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21/02/2023 | FRANCE | N°21/01435

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 21 février 2023, 21/01435


ARRÊT N°60



N° RG 21/01435



N° Portalis DBV5-V-B7F-GIOA















[G]

[R]



C/



[D]





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 21 FÉVRIER 2023





Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 avril 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire de SAINTES





APPELANTS :



Monsieur [W] [G]

né le 03 Juillet 1944 à [Localité 7] (28)

[Adresse 1]



Madame [E] [R] épouse [G]

née le 24 Avril 1946 à [Localité 5] (28)

[Adresse 1]



ayant tous deux pour avocat postulant Me Jean-Hugues MORICEAU de la SELARL E-LITIS SOCIÉTÉ D'AVOCATS, avocat au barreau...

ARRÊT N°60

N° RG 21/01435

N° Portalis DBV5-V-B7F-GIOA

[G]

[R]

C/

[D]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 21 FÉVRIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 avril 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire de SAINTES

APPELANTS :

Monsieur [W] [G]

né le 03 Juillet 1944 à [Localité 7] (28)

[Adresse 1]

Madame [E] [R] épouse [G]

née le 24 Avril 1946 à [Localité 5] (28)

[Adresse 1]

ayant tous deux pour avocat postulant Me Jean-Hugues MORICEAU de la SELARL E-LITIS SOCIÉTÉ D'AVOCATS, avocat au barreau de SAINTES

INTIMÉ :

Monsieur [U] [D]

né le 03 Janvier 1981 à [Localité 6] (59)

[Adresse 4]

ayant pour avocat postulant Me Mylène BONNET, avocat au barreau de SAINTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par acte authentique en date du 28 novembre 2014, M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] ont acquis de M. [U] [D], moyennant le prix de 258.000 €, un immeuble à usage d'habitation situé [Adresse 1].

Ce bien comprend notamment une piscine avec local technique dont il est mentionné que les travaux de construction ont fait l'objet d'une déclaration préalable suivie d'un arrêté de non opposition délivré au cours de l'année 2013, puis d'une déclaration d'achèvement et de conformité déposée par le vendeur au cours du mois de septembre 2014, ce dernier s'engageant à produire ces documents à l'acquéreur dans les plus brefs délais.

Apprenant que la déclaration préalable des travaux de construction de la piscine déposée par M. [D] le 14 février 2013 avait fait l'objet d'un arrêté d'opposition à projet le 4 mars 2013 en raison notamment d'une implantation de l'ouvrage en limite de propriété sans respect du retrait à 1,50 mètres de la limite séparative imposé par l'article UD7 du plan local d'urbanisme, M. et Mme [G] ont sollicité leur assureur protection juridique en vue d'une expertise amiable, qui a été réalisée le 25 mars 2016 par le cabinet ELEX au contradictoire de M. [D].

M. [D] a tenté de régulariser la situation par le dépôt successif de deux nouvelles déclarations préalables de travaux de construction de la piscine les 1er février et 6 mai 2016, cette dernière déclaration a fait l'objet d'une décision de non-opposition tacite à l'issue d'un délai d'un mois, retirée par arrêté du 5 août 2016 au motif réitéré d'un défaut de respect de la distance d'implantation de la piscine.

Par acte d'huissier délivré le 6 juin 2019 M. et Mme [G] ont assigné M. [D] devant le tribunal de grande instance de SAINTES pour obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes :

- 50.000 € à titre de dommages et intérêts,

- 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Par leurs dernières écritures, les époux [G] maintenaient leurs demandes initiales et demandaient en outre que le tribunal condamne M. [D], en sa qualité de gérant de l'EARL IDEM et de la S.C.I. LES TRACAS, à effectuer sans délai les formalités nécessaires au changement de son adresse et de celle du siège des sociétés à une adresse autre que celle de l'immeuble litigieux, sous astreinte de 1.000 € par jour à compter de la décision à intervenir.

En défense, M. [D] sollicitait que le tribunal :

- déclare irrecevables les demandes des époux [G] et subsidiairement les rejette,

- condamne in solidum les époux [G] à lui payer la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre celle de 4.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

- très subsidiairement ordonne une expertise de la piscine.

M. [D] versait en dernier lieu aux débats un extrait Kbis de l'EARL IDEM justifiant de la modification de l'adresse de son gérant.

Par jugement contradictoire en date du 09/04/2021, le tribunal judiciaire de SAINTES a statué comme suit :

'CONDAMNE M. [U]. [D] à payer à M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] la somme de VINGT MILLE EUROS (20.000 €) à titre de dommages et intérêts,

CONDAMNE M. [U] [D] à procéder à la modification de l'adresse du siège de la S.C.I. LES TRACAS dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte de 30 € par jour de retard pendant quatre mois passé ce délai,

DÉBOUTE M. [U] [D] de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,

CONDAMNE M. [U] [D] aux dépens de l'instance,

CONDAMNE M.. [U] [D] à payer à M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] pris ensemble la somme de TROIS MILLE EUROS (3.000 €) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile'.

Le premier juge a notamment retenu que :

- le dol emporte en principe la nullité du contrat mais n'exclut pas l'exercice par la victime des manoeuvres dolosives d'une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation.

- le compromis de vente signé par les parties le 12 septembre 2014 ne fait aucune mention du caractère irrégulier de la construction de la piscine et de l'arrêté d'opposition à cette construction rendu par la mairie de [Localité 9] le 4 mars 2013, notifié à M. [D] par courrier recommandé remis le 6 mars 2013. Or la présence d'une piscine apporte une plus-value notable à une transaction immobilière, si bien que le caractère illégal de cette construction est de nature à bouleverser l'économie du contrat.

- le caractère intentionnel de cette dissimulation, qui démontre également la conscience qu'avait M. [D] du caractère déterminant pour les acquéreurs des informations retenues, ressort de la déclaration mensongère portée à l'acte de vente du 28 novembre 2014.

- M. [D] soutient qu'il était légitime à ne pas faire état du caractère illégal de la piscine et à mentionner au contraire que sa construction avait été autorisée, dans la mesure où suite à l'arrêté d'opposition une modification de la déclaration préalable avait été déposée au mois de mars 2013 par M. [Y] [S], constructeur de la piscine, qu'il avait cru tacitement acceptée.

- toutefois, l'unique pièce destinée à démontrer l'existence de cette prétendue déclaration modificative est dépourvue de toute force probante, puisqu'il s'agit d'un document dactylographié intitulé « Attestation sur l'honneur », rédigé au nom de M. [S], sans en-tête, cachet ou justificatif établissant l'identité de son auteur.

- la réticence de M. [D] à communiquer une information qu'il

savait déterminante du consentement des acquéreurs à contracter aux conditions convenues et les manoeuvres utilisées pour la dissimuler sont donc avérées, et constituent une faute dolosive de nature à engager sa responsabilité délictuelle.

- en cas de dol, le préjudice réparable du cessionnaire, s'il ne demande pas la nullité du contrat, correspond uniquement à la perte d'une chance d'avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses.

- compte tenu de la dynamique du marché immobilier sur la commune de [Localité 9] et de la plus-value de 15 % généralement apportée par une piscine pour cette gamme de biens, il convient d'évaluer la perte de chance subie par les époux [G] à 50 % de cette plus-value, soit 20.000 €.

- sur la modification d'adresse, M. [D] produit un extrait Kbis de l'EARL IDEM délivré le 12 juin 2020 faisant ressortir une modification de l'adresse du gérant mais ne démontre cependant pas avoir procédé de même pour le siège de la S.C.I. LES TRACAS, si bien qu'il continue de domicilier cette société à l'adresse de l'immeuble vendu aux époux [G].

LA COUR

Vu l'appel en date du 04/05/2021 interjeté par M. [W] [G]

et Mme [E] [R] épouse [G] en ce que le jugement a condamné M. [U] [D] à payer à M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts en lieu et place des 50.000 € qui étaient sollicités à ce titre devant le tribunal judiciaire.

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 03/01/2022, M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] ont présenté les demandes suivantes :

'Vu les articles 1116 et 1382 du code civil dans leur rédaction antérieure à 2016,

Vu les dispositions de l'article 1792 du code civil,

- REFORMER le jugement du tribunal judiciaire de Saintes en date du 9 avril 2021 en ce qu'il a limité à la somme de 20.000 € les dommages et intérêts alloués aux époux [G]

- Statuant de nouveau de ce chef,

- CONDAMNER M. [U] [D] à verser aux époux [G] la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts

- DÉBOUTER M. [U] [D] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions

- Y ajoutant

- CONDAMNER M. [U] [D] à verser aux époux [G] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel

- CONDAMNER M. [U] [D] aux entiers dépens d'appel'.

A l'appui de leurs prétentions, M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] soutiennent notamment que:

- la déclaration préalable déposée en 2012 a fait l'objet d'un arrêté défavorable le 4 mars 2013.

M. [D] a délibérément menti dans l'acte du notaire, faisant état d'un arrêté de non-opposition délivrée au cours de l'année 2013 alors qu'il avait connaissance d'une opposition à déclaration préalable en date du 4 mars 2013.

- l'illégalité de l'ouvrage est avérée et M. [D] s'était engagé à régulariser la situation.

- il existe des problèmes d'écoulement et le système d'évacuation de la piscine n'a pas été construit dans les règles de l'art. Selon le pisciniste intervenu, le tuyau de la vidange piscine était raccordé avec le syphon de sol extérieur induisant un écoulement chez le voisin. Cela empêche le bon fonctionnement de la piscine,

- la régularisation de la piscine est impossible.

- il y a dol car M. [D] a caché aux acquéreurs que la piscine était illégale.

Sa demande avait fait l'objet d'une opposition le 4 mars 2013, résultant de l'utilisation d'un mauvais formulaire et surtout de ce que l'implantation de la piscine ne respecte pas les règles d'urbanisme en vigueur.

- l'article UD 7 prévoit « les piscines enterrées de plus de 0.90 m seront implantées à une distance au moins égale à 1.5m de chacune des limites ». Or, la piscine construite par le vendeur est située à moins de 50 cm de la limite séparative.

- les pièces versées ne sont pas probantes, notamment l'attestation du voisin qui indique ne souffrir 'd'aucune gêne et désagréments pour [leur] habitation malgré la limite non-respectée'.

- pour rendre l'ouvrage conforme, il aurait fallu déplacer le bassin.

- M. [D] prétend toujours devant la cour que son pisciniste aurait déposé une seconde déclaration, mais toujours sans verser le moindre justificatif de ce prétendu dépôt.

Or, M. [D] ne verse pas la moindre preuve, ni le moindre justificatif en dehors de l'attestation du pisciniste, rédigée a posteriori, alors que les demandes sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie qui en délivre récépissé.

- M. [D] ne pouvait pas prétendre qu'il avait obtenu une décision tacite d'acceptation.

Il était expressément informé de ce que valait le silence gardé par l'administration dès la réception de l'opposition le 4 mars 2013.

C'est donc en connaissance de cause qu'il a déclaré dans l'acte notarié qu'une décision de non-opposition avait bien été délivrée en 2013.

Or, les travaux n'ont jamais été autorisés et aucune décision de non-opposition n'a été obtenue.

- le dol est caractérisé, même s'il n'entraîne pas forcément la nullité du contrat, au choix de la victime qui peut faire réparer son préjudice.

- M. [D] justifie de ses démarches pour tenter de régulariser l'ouvrage illégal mais il savait que l'ouvrage ne pourrait jamais être régularisé.

- M. et Mme [G] étaient informés de la position de la mairie de [Localité 9] et le 23 août 2016, le maire de [Localité 9] leur adressait copie de l'arrêté portant retrait de la déclaration préalable déposée par M. [D].

- les époux [G] n'ont poursuivi aucune démarche puisqu'en l'état, il appert que la piscine ne pourra faire l'objet d'aucune régularisation.

-, las de supporter des coûts pour un ouvrage illégal et inutilisable, ils ont fait le choix de le détruire en 2020 pour cesser de payer une taxe foncière majorée en raison de l'existence de cet ouvrage.

- sur la garantie décennale, la responsabilité du vendeur au titre des articles 1792 et suivants du code civil serait mobilisable dès lors que la juridiction n'aurait pas retenu le dol.

M. et Mme [G] n'entendaient pas procéder aux réparations des désordres constatés lors de l'expertise amiable et rendant la piscine impropre à sa destination, s'agissant de dysfonctionnements ou non-fonctionnements du système de filtration.

Il s'agissait d'éléments d'équipement indissociables de la piscine, et aucun justificatif d'assurance n'a été fourni aux époux [G] malgré leur démarche en direction du fabriquant de la piscine en 2019.

- il n'y avait aucune demande formulée sous ce chef, pas plus qu'aujourd'hui devant de la cour puisque les époux [G] ne souhaitaient pas procéder aux réparations des désordres d'un ouvrage qui demeurerait illégal.

C'est la raison pour laquelle ils n'ont jamais sollicité aucune expertise judiciaire.

- sur la demande de dommages et intérêts, leur consentement a été vicié, sans qu'il puisse être tiré argument de la destruction de la piscine.

Ils ont supporté un coût supplémentaire de 4.708, 56 €, outre d'autres frais relatifs aux plaques à induction, à la climatisation, aux WC et à la porte du garage.

- s'ils avaient eu connaissance de l'illégalité de la piscine, ils n'auraient pas contracté dans les conditions fixées dans l'acte authentique de vente et auraient a minima négocié une nette diminution du prix, leur demande en paiement

d'une somme indemnitaire de 50 000 € étant justifiée, cette demande ne devant pas être minorée comme l'a fait le tribunal.

- à titre subsidiaire, la demande de dommages et intérêts, au visa de l'article 1611 du code civil est encore légitimée, faute d'une délivrance conforme.

- si la garantie de M. [D] était recherchée au titre de l'article 1792 du Code civil, il devrait à ce titre verser aux époux [G] les sommes nécessaires d'une part à la démolition de l'ouvrage litigieux mais en outre à la reconstruction d'un ouvrage de même nature conforme aux règles de l'art et aux règles de l'urbanisme, ce qui amènerait à une somme bien supérieure à celle de 50.000 €.

- il y a lieu de rejeter la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par M. [D].

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 17/09/2021, M. [U] [D] qui formait également appel du jugement en date du 02/07/2021 a présenté les demandes suivantes :

'Vu les dispositions légales susvisées et notamment les dispositions des articles 1116, 1382 et 1792 et suivants du code civil dans leur rédaction applicable à la cause,

Vu les pièces versées aux débats et pour les causes sus énoncées,

INFIRMER la décision rendue par le tribunal judiciaire de SAINTES en date du 9 avril 2021 en ce qu'elle a :

- retenu le dol de M. [U] [D],

- condamné M. [U] [D] à payer à M. [W] [G]

et Mme [E] [R] épouse [G] la somme de VINGT MILLE

EUROS (20.000 €) à titre de dommages et intérêts,

- condamné M. [U] [D] à procéder à la modification de l'adresse du siège de la S.C.I. LES TRACAS dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 30 € par jour de retard pendant quatre mois passé ce délai,

- débouté M. [U] [D] de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,

STATUANT DE NOUVEAU SUR LES CHEFS INFIRMES,

A titre principal,

DÉCLARER M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse

[G] mal fondés en leurs demandes, fins et prétentions,

En conséquence,

Les en DÉBOUTER purement et simplement,

CONDAMNER in solidum M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] à payer à M. [U] [D] la somme de 3.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

A titre subsidiaire,

CONSTATER que les demandes des époux [G] sont excessives,

CONSTATER la bonne foi de M. [U] [D],

En conséquence,

RÉDUIRE les demandes indemnitaires des époux [G] à de plus justes proportions,

DÉBOUTER les époux [G] de leur demande au titre des frais irrépétibles et des dépens,

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

CONDAMNER in solidum M. [W] [G] et Mme [E]

[R] épouse [G] à payer à M. [U] [D] la somme de 4.000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de l'instance'.

A l'appui de ses prétentions, M. [U] [D] soutient notamment que :

- dès leur entrée en jouissance, les époux [G] ne vont avoir de cesse de solliciter M. [U] [D], vendeur du bien, afin que celui-ci procède à la réparation de certains éléments.

- sur la piscine, M. [D] a déposé une déclaration préalable de travaux non-soumis à permis de construire en octobre 2012 (reçue en février 2013 par la Mairie de [Localité 9]).

Cette déclaration préalable a fait l'objet d'une opposition de la part du maire de la commune le 4 mars 2013 aux motifs :

* que l'imprimé utilisé était obsolète,

* que la piscine était implantée en limite de propriété et ne respectait donc pas les dispositions de l'article UD 7 qui fixe le retrait des limites séparatives à 1,5 m.

- M. [Y] [S] (constructeur de la piscine) a donc déposé une seconde déclaration préalable en mars 2013 en expliquant notamment les modalités d'implantation de la piscine par rapport aux limites de propriété.

- en l'absence d'opposition et de refus de la Mairie de [Localité 9], M. [D] a considéré que cette seconde déclaration avait fait l'objet d'une acceptation, de sorte que M. [D] a indiqué dans l'acte de vente qu'il s'engageait à fournir l'arrêté de non-opposition dans les plus brefs délais.

- le rapport d'expertise amiable, à l'exception de la régularisation de la piscine au niveau des règles d'urbanisme, balaye d'un revers de la main les griefs des époux [G]

- M. [D] a tenté à plusieurs reprises de régulariser la situation administrative de la piscine litigieuse en déposant de nouveau des déclarations préalables de travaux et ce avec l'autorisation expresse des époux [G] mais ces demandes ont été rejetées.

- sur la prétendue responsabilité du vendeur pour dol, celui-ci ne se présume pas et doit être prouvé.

M. et Mme [G] doivent rapporter la preuve de manoeuvres dolosives, mais cette preuve n'étant pas établie faute de dissimulations délibérées.

- M. [D] a considéré que la seconde déclaration avait fait l'objet d'une acceptation, dès lors qu'il n'avait pas reçu d'opposition à la seconde déclaration, la piscine ayant été déclarée à l'administration fiscale.

- par la suite, il a tenté à plusieurs reprises de régulariser la situation administrative de la piscine litigieuse.

S'il finissait par obtenir une autorisation tacite en juin 2016, il s'est vu notifié par lettre en date du 22 juin 2016, un retrait de cette autorisation.

L'ensemble de ces mesures persuade de sa bonne foi, alors que M. et Mme [G] ne semblent avoir effectué aucune démarche pour que la situation administrative de la piscine soit régularisée.

- les refus pouvaient être contournés par M. et Mme [G] car ils sont propriétaires de l'immeuble et que l'implantation de la piscine se situe à 0,85 cm du terrain naturel soit dans les limites posées par les règles d'urbanisme.

- ils ont fait tout ce qui est en leur pouvoir pour que la régularisation de la piscine soit impossible et ont fait procéder à sa destruction, ce qui démontre qu'ils n'avient pas fait de son existence un élément déterminant de leur consentement.

- il y a lieu de les débouter de leurs demandes fondées sur le dol.

- sur la prétendue garantie décennale du vendeur, et alors que n'est pas invoquée la garantie des vices-cachés compte tenu de sa prescription, ils ne recherchent pas la responsabilité du professionnel. D'une part la prétendue illégalité de la piscine est régularisable, d'autre part les dysfonctionnement avancés ne sont pas établis et les éventuels défauts liés à l'évacuation et au système de filtrage ne compromettent aucunement la solidité de l'ouvrage, ni ne le rendent impropre à sa destination dès lors qu'il est toujours possible de se baigner.

- le système d'évacuation et de filtrage d'une piscine doit être considéré comme un élément d'équipement de l'ouvrage principal relevant de la garantie de bon fonctionnement.

- si le dol est écarté, M. [U] [D] ne pourra pas voir sa responsabilité recherchée sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil.

- à titre subsidiaire sur la demande de dommages et intérêts, M. et Mme [G] ne pourraient demander que soit le coût pour supprimer la piscine, soit le coût pour la mettre en conformité la piscine, et au besoin un éventuel préjudice de jouissance.

Ils ne justifient pas d'un préjudice à hauteur de 50.000,00 euros et il conviendra de réduire leurs demandes indemnitaires à de plus justes proportions.

- la procédure est abusive et une somme de 3000 € est sollicitée à ce titre.

- postérieurement au jugement de première instance, M. [D] a justifié du

changement de siège de la S.C.I. LES TRACAS et le jugement doit être infirmé de ce chef.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Par ordonnance en date du 20 juillet 2021, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des procédures portant les RG N°21/02062 et RG N°21/1435 et dit que la présente procédure se poursuivrait sous le numéro RG N°21/1435.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 10/10/2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'existence de manoeuvres dolosives et leurs conséquences :

L'article 1116 du code civil dans sa version applicable au présent litige dispose que 'le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.

Il ne se présume pas et doit être prouvé'

L'article 1109 du même code dispose que 'il n'y a point de consentement valable, si le consentement n'a été donné que par erreur, ou s'il a été extorqué par violence ou surpris pas dol'.

L'article 1382 du même code civil dispose que 'tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer '.

Il est de jurisprudence assurée que la victime de manoeuvres dolosives peut exercer, outre une action en annulation du contrat, une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du dommage qu'elle a subi.

Cette victime peut donc, à son choix, faire réparer le préjudice que lui ont causé les manoeuvres de son cocontractant par l'annulation de la convention et, s'il y a lieu, par l'attribution de dommages-intérêts, ou simplement par une indemnisation pécuniaire, lorsque les manoeuvres pratiquées par une des parties sont telles, qu'il est évident que sans ces manoeuvres l'autre partie n'aurait pas contracté.

En l'espèce, par acte sous seing privé en date du 12 septembre 2014, est intervenue la vente sous conditions suspensives par M. [D] aux époux [G], d'un bien immobilier à usage d'habitation sis [Adresse 1] avec pour désignation :

'une maison d'habitation élevée sur simple rez-de-chaussée comprenant un salon/séjour avec coin cuisine équipée ouvrant sur une terrasse, un cellier, trois chambres, une salle de bains et un WC, garage, piscine avec local technique , figurant au cadastre, à savoir AT n° [Cadastre 2] et AT n° [Cadastre 3]"

Puis, l'acte authentique de vente par M. [D] au profit des époux [G] du bien immobilier en cause est intervenu le 28 novembre 2014 en l'étude de Maître [K], Notaire à MESCHERS l'acte authentique de vente.

A cet acte est porté la mention suivante :

'Travaux réalisés au cours de l'année 2013 :

Edification d'une piscine, d'un local technique, terrassement, pose de margelles et carrelage. Ces travaux ont été réalisés par la société [S] [Y] à [Localité 8].

Les travaux ont fait l'objet d'une déclaration préalable de travaux, l'arrêté de non opposition a été délivré au cours de l'année 2013 et le vendeur a déposé une déclaration d'achèvement et de conformité au cours du mois de septembre 2014.

Il s'engage à produire ces documents à l'acquéreur dans les plus brefs délais'.

Est annexée à l'acte de vente la facture de construction de la piscine par l'entreprise [S] [Y] pour un coût de 39.468 €.

M. [D] soutient avoir de bonne foi considéré qu'une seconde déclaration avait fait l'objet d'une acceptation, de sorte qu'il a indiqué dans l'acte de vente qu'il s'engageait à fournir l'arrêté de non-opposition dans les plus brefs délais.

Pour lui, la situation administrative de la piscine ne faisait l'objet d'aucune difficulté dès lors qu'il n'avait pas reçu d'opposition à la seconde déclaration, la piscine ayant été déclarée à l'administration fiscale.

Toutefois, et en premier lieu, le compromis de vente signé par les parties le 12 septembre 2014 ne fait aucune mention de l'arrêté d'opposition à cette construction rendu par la mairie de [Localité 9] le 4 mars 2013, notifié à M. [D] par courrier recommandé remis le 6 mars 2013.

Si M. [D] soutient que M. [Y] [S] son pisciniste aurait, selon attestation sur l'honneur de celui-ci, déposé dans la' boîte au lettre de l'urbanisme de [Localité 9] dans le mois de mars 2013" une demande de modification de la déclaration préalable dans laquelle il aurait expliqué les modalités d'implantation du projet, il ne verse aucune pièce probante lui permettant effectivement de justifier du dépôt de cette demande.

Or, l'article R 423-3 du code de l'urbanisme dispose que : ' le maire affecte un numéro d'enregistrement à la demande ou à la déclaration et en délivre récépissé dans des conditions prévues par arrêté du ministre chargé de l'urbanisme'.

M. [D] ne justifie donc ni du dépôt effectif d'une déclaration préalable modifiée, laquelle était de sa responsabilité et dont il ne pouvait se décharger sur un tiers, ni de l'obtention d'une autorisation de la part de l'autorité administrative, intervenant au surplus après un rejet.

C'est alors faussement que le vendeur a indiqué à l'acte de vente qu'un arrêté de non opposition avait été délivré au cours de l'année 2013,et fallacieusement qu'il s'est s'engagé à fournir ces documents à l'acquéreur dans les 'plus brefs délais', ce qu'il n'était pas en mesure de faire.

En l'espèce, l'autorité municipale avait le 4 mars 2013 motivé son rejet du fait d'une part que l'imprimé utilisé était obsolète, et surtout d'autre part que la piscine était implantée en limite de propriété et ne respectait donc pas les dispositions de l'article UD 7 du plan local d'urbanisme qui fixe le retrait des limites séparatives à 1,5 m.

Si M. [D] paraît contester cette analyse de la mairie de [Localité 9], il ressort effectivement du constat d'huissier de justice dressé le 5 septembre 2016 que 'Nous pouvons constater, le long de la limite séparative, un espace entre celle-ci et la piscine. Sur le côté gauche de la piscine, l'espace présente une largeur de l'ordre de 32,5 cm. De même sur le côté droit de la piscine, nous pouvons constater un écart de 30 cm'.

Nonobstant l'attestation d'un voisin, M. [X] qui indiquait ne pas subir de gêne du fait de cette situation, force est de constater que l'implantation de la piscine ne respectait pas les règles d'urbanismes applicables.

Il en est par la suite résulté que la demande de régularisation, présentée postérieurement à la vente par M. [D], sera rejetée par retrait en date du 22 juin 2016 d'une autorisation tacite au motif principal du défaut d'implantation de la piscine.

Il ressort de ces éléments que M. [D] ne pouvait soutenir lors de la vente qu'il bénéficiait d'une autorisation d'urbanisme dont il ne pouvait justifier, nonosbtant la déclaration faite aux services fiscaux dont la tâche n'est pas de vérifier le respect des dispositions du code de l'urbanisme.

Faute de pouvoir justifier du dépôt effectif d'une demande modifiée ni de l'obtention de l'autorisation y afférent, M. [D] a ainsi procédé, par ses affirmations non étayées à l'acte notarié et son engagement à produire un document qu'il savait ne pouvoir fournir, à des manoeuvres destinées à emporter le consentement de ses acquéreurs.

Son attitude postérieure à la vente ne saurait amoindrir ce comportement fautif, dès lors que le défaut d'implantation de la piscine ne pouvait permettre la régularisation de la situation, sauf à la détruire pour la déplacer.

La présence d'une piscine est une cause de plus-value conséquente d'un bien immobilier, étant rappelé son coût de construction et l'agrément qu'un tel équipement procure.

En conséquence, son illégalité prive le bien et ses acquéreurs d'une perspective de jouissance pérenne et modifie pour une part importante l'économie de la transaction.

En l'espèce, il ne peut être reproché à M. et Mme [G] d'avoir fait procédé à la destruction d'un équipement dont la présence ne pouvait être régularisée, au regard de la position réitérée de l'administration locale, dans le respect du PLU, et alors même que les acquéreurs supportait un surcoût fiscal, indépendamment des dysfonctionnements éventuels du bien.

Le jugement doit être en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu la faute dolosive de M. [D] , M. et Mme [G] étant légitimes à prétendre sur ce fondement à leur indemnisation, sans qu'il y ait lieu d'examiner leurs autres moyens.

S'agissant du montant de cette indemnisation, M. et Mme [G] ont subi d'une part une perte de chance conséquente de contracter à meilleur coût, étant considéré que la présence d'une piscine implique une plus-value de 15 % de la valeur du bien. D 'autre part, ils ont supporté le coût de la destruction de la piscine illicite et non régularisable, pour un montant de 4708,56 €.

Ces préjudices consécutifs au dol justifient une indemnisation de 20.000 euros.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné justement M. [U] [D] à payer à M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts au titre de leur indemnisation.

Sur l'obligation de modification d'adresse :

M. [D] justifie aux débats d'avoir procédé postérieurement au jugement entrepris à la modification de l'adresse du siège de la S.C.I. LES TRACAS selon courrier du 21 juin 2021, sans que cette demande soit poursuivie ou argumentée en cause d'appel, et il sera dit n'y avoir lieu désormais à cette condamnation devenue sans objet.

Sur l'abus de procédure :

Il y a lieu de rechercher l'existence d'éléments faisant apparaître non seulement le caractère infondé mais encore abusif de la procédure engagée, caractérisant des circonstances de natures à faire dégénérer en faute l'exercice du droit d'agir en justice.

En l'espèce il n'est pas démontré un abus du droit d'ester en justice, ni du droit d'appel, les demandeurs n'ayant pas fait dégénérer en abus leur droit de soumettre leur prétention à examen de justice.

La demande de dommages et intérêts formée à ce titre sera en conséquence écartée, par confirmation du jugement rendu sur ce point.

Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de M. [U] [D], également appelant.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner M. [U] [D] à payer à M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La somme allouée au titre des frais de première instance a été justement appréciée, le jugement entrepris devant être confirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris.

Y ajoutant,

CONSTATE qu'il a été procédé à la modification de l'adresse du siège de la S.C.I. LES TRACAS ordonnée par le tribunal.

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

CONDAMNE M. [U] [D] à payer à M. [W] [G] et Mme [E] [R] épouse [G] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE M. [U] [D] aux dépens d'appel, étant rappelé que les dépens de première instance restent répartis ainsi que décidé par le premier juge.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01435
Date de la décision : 21/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-21;21.01435 ?
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