ARRET N°41
FV/KP
N° RG 21/00234 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GFQR
[F]
C/
Etablissement Public TRESOR PUBLIC DE [Localité 5]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 24 JANVIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00234 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GFQR
Décision déférée à la Cour : jugement du 30 juin 2020 rendu par le Tribunal de Grande Instance de POITIERS.
APPELANTE :
Madame [X] [C] [F]
née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Ayant pour avocat plaidant Me Sylvie RODIER de l'ASSOCIATION RODIER MBDT ASSOCIÉS, avocat au barreau de POITIERS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/004161 du 04/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de POITIERS)
INTIMEE :
Etablissement Public TRESOR PUBLIC DE [Localité 5]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Ayant pour avocat plaidant Me Renaud BOUYSSI de la SELARL ARZEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de POITIERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE :
Madame [X] [F] est locataire d'un appartement situé sur la commune de [Localité 3] (85) appartenant à cette commune.
Le 21 octobre 2018, cette commune lui a délivré un commandement de payer un arriéré locatif visant la clause résolutoire.
Le 21 décembre 2018, la commission de surendettement des particuliers de la Vienne a constaté la recevabilité du dossier déposé par Mme [F] puis, a validé à son profit les mesures de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire le 21 mai 2019.
Par acte daté du 19 septembre 2019, la commune de [Localité 3] a assigné Mme [F] devant le tribunal d'instance de Poitiers en vue d'obtenir son expulsion.
Le 27 septembre 2019, la Trésorerie de [Localité 5] a procédé auprès de Pôle Emploi à une saisie sur les sommes dues à Mme [F] pour recouvrement de 473 € en vertu de quatre titres émis les 26 mars 2019, 23 avril 2019, 22 mai 2019 et 14 juin 2019 relatifs à la consommation d'eau chaude, le chauffage et le loyer.
Le 25 novembre 2019, Mme [F] a assigné le Trésor Public de [Localité 5] devant le juge de l'exécution de Poitiers en vue, notamment, de faire constater l'absence de titre exécutoire, de dire que la saisie opérée en considération de l'avis à tiers détenteur est nulle faute de cause et obtenir sa condamnation à lui payer une somme de 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par décision datée du 30 juin 2020, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Poitiers a débouté Mme [F] de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens dans les règles de l'aide juridictionnelle.
Mme [F] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe datée du 19 janvier 2021 en vue d'obtenir son infirmation, de faire constater l'absence de titre exécutoire et la nullité de la saisie administrative, d'ordonner la restitution des sommes prélevées, faire condamner la trésorerie à lui payer une somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts, subsidiairement, de lui permettre de se libérer du solde des sommes dues par 24 mensualités outre une somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par arrêt avant dire droit en date du 09 novembre 2021, la Cour d'appel de Poitiers a statué ainsi:
Ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture,
Ordonne en conséquence le renvoi devant le conseiller de la mise en état afin que les parties produisent les titres suivant pour recouvrement de 473 € relatifs à la consommation d'eau chaude, le chauffage et le loyer qui suivent :
- Titre émis le 16/03/2018-CCVG 1ER SEM 2018 NP(1) FACT N3094W - 95,50 Euros
- Titre émis le 16/03/2018CCVG TC 23017 FACT N 21877N - 184,00 Euros
- Titre émis le 11/09/2018-CCVG 2EME SEM 2018 NP(1) FACT N30146 BW - 95,50 Euros.
- Titre émis le 20/03/2019-REDEVANCE ORDURES MENAGERES - 98,00Euros
Ordonne par ailleurs la production de la preuve de la notification des titres susdits,
Invite les parties à préciser si l'instance introduite le 19 septembre 2019, par la commune de [Localité 3] devant le tribunal d'instance de Poitiers (aujourd'hui tribunal judiciaire de Poitiers) en vue d'obtenir son expulsion est toujours pendante, ou alors, a fait l'objet d'un recours,
Réserve les dépens.
Dans ses dernières conclusions RPVA du 20 septembre 2022, Mme [F] sollicite de la cour de :
Vu l'article l'article L. 1617-5, du code général des collectivités territoriales,
Vu l'article R 121-1 du Code des procédures civiles d'exécution,
Vu L.252 A et 257 0 A du Code des procédures fiscales (applicable en l'espèce),
Vu l'article L. 281 du Code des procédures fiscales (applicable en l'espèce),
Vu l'article 510 du Code de procédure civile
Vu l'article 1343-5 du Code civil ;
Vu les moyens de fait et de droit sus énoncés et les pièces dont le détail est reproduit dans le bordereau annexé,
' A titre principal,
- Infirmer le jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Poitiers du 30 juin 2020,
Statuer à nouveau :
- Dire et juger que Madame [F] [X] est recevable et bien fondée en ses demandes ;
- Débouter le TRESOR PUBLIC de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- Constater l'absence d'un titre exécutoire ;
- Constater que la saisie administrative à tiers détenteur mise en place par le TRÉSOR PUBLIC le 27 septembre 2019 est nulle faute de cause ;
- Annuler la saisie administrative à tiers détenteur mise en place par le TRÉSOR PUBLIC le 27 septembre 2019 ;
- Ordonner la restitution de toutes les sommes prélevées à Madame [F] suite à la saisie administrative à tiers détenteur mise en place par le TRÉSOR PUBLIC le 27 septembre 2019;
- Déclarer que le TRÉSOR PUBLIC les prélèvements indûment réalisés ;
- Condamner le TRÉSOR PUBLIC, à payer la somme de 1 000 € à Madame [F] à titre de dommages et intérêts ;
' À titre infiniment subsidiaire,
Vu les articles R 121-1 du Code des procédures civiles d'exécution, 510 du Code de procédure civile et 1343-5 du Code civil, au cas où par impossible la Cour ne ferait pas droit aux demandes sur les fondements précédents, pour le moins ;
-Autoriser Madame [F] [X] à se libérer du solde de la créance réclamée par le Trésor Public, après déduction des fonds saisis, en 24 mensualités ;
' En toute Hypothèse,
- Condamner le TRÉSOR PUBLIC aux entiers dépens et au paiement, en outre, de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile faisant application de l'article 37 du décret sur l'aide juridictionnelle
Par dernières conclusions RPVA du 26 septembre 2022, la Trésorerie de [Localité 5] sollicite de la cour de:
Confirmer le jugement dont appel ;
Débouter Madame [F] de sa contestation du caractère exécutoire des titres de recettes et de la régularité de la SATD émise le 27 septembre 2019 par la TRÉSORERIE DE [Localité 5] ;
Débouter Madame [F] de ses demandes tendant à la restitution des sommes prélevées suite à la SATD mise en place par la TRÉSORERIE DE [Localité 5];
Condamner Madame [F] au paiement de la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamner Madame [F] aux entiers dépens.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 27 septembre 2022 pour être plaidée le 25 octobre suivant, date à laquelle elle a été mise en délibéré à ce jour.
MOTIFS
Sur la contestation de l'existence d'un titre exécutoire
1. L'article L. 1617-5 du Code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable à la cause dispose en son 1° qu'en l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. Toutefois, l'introduction devant une juridiction de l'instance ayant pour objet de contester le bien-fondé d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local suspend la force exécutoire du titre.
L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite.
Selon le 2° de cette disposition, la contestation qui porte sur la régularité d'un acte de poursuite est présentée selon les modalités prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales. La revendication par une tierce personne d'objets saisis s'effectue selon les modalités prévues à l'article L. 283 du même livre
2. La contestation sur la créance objet des poursuites doit être dirigée contre l'ordonnateur qui a émis le titre de recette faisant l'objet de l'avis à tiers détenteur alors que la seconde contestation l'est contre le comptable qui a engagé la saisie. Ces éléments sont repris dans les actes de notification de saisie administrative à tiers détenteur.
3. En vertu de ces dispositions légales, les contestations peuvent porter, soit sur le bien-fondé de la créance de la collectivité locale, soit sur la régularité formelle de l'acte de saisie, seule cette seconde contestation relevant de la compétence du juge de l'exécution.
4. Ces dispositions doivent encore être combinées avec celles du code de l'organisation judiciaire et, notamment, son article L. 213-6 qui dispose, notamment, que le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire
5. En l'espèce, au vu des dernières conclusions de l'appelante, la cour constate que la contestation ne porte pas sur le bien-fondé de la créance de la collectivité locale mais sur la régularité de l'acte de saisie dès lors qu'il est indiqué en dernier lieu que le Trésor Public ne rapporte pas la preuve de la notification des titres pour le recouvrement de cette somme de 473 € puis, à la suite, que de nombreuses irrégularités entachent la saisie administrative à tiers détenteur.
6. Il s'évince de cette première constatation de la cour :
- que seul le juge de l'exécution était compétent pour statuer sur la contestation élevée par Mme [F] ;
- que la contestation de l'avis à tiers détenteur formée par le conseil de Mme [F] par lettre recommandée avec demande d'avis de réception datée du 21 novembre 2019 devant le SIMER de [Localité 5] prduite aux débats, n'a pu interrompre le délai imparti par le texte de l'article L. 1617-5 du Code général des collectivités territoriales sus-énoncé ;
7. Mme [F] fait valoir qu'elle a :
- par conclusions en date du 20 novembre 2019, adressée au tribunal d'instance de Poitiers, fait une demande reconventionnelle tendant à la contestation des sommes réclamées par les deux avis à tiers détenteur. ( Pièce n° 11) ;
- par assignation en cours de délivrance en même temps que la présente, saisi le tribunal judiciaire de Poitiers afin de contester le bien fondé de ces créances et explique que l'affaire avait été fixée à l'audience du 31 janvier 2019 ; selon elle cette affaire serait toujours pendante devant le tribunal et une transaction serait en cours de finalisation entre les parties, laquelle doit être homologuée à l'audience du 8 avril 2022 ;
8. La Trésorerie de [Localité 5], qui produit les titres après réouverture des débats, objecte que Mme [F] conteste le caractère exécutoire des titres en se prévalant de l'introduction d'une instance devant le tribunal judiciaire de POITIERS en date du 20 novembre 2019, soit plus de sept mois après l'émission des titres et conclut ainsi que le délai de deux mois prévu par l'article L1617-5 pour contester le bien-fondé de la créance était dépassé lors du dépôt de la demande reconventionnelle tendant à la contestation des sommes réclamées par la SATD.
9. La cour constate que le litige a évolué durant le temps de la réouverture des débats dès lors que, par décision en date du 08 avril 2022 du juge des contentieux de la protection de Poitiers, il a été constaté que chacune des parties se désistait de leurs demandes en vue de mettre fin à l'instance et à l'action introduite
10. Toutefois, au vu des éléments produits aux débats, cette décision, qui l'oppose à la commune de [Localité 3] ne concerne qu'une instance en expulsion et recouvrement des loyers impayés.
11. Le titre exécutoire qui concerne le présent litige, pour un montant de 473 €, a été notifié par voie de notification de saisie administrative à tiers détenteurs le 15 septembre 2019. Mme [F] disposait d'une voie de recours expirant le 15 novembre 2019.
12. A cette date, Mme [F] avait répliqué, par voie de conclusions notifiées au greffe le 20 novembre 2019, à une assignation à comparaître devant le tribunal d'instance de Poitiers le 22 novembre 2019, délivrée par la commune de la Chappelle Viviers, suivant son assignation en expulsion datée du 19 septembre 2019.
13. La cour constate ainsi que ces conclusions en réplique ne pouvaient valoir contestation des quatre titres émis les 16 et 20 mars 2018 ainsi que le 11 septembre 20l8 relatifs à trois factures émises par le "CCVG" et les ordures ménagères.
14. De la sorte, c'est bien l'assignation devant le juge de l'exécution en date du 25 novembre 2019 ayant donné lieu au jugement actuellement contesté qu'il convient de prendre en compte.
15. Cette assignation est intervenue 10 jours après le délai d'expiration du délai de contestation de sorte que, conformément au texte de l'article L. 1617-5 du Code général des collectivités territoriales précitée, l'action en contestation de ce titre par Mme [F] doit être déclarée irrecevable.
16. Consécutivement, l'ensemble des autres demandes ne seront pas examinées par la cour.
17. La décision entreprise sera ainsi réformée.
Sur les frais de procès
18. Il apparaît équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
19. Mme [F] qui échoue en ses prétentions supportera les dépens de la présente instance.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Vu l'arrêt de la cour avant dire droit en date du 09 novembre 2021,
Infirme en toutes ses dispositions la décision du le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Poitiers du 30 juin 2020,
Statuant à nouveau,
Déclare irrecevable, comme prescrite la contestation portant sur la saisie de la somme de 473 €, en vertu des titres émis le 16/03/2018-CCVG 1ER SEM 2018 NP(1) FACT N3094W - 95,50 € le 16/03/2018CCVG TC 23017 FACT N 21877N - 184,00 €, émis le 11/09/2018-CCVG 2EME SEM 2018 NP(1) FACT N30146 BW - 95,50 € et émis le 20/03/2019-REDEVANCE ORDURES MENAGERES - 98,00 €,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à statuer sur les autres demandes,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Mme [X] [F] aux dépens de l'instance dans les règles de l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,