ARRET N°42
FV/KP
N° RG 21/00235 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GFQT
[S]
C/
TRESORERIE DE CHAUVIGNY
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 24 JANVIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00235 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GFQT
Décision déférée à la Cour : jugement du 30 juin 2020 rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS.
APPELANTE :
Madame [K] [E] [S]
née le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 7] (75)
[Adresse 3]
[Localité 5]
Ayant pour avocat plaidant Me Sylvie RODIER de l'ASSOCIATION RODIER MBDT ASSOCIÉS, avocat au barreau de POITIERS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/004168 du 04/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de POITIERS)
INTIME :
TRESORERIE DE [Localité 4]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Ayant pour avocat plaidant Me Renaud BOUYSSI de la SELARL ARZEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de POITIERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE :
[K] [S] est locataire d'une appartement situé sur la commune de [Localité 5] le [Localité 5] (85) appartenant à cette commune.
Le 21 octobre 2018, cette commune lui a délivré un commandement de payer un arriéré locatif visant la clause résolutoire.
Le 21 décembre 2018, la commission de surendettement des particuliers de la Vienne a constaté la recevabilité du dossier déposé par [K] [S] puis, a validé à son profit les mesures de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire le 21 mai 2019.
Par acte daté du 19 septembre 2019, la commune de [Localité 5] le [Localité 5] a assigné [K] [S] devant le tribunal d'instance de Poitiers en vue d'obtenir son expulsion.
Le 09 octobre 2019, la Trésorerie de [Localité 6] a procédé auprès de Pôle Emploi à une saisie sur les sommes dues à [K] [S] pour recouvrement de 2.066,02 € en vertu de cinq titres émis les 26 mars 2019, 23 avril 2019, 22 mai 2019 et les 13 et 14 juin 2019 relatifs à la consommation d'eau chaude, le chauffage et le loyer.
Le 06 décembre 2019, [K] [S] a assigné le Trésor Public de [Localité 6] devant le juge de l'exécution de Poitiers en vue, notamment, de faire constater l'absence de titre exécutoire, de dire que la saisie opérée en considération de l'avis à tiers détenteur est nulle faute de cause et obtenir sa condamnation à lui payer une somme de 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par décision datée du 30 juin 2020; le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Poitiers a débouté [K] [S] de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens dans les règles de l'aide juridictionnelle.
[K] [S] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe datée du 20 janvier 2021 en vue d'obtenir son infirmation, de faire constater l'absence de titre exécutoire et la nullité de la saisie administrative, d'ordonner la restitution des sommes prélevées, faire condamner la trésorerie à lui payer une somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts, subsidiairement, de lui permettre de se libérer du solde des sommes dues par 24 mensualités outre une somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par arrêt en date du 09 novembre 2021, la Cour d'appel de Poitiers, avant dire droit, a ordonné le renvoi du dossier devant le conseiller de la mise en état afin que les parties produisent la preuve de la notification et les titres correspondant au recouvrement de 2.101 € relatifs à la consommation d'eau chaude, le chauffage, le loyer, à savoir :
- Le titre 2019 T 15 émis le 14 juin 2019 pour un montant de 7.31 € ;
- Le titre 2019 T 180 émis le 26 mars 201 pour un montant de 385.95 € ;
- Le titre 2019 T 2 émis le 13 juin 2019 pour un montant de 924,62 € ;
- Le titre 2019 T 267 émis le 23 avril 2019 pour un montant de 385.95 € ;
- Le titre 2019 T 35 émis le 22 mai 2019 pour un montant de 397.17 € ;
Dans ses dernières conclusions RPVA du 20 septembre 2022, Mme [S] sollicite de la cour de :
Vu l'article l'article L. 1617-5, du code général des collectivités territoriales,
Vu l'article R 121-1 du Code des procédures civiles d'exécution,
Vu l'article 510 du Code de procédure civile,
Vu l'article 1343-5 du Code civil,
Vu l'article L. 257-0A du Livre des procédures fiscales,
Vu l'article L.252 A du Code des procédures fiscales (applicable en l'espèce),
Vu l'article L. 281 du Code des procédures fiscales (applicable en l'espèce),
Vu l'article L. 212-1 du Code des relations entre le public et l'administration,
Vu l'article 700 du Code de procédure civile,
Vu les moyens de fait et de droit sus énoncés et les pièces dont le détail est reproduit dans le bordereau annexé,
' À titre principal :
- Infirmer le jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Poitiers daté du 30 juin 2020,
' Statuer à nouveau :
- Déclarer que Mme [S] [K] est recevable et bien fondée en ses demandes,
- Débouter le Trésor Public de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- Constater l'absence d'un titre exécutoire,
- Constater que la saisie administrative à tiers détenteur mise en place par le Trésor Public le 09 octobre 2019 est nulle faute de cause,
- Annuler la saisie administrative à tiers détenteur mise en place par le Trésor Public le 09 octobre 2019,
- Ordonner la restitution de toutes les sommes prélevées à Mme [S] suite à la saisie administrative à tiers détenteur mise en place par le trésor Public le 09 octobre 2019,
- Condamner le Trésor Public à payer la somme de 1.000 € à Mme [S] à titre de dommages et intérêts ;
' À titre infiniment subsidiaire,
Vu les articles R 121-1 du Code des procédures civiles d'exécution, 510 du Code de procédure civile et 1343-5 du Code civil, au cas où par impossible la Cour ne ferait pas droit aux demandes sur les fondements précédents, pour le moins,
-Autoriser Madame [S] [K] à se libérer du solde de la créance réclamée par le Trésor Public, après déduction des fonds saisis, en 24 mensualités,
En toute hypothèse,
- Condamner le Trésor Public aux entiers dépens et au paiement, en outre, de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile faisant application de l'article 37 du décret sur l'aide juridictionnelle.
Par dernières conclusions RPVA du 26 septembre 2022, la Trésorerie de [Localité 6] sollicite de la cour de :
Confirmer le jugement dont appel ;
Débouter Madame [S] de sa contestation du caractère exécutoire des titres de recettes et de la régularité de la SATD émise le 9 octobre 2019 par la TRESORERIE DE [Localité 4] ;
Débouter Madame [S] Madame [S] de ses demandes tendant à la restitution des sommes prélevées suite à la SATD mise en place par la TRESORERIE DE [Localité 4] ;
Condamner Madame [S] au paiement de la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamner Madame [S] aux entiers dépens.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 27 septembre 2022 pour être plaidée le 25 octobre suivant, date à laquelle elle a été mise en délibéré à ce jour.
MOTIFS
Sur la contestation de l'existence d'un titre exécutoire
1. L'article L. 1617-5 du Code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable à la cause dispose en son 1° qu'en l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. Toutefois, l'introduction devant une juridiction de l'instance ayant pour objet de contester le bien-fondé d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local suspend la force exécutoire du titre.
L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite.
Selon le 2° de cette disposition, la contestation qui porte sur la régularité d'un acte de poursuite est présentée selon les modalités prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales. La revendication par une tierce personne d'objets saisis s'effectue selon les modalités prévues à l'article L. 283 du même livre
2. La contestation sur la créance objet des poursuites doit être dirigée contre l'ordonnateur qui a émis le titre de recette faisant l'objet de l'avis à tiers détenteur alors que la seconde contestation l'est contre le comptable qui a engagé la saisie. Ces éléments sont repris dans les actes de notification de saisie administrative à tiers détenteur.
3. En vertu de ces dispositions légales, les contestations peuvent porter, soit sur le bien-fondé de la créance de la collectivité locale, soit sur la régularité formelle de l'acte de saisie, seule cette seconde contestation relevant de la compétence du juge de l'exécution.
4. Ces dispositions doivent encore être combinées avec celles du code de l'organisation judiciaire et, notamment, son article L. 213-6 qui dispose, notamment, que le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire
5. En l'espèce, au vu des dernières conclusions de l'appelante, la cour constate que la contestation porte autant sur le bien-fondé de la créance de la collectivité locale que sur la régularité de l'acte de saisie dès lors qu'il est invoqué, en dernier lieu, une absence de titre exécutoire, des irrégularités entachant la saisie administrative à tiers détenteur et l'existence d'une dette locative qui lui serait opposable.
6. Il s'évince de cet article du code de l'organisation judiciaire et des constatations qui les suivent immédiatement que la contestation du bienfondé des créances visées à la saisie contestée, relève de la compétence exclusive du juge de l'exécution dès lors qu'il est, comme en l'espèce, saisi des contestations concernant la mise en oeuvre d'une voie d'exécution s'y rapportant.
7. Ainsi, encore, la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, datée du 05 décembre 2019, par laquelle Mme [S] a contestée l'avis à tiers détenteur du 09 octobre 2019, pour la somme de 2.066,02 € (pièce n°11 de l'appelante) n'a pu interrompre le délai imparti par le texte de l'article L. 1617-5 du Code général des collectivités territoriales sus-énoncé.
8. Les éléments produits aux débats, notamment la notification de saisie administrative à tiers détenteur, en l'espèce, à Pôle Emploi ALPC, est régulier, Mme [S] ne fournissant aucune indication sur l'article du code des relations entre le public et l'administration et la jurisprudence constante s'y rapportant qu'elle invoque, susceptibles de vicier ledit titre.
9. Ainsi, la cour observe que le titre exécutoire qui concerne le présent litige, pour un montant de 2.066,02 € a été valablement notifié par voie de notification de saisie administrative à tiers détenteurs le 27 septembre 2019, de sorte que Mme [S] disposait d'une voie de recours expirant le 27 novembre 2019 qu'elle devait porter exclusivement devant le juge de l'exécution.
9. Or, Mme [S] a contesté ce titre par assignation devant le juge de l'exécution en date du 06 décembre 2019 de sorte que son action en contestation est irrecevable, conformément à l'alinéa 2 de l'article L. 1617-5 du Code général des collectivités territoriales sus énoncé.
10. Consécutivement, l'ensemble des autres demandes ne seront pas examinées par la cour.
11. La décision entreprise sera ainsi réformée.
Sur les frais de procès
12. Il apparaît équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
13. Mme [S] qui échoue en ses prétentions supportera les dépens de la présente instance.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Vu l'arrêt de la cour avant dire droit en date du 09 novembre 2021,
Infirme en toutes ses dispositions la décision du le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Poitiers du 30 juin 2020,
Statuant à nouveau,
Déclare irrecevable, comme prescrite, la contestation portant sur la saisie de la somme de 2.066,02 € portant sur le titre 2019 T 15 émis le 14 juin 2019 pour un montant de 7.31 €, le titre 2019 T 180 émis le 26 mars 201 pour un montant de 385.95 €, le titre 2019 T 2 émis le 13 juin 2019 pour un montant de 924,62 €, le titre 2019 T 267 émis le 23 avril 2019 pour un montant de 385.95 € et le titre 2019 T 35 émis le 22 mai 2019 pour un montant de 397.17 € ;
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à statuer sur les autres demandes,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Mme [K] [S] aux dépens de l'instance dans les règles de l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,