ARRÊT N°42
N° RG 21/03648
N° Portalis DBV5-V-B7F-GOAK
[Y]
C/
MACIF
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 31 JANVIER 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 novembre 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire de NIORT
APPELANT :
Monsieur [P] [Y]
né le [Date naissance 3] 1970 à [Localité 6] (27)
[Adresse 1]
[Localité 4]
ayant pour avocat postulant Me Sébastien FOUCHERAULT de la SAS AVODES, avocat au barreau de DEUX-SEVRES
ayant pour avocat plaidant Me Clotilde COURATIER-BOUIS, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
MUTUELLE ASSURANCES DES COMMERÇANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE ET DES CADRES ET SALARIES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE - MACIF
[Adresse 2]
[Localité 5]
ayant pour avocat postulant Me Gaëtan FORT de la SCP FORT-BLOUIN-BOSSANT, avocat au barreau de DEUX-SEVRES
ayant pour avocat plaidant Me Myriam HOUFANI, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 24 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller qui a présenté son rapport
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
[P] [Y], passager d'un véhicule assuré auprès de la société Macif, a été victime le 2 août 1992 d'un accident de la circulation. Il a été hospitalisé puis en convalescence jusqu'au 5 mars 1995. Il est demeuré paraplégique des suites de cet accident.
Un premier rapport d'expertise du docteur [M] [R] missionné par la société Macif est en date du 24 mai 1993. Cet expert a conclu en ces termes :
'- I.T.T. du 02.03.1992 au 05.03.1993
- Consolidation le 05.03.1993
- Quantum doloris qualifié de 4/7 (QUATRE)
- Préjudice esthétique qualifié de 3/7 (TROIS)
- I.P.P, en DROTT COMMUN de 80 % (QUATRE-VTNGTS)
- nécessité d'une aide ménagère une heure par jour
- Réinsertion professionnelle possible au poste de travail occupé antérieurement à deux tiers de temps ;
- Existence d'un préjudice sexuel
- Préjudice d'agrément : abandon du moto-cross et de la mécanique moto ;
- Retour au domicile du père effectif
- Nécessité d'un aménagement des locaux (chambre, salle de bain, W.C. aménagé, aménagement de l'accès à la maison par un élévateur, véhicule automobile adapté, aménagement des aires de transferts) ;
- Soins futurs : pas de traitement médicamenteux, soins de rééducation à raison de 50 séances par an pour mobilisation des membres inférieurs, matériel pour sondages urinaires à usage unique'.
Une seconde expertise a été réalisée par le docteur [J] [E]. Cet expert a conclu en ces termes dans son rapport en date du 9 avril 1994 :
'I.T.T. du 2 août 1992 au 28 octobre 1993 ;
Consolidation 28 octobre 1993 ;
- I.P.P QUATRE VINGT CINQ POUR CENT (85 %) (paraplégie haute avec instabilité du tronc importante et troubles respiratoires).
Souffrances endurées 6/7
[...]
Préjudice esthétique 5/7
[...]
- préjudice sexuel.
Existence d'un préjudice professionnel : ne pourra reprendre les activités professionnelles qu'il avait avant l'accident et devra suivre une formation professionnelle après mise à niveau.
Préjudice d'agrément (tennis, moto-cross) justifié également par la perte des possibilités de tous loisirs nécessitant l'usage des membres inférieurs, ainsi que par les multiples sujétions que lui impose son état.
Nécessité d'un logement aménagé indépendant du logement paternel.
- nécessité d'un véhicule aménagé'.
[P] [Y] et la société Macif se sont postérieurement accordés sur l'indemnisation du préjudice subi. Le procès-verbal de transaction est en date du 28 novembre 1994. Il a été stipulé qu'au vu des rapports d'expertise, les parties avaient décidé de retenir une I.T.T. du 2 août 1992 au 30 août 1993, une I.P.P de 80 % et la nécessité d'une aide ménagère 3 heures par jour. Il a été convenu du versement :
- d'un capital de 2.416.952 F (368.461.96 €) déduction faite des provisions versées pour un montant de 175.000 F (26.678.58 €) ;
- d'une rente annuelle de 43.200 F (6585.79 €) à compter du 1er janvier 1995;
- de la somme de 79.200 F (12073.96 €) en règlement des arrérages échus du 5 mars 1993 au 1er janvier 1995.
[P] [Y] qui résidait chez son père s'est installé courant 1998 dans un logement indépendant et adapté à son handicap. Il a vendu ce logement le 8 mars 2012, puis a fait construire une maison de plain-pied sur un terrain qu'il avait acquis le 27 mai 2009.
Un second rapport d'expertise du docteur [J] [E] est en date du 24 octobre 2005. Il a conclu en ces termes :
'L'état de Monsieur [P] [Y] s'est aggravé depuis le 28 octobre 1993, date de consolidation précédemment fixée.
Le début de l'aggravation peut-être fixé au 1er août 2004 et son état, qui a nécessité trois interventions chirurgicales sur l'épaule gauche est encore évolutif.
A revoir en mai 2006, lorsque la date de consolidation de l'aggravation pourra être fixée.
Incapacité Temporaire Totale un mois.
Souffrances endurées 4/7 (moyennes dans l'échelle 0 à 7) justifiées par deux triturations et une intervention chirurgicale sous arthroscopie ainsi que par l'importance des douleurs pendant toute la période de non consolidation.
Il persistera vraisemblablement un préjudice d'agrément (ne peut plus pratiquer le ski en fauteuil comme il le faisait auparavant, ainsi que la chasse - il n'a pas repris son permis pour l'année 2004-2005).
Il a besoin de changer de véhicule (éventuellement contre un véhicule avec rampe d'accès, pouvant être conduit en fauteuil)
I.P.P. à évaluer en mai 2006".
Dans une note en date du 20 novembre 2006, cet expert a maintenu ses conclusions.
Le docteur [M] [R], de nouveau missionné par l'assureur, a établi un rapport en date du 29 mars 2007 dont les conclusions ont été contestées par [P] [Y].
Par ordonnance du 20 juillet 2007, le juge des référés du tribunal de grande instance de Versailles a sur la demande de [P] [Y] commis le docteur [L] [W] en qualité d'expert. Le rapport d'expertise n'a pas été produit.
Par acte du 6 février 2008, [P] [Y] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Niort. Par ordonnance du 5 septembre 2008, [A] [C] a été commis en qualité d'expert. Par ordonnance du 24 octobre 2008, [S] [X] a été désigné en remplacement de ce premier expert. Le rapport d'expertise est en date du 30 avril 2009. Les conclusions de cet expert ont été rappelées en ces termes dans un arrêt du 28 novembre 2018 de cette cour :
'* absence de déficit fonctionnel temporaire car les hospitalisations en rapport avec les épaules résultent de la tendinite métabolique
* consolidation de l'état de la victime au 11 mars 2009
* souffrances endurées cotées 4/7
* déficit fonctionnel permanent de 6 %
* retentissement professionnel car la victime doit bénéficier d'un travail protégé non seulement du fait des conséquences directes de la paraplégie mais également du fait des pathologies scapulaires (limitation des abductions actives et pas de port de lourdes charges)
* M. [Y] doit être en mesure de reprendre une activité d'informaticien sédentaire, uniquement sur clavier, sans possibilité de faire des montages d'installations ou de l'entretien
* il est probable que la persistance des contraintes mécaniques vont favoriser la lente dégradation avec tendinoplasties
* absence de préjudices esthétiques'.
Par jugement du 1er octobre 2010, le tribunal de grande instance de Niort a condamné la société Macif :
- à payer à [P] [Y] la somme de 277.225,92 €, soit :
- dépenses de santé actuelles : 98 € ;
- frais divers : 35.050 € ;
- dépenses de santé futures : 89.033,02 € ;
- frais de véhicule adapté : 132.044, 90 € ;
- souffrances endurées : 12.000 € ;
- déficit fonctionnel permanent : 9.000 € ;
- à lui verser une rente annuelle complémentaire au titre de l'assistance tierce personne de 8.400 € à compter du 11 mars 2009, réduite à 5.600 € dès livraison du fauteuil électrique et de la voiture aménagée.
[P] [Y] a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt du 28 novembre 2012, la cour d'appel de Poitiers a confirmé le jugement sur l'indemnisation des dépenses de santé actuelles, des frais divers, du déficit fonctionnel permanent et a infirmé le jugement pour le surplus. Elle a condamné la société Macif au paiement des sommes de :
- 16.846,82 € au titre des frais de tierce personne avant consolidation ;
- 21.025,72 € au titre de la perte de gains professionnels actuels ;
- 101.361 € au titre des dépenses de santé futures ;
- 50.000 € au titre de l'incidence professionnelle ;
- 162.406,73 € au titre des frais de véhicule adapté ;
- 156.900,74 € au titre des frais de tierce personne après consolidation ;
- 100.000 € au titre des souffrances endurées.
Elle a considéré que l'aggravation de l'état de santé devait être indemnisée par l'assureur à concurrence de 66 % du préjudice, devant être exclues les conséquences directes de la tendinite métabolique qui n'étaient pas directement résultées du traumatisme accidentel initial.
Par acte du 23 octobre 2015, [P] [Y] a assigné la société Macif devant le tribunal de grande instance de Niort. Il a sollicité l'indemnisation du préjudice résultant de la nécessité d'acquérir et d'aménager son logement, selon lui non encore réalisée.
La société Macif a avant dire droit demandé que soit ordonnée une mesure d'expertise.
Par ordonnance du 10 novembre 2016, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Niort a ordonné une mesure d'expertise architecturale et financière de la maison d'habitation de [P] [Y]. La mission a été confiée à [V] [D]. Par ordonnance du 16 juin 2017, [L] [K] a été commis en remplacement de ce premier expert. Le rapport d'expertise est en date du 8 janvier 2019.
[P] [Y] a postérieurement sollicité paiement de la somme de 533 963,70 € en réparation du préjudice lié à l'acquisition et l'aménagement de son logement.
La société Macif a à titre principal conclu au rejet de cette demande aux motifs que :
- le demandeur avait déjà été indemnisé de son préjudice par la transaction en date du 28 novembre 1994 ;
- toute action relative à l'indemnisation du préjudice initial était prescrite en application de l'article 2226 du code civil.
Elle a subsidiairement conclu à la réduction des prétentions formées à son encontre.
Par jugement du 22 novembre 2021, le tribunal judiciaire (anciennement tribunal de grande instance) de Niort a statué en ces termes:
'DECLARE IRRECEVABLES comme prescrites les demandes de M. [P] [Y] ;
CONDAMNE M. [P] [Y] aux dépens dont distraction au profit de Me Fort, avocat aux offres de droit, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, à l'exception du coût de l'expertise judiciaire;
CONDAMNE la MACIF à payer les frais d'expertise judiciaire de Monsieur [L] [K], selon rapport du 14 janvier 2019 ;
DIT n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire de ce jugement '.
Il a considéré que :
- la transaction n'avait porté que sur l'aménagement du logement paternel qu'occupait [P] [Y] et non celui du logement personnel de ce dernier ;
- le préjudice dont l'indemnisation était sollicitée était la conséquence directe de la paraplégie initiale et demeurait sans lien causal direct et exclusif avec l'aggravation ;
- la preuve n'était pas rapportée qu'un fauteuil électrique imposait des contraintes supérieures à celle d'un fauteuil manuel et que le précédent logement était inadapté à l'utilisation d'un tel fauteuil.
Il a pour ces motifs et par application de l'article 2226 du code civil, déclaré prescrite l'action.
Par déclaration reçue au greffe le 24 décembre 2021 et enrôlée sous le numéro 21/3648, [P] [Y] a interjeté appel de ce jugement.
Une seconde déclaration d'appel a été reçue au greffe le 7 février 2022 et enrôlée sous le numéro 22/341.
Par ordonnance du 15 février 2022, le conseiller de la mise en état a joint ces procédures.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 juin 2022, [P] [Y] a demandé de :
'Vu le jugement du tribunal judiciaire de Niort du 22 novembre 2021
Vu l'ancien article 2270-1 du code civil
Vu l'article 2246 du code civil
Vu le rapport d'expertise
Vu les pièces
DECLARER Monsieur [Y] recevable en ses fins moyens et conclusions
Y FAISANT DROIT
REFORMER le jugement en ce qu'il a :
Déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de M. [P] [Y],
Condamné M. [P] [Y] aux dépens dont distraction au profit de Maître FORT, avocat aux offres de droit, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du CPC
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire
Et en ce qu'il n'a pas :
Dit et jugé Monsieur [P] [Y] recevable et bien fondé en sa demande tendant à l'indemnisation des frais d'acquisition et d'aménagement de son logement,
Condamné la MACIF à verser à Monsieur [P] [Y], la somme de 533.963,70 € (cinq cent trente-trois mille neuf cent soixante-trois euros et soixante centimes), en réparation du préjudice lié à l'acquisition et à l'aménagement de son logement,
Condamné la MACIF à verser à Monsieur [P] [Y], la somme de 3.500,00 € au titre de l'article 700 du CPC,
Condamné la MACIF en tous les dépens de la présente instance et ce, dont distraction au profit de Maître Sébastien FOUCHERAULT, membre de la SAS AVODES, Avocats aux offres de droit, en application es dispositions de l'article 699 du CPC
Ordonné l'exécution provisoire du jugement à intervenir.
CONFIRMER la décision entreprise en ce qu'elle n'a pas retenu l'autorité de la chose jugée
STATUANT à nouveau
DIRE ET JUGER que l'action de Monsieur [Y] n'est pas prescrite
DIRE ET JUGER que l'action de Monsieur [Y] ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée
En conséquence
CONDAMNER la MACIF à verser à Monsieur [Y] les sommes suivantes:
- Acquisition du terrain : 120.000.00 €
- Frais de notaire : 9.101,72 €
- Lot gros-'uvre : 238.239,20 €
- Lot électricité : 24.984,44 €
- Lot isolation : 25.345,03 €
- Lot aménagement de placards : 3.700,02 €
- Lot carrelage : 15.749,92 €
- Lot chauffage : 10.720,94 €
- Lot Peinture : 13.728,00 €
- Lot Chape : 3.314,71 €
- Lot aménagement salle de bains : 15.034,20 €
- Lot aménagement cuisine : 24.803,98 €
CONDAMNER la MACIF à verser à Monsieur [Y] la somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNER la MACIF aux entiers dépens de l'instance' .
Il a exposé que son changement de résidence avait été le point de départ de l'aggravation de son préjudice, que le délai de prescription de 10 années de l'article 2270-1 ancien du code civil avait commencé à courir à compter de cette date, que ce délai avait été interrompu par l'assignation en référé expertise du 20 juillet 2007 et qu'il n'était pas expiré à la date de délivrance de l'assignation du 23 octobre 2015.
Il a soutenu que la société Macif, en sollicitant une mesure d'expertise alors même que la prescription était selon elle acquise, puis en formulant en cours d'expertise des suggestions d'indemnisation, avait renoncé à se prévaloir du bénéfice de la prescription.
Il a contesté que puisse être opposée l'autorité de chose jugée de la transaction, seul le coût d'aménagement du logement de son père chez qui il résidait ayant été indemnisé.
Il s'est prévalu du principe de l'indemnisation intégrale de son préjudice pour solliciter paiement du coût d'achat d'un terrain et d'édification d'une maison d'habitation adaptée. Subsidiairement, il a limité sa demande au surcoût de la construction imposé par l'aggravation de son état.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 juin 2022, la société Macif a demandé de :
'Vu les dispositions des articles 2044, 2052 du Code civil,
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré qu'il n'existait pas d'autorité de la chose jugée à la suite de la transaction intervenue entre Monsieur [Y] et la MACIF au 28 novembre 1994,
En conséquence,
Déclarer irrecevable Monsieur [Y] et le débouter de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la MACIF, ce dernier ayant d'ores et déjà été indemnisé de son préjudice initial résultant de sa paraplégie relative à l'accident de la circulation dont il a été victime le 2 août 1992 et qui comprenait l'indemnisation de son logement,
Vu les dispositions de l'article 2226 du Code Civil,
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu l'action de Monsieur [Y] prescrite concernant l'indemnisation du préjudice initial sur l'aménagement et l'acquisition de son domicile en application de l'article 2226 du Code Civil et débouter ainsi Monsieur [Y] de ses demandes et de son appel,
En conséquence,
Déclarer irrecevable Monsieur [Y] et le débouter purement et simplement Monsieur [Y] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la MACIF,
Débouter Monsieur [Y] de sa réclamation tendant à se voir indemnisé de l'acquisition et de l'aménagement de son domicile, ce dernier ne justifiant pas que l'acquisition et l'aménagement soient en relation avec l'aggravation de son préjudice et exclusivement en relation avec l'aggravation de son préjudice tel que constaté par le Docteur [X],
A titre subsidiaire, limiter l'indemnisation sur aggravation au titre des travaux spécifiques et surcoût d'agencement à la somme de 14 120,94 € outre 11,10 € de coût annuel pour le matériel spécifique correspondant à la chaise de douche englobante et les barres de relèvement,
Débouter Monsieur [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du CPC et confirmer le jugement entrepris,
Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la MACIF de sa réclamation au titre de l'article 700 du CPC,
Y faisant droit,
Condamner Monsieur [Y] à payer à la MACIF la somme de 6 000,00 € au titre de l'article 700 du CPC pour les frais de première instance et 6 000,00 € pour les frais irrépétibles devant la Cour,
Réformer le jugement entrepris en ce que la MACIF a été condamnée à payer les frais d'expertise de Monsieur [K],
Condamner en conséquence Monsieur [Y] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise de première instance et devant la Cour, dont distraction au profit de Maître FORT en application de l'article 699 du CPC'.
Elle a soutenu que la transaction, qui avait porté sur l'indemnisation de l'aménagement tant du logement parental que de celui de [P] [Y], avait autorité de chose jugée et rendait irrecevable l'action de ce dernier.
Elle a maintenu que l'action était prescrite, le délai de l'article 2226 du code civil ayant commencé à courir à compter de la date de consolidation, le 28 octobre 1993 et non postérieurement, le préjudice lié à l'aménagement du domicile étant la conséquence directe de la paraplégie initiale et non de l'aggravation. Elle a ajouté que les procédures de référé n'avaient pas porté sur ce point et n'avaient dès lors pas interrompu ou suspendu le délai.
Elle a contesté avoir renoncé au bénéfice de la prescription en ayant d'une part sollicité une mesure d'expertise, d'autre part en ayant transmis à l'expert des suggestions d'évaluation du coût d'aménagement du logement. Elle a exposé qu'elle s'était dans ses conclusions interrogée sur l'imputabilité des réclamations formulées, avait demandé que l'expert détermine si l'acquisition d'un nouveau bien immobilier était justifiée et en relation avec son handicap, qu'il décrive les travaux réalisés courant 1998, indemnisés en 1994 et indique s'ils étaient utiles à l'aménagement du lieu de vie de [P] [Y]. Selon elle, la mission sollicitée incluait une contestation des prétentions de l'appelant et ne valait dès lors pas renonciation au bénéfice de la prescription. Elle a ajouté que le rapport d'expertise avait établi que le préjudice allégué était en lien avec la pathologie initiale et non son aggravation.
Subsidiairement, elle a conclu au rejet des prétentions de l'appelant aux motifs :
- que l'aggravation subie consistait en une tendinite traumatique par l'usure de la coiffe sous les voûtes acromiales à la suite des microtraumatismes itératifs produits par les efforts de transfert lit, fauteuil roulant et voiture ;
- qu'il n'était pas établi que l'aménagement du logement était justifié par l'aggravation du préjudice ;
- qu'il n'établissait pas que le logement qu'il avait acquis en 1998 puis cédé en 2012 était inadapté à ses besoins ;
- qu'il n'était pas justifié que l'espace nécessaire à l'utilisation d'un fauteuil roulant électrique était supérieur à celui nécessaire à l'utilisation d'un fauteuil roulant manuel.
Elle ajouté plus subsidiairement que l'indemnisation devait se limiter aux aménagements rendus nécessaires par la seule aggravation du préjudice.
L'ordonnance de clôture est du 20 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 122 du code de procédure civile dispose que 'constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.
SUR L'AUTORITÉ DE CHOSE JUGÉE
Aux termes de l'article 1355 (anciennement 1351) du code civil : 'L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité'.
L'article 2044 du code civil, dans sa formulation applicable au 28 novembre 1994, définit en ces termes la transaction : 'La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître'. Il précise que : 'Ce contrat doit être rédigé par écrit'.
L'article 2048 du code civil dispose que : 'Les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu' et l'article 2049 que : 'Les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé'.
Aux termes de l'article 2052 alinéa 1er de ce code, 'Les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort'
Le procès-verbal de transaction en date du 28 novembre 1994 conclu entre [P] [Y] et la société Macif stipule notamment que :
'- Les conséquences corporelles de l'accident de circulation survenu le 2 AOUT 1992 dont a été victime Monsieur [Y] [P] ont été déterminées sur le plan médical par les Docteurs [R] et [E].
- Au vu des rapports déposés par ces deux médecins, l'un daté du 24 MAI 93 (Docteur [R]), et 1'autre du 9 AVRIL 94 (Docteur [E]), il a été décidé entre les parties de retenir pour le préjudice soumis au recours des organismes sociaux, les conclusions suivantes :
. I.T.T. du 2.8.92 au 30.8.93
. I.P.P. 80 %
. Nécessité d'une aide ménagère de 3 heures par jour
Les autres postes de préjudice ont fait l'objet d'une négociation.
- Il a été tenu compte de ce que la Caisse Régionale D'assurance Maladie d'ILE DE FRANCE avait alloué à Monsieur [Y], suite à cet accident, une pension d'invalidité d'un montant annuel de 20.503,22 F.
Il a été décidé que le préjudice subi par Monsieur [Y] [P] serait indemnisé comme suit :
1 - Règlement d'un capital de :
DEUX MILLIONS QUATRE CENT SEIZE MILLE NEUF CENT CINQUANTE DEUX FRANCS(2.416.952 F)
déduction faite des provisions versées pour un montant de :
CENT SOIXANTE QUINZE MILLE FRANCS (175.000 F).
2 - Versement d'une rente annuelle de:
QUARANTE TROIS MILLE DEUX CENTS FRANCS (43200 F)
à compter du ler JANVIER 1995
3 - Règlement des arrérages échus
du 5 MARS 93 au 1er JANVIER 95
SOIXANTE DIX NEUF MILLE DEUX CENTS FRANCS 79.200 F)
Cette rente sera payable trimestriellement, à terme échu, revalorisée conformément aux dispositions de l'article L 455 du code de la Sécurité Sociale et celles de la Loi du 5 JUILLET 1985.
Elle sera suspendue en cas d'hospitalisation supérieure à 30 jours.
Les droits des organismes sociaux ont été respectés, la MACIF en fera son affaire personnelle.
Il est donné acte à Monsieur [Y] [P] de réserves en cas d'aggravation de son état, entraînant un préjudice nouveau et distinct de celui présentement réparé'.
Un rapport d'inspection en date du 20 octobre 1994 établi par les agents de la Macif dont les termes ne sont pas contestés a précédé la conclusion de la transaction. Il y est notamment indiqué que :
'Entretiens avec Maître [O].
Après une discussion serrée, nous avons pu trouver un accord qui me parait très satisfaisant.
Après avoir examiné et décortiqué nos conclusions médicales respectives, nous avons décidé de retenir :
- un taux d'IPP de 80 %
- une aide-ménagère de 3 h par jour
- une tierce personne réglée sous forme de rente mais à compter du jour du retour au domicile, sot le 5 mars 1993
-un calcul des arrérages échus du 5.3.93 au 31.12.94, la rente prenant effet à compter du 1er jamvier 1995
- période d'ITT prise en considération 2.8.92 au 31.8.93, soit la période indemnisée par la GPAM
- frais d'aménagement du véhicule dans le futur, forfaitairement 100 000 F
- aménagement du logement, forfaitairement 150 000 F
-rente T.P suspendue en cas d'hospitalisation supérieure à 30 jours
Le compte se présente donc comme suit :
1) Préjudices soumis à recours
-ITT 57 814 F
- IPP 80 % X 25 000 2 000 000 F
- aménagement de l'habitat 150 000 F
- aménagement du véhicule 100 000 F
-tierce personne... mensuellement 3 600 F servis à compter du 5.3.93
- arérages échus de cette rente du 5.3.93 au 1.1.95, soit 22 mois 79 200 F
TOTAL 2 387 014 F
à déduire
- indemnités journalières 57 814 F
- capital pension 408 048 F
[...]
RESTE 1 921 152 F
2) Préjudices personnels
- Q. D. +P. E. +P. A. + préjudice sexuel 750 000 F
à déduire provisions 175 000 F
RESTE 575 000 F
TOTAL GENERAL 1 921 152 F + 575 000 F = 2 496 152 F
C'est donc cette dernière somme que nous réglerions en capital'.
L'appelant ne conteste pas les termes ce rapport. Il a indiqué en pages 4 et 5 de ces dernières écritures que :
'Le 28 novembre 1994, il a été signé un procès-verbal de transaction entre la MACIF et Monsieur [Y] qui l'indemnisait comme suit :
- Règlement d'un capital de 2.416.952 francs déduction faite des provisions versées pour un montant de 175.000 francs, se décomposant de la manière suivante :
o ITT : 57.814,00 Francs
o IPP 80 % : 2.000.000,00 Francs
o Aménagement de l'habitat : 150.000,00 Francs
o Aménagement du véhicule : 100.000,00 Francs
o Préjudices personnels : 750.000,00 Francs
o Déduction IJ et capital pension : 408.048Francs
- Versement d'une rente annuelle de 43.200 francs à compter du 1 er janvier 1995 ;
- Règlement des arrérages échus du 5 mars 1993 au 1 er janvier 1995 à hauteur de 79.200 francs'.
Le docteur [M] [R] avait dans son premier rapport dont la conclusion a été précédemment rappelée et qui a été visé au rapport d'inspection, indiqué que : 'Nécessité d'un aménagement des locaux (chambre, salle de bain, W.C. aménagé, aménagement de l'accès à la maison par un élévateur, véhicule automobile adapté, aménagement des aires de transferts)'.
Le docteur [J] [E] avait dans son premier rapport dont la conclusion a été précédemment rappelée et qui a aussi été visé au rapport d'inspection, conclu à la :'Nécessité d'un logement aménagé indépendant du logement paternel'.
Il se déduit du contenu et de la chronologie de ces documents que :
- l'indemnisation du coût d'un logement autonome avait été évoquée en sus de celui du logement paternel par les experts médicaux dans leurs rapports ayant servi de fondement à l'évaluation ;
- le rapport d'inspection ayant détaillé l'indemnisation des postes de préjudice renvoyait aux rapports de ces experts médicaux ;
- lors de la discussion avec la compagnie d'assurance, [P] [Y] avait été assisté d'un conseil avec lequel la discussion avait été 'serrée'.
Il sera observé que le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Niort avait, en page 3 de l'ordonnance du 10 novembre 2016, à l'occasion du rappel des prétentions des parties, indiqué que [P] avait estimé insuffisant 'l'octroi d'une somme de 22.867,35€ destinée davantage à l'aménagement du logement parental où il demeurait à l'époque qu'au financement de son logement indépendant en 1998".
Dès lors, l'indemnisation convenue de l'aménagement du logement, d'un montant non contesté de 150.000 F soit 22.867,35 €, avait pour objet l'aménagement du logement paternel et celui futur du logement autonome de [P] [Y].
Le procès-verbal de transaction a pour ces motifs, s'agissant de ce poste de préjudice, autorité de chose jugée rendant irrecevable l'action de [P] [Y].
Le jugement sera infirmé de ce chef.
SUR LA PRESCRIPTION
L'article 2270-1 ancien du code civil dans sa version applicable à la date de l'accident disposait que :'Les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation'.
L'article 2226 alinéa 1er du code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile dispose désormais que : 'L'action en responsabilité née à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé'.
[P] [Y] rattache sa demande indemnitaire, non à l'aggravation de son état constatée en août 2006 et considérée consolidée au 11 mars 2009, mais à une 'aggravation situationnelle' née de son emménagement dans un logement autonome.
L'aménagement de ce logement, qui avait été envisagé antérieurement à la transaction, est, ainsi que retenu par le premier juge, une conséquence directe de l'accident de 2 août 1992.
Par acte du 6 juin 2007, [P] [Y] avait demandé au juge des référés du tribunal de grande instance de Versailles de : 'Ordonner la désignation de tel médecin expert qui lui plaira, lequel devra, outre la mission habituelle, devra se prononcer sur l'aggravation médicale de Monsieur [P] [Y] consécutivement à son accident, sur la base du rapport déposé par le Docteur [E] et des certificats médicaux établis par les professeurs [G]-[H] et [N], et de dire s'il y a bien une relation directe et certaine entre la pathologie survenue au cours de l'été 2004 au niveau de l'épaule gauche qui correspond à un rhumatisme apatitique et l'accident survenu le 2 août 1992". La mission d'expertise ordonnée en suite de cette demande le 20 juillet 2007 n'a pas porté sur l'aménagement du logement.
Il était demandé dans l'assignation du 6 février 2008 au juge des référés du tribunal de grande instance de Niort de : 'Désigner tel médecin expert qu'il lui plaira qui, outre la mission habituelle, devra se prononcer sur l'origine de la pathologie dont souffre le blessé au niveau de l'épaule gauche, en s'appuyant pour se faire sur les certificats médicaux établis par les deux éminents spécialistes que sont les Professeurs [G] [H] et [N], dont la compétence est unanimement reconnue concernant les victime médullaires'. La mission d'expertise ordonnée en suite de cette demande le 5 septembre 2008 n'a comme précédemment pas porté sur l'aménagement du logement.
Le tribunal de grande instance de Niort puis la cour d'appel de Poitiers qui ont par jugement du 1er octobre 2010 puis arrêt du 28 novembre 2012 fixé l'indemnisation revenant à [P] [Y] en raison de l'aggravation de son état n'avaient pas été saisis d'une demande relative à l'aménagement du logement personnel.
Ces procédures n'ont dès lors pas eu d'effet interruptif ou suspensif de la prescription s'agissant de l'indemnisation du coût de l'aménagement du logement personnel.
Il s'ensuit que le délai de prescription des articles 2270-1 puis 2226 du code civil qui avait commencé à courir à compter du 28 octobre 1993, date de la consolidation, était expiré à la date de l'acte introductif de la présente instance, du 23 octobre 2015.
SUR LA RENONCIATION AU BÉNÉFICE DE LA PRESCRIPTION
L'article 2220 ancien du code civil disposait que : 'On ne peut, d'avance, renoncer à la prescription : on peut renoncer à la prescription acquise' et l'article 2221 ancien du même code que : 'La renonciation à la prescription est expresse ou tacite ; la renonciation tacite résulte d'un fait qui suppose l'abandon du droit acquis'.
L'article 2250 nouveau du code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 dispose que : 'Seule une prescription acquise est susceptible de renonciation' et l'article 2251 nouveau du même code que :
'La renonciation à la prescription est expresse ou tacite.
La renonciation tacite résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription'.
[P] [Y] a saisi le premier juge d'une demande d'indemnisation des frais d'acquisition et d'aménagement de son logement. Le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Niort a dans son ordonnance du 10 novembre 2016 rappelé en ces termes la demande de la société Macif :
'Par dernières conclusions d'incident...la MACIF demande auprès du juge de la mise en état de:
- Ordonner une expertise architecturale et désigner à cet effet tel expert qu'il plaira avec mission de:
1)- Dire si l'acquisition d'un nouveau bien immobilier de M. [Y] était justifiée et préciser très exactement le coût réel des travaux utiles à l'aménagement spécial du logement en fonction des besoins de M. [Y] liés à son handicap;
2°- Chiffrer très précisément les travaux utiles et indispensables pour les seuls besoins de l'adaptation;
3°- Se prononcer précisément sur les aménagements nécessaires au cadre de vie de M. [Y];
4°- Evaluer le surcoût de ces installations;
5°- Décrire les aides techniques, appareillages et systèmes domotiques nécessaires à la victime, en préciser le coût restant à charge et l'amortissement;
6- Dire enfin que 1'expert aura pour mission de se faire communiquer l'ensemble des documents liés aux aménagements du domicile de la victime avec un descriptif des lieux;
7°- Préciser les travaux réalisés dans la maison de M. [Y] en 1998 (réglés par la MACIF en 1994), préciser leur nature, dire s'ils étaient utiles à l'aménagement du domicile du lieu de vie de M. [Y]'.
Le juge de la mise en état a rappelé l'argumentation de [P] [Y]. Il a notamment indiqué que :
'M. [Y] s'oppose fermement, à titre principal, à l'expertise sollicitée, rappelant qu'il avait fait 1'acquisition en 1998 d'une maison...partiellement adaptée à son handicap...et ce alors qu'il n'avait bénéficié en 1994 que de l'octroi d'une somme de 22.867,35€ destinée davantage à l'aménagement du logement parental où il demeurait à l'époque qu'au financement de son logement indépendant en 1998. Il précise ainsi que sa demande actuelle ne correspond pas au préjudice déjà indemnisé en 1994 mais en est le complément qui n'avait pas été sollicité en 1994.
II argue en outre que la maison acquise en 1998 n'était plus adaptée à son état de santé et à 1'aggravation de celui-ci survenue à partir de 2004 et caractérisée par l'apparition d'une pathologie importante de l'épaule qui l'a conduit à vendre son logement et à se faire construire une maison de plain-pied pour éviter toute contrainte au niveau de l'épaule, limiter l'usure de la coiffe des rotateurs et prévenir ainsi toute nouvelle aggravation de son état".
La demande indemnitaire de [P] [Y] se rattachait, ainsi qu'exprimée, tant à l'accident qu'à l'aggravation de son état de santé qui avait été reconnue et indemnisée. Il ne peut dès lors être considéré que la société Macif, en sollicitant avant dire droit cette expertise qui avait pour finalité de décrire les aménagement du logement que pouvait notamment rendre nécessaires l'aggravation de l'état de santé de [P] [Y] et non son état initial consolidé, puis en ayant participé aux opérations de cette expertise qu'elle avait demandée, avait tacitement renoncé au bénéfice de la prescription.
La société Macif est dès lors fondée à se prévaloir de la prescription, s'agissant de la demande d'indemnisation du coût d'aménagement du logement de [P] [Y].
Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables car prescrite l'action de [P] [Y].
SUR LES DÉPENS
La mesure d'expertise architecturale et financière a été ordonnée sur la demande de la société Macif. Le premier juge a en conséquence justement laissé à la charge de cette société les frais de cette expertise. Pour le surplus, la charge des dépens de première instance incombe à [P] [Y]. Le jugement sera pour ces motifs confirmé de ces chefs.
La charge des dépens d'appel incombe à l'appelant. Ils seront recouvrés par Maître Gaëtan Fort conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
SUR LES DEMANDES PRÉSENTÉES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Le premier juge a équitablement apprécié n'y avoir lieu de faire application de ces dispositions.
Les circonstances de l'espèce ne justifient pas de faire droit aux demandes présentées sur ce fondement devant la cour.
PAR CES MOTIFS :
statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement du 22 novembre 2021 du tribunal judiciaire de Niort sauf en ce qu'il a retenu que l'action n'était pas irrecevable en l'absence d'autorité de chose jugée de la transaction en date du 28 novembre 1994 ;
y ajoutant,
REJETTE la demande de [P] [Y] tendant à faire constater que la société Macif avait renoncé au bénéfice de la prescription s'agissant de l'indemnisation du coût de l'aménagement de son logement ;
DIT que le procès-verbal de transaction en date du 28 novembre 1994 a autorité de chose jugée entre la société Macif et [P] [Y] du chef de l'indemnisation du coût de l'aménagement du logement de ce dernier ;
DECLARE irrecevables les demandes de [P] [Y] d'indemnisation du coût de l'aménagement de son logement par l'effet de l'autorité de chose jugée attachée à la transaction conclue avec la société Macif ;
REJETTE les demandes présentées en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [P] [Y] aux dépens d'appel qui seront recouvrés par Maître Gaëtan Fort conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,