, stipulait que l'acquéreur financerait son acquisition pour un prix de 100.000 euros augmenté des frais d'acte pour 8.500 euros et de négociation immobilière pour 5.000 euros, soit globalement 113.500 euros, la durée de réalisation de la condition suspensive d'obtention du prêt étant fixée à 45 jours à compter de la signature du compromis de vente, soit une date d'échéance fixée au 26 avril 2018.

- aucun financement par un organisme bancaire ne devait intervenir au bénéfice de la S.C.I. APREM laquelle informait le 12 juillet 2018 l'EURL [X] IMMOBILIER de deux justificatifs de refus d'obtention de prêt, indiquant qu'elle se désistait de l'achat du bien.

- il convient d'observer que l'immatriculation de la S.C.I. APREM en cours de formation a été opérée le 16 avril 2018, publiée au BODAC les 23 et 24 avril 2018 et que les refus des deux organismes bancaires ont été notifiés les 13 juin et 6 juillet 2018 au vu des documents et informations fournis.

- la S.C.I. APREM n'a pas sollicité un prêt dans le délai imparti et sur la base du montant et des conditions prévues dans la stipulation du compromis de vente, s'agissant notamment de la demande présentée au CIC, informant l'EURL [X] IMMOBILIER le 12 juillet 2018 soit deux mois et demi après la date butoir fixée.

- la S.C.I. APREM ne peut davantage tirer profit de l'absence préalable d'immatriculation au registre du commerce étant rappelé qu'elle a déposé la demande de prêt au CIC le 29 mai 2018 soit un mois et demi après son immatriculation, contredisant ainsi sa propre argumentation tirée de l'absence d'immatriculation.

- la négligence fautive de la S.C.I. APREM est ainsi établie, dont l'activité est « l'acquisition et la mise en location de biens immobiliers » traduisant ainsi la compétence de ses gérants associés.

- la condition suspensive d'obtention de prêt est réputée acquise et la vente parfaite, la S.C.I. APREM ayant manifestement été défaillante dans l'exécution de ses obligations contractuelles. Elle sera condamnée au paiement des honoraires de négociation de la vente.

LA COUR

Vu l'appel en date du 04/05/2021 interjeté par la société S.C.I. APREM

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 19/01/2022, la société S.C.I. APREM a présenté les demandes suivantes :

'VU les articles 1er et 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970,

VU les articles 72 et 73 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972,

VU la jurisprudence citée,

VU les pièces communiquées,

INFIRMER le jugement rendu par le tribunal judiciaire des SABLES-D'OLONNE le 29 mars 2021, dans toutes ses dispositions ;

Et, statuant à nouveau,

- A titre principal,

JUGER que la société [X] IMMO n'a aucunement accompli l'ensemble de sa mission dans le cadre d'un contrat de mandat en cours de validité ;

- A titre subsidiaire

DÉBOUTER la société [X] IMMO de sa demande de condamnation de la S.C.I. APREM au paiement de la somme de 5 000,00 € au titre de sa rémunération ;

- A titre infiniment subsidiaire,

DÉBOUTER la société [X] IMMO de sa demande subsidiaire de condamnation de la S.C.I. APREM au paiement de la somme de 5 000,00 € à titre de dommages et intérêts ;

- En tout état de cause,

CONDAMNER la société [X] IMMO à payer à la S.C.I. APREM la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER la société [X] IMMO aux entiers dépens d'instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP CIRIER ET ASSOCIES, société d'avocats aux offres et affirmations de droit'.

A l'appui de ses prétentions, la société S.C.I. APREM soutient notamment que :

- à compter de la signature du compromis le 15 mars 2018, la S.C.I. APREM a engagé des démarches auprès de deux établissements bancaires distincts.

- elle a été immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LA ROCHE-SUR-YON le 16 avril 2018 et publiée au BODACC les 23 et 24 avril 2018.

- la société [X] IMMO était parfaitement au courant que la S.C.I. APREM n'était pas constituée lors de la signature du compromis de vente.

- à réception de son immatriculation, la S.C.I. APREM a repris contact avec les établissements bancaires, tant le CIC que la BANQUE POPULAIRE pour la constitution d'un dossier de prêt le 23 avril 2019

Cependant, les établissements bancaires sollicités ont refusé l'octroi du prêt.

- le 12 juillet 2018, M. [V] informait M. [X] de ces refus en y joignant les courriers des différents établissements.

- au principal, sur l'exercice de missions par la société [X] IMMO sans mandat en cours de validité, d'après le compromis de vente, le mandat aurait été établi au 12 mars 2018, soit le même jour que la date de signature du compromis de vente, alors que le professionnel a l'obligation de tenir le registre des mandats, par ordre chronologique, et de reporter le numéro d'ordre sur l'exemplaire remis au mandant.

- selon le registre des mandats communiqué par la société [X] IMMO, il ressort également cette date du 12 mars 2018, mais cela apparaît extrêmement douteux.

- la société [X] IMMO aurait ainsi agi en dehors de tout mandat, menant différentes diligences sans disposer d'un mandat en cours de validité..

- il paraît tout à fait impossible que la société [X] IMMO ait réussi à accomplir, dans une même journée, la signature d'un mandat « pour recherche et pour vendre » avec la société SALSY, fait visiter à la S.C.I. APREM les locaux, et fait signer le compromis de vente avec cette dernière, dès lors qu'elle avait organisé la visite du bien fin janvier 2018, permettant à la S.C.I. APREM d'être accompagnée par des artisans pour établir des devis de remise en état lors d'une nouvelle visite au mois de février 2018.

- le mandat ne débutant qu'à compter du 12 mars 2018, la société [X]-IMMO ne peut prétendre à une quelconque rémunération, ayant agi en dehors de tout cadre légal.

- à titre subsidiaire, si la validité de l'activité d'entremise de la société [X] IMMO était retenue, sur l'accomplissement des formalités d'obtention de prêt par la S.C.I. APREM,

aucune somme d'argent n'est due, à quelque titre que ce soit, à l'agent immobilier avant que l'opération pour laquelle il a reçu un mandat écrit ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte contenant l'engagement des parties.

Or, une opération ne peut pas être considérée comme étant définitivement conclue « en cas de défaillance de la condition suspensive, comme le refus de prêt sollicité par l'acquéreur ».

- le compromis de vente prévoit expressément que 'si la condition suspensive n'est pas réalisée dans le délai prévu, sans que ce défaut incombe à l'acquéreur et sauf renonciation par ce dernier à ladite condition dans la forme prévue, chacune des parties retrouvera sa pleine et entière liberté, sans indemnité de part et d'autre'.

- la S.C.I. APREM a requis, auprès des établissements bancaires CIC et BANQUE POPULAIRE, deux études de prêts le 20 mars et le 23 avril 2018, soit antérieurement à la fin de l'échéance de la condition suspensive, ce dont le tribunal n'a pas tenu compte.

- la S.C.I. APREM a parfaitement rempli les conditions pour mettre en oeuvre la condition suspensive, dans les délais impartis, impliquant de facto sa parfaite bonne foi dans l'opération.

- à titre infiniment subsidiaire, sur la méconnaissance par la société [X] IMMO de ses obligations de conseil et d'information et le rejet de sa demande subsidiaire de dommages et intérêts à hauteur de 5000 €, l'agent immobilier, intermédiaire professionnel, qui prête son concours à la rédaction d'un acte, après avoir été mandaté par l'une des parties, est tenu de s'assurer que se trouvent réunies toutes les conditions nécessaires à l'efficacité juridique de la convention, et ce même à l'égard de l'autre partie. Ce devoir de vérification a pour corollaire une obligation de renseignement et de conseil

- l'agence était parfaitement au courant que la S.C.I. APREM était 'en cours de constitution'

Il lui appartenait, en qualité notamment de rédacteur d'acte, d'octroyer un délai plus raisonnable à la S.C.I. APREM pour obtenir des réponses de la part des différentes banques, le délai de 45 jours étant impossible à tenir.

- la S.C.I. APREM n'a pu ainsi récupérer son extrait K-bis que le 18 avril 2018, soit très peu de temps avant la fin de l'échéance.

Or, il s'est simplement écoulé environ deux mois entre la publication au BODACC et la dernière réponse ferme et définitive de l'établissement bancaire BANQUE POPULAIRE.

Aucun dommages et intérêts ne sont dûs en l'espèce.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 20/10/2021, la société EURL [X] IMMOBILIER a présenté les demandes suivantes :

'Vu les articles 1589 et 1103 et suivants du code civil,

Vu l'article 6, alinéa 3, de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970,

Vu l'article 1178 ancien devenu 1304-3 du code civil,

Vu l'article 1382 ancien devenu 1240 du code civil,

Vu la jurisprudence citée,

Vu les pièces justificatives communiquées aux débats,

Vu les éléments précédemment développés,

Il est demandé à la cour d'appel de POITIERS de :

- CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 mars 2021 par le tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE ;

- CONDAMNER, en conséquence, la S.C.I. APREM à régler à la société [X] - IMMOBILIER la somme de 5 000,00 € (cinq mille euros), avec intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 24 décembre 2018, à titre de commission due, à titre principal, et à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi du fait du comportement fautif et déloyal de l'acquéreur,

à titre subsidiaire ;

- DÉBOUTER la S.C.I. APREM de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions contraires à celles de la société [X] - IMMOBILIER ;

- CONDAMNER la S.C.I. APREM à verser à la société [X] - IMMOBILIER la somme de 2 500,00 € (deux mille euros) à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel;

- CONDAMNER la S.C.I. APREM aux entiers dépens de l'instance'.

A l'appui de ses prétentions, la société EURL [X] IMMOBILIER soutient notamment que :

- la société [X] - IMMO est recevable et bien fondée à réclamer, à titre principal, sa commission de 5000 € dans la mesure où la vente est devenue parfaite.

- à titre subsidiaire, faute de conclusion de la vente, la société [X] - IMMO demande la condamnation de la S.C.I. APREM à l'indemniser de son préjudice à hauteur du montant de la commission.

- la S.C.I. APREM n'a pas sollicité un prêt dans le délai imparti et sur la base du montant et conditions prévus.

Elle a justifié tardivement, par mail du 12 juillet 2018 (soit plus de 2 mois et demi après l'échéance fixée), de démarches donnant lieu à des refus des banques.

- s'agissant de la banque CIC, le courrier de la banque CIC en date du 13 juin 2018, fait état d'une demande de prêt effectuée le 29 mai 2018 pour un montant de 150 000 €. Cette demande hors délai ne portait pas sur le montant total d'emprunt convenu dans le compromis de vente (113 500 €).

- s'agissant de la Banque Populaire, le courrier de la banque en date du 06 juillet 2018 évoquant le fait qu'une demande de prêt de 113 500 € sur une durée de 15 ans n'indique pas la date à laquelle la demande a été effectuée. On ignore également ce que contenait le dossier de demande de prêt déposé tardivement par la S.C.I. APREM, et si ce dossier était complet ou non.

- la S.C.I. APREM explique que dès le 20 mars 2018, elle a sollicité le CIC des [Localité 5] pour obtenir le financement prévu dans le compromis de vente.

Elle communique ainsi une proposition de financement du CIC du 20 mars 2018 qu'elle n'avait pas transmise avant la fin du délai prévu. En outre, cette demande porte sur un montant de 150 000 €, ce qui n'est pas conforme à son engagement.

- la S.C.I. APREM aurait pu, utilement conseillée, solliciter l'agence immobilière et le vendeur pour prolonger contractuellement le délai, si celui-ci n'était pas suffisant.

- il n'est étayé par aucune preuve que la constitution d'un dossier de prêt nécessitait une immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés.

- à la lecture des pièces adverses 5 et 6, on constate que la S.C.I. APREM n'a sollicité la BANQUE POPULAIRE que le 04 mai 2018 (plus de 15 jours après l'obtention de l'extrait K-BIS et 8 jours après le délai fixé dans le compromis de vente) et le CIC que le 16 mai 2018 (près d'1 mois après l'obtention de l'extrait K-BIS et 20 jours après le délai fixé dans le compromis de vente).

- la négligence fautive de la S.C.I. APREM est établie et la condition suspensive d'obtention de prêt doit être réputée acquise et la vente parfaite. Sa rémunération est donc due.

- le mandat de vente est parfaitement valable au vu du registre des mandats.

Ce mandat a été remis par l'épouse de M. [B] (Société SALSY) le 12 mars 2018 et le fait qu'il ait été signé le jour du compromis est légal et courant.

- les démarches entreprises préalablement à la signature du mandat, notamment la visite, ont été faites dans le cadre d'un mandat du 29 juin 2017 que M. [X] détenait en sa qualité d'agent immobilier au sein de l'agence AAZ IMMO, jusqu'à ce qu'il quitte l'entreprise le 27 février 2019 pour s'installer à son compte.

- subsidiairement, l'article 1304-3 du code civil prévoit que : 'la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement. La condition résolutoire est réputée défaillie si son accomplissement a été provoqué par la partie qui y avait intérêt'.

La « faute » du débiteur peut consister en une négligence fautive, un défaut de diligence, demande d'un prêt très supérieur à celui envisagé, ou au nom d'une S.C.I. en cours de constitution, sans avoir exercé la faculté de substitution.

- si l'agent immobilier ne peut exiger sa commission puisque l'opération n'est pas effectivement conclue, celui-ci peut néanmoins prétendre à des dommages et intérêts pour la perte financière subie. C'est en ce sens que le compromis de vente a été rédigé.

- le quantum de l'indemnité correspond au montant de la rémunération dont elle a été privée par la faute commise, dès lors que son préjudice consiste en la perte de son droit à rémunération.

- la S.C.I. APREM n'a pas été en mesure de démontrer qu'elle a sollicité un prêt conforme aux caractéristiques décrites dans la promesse de vente et dans le délai stipulé à l'acte.

Le refus de prêt ne résulte que de leur propre turpitude.

- on ignore le motif des refus d'octroi de prêt par les banques.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 10/10/2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le fond du litige :

L'article 1134 ancien du code civil dispose que :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi. »

Le principe de ces dispositions est repris désormais aux articles 1103 du code civil : ' les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits,' et 1104 du code civil 'les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi'.

L'article 1353 du même code dispose que 'celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation'.

L'article 1304 du code civil dispose que 'l'obligation est conditionnelle lorsqu'elle dépend d'un événement futur et incertain. La condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l'obligation pure et simple.

Elle est résolutoire lorsque son accomplissement entraîne l'anéantissement de l'obligation'.

L'article 1304-3 du Code civil précise que : 'la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement. La condition résolutoire est réputée défaillie si son accomplissement a été provoqué par la partie qui y avait intérêt'.

Il est en outre rappelé qu'aux termes de l'article 1589 du code civil, 'la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement récisproque sur la chose et sur le prix'.

En l'espèce, la société [X] - IMMO soutient avoir conclu un mandat de vente sans exclusivité non daté, pour une durée de 12 mois, avec la société SALSY, pour la vente d'un local commercial situé [Adresse 2] à [Localité 5], pour un prix de vente de 100 000 € et prévoyant une rémunération de l'agence immobilière à la somme de 5 000 € T.T.C. à la charge de l'acquéreur.

La S.C.I. APREM soutient que le mandat ne débutant qu'à compter du 12 mars 2018, la société [X]-IMMO ne peut prétendre à une quelconque rémunération, ayant agi en dehors de tout cadre légal.

Toutefois, la société [X] - IMMO communique aux débats son registre des mandats, faisant apparaître effectivement un mandat n°18-301 du 12/03/2018 conclu avec la Société SALSY pour la vente d'un local commercial en cause.

Le fait que ce mandat ait été signé le même jour que le compromis de vente n'entache pas sa régularité, et les opérations de visites antérieures pouvaient légitimement être pratiquées dans le cadre d'un mandat précédemment établi par le vendeur le 29 juin 2017 alors que M. [X] avait qualité d'agent immobilier au sein de l'agence AAZ IMMO.

S'agissant des obligations contractuellement souscrites par la S.C.I. APREM, la durée de réalisation de la condition suspensive d'obtention du prêt a été fixée à 45 jours à compter de la signature du compromis de vente, soit une date d'échéance fixée le 26 avril 2018 à 18h00, conditions que la S.C.I. acheteuse avait acceptées.

Elle ne justifie par aucune pièce de ce qu'elle aurait sollicité du vendeur ou de l'agence une modification du délai souscrit, aucune communication de sa part n'étant établie avant son mail du 12 juillet 2018, ou elle indiquait se désister de l'achat du bien et produisait deux justificatifs de refus d'obtention de prêt, alors même que la date d'échéance était dépassée de plus de 2 mois.

Elle n'est pas fondée à soutenir que le délai convenu pour solliciter le prêt, n'était pas été réaliste, alors qu'elle l'a accepté et que sa durée est usuelle, et conforme à celle requise pour obtenir la réponse d'un établissement financier.

En l'espèce, le compromis de vente prévoit expressément que 'si la condition suspensive n'est pas réalisée dans le délai prévu, sans que ce défaut incombe à l'acquéreur et sauf renonciation par ce dernier à ladite condition dans la forme prévue, chacune des parties retrouvera sa pleine et entière liberté, sans indemnité de part et d'autre'.

Le compromis stipule en outre que l'acquéreur 's'oblige à déposer une ou plusieurs demande de prêts' d'un montant global de 113 500,00 € au taux d'intérêt maximum de 1,5 % / an sur une durée de 15 ans, 'notamment auprès de la banque CIC ou tout autre organisme financier'.

Il résulte du même acte que : 'en revanche, si la non-obtention des prêts a pour cause la faute, la négligence, la passivité, la mauvaise foi ou tout abus de droit de l'acquéreur comme ne cas de comportements ou de réticences de nature à faire échec à l'instruction des dossiers ou à la conclusion des contrats de prêts, le vendeur pourra demander au tribunal de déclarer la condition suspensive de prêt réalisée, en application de l'article 1178 [devenu 1304-4] du code civil avec attribution de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de l'immobilisation abusive des biens à vendre. Dans cette éventualité, l'acquéreur devra également indemniser le mandataire du préjudice causé par cette faute... De plus, dans l'une et l'autre éventualité, une indemnité compensatrice de sa perte de rémunération restera due au mandataire, dans les conditions de forme prévues ci-après à la rubrique « négociation », l'opération étant définitivement conclue'.

La S.C.I. APREM produit un courrier de la banque CIC en date du 13 juin 2018, faisant état d'une demande de prêt effectuée le 29 mai 2018 pour un montant de 150 000 € qui avait été refusée au motif que ' après étude de votre dossier et de votre situation, nous avons le regret de ne pouvoir y réserver une suite favorable'.

En outre, elle produit un courrier de la BANQUE POPULAIRE en date du 06 juin 2018 évoquant une demande de prêt de 113 500 € sur une durée de 15 ans, sans indiquer la date à laquelle la demande avait été effectuée, la banque indiquant cette fois : 'les documents que vous nous avez fournis et les

informations que vous nous avez communiquées nous ont permis de réaliser une étude attentive de votre demande de financement. Nous sommes au regret de vous informer que les éléments du dossier ne permettent pas à notre établissement de réserver une suite favorable à votre demande de financement'.

Par application des dispositions de l'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, aucune somme d'argent n'est due, à quelque titre que ce soit, à l'agent immobilier avant que l'opération pour laquelle il a reçu un mandat écrit ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte contenant l'engagement des parties, et une opération ne peut pas être considérée comme étant définitivement conclue en cas de défaillance de la condition suspensive, comme le refus de prêt sollicité par l'acquéreur.

La S.C.I. APREM verse aux débats un courrier émanant de l'agence CIC des [Localité 5] en date du 20/03/2018 intitulé 'proposition de financement' par lequel l'établissement bancaire indiquait : 'nous avons le plaisir de vous communiquer notre proposition de crédit suite à votre demande de financement. Cette proposition est valable 30 jours. Elle n'est pas contractuelle et est faite sous conditions suspensives de l'instance de décision de notre établissement sur votre dossier...'

Toutefois, le montant du crédit sollicité était de 150 000 € au taux hors assurance de 1,77 % et cette demande n'était pas conforme aux conditions prévues au compromis , s'agissant d'une proposition d'un montant supérieur à celui de 113 500 € prévu, pour un taux maximum de 1,5 % l'an.

Il est par contre à noter que la question du défaut d'immatriculation au RCS de la S.C.I. appelante ne faisait pas l'objet de difficulté de la part du CIC.

Cet organisme fera ensuite référence à une demande en date du 29 mai 2018 dans son courrier de refus de crédit mentionnant toujours un montant demandé supérieur à celui prévu au compromis signé.

La SCI APREM justifie également avoir sollicité également, à une date cette fois non justifiée, le concours de la Banque Populaire Grand Ouest qui rejetait cette demande, sans toutefois faire état d'un défaut de transmission des éléments nécessaire à l'examen de la demande ni de remarque quant à la date d'inscription au RCS de la S.C.I. APREM.

Il résulte de ces éléments que la condition suspensive d'obtention du ou des prêts n'a pas été réalisée dans le délai contractuellement stipulé et ce, du fait de la SCI APREM, qui ne justifie pas avoir effectivement présenté à au moins un organisme bancaire dans le délai de 45 jours qu'elle avait souscrit une demande de prêt conforme aux stipulations du compromis.

La S.C.I. APREM a, de plus, attendu le 12 juillet 2018 pour indiquer par mail se désister de l'achat du bien et produire deux justificatifs de refus d'obtention de prêt.

Elle n'est pas au surplus légitime à soutenir un défaut de conseil de la part de la société [X]-IMMO , dès lors qu'elle ne justifie d'aucune démarche d'information de l'agence immobilière quant à ses difficultés d'obtention de prêt, aucune communication n'étant versé aux débats à ce titre, avant le mail transmis plus de 2 mois après la date limite d'authentification prévue au compromis.

En conséquence, il convient de retenir que le défaut de la réalisation effective de la vente faute d'obtention des prêts nécessaire trouve sa source dans la faute de la SCI APREM qui ne justifie pas d'avoir présenté dans le délai qu'elle avait accepté des demandes de prêts conforme aux dispositions de la promesse de vente, ce qui constitue une faute.

L'agent immobilier lui réclame à titre principal, sa commission, et à titre subsidiaire des dommages et intérêts en réparation du préjudice que lui cause sa faute.

Par application des dispositions de l'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, aucune somme d'argent n'est due, à quelque titre que ce soit, à l'agent immobilier avant que l'opération pour laquelle il a reçu un mandat écrit ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte contenant l'engagement des parties, et une opération ne peut pas être considérée comme étant définitivement conclue en cas de défaillance de la condition suspensive, comme le refus de prêt sollicité par l'acquéreur.

Si la rémunération du mandataire n'est pas due en tant que telle, faute de réalisation effective de la vente, la société EURL [X] IMMOBILIER peut légitimement prétendre à l'indemnisation de son préjudice résultant de sa perte financière, qu'il convient de fixer à la somme de 2500 €.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a condamné la S.C.I. APREM à payer à l'EARL [X] IMMOBILIER la somme principale de 5.000 euros au titre de la commission due, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 24 décembre 2018 , la S.C.I. APREM devant être condamnée à payer à l'EARL [X] IMMOBILIER à titre indemnitaire, la somme de 2500 €, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt.

Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de la S.C.I. APREM.

Il sera fait application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP CIRIER ET ASSOCIES, avocat.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner la S.C.I. APREM à payer à l'EURL [X] IMMOBILIER la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La somme allouée au titre des frais de première instance a été justement appréciée, le jugement entrepris devant être confirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a condamné la S.C.I. APREM à payer à l'EARL [X] IMMOBILIER la somme principale de 5.000 euros au titre de la commission due, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 24 décembre 2018 .

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la S.C.I. APREM à payer à l'EURL [X] IMMOBILIER la somme de 2 500 € à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt.

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

CONDAMNE la S.C.I. APREM à payer à l'EURL [X] IMMOBILIER la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE la S.C.I. APREM aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par de la SCP CIRIER ET ASSOCIES, avocat étant rappelé que les dépens de première instance restent répartis ainsi que décidé par le premier juge.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01445
Date de la décision : 21/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-21;21.01445 ?
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