ARRET N°53
JPF/KP
N° RG 22/00663 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GPY7
[D]
[Z]
C/
[D] VEUVE [R]
[Z]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 24 JANVIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/00663 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GPY7
Décision déférée à la Cour : jugement du 27 janvier 2022 rendu par le Juge des contentieux de la protection de LA ROCHE SUR YON.
APPELANTS :
Monsieur [F] [Z]
né le 04 Avril 1949 à [Localité 5] (85)
[Adresse 1]
[Localité 5]
Ayant pour avocat plaidant Me Sylvie MARTIN de la SELARL SYLVIE MARTIN, avocat au barreau de POITIERS.
INTIMES :
Madame [W] [D] veuve [R]
née le 20 Décembre 1940 à [Localité 6] (85)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Pauline DRIESSCHE, avocat au barreau de NANTES.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 16 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Monsieur Claude PASCOT, Président
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Claude PASCOT , Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE:
Suivant bail verbal conclu en 1979, à une date exacte qui donne lieu à discussion entre les parties, M. [F] [Z] occupe en qualité de locataire une maison d'habitation située [Adresse 1], appartenant désormais à Mme [W] [D] veuve [R], qui en a hérité de ses parents.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 novembre 2016, cette dernière a, au visa des articles 12 et 15 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989, notifié à son locataire un congé aux fins de reprise pour occupation personnelle, avec un préavis de six mois, expirant le 8 juin 2017.
Dans la mesure où M. [Z] se maintenait dans les lieux en dépit d'une sommation de déguerpir signifiée par huissier le 10 octobre 2018, Mme [R] l'a fait assigner devant le juge des référés par acte du 1er février 2019.
Par ordonnance de référé en date du 14 novembre 2019, le juge d'instance de la Roche-sur-Yon a constaté que le congé était conforme à la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et autorisé l'expulsion de M. [F] [Z], à défaut de départ volontaire dans le délai de deux mois après signification d'un commandement de quitter les lieux, en le condamnant au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en rejetant les autres demandes.
À la suite de l'appel interjeté par M. [Z], la cour d'appel de Poitiers a par arrêt en date du 27 octobre 2020, rectifié le 30 mars 2021, infirmé l'ordonnance en ses dispositions contestées et statuant à nouveau, a dit n'y avoir lieu à référé, en condamnant Mme [W] [D] veuve [R] à payer à M. [F] [Z] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par acte en date du 3 mars 2021, Mme [R] a fait assigner M. [Z] au fond, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon en validation du congé, expulsion et condamnation au paiement d'une indemnité de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 27 janvier 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon a:
- dit que le congé délivré le 29 novembre 2016 par Mme [W] [R] à M. [F] [Z] n'est pas valide,
- rejeté pour le surplus les demandes de Mme [W] [R],
- rejeté l'ensemble des demandes formées à titre reconventionnel par M. [Z],
-condamné Mme [W] [R] au paiement d'une indemnité de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Par déclaration en date du 9 mars 2022, M [Z] a relevé appel de ce jugement, en ses chefs expressément critiqués.
Mme [D] a également relevé appel le 29 mars 2022.
Une ordonnance de jonction a été rendue le 9 octobre 2022 entre les procédures RG 22 820 et 22 663.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 4 novembre 2022, M. [Z] demande à la cour :
-de déclarer son appel recevable et bien fondé,
-de confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection de le 27 janvier 2022 en ce qu'il a :
- dit que le congé délivré le 29 novembre 2016 par Mme [D] à M. [Z], locataire de la maison d'habitation sise [Adresse 1]) n'est pas valide ;
- rejeté les demandes de Mme [D] pour le surplus ;
- condamné Mme [D] à verser à M. [Z] la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Mme [D] aux dépens.
-d'infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection en ce qu'il a :
- rejeté l'ensemble des demandes formées à titre reconventionnel par M. [Z],
Statuant à nouveau,
-de fixer de façon rétroactive à la somme de 118,70 euros le montant mensuel du loyer devant être versé par M. [Z] en application des dispositions de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948,
-de condamner Mme [D] à lui verser la somme de 4.l09,10 euros correspondant l'écart existant entre le loyer versé mensuellement depuis mois de juillet 2018 et le loyer maximum pouvant lui être réclamé,
-de condamner Mme [D] à lui rembourser le coût des matériaux utilisés pour la rénovation du logement, pour une somme de 3.229,05 euros, cette créance étant incontestable, certaine, liquide et exigible comme en attestent les factures fournies,
-de condamner Mme [D] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement de 1'artic1e 700 du code de procédure civile.
-de condamner Mme [D] aux entiers dépens
-de débouter purement et simplement Mme [D] de l'ensemb1e de ses demandes, fins et conclusions.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 19 octobre 2022, Mme [D] demande à la cour :
- de la déclarer bien fondée en son appel,
- de confirmer le jugement du 27 janvier 2022 du juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de [Localité 5] en ce qu'il a :
-jugé que le bail en cours est soumis à la loi du 6 juillet 1989,
-rejeté l'ensemble des demandes formés à titre reconventionnel par M.[Z],
-d'infirmer le jugement du 27 janvier 2022 en ce qu'il a :
-dit que le congé délivré le 29 novembre 2016 par Mme [D] à M. [Z] locataire de la maison d'habitation sise [Adresse 1], n'est pas valide ;
-rejeté les demandes de Mme [D] pour le surplus ;
-condamné Mme [D] à verser à M.[Z] la somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
-condamné Mme [D] aux dépens.
Statuant de nouveau
A titre principal :
-de juger que le congé délivré à M.[Z] est justifié au regard de l'article 15 de la Loi du 6 juillet 1989 ;
-d'ordonner l'expulsion immédiate de M.[Z], de tous occupants de son chef ainsi que de ses biens ;
-d'ordonner à M.[Z] de justifier de l'acquit des charges locatives et de remettre les clefs ;
-d'autoriser le propriétaire à l'expulser des lieux avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, s'il y a lieu, faire constater et estimer les réparations locatives par un huissier de justice qui sera commis à cet effet, assisté, s'il l'estime utile, d'un technicien
-de séquestrer les effets mobiliers qui en sont susceptibles pour sûreté des loyers échus et des charges locatives
A titre subsidaire :
-de juger que le congé délivré à M.[Z] est justifié au regard de l'article 19 de la loi du 1er septembre 1948 et ne cause pas grief à M.[Z];
En conséquence,
-d'ordonner l'expulsion immédiate de M. [Z], de tous occupants de son chef ainsi que de ses biens ;
-d'ordonner à M.[Z] de justifier de l'acquit des charges locatives et de remettre les clefs ;
-d'autoriser le propriétaire à l'expulser des lieux avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, s'il y a lieu, faire constater et estimer les réparations locatives par un huissier de justice qui sera commis à cet effet, assisté, s'il l'estime utile, d'un technicien
-de séquestrer les effets mobiliers qui en sont susceptibles pour sûreté des loyers échus et des charges locatives
-de constater l'augmentation, à compter du 1 er juillet 2021, du loyer mensuel de M.[Z], s'élevant actuellement à 223 euros, de 0,9%
En tout état de cause,
-de rejeter l'ensemble des demandes de M.[Z].
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précités pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 9 novembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l'appel principal :
Sur la loi applicable :
1- Considérant que le premier juge aurait renversé la charge de la preuve, M. [Z] soutient que le bail est soumis aux dispositions de la loi n°48-1360 du 1er septembre 1948; dès lors qu'il concerne un logement construit avant 1810, dans lequel il est entré avant le 23 décembre 1986, qui ne disposait que de peu de confort, et pour lequel le bailleur n'a jamais réalisé de travaux.
Il souligne qu'il incombait à Mme [R] de rapporter la preuve que le logement disposait de conditions satisfaisantes d'habitabilité, d'installations et d'équipements de bonne qualité voire de très bonne qualité, de sorte qu'il pouvait être valablement classé dans la catégorie A II prévue à l'article 2 du décret n°48-1881 du 10 décembre 1948.
Il ajoute qu'en toutes hypothèses, les éléments qu'il verse aux débats (et en particulier le rapport d'expertise PolyExpert du 10 octobre 2022) démontrent que le bail litigieux n'entrait pas dans les prévisions de l'article 1er du décret 75-803 du 26 août 1975 et demeurait donc soumis à la loi du 1er septembre 1948.
Il demande en conséquence que le montant de son loyer soit ramené à la somme de 118,70 euros par mois correspondant au loyer maximum susceptible de lui être réclamé pour un appartement relevant de la catégorie III A.
2- Mme [R] réplique que le logement donné à bail dispose de matériaux de bonne qualité, qu'il assure des conditions d'habitabilité satisfaisante, que les installations et équipements sont au moins de qualité moyenne, voire supérieure, de sorte que ce bien entre dans la catégorie II du décret n°48-1881 du 10 décembre 1948, et qu'en application du décret 75-803 du 26 août 1975, il est sorti à compter du 1er juillet 1976 du périmètre d'application de la loi du 1er septembre 1948.
Elle expose qu'il ne saurait lui être fait grief de ne produire aucune photo de l'intérieur de la maison donnée en location, dès lors que le locataire refuse tout accès au logement et n'a lui-même produit volontairement que quelques photographies.
3- La cour constate en premier lieu que les parties ne sont pas en désaccord sur le fait que le local d'habitation a été construit avant 1948 (l'extrait cadastral mentionnant une date de construction en 1810), dans une commune ([Localité 5]) dont la population municipale totale était supérieure à 4000 habitants selon le recensement général total de 1968, de sorte que le bail conclu en 1979 est soumis aux dispositions de la loi n°48-1360 du 1er septembre 1948, en application des dispositions de l'article 1er de ladite loi, dans sa rédaction issue de la loi n°70-598 du 9 juillet 1970, à moins que l'un des décrets pris en application de l'article 1er alinéa 3 ait fait sortir ce local du champ d'application de la loi.
Il incombait en conséquence à Mme [R] de justifier des circonstances qui auraient fait sortir le local du champ d'application de la loi du 1er septembre 1948, lorsqu'il a été donné en location en 1979 à M. [Z].
Le premier juge a donc inversé la charge de la preuve en retenant que le locataire devait apporter la preuve que son logement entrait dans le champ d'application de la loi du 1er septembre 1948.
4- Selon l'article 1er du décret n°75-803 du 26 août 1975, les locaux d'habitation ou à usage professionnel classés dans la sous-catégorie A de la 2ème catégorie prévue par l'article 2 du décret n° 48-1881 du 10 décembre 1948 modifié, situés dans les communes entrant dans le champ d'application de la loi du 1er septembre 1948, en vertu de son article 1er ou des textes pris pour son application, ne seront plus soumis à l'ensemble des dispositions de cette loi :
-A compter du 1er juillet 1976, dans les communes comprises dans la région parisienne définie par l'article 1er de la loi n° 64-707 du 10 juillet 1964
-A compter du 1er janvier 1976 dans les autres communes.
5- L'article 2 du décret n°48-1881 du 10 décembre 1948 dispose qu'en vue de la détermination du montant du loyer et de la valeur locative des locaux d'habitation ou à usage professionnel, ceux-ci sont classés en quatre catégories dont les deuxième et troisième comporteront respectivement trois et deux sous-catégories.
Exceptionnellement, certains locaux de très grand luxe pourront être mis hors catégorie ; le montant du loyer au 1er janvier 1949 et la valeur locative de ces locaux sont ceux des locaux de la première catégorie, affectés d'un coefficient pouvant varier, par palier de 0,05, entre 1,05 et 1,25.
L'indication de la catégorie du local, déterminée conformément aux règles fixées à l'annexe I jointe au présent décret, doit figurer sur le décompte établi selon le modèle type annexé au décret du 22 novembre 1948 susvisé.
6- Mme [D] sollicite le classement du local dans la sous-catégorie A de la 2ème catégorie de l'annexe I, qui est définie comme suit:
« Deuxième catégorie.
Dans cette catégorie entrent les locaux situés dans des constructions en matériaux de bonne ou très bonne qualité, assurant des conditions satisfaisantes d'habitabilité (notamment au point de vue de l'isolation phonique ou thermique), qui présentent la plupart des caractéristiques suivantes :
Existence de pièces de réception (salle à manger et salon) pour les locaux d'un certain nombre
de pièces ; dégagements intérieurs de dimensions normales et d'aspect satisfaisant ;
Installations et équipement de bonne qualité ou de qualité moyenne.
Concernant la sous-catégorie A, ce même texte précise que :
« A. - Locaux appartenant à la 2ème catégorie.
1° Locaux situés dans l'agglomération parisienne.
La sous-catégorie A comprend des locaux situés dans des constructions de très bonne qualité, qui comportent de larges pièces de réception et des dégagements intérieurs assez vastes. Dans les immeubles collectifs, présence d'un escalier assez large, avec tapis, d'un escalier de service, et, si l'immeuble a plus de deux étages, d'un ascenseur.
Cette sous-catégorie diffère principalement de la première catégorie par :
Une moindre ampleur des pièces de réception, entrées et galeries ;
Le nombre plus réduit des cabinets de toilette, salles de bains, lingeries et offices ;
Des matériaux parfois de moindre qualité ;
Dans les immeubles collectifs, dimensions moins importantes des dégagements, vestibules et escaliers ; absence possible de monte-charge. »
Pour les locaux situés « en province », le même texte précise qu'« il y a lieu d'adapter les indications qui précèdent aux circonstances locales ».
7- Au vu des pièces produites, et notamment des photographies communiquées par M. [Z], mais également du rapport dressé à sa demande par M. [Y] (cabinet Polyexpert) le 10 octobre 2022, le local donné à bail est une maison d'habitation individuelle, comportant deux niveaux, avec une cave semi-enterrée, un rez de chaussée complet, un WC situé à l'extérieur du bâtiment principal, dans la cour arrière, des menuiseries extérieures d'origine en bois et simple vitrage, et doté lors de l'entrée en jouissance d'un poêle à mazout (depuis remplacé par M. [Z]) et d'une cuisinière à charbon.
La maison dispose d'un salon de 12,16 m², d'un séjour de 13,75 m², d'une entrée de 3,41 m², d'une chambre de 14 m², d'une cuisine de 14,17 m² avec évier.
Les pièces de vie comportent un revêtement en carrelage.
La véranda a été créée par M. [Z] en 2000, de même que la salle d'eau (installée dans l'ancien couloir); il n'existe pas de production d'eau chaude.
8- Les photographies jointes au rapport révèlent que le murs de la maison sont en moellons, avec crépi extérieur pour le niveau supérieur occupé à usage d'habitation, de même que pour le mur pignon.
Les pièces de vie sont éclairés par des fenêtres de bonne taille.
9- Il s'évince de ces constatations que la maison donné en location est une construction de ville en matériaux de bonne qualité, assurant des conditions satisfaisantes d'habitation au regard des critères en vigueur en 1979, pourvu d'un nombre de pièces très satisfaisant, de dimensions très satisfaisantes, et d'installations et équipements de qualité moyenne.
Elle correspondait donc en 1979 à la sous-catégorie A de la 2ème catégorie prévue par l'article 2 du décret n° 48-1881 du 10 décembre 1948 modifié, de sorte que la loi du 1er septembre 1948 avait cessé de s'appliquer à compter du 1er janvier 1076.
Le fait que la maison présente actuellement des désordres, des non-conformités aux normes actuelles et une vétusté incontestable liés à l'absence prolongée de travaux n'a pas d'incidence sur ce classement, en 1979.
10- C'est donc à juste titre que la bailleresse soutient que le local était sorti du champ d'application de la loi du 1er septembre 1948 lorsqu'il a été donné à bail en 1979 à M. [Z].
Le jugement sera donc confirmé, par motifs substitués, en ce qu'il a dit que le bail était soumis aux dispositions de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.
Concernant la demande de remboursement de loyers trop-perçus :
11- Dès lors que la cour écarte l'application de la loi du 1er septembre 1948, M. [Z] ne peut prétendre à la fixation d'une valeur locative correspondant au loyer maximum pour un logement de la catégorie III A, ni à un trop perçu, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de remboursement de loyers.
Concernant le remboursement des frais de rénovation du logement :
12- M. [Z] sollicite, par voie d'infirmation du jugement entrepris, la condamnation de Mme veuve [R] à lui payer la somme de 3229,05 euros correspondant au total des factures de travaux qu'il a pris en charge, dépassant largement les dépenses d'entretien normal du logement et qui incombaient donc au bailleur.
13- Mme veuve [R] sollicite la confirmation du jugement sur ce point, en ce qu'il a rejeté cette demande reconventionnelle.
Elle souligne que les factures produites sont illisibles, et que la preuve n'est pas rapportée que les dépenses engagées dépasseraient les frais d'entretien normalement à la charge de tout locataire.
Elle ajoute que les demandes sont en tout état de cause prescrites dans leur grande majorité.
14- La cour relève en premier lieu que dans le dispositif de ses conclusions, Mme Veuve [R] n'a pas formé de prétention spécifique tendant à voir déclarer irrecevables cette demande en paiement.
En considération des dispositions de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour n'est donc pas valablement saisie d'une fin de non-recevoir tirée de la prescription.
15- Il convient de rappeler que selon les dispositions de l'article 6 c) de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le bailleur est obligé d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat.
Cette obligation incombe au bailleur sans nécessité d'être prévenu par le locataire.
16- La cour relève que M. [Z] a produit pour l'essentiel des notes manuscrites, tickets de caisse ou factures Point P., Mr Bricolage, E. [E] correspondant à des achats de matériaux, dont les mentions abrégées et imprécises ne permettent pas de déterminer s'il s'agit de dépenses incombant normalement au bailleur, comme résultant de la vétusté, ni de prouver la réalisation effective de travaux dans la maison donnée à bail.
17- Par ailleurs, M. [Z] ne rapporte pas la preuve d'un accord entre les parties pour que les aménagements dont il avait pris l'initiative (notamment par la pose d'une antenne VHF ou l'installation d'une véranda) soient en définitive supportés par Mme [R]..
Il produit en revanche des factures 1999 de la société Drouet Bois (en pièces 11) attestant de la réalisation de travaux d'enlèvement d'une souche de cheminée, reprise d'un lambris, à la suite d'une tempête, pour un montant total de 814,42 Francs soit 124,16 euros, qui doivent être supportés par le bailleur, dès lors que ces dépenses excèdent les réparations locatives et que l'urgence justifiait leur réalisation immédiate.
18-Il convient en conséquence d'infirmer le jugement et de condamner Mme [R] à payer à M. [Z] la somme de 124,16 euros et de rejeter le surplus des demandes à ce titre, compte tenu de l'insuffisance et de l'imprécision des pièces justificatives versées aux débats.
Sur l'appel incident:
Concernant la validité du congé :
19- Mme [R] fait grief au jugement d'avoir considéré que le congé qu'elle a donné par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 novembre 2016 pour la date du 8 juin 2017 n'était pas valide, au regard du terme normal du bail tacitement renouvelé (à savoir le 24 juin 2019), alors, selon elle, que le fait de mentionner une date d'effet du congé inexact n'emporte pas la nullité du congé.
20- Dans ses conclusions développées à titre subsidiaire, M. [Z] soutient que le premier juge a fait une juste application des dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, et que Mme [R] aurait dû donner congé par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte d'huissier en respectant un délai de six mois avant le terme du bail fixé le 24 juin 2019.
21- La cour relève qu'il n'existe aucune contestation entre les parties, dans l'hypothèse d'une application de la loi du 6 juillet 1989, sur le fait que le terme du bail non mis en conformité et tacitement renouvelé par périodes de trois ans était le 24 juin 2019, ainsi que le premier juge l'a retenu, par une exacte application des dispositions des articles 71 de la loi n°82-526 du 22 juin 1982, et 51 de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986.
22- Contrairement à ce que soutient M. [Z], il est constant, en droit, qu'un congé donné pour une date prématurée mais régulier en la forme reste valable pour la date pour laquelle il aurait dû être délivré: le congé n'est pas affecté de nullité mais ses effets sont reportés la date du terme normal du bail.
Il en résulte que les effets du congé valablement donné par Mme [R], par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 novembre 2016 pour la date du 8 juin 2017 ont été reportés à la date du 24 juin 2019.
Dès lors que le délai de six mois prévus par l'article 15-I de la loi n° 89 ' 462 du 6 juillet 1982 a été respecté par Mme [R], le congé a pu produire effet à la date du 24 juin 2019, sous réserve de la vérification de son bien-fondé.
23- Le congé du 29 novembre 2016 est motivé par le souhait de Mme [R] de reprendre le logement pour l'occuper elle-même.
M.[Z] souligne que le congé ne contient aucune justification du caractère réel et sérieux de cette décision de reprise, et que le courrier simple adressé ensuite par Mme [R] le 20 décembre 2017 n'a pas régularisé le congé.
24- La cour rappelle toutefois que selon les dispositions de l'article 15-I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant. A peine de nullité, le congé donné par le bailleur doit indiquer le motif allégué et, en cas de reprise, les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise ainsi que la nature du lien existant entre le bailleur et le bénéficiaire de la reprise qui ne peut être que le bailleur, son conjoint, le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé, son concubin notoire depuis au moins un an à la date du congé, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint, de son partenaire ou de son concubin notoire. Lorsqu'il donne congé à son locataire pour reprendre le logement, le bailleur justifie du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise. Le délai de préavis applicable au congé est de six mois lorsqu'il émane du bailleur.
25- Contrairement à ce que soutient M. [Z], ce texte n'exige pas, à peine de nullité, que le congé contienne à la date de sa délivrance les justificatifs du caractère réel et sérieux du motif de reprise.
Il est constant que ces justificatifs peuvent être valablement produits en cas de contestation par la locataire.
26- En l'espèce, Mme [R] a exposé, par courrier du 20 décembre 2017, puis dans le cadre de l'instance, qu'elle entend reprendre le logement du [Adresse 1] afin d'y habiter personnellement avec son fils, [I] [R], handicapé à plus de 80 %, dont elle entend assurer les intérêts pour l'avenir.
Mme [R], née le 20 décembre 1940, a produit les justificatifs de ce qu'elle résidait, lors de la délivrance du congé, dans une maison avec étage sise [Adresse 4], devenue trop grande pour elle depuis le décès de son mari et de ses parents qu'elle hébergeait, et qu'elle a donc vendue par acte en date du 10 avril 2018, dans la perspective de la reprise de la maison occupée par M. [Z], qui présente l'avantage d'être entièrement de plain pied.
Elle a en outre justifié que dans l'attente de l'issue du litige et de la reprise effective de cette maison, elle a pris en location une maison avec son fils, au [Adresse 2], selon contrat de bail du 6 octobre 2017, avant de quitter cette location pour limiter les frais (soit un loyer de 660 euros par mois) et de résider en meublé au [Adresse 3], dans une chambre en rez de chaussée dépendant d'un immeuble appartenant à la SCI Alfaga, qui ne lui permet pas de disposer d'une cuisine et d'une salle à manger.
Le caractère réel et sérieux du motif de reprise est donc suffisamment établi et M. [Z] ne démontre pas l'existence d'une fraude à ses droits.
27- Il convient en conséquence de valider le congé, et d'autoriser l'expulsion de M. [Z] à défaut de départ volontaire dans les conditions énoncées ci-après au dispositif, et le séquestre des biens mobiliers qui en seraient susceptibles, pour surêté des loyers échus et des charges locatives.
Le jugement sera en conséquence infirmé sur ce point.
Il n'y a pas lieu d'ordonner dès à présent les autres mesures sollicitées par Mme [R], en l'absence d'intérêt né et actuel (justification du paiement des charges locatives, constat des réparations locatives, estimation des réparations nécessaires par un huissier de justice), celles-ci relevant de sa seule initiative lors de la restitution des clés, et d'un état des lieux.
Sur les demandes accessoires:
28- Il n'est pas inéquitable de laisser aux parties la charge de leurs frais irrépétibles; les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.
PAR CES MOTIFS:
La Cour,
Confirme le jugement, en ce qu'il a :
-rejeté les demandes de M. [F] [Z], tendant à voir :
-fixer de façon rétroactive le montant mensuel du loyer à la somme de 118,70 euros par mois, en application de la loi n°48-1360 du 1er septembre 1948,
-condamner Mme [W] [D] veuve [R] à lui verser la somme de 4.l09,10 euros correspondant l'écart existant entre le loyer versé mensuellement depuis mois de juillet 2018 et le loyer maximum pouvant lui être réclamé,
Infirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,
Statuant à nouveau,
-Dit que le congé délivré par Mme [W] [D] veuve [R] à M. [F] [Z] est justifié, en application de l'article 15 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989,
-Dit qu'à défaut de départ volontaire de M. [F] [Z] à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la signification d'un commandement de quitter les lieux, et restitution des clés à cette date, Mme [W] [D] veuve [R] pourra faire procéder à son expulsion et à celle de tout occupant de son chef, avec au besoin le concours de la force publique et d'un serrurier,
-Dit qu'il sera fait application du code des procédures civiles d'exécution lors de l'exécution éventuelle de l'expulsion,
-Condamne Mme [W] [D] veuve [R] à payer M. [F] [Z] la somme de 124,16 euros au titre des travaux d'entretien justifiés sur factures incombant normalement au bailleur,
Y ajoutant,
Rejette le surplus des demandes,
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,