ARRET N°7
N° RG 21/01022 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GHMZ
[H]
C/
S.A.S. ALADDIN CONCEPT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 17 JANVIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01022 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GHMZ
Décision déférée à la Cour : jugement du 02 mars 2021 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de POITIERS.
APPELANT :
Monsieur [T] [H]
né le 21 Décembre 1927 à [Localité 6]
[Adresse 4]
[Localité 3]
ayant pour avocat Me Frédérique PASCOT de la SCP GAND-PASCOT, avocat au barreau de POITIERS
INTIMEE :
S.A.S. ALADDIN CONCEPT
[Adresse 1]
[Localité 2]
ayant pour avocat postulant Me Yann MICHOT de la SCP ERIC TAPON - YANN MICHOT, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Jacques MOUTOT, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 07 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller
Madame Anne VERRIER, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,
ARRÊT :
- Contradictoire
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ :
Selon contrat daté du 6 juin 2017, [T] [H] a passé commande d'un abri de piscine du modèle 'Elite' auprès de la société Aladdin Concept pour un prix total de 46.630 euros TTC.
Le contrat stipulait une date de livraison au 10 octobre 2017 susceptible d'être modifiée selon avancement des travaux, et le paiement d'un acompte de 10.000 euros.
Deux chèques bancaires datés l'un et l'autre du 6 juin 2017 ont été émis par M. [H] à l'ordre d'Aladdin Concept, et encaissés.
L'abri a été livré et posé le 6 février 2018
Le même jour, [T] [H] remettait au représentant de la société Aladdin Concept deux chèques bancaires tirés sur son compte à la Banque Postale, l'un de 34.630 euros et l'autre de 2.000 euros.
Le chèque de 2.000 euros a été mis à l'encaissement et honoré.
Celui de 34.630 euros, lorsqu'il l'a été aussi, a fait l'objet d'un rejet pour cause d'opposition du tireur pour cause de vol.
Après avoir vainement mis en demeure [T] [H] de lui payer le solde du prix, la société Aladdin Concept l'a fait assigner, ainsi que la Banque Postale, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Poitiers pour voir ordonner sous astreinte en vertu de l'article L.131-35 du code monétaire et financier la main-levée de l'opposition pour vol et condamner les défendeurs à lui payer 3.000 euros de dommages et intérêts et 2.500 euros d'indemnité de procédure.
[T] [H] a demandé qu'il soit sursis à statuer jusqu'à l'issue de la plainte qu'il avait entre-temps déposée au commissariat contre Aladdin Concept pour abus de faiblesse, en indiquant avoir 90 ans, avoir expliqué à son interlocuteur lors de la conclusion du contrat qu'il ne disposait pas des fonds au comptant et s'être entendu faussement certifier qu'il obtiendrait à coup sûr un crédit.
Par ordonnance du 20 juin 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Poitiers a ordonné la main-levée de l'opposition pour vol, en rejetant la demande d'astreinte.
La société Aladdin Concept a alors pratiqué le 11 avril 2019 entre les mains de La Banque Postale une saisie-attribution au préjudice de [T] [H] pour obtenir recouvrement de la somme de 34.630 euros au vu du certificat de non-paiement du chèque émis le 8 février 2018.
[T] [H] a saisi le juge de l'exécution par acte du 26 avril 2019 en main-levée de cette saisie-attribution en indiquant avoir remis le chèque comme simple garantie dans l'attente de l'obtention du crédit qui lui avait été annoncé, et en soutenant que le certificat de non-paiement n'était pas régulier.
Par jugement du 9 juillet 2019, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Poitiers a constaté la nullité du certificat de non-paiement argué de titre exécutoire au motif qu'il ne supportait pas de signature, et constaté la nullité subséquente de la saisie-attribution dont il a ordonné la main-levée.
[T] [H] a fait assigner par acte du 5 septembre 2019 la société Aladdin Concept devant le tribunal de grande instance de Poitiers afin de voir prononcer la nullité pour dol du contrat conclu le 6 juin 2017.
La société Aladdin Concept a signifié le 5 août 2019 à M. [H] un certificat de non-paiement revêtu d'une signature, et a pratiqué en vertu de cet acte le 18 novembre 2019 entre les mains de la Banque Postale une nouvelle saisie-attribution, toujours pour obtenir paiement de 34.630 euros en principal.
[T] [H] a saisi le juge de l'exécution de Poitiers par assignation du 19 décembre 2019 en lui demandant
.in limine litis : de surseoir à statuer jusqu'à ce que le tribunal de grande instance de Poitiers se prononce sur son action en nullité de la vente
.en tout état de cause : d'ordonner la main-levée de cette saisie-attribution.
Par jugement du 30 juin 2020, le juge de l'exécution du tribunal entre-temps devenu tribunal judiciaire de Poitiers a rejeté toutes les demandes de [T] [H] et l'a condamné aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure, en retenant
-qu'il n'avait pas à surseoir à statuer car l'article L.213-6 alinéa 1 du code de l'organisation judiciaire lui donnait compétence pour connaître des difficultés, même portant sur le fond du droit, s'élevant à l'occasion de l'exécution forcée
-qu'il pouvait et devait donc, quand bien même le tribunal judiciaire avait été saisi à même fin antérieurement, déterminer si le contrat du 6 juin 2017 était nul pour cause de dol
-que le demandeur n'établissait pas avoir été victime d'un dol ni d'un abus de faiblesse
-que la saisie-attribution était valable, car elle se fondait certes sur le même certificat de non-paiement mais cette fois-ci revêtu de la signature qui lui conférait la nature d'un titre exécutoire, et signifié à M. [H].
Devant le tribunal judiciaire saisi sur son assignation du 5 septembre 2019 d'une demande d'annulation du contrat de vente, [T] [H] a demandé dans le dernier état de ses conclusions
.de prononcer la nullité pour dol et non-respect du droit de la consommation du contrat de vente souscrit le 6 juin 2017
.de condamner la SARL Aladdin Concept
-à lui restituer les 12.000 euros encaissés, avec intérêts au taux légal à compter du 6 juin 2017 sur 10.000 euros et du 8 février 2018 sur 2.000 euros
-à lui restituer sous un mois à peine d'astreinte le chèque de 34.630 euros remis à titre de caution
-à lui verser 10.000 euros de dommages et intérêts
.subsidiairement : d'ordonner une expertise graphologique des mentions manuscrites figurant sur la facture du 19 décembre 2017, soutenant que celle 'caution' était de sa main et celle 'en attendant règlement mensuel' de la main du représentant de la société
.en toute hypothèse de condamner la défenderesse aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 3.000 euros.
La société Aladdin Concept concluait au rejet de ces demandes, rappelait que le juge de l'exécution avait déjà jugé qu'il n'y avait pas matière à annuler le contrat pour dol et réclamait une indemnité de procédure.
Par jugement du 2 mars 2021, le tribunal judiciaire de Poitiers a rejeté les demandes de [T] [H] et l'a condamné aux dépens de l'instance et à payer une indemnité de procédure de 3.000 euros à la société Aladdin Concept.
Pour statuer ainsi, il a retenu
.que la question de la nullité pour dol du contrat avait été tranchée par un jugement définitif du juge de l'exécution qu'aucun élément ne remettait en cause
.qu'aucun abus de faiblesse n'était démontré
.que le contrat n'encourait pas d'annulation pour méconnaissance du droit de la consommation, la date d'encaissement des deux chèques d'acompte de 10.000 euros étant indéterminée, et le formulaire détachable de rétractation étant conforme à la loi compte-tenu de la nature de l'opération, qui était celle d'une prestation de service
.que M. [H] avait signé un procès-verbal de réception sans réserve
.qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner une expertise graphologique, les mentions manuscrites dont M. [H] invoquait la différence d'écriture ne figurant que sur son exemplaire, sur lequel elles pouvaient donc avoir été rajoutées.
[T] [H] a relevé appel le 26 mars 2021.
Les dernières écritures prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile ont été transmises par la voie électronique
* le 7 février 2022 par [T] [H]
* le 5 septembre 2022 par la SARL Aladdin Concept.
[T] [H] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, et
-à titre principal :
.de prononcer la nullité pour dol et pour non-respect du droit de la consommation du contrat de vente d'un abri de piscine souscrit le 6 juin 2017
.de condamner la SARL Aladdin Concept
-à lui restituer les 12.000 euros encaissés, avec intérêts au taux légal à compter du 6 juin 2017 sur 10.000 euros et du 8 février 2018 sur 2.000 euros
-à lui restituer sous un mois à peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard le chèque de 34.630 euros remis à titre de caution
.de dire qu'Aladdin Concept a engagé sa responsabilité délictuelle et de la condamner à lui verser 10.000 euros de dommages et intérêts
.subsidiairement : d'ordonner une expertise graphologique des mentions manuscrites figurant sur la facture du 19 décembre 2017
.en toute hypothèse de condamner la défenderesse aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 3.000 euros.
Il maintient avoir été victime d'un dol et d'un abus de faiblesse de la part du représentant de la société, auquel il avait bien spécifié ne pas avoir les moyens financiers de cet achat et qui lui avait assuré qu'il pourrait s'en acquitter à crédit, comme en persuade la mention manuscrite qu'il porta sur la facture ' reçu ce jour 2000 euros Plus un chèque de 34630 euros en attente du règlement mensuel', ce qui montre bien qu'il ne s'agissait que d'un chèque de caution, qui ne devait pas être encaissé, le mot 'caution' d'une autre écriture, ayant été ajouté quant à lui par M. [H]. Il soutient que le jugement du juge de l'exécution n'a pas autorité de chose jugée à ce titre, car il ne tranche pas dans son dispositif cette question, qui ne lui était pas posée, puisqu'il n'avait pas le pouvoir de la trancher, et que le tribunal devait statuer sur cette demande.
Il sollicite subsidiairement une expertise des écritures figurant sur cette facture.
S'agissant de la violation du code de la consommation, il rappelle l'interdiction de recevoir aucun paiement avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat hors établissement instituée par l'article L.221-10, alinéa 1er, affirmant que ce texte s'applique quand bien même c'est sur une prise de contact antérieure du consommateur que le professionnel se rend au domicile de celui-ci comme en l'espèce, et soutenant que l'entreprise n'avait pas le droit de se faire remettre deux chèques le jour de la signature du contrat, ainsi qu'elle a reconnu par un aveu judiciaire dans ses premières écritures l'avoir fait, et qu'en persuade si besoin était la date des deux chèques d'acompte de 10.000 euros, qui est celle du 6 juin 2017, jour de signature du contrat. Il conteste avoir couvert les nullités en exécutant le contrat, rappelant qu'il n'a pas payé le prix, et affirmant n'avoir ni eu conscience du vice, ni donc a fortiori la volonté de le couvrir.
Il soutient que le comportement de l'entreprise, qu'il s'agisse du dol et de l'abus de faiblesse ou de la violation des règles du code de la consommation, est constitutif d'une faute, et que son préjudice tient à ce qu'il a été fiché à la Banque de France après l'incident de paiement, et a subi un gros stress.
La SARL Aladdin Concept demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter M. [H] de ses prétentions et de le condamner aux dépens et à lui payer 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle indique que M. [H] l'a contactée pour venir à son domicile lui proposer un abri de piscine sur mesure ; qu'il a signé le bon de commande, n'a pas usé de sa faculté de rétractation durant quatorze jours, a fait les travaux modificatifs qu'elle lui avait dit nécessaires, a signé un procès-verbal de réception sans réserve et a même donné son accord pour qu'elle photographie l'ouvrage et puisse le faire visiter à d'autres clients, ce qui montre combien il était satisfait, avant de faire frauduleusement opposition au chèque du solde du prix qu'il avait librement émis, en arguant faussement d'un vol.
Elle rappelle les différentes procédures judiciaires qui ont opposé les parties.
Elle récuse tout manquement au code de la consommation, en soutenant que l'acompte a été acquitté après l'expiration du délai de sept jours, et elle nie à cet égard tout aveu judiciaire du contraire. Elle soutient qu'une éventuelle irrégularité aurait de toute façon été couverte par la ratification tenant à la prise de possession du bien assortie de la signature sans réserve d'un bon d'accord de fin des travaux attestant de la conformité de l'installation livrée.
Indiquant ne pas invoquer l'autorité de chose jugée du jugement du juge de l'exécution mais soutenir simplement qu'il n'est pas plus produit de preuve à cet égard devant la cour que devant ce magistrat, elle réfute tout abus de faiblesse et tout dol, en faisant valoir que le grand âge n'est pas consubstantiel d'un état de faiblesse, et qu'aucun élément probant d'un tel état n'est produit; que les mentions manuscrites dont argue l'appelant ne figurent que sur son exemplaire de la facture, où il reconnaît lui-même en avoir porté beaucoup; qu'une expertise graphologique serait sans intérêt dans ces conditions, et au vu des exigences de l'article 1325 du code civil que les actes synallagmatiques soient établis en autant d'originaux qu'il y a de parties.
Elle conteste avoir aucunement engagé sa responsabilité, et soutient que c'est M. [H] qui a fait preuve d'une grande mauvaise foi et qui dissimule ses revenus, notamment l'autre compte dont il est à l'évidence titulaire.
La clôture est en date du 12 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
* sur la demande d'annulation du contrat pour dol ou pour abus de faiblesse
La société Aladdin Concept indique expressément ne pas arguer de l'autorité de la chose jugée par le juge de l'exécution.
Le tribunal n'a pas déclaré irrecevable la demande d'annulation du contrat pour cause de dol ou d'abus de faiblesse.
Il a cité la décision du juge de l'exécution qui avait déjà examiné cette prétention sans indiquer qu'elle avait autorité de chose jugée, pour en dire que la preuve de ces atteintes à la liberté du consentement n'était pas plus rapportée devant lui qu'elle ne l'avait été devant le juge de l'exécution.
La question de l'autorité de la chose jugée ne se pose donc pas.
M. [H] ne rapporte ni preuve, ni indice, de ce qu'il aurait souscrit le contrat par l'effet d'un abus de faiblesse.
L'abri de piscine qui est l'objet du contrat litigieux était un élément qu'il désirait acquérir ; il a indiqué dans sa plainte avoir lui-même repéré sur une annonce la SARL Aladdin Concept et l'avoir contactée ; la signature du contrat avait été précédée de discussions sur les travaux, notamment d'élargissement de la plage et de suppression d'une cheminée, qu'il lui restait à faire pour permettre l'implantation de cet abri ; M. [H] n'a pas exercé la faculté de rétractation qui figurait en termes visibles sur le contrat, dans un cartouche détachable ; les travaux ont été exécutés chez lui, et il en a pris livraison par un procès-verbal sans réserve, autorisant même le constructeur à prendre des photos de l'ouvrage et à le faire visiter à d'éventuels clients. Ces éléments ne sont pas compatibles avec un contrat qui aurait été conclu en abusant d'un état de faiblesse qu'absolument rien n'accrédite, ni sous l'effet de manoeuvres ou de surprise.
Quant à l'affirmation de M. [H], contestée, qu'il lui aurait été fallacieusement assuré que le contrat était conclu à crédit, ou du moins pour un prix qui serait financé pour la plus grosse partie par un crédit, elle ne repose sur aucune preuve ; le contrat n'énonce rien de tel et ne comporte aucune référence à un recours à l'emprunt ; les mentions manuscrites figurant sur l'exemplaire de la facture que produit M. [H], d'une origine et d'une date incertaines, ne constituent pas à cet égard une preuve ou un indice exploitable, d'autant qu'elles figurent sur un document édité le 19 décembre 2017 soit plus de six mois après la conclusion du contrat, époque à laquelle s'apprécie l'existence d'un vice du consentement.
Les allégations de l'appelant selon lesquelles le dirigeant de l'entreprise l'aurait contacté pour lui demander les documents nécessaires à la présentation d'une demande de crédit bancaire sont contestées, et elles ne reposent sur aucun élément probant.
La circonstance que M. [H] n'aurait pas disposé des fonds sur son compte ne constitue pas une preuve par elle-même.
Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation du contrat pour dol et/ou pour abus de faiblesse.
* sur la demande d'annulation du contrat tirée de la méconnaissance du droit de la consommation
Le contrat entre Aladdin Concept, société implantée dans le Vaucluse, et M. [H], a été signé au domicile de celui-ci, à [Localité 5].
Il est constant entre les parties que M. [H] avait contacté l'entreprise, et que celle-ci a dépêché un de ses représentants chez lui.
Elle est donc venue à sa demande à son domicile lui proposer la vente et la pose d'un abri de jardin, ce qui correspond à la situation visée à l'ancien article L.121-21 du code de la consommation, dont les termes sont reproduits en dernière page du contrat conclu par les parties, selon lequel est soumis aux dispositions de la présente section quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage au domicile ou à la résidence d'une personne physique même à sa demande, afin de lui proposer l'achat, la vente, la location, la location-vente ou la location avec option d'achat de biens ou la fourniture de services.
Le contrat, contrairement à ce que soutient l'intimée, est donc bien soumis aux règles applicables en matière de démarchage.
Ce constat, tiré des dispositions antérieures à l'ordonnance n°2016-310 du 14 mars 2016 telles qu'elles sont visées au contrat, reste le même en considérant les dispositions issues de cette ordonnance, puisque le contrat est un contrat hors établissement au sens de ce texte.
Parmi ces règles, l'ancien article L.121-26 du code de la consommation -également reproduit en dernière page du contrat- dispose qu'avant l'expiration du délai de réflexion prévu à l'article L.121-25, nul ne peut exiger ou obtenir du client, directement ou indirectement, à quelque titre ni sous quelque forme que ce soit, une contrepartie quelconque ni aucun engagement, ni effectuer des prestations de services de quelque nature que ce soit.
Cette interdiction a été reprise à l'article L.221-10 du code de la consommation en sa rédaction issue de l'ordonnance n°2016-310 du 14 mars 2016, qui dispose que le professionnel ne peut recevoir aucun paiement ou aucune contrepartie, sous quelque forme que ce soit, de la part du consommateur, avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat hors établissement.
Alors que le contrat est en date du 6 juin 2017, il ressort des productions que [T] [H] a remis à la société Aladdin Concept deux chèques bancaires de 5.000 euros chacun qui sont l'un et l'autre datés dudit jour, 6 juin 2017, et qu'elle a encaissés.
La date figurant sur ces chèques est présumée exacte, et c'est à la SARL Aladdin Concept de rapporter la preuve de son affirmation, contestée, selon laquelle ils auraient été émis, et lui auraient été remis, après l'expiration du délai de réflexion courant à compter du 6 juin 2017, et donc antidatés.
Elle ne rapporte pas cette preuve, ni d'ailleurs seulement même celle d'indice en ce sens, étant à l'inverse relevé qu'elle a écrit dans ses conclusions de première instance dans sa relation de l'historique formulée à l'imparfait 'que lors de la signature du bon de commande, Monsieur [H] devait établir deux chèques d'un montant de 5.000 euros correspondant à l'acompte'.
La remise par M. [H] à la société Aladdin Concept de deux chèques bancaires le jour de la signature du contrat conclu hors établissement contrevient à la prohibition légale instituée par l'ancien article L.121-26 visé à la convention, et par l'article L.221-10 en sa rédaction applicable au jour de la signature invoqué par l'appelant.
Elle justifie la nullité du contrat sollicitée par M. [H].
La société Aladdin Concept soutient que l'éventuelle nullité encourue aurait été couverte par la prise de possession sans réserve de l'abri.
La confirmation d'un acte nul procède de son exécution volontaire en connaissance du vice qui l'affecte.
L'exécution du contrat de vente par le consommateur ne résulte pas de ce qu'il a signé un 'procès-verbal de réception - de livraison' ; elle se traduit essentiellement par son paiement du prix de la chose ou du service fournis, or M. [H] n'a pas payé le prix de l'abri, ayant émis pour régler le solde du prix restant dû après l'encaissement des deux chèques de 5.000 euros indûment perçus le jour de la conclusion du contrat un chèque qu'il présente comme un chèque de garantie, et qu'il savait ne pouvoir être honoré faute de provision suffisante sur le compte.
Quant à la confirmation d'une obligation résultant d'un contrat entaché d'une nullité, elle suppose la preuve que l'acquéreur avait eu connaissance du vice et l'intention de le réparer.
Pour ce qui est de la connaissance par [T] [H] du vice affectant le contrat, rien ne l'établit, hormis la considération parfaitement théorique qu'ayant déclaré en signant le contrat en avoir pris intégralement connaissance, il pouvait donc comprendre, pour y avoir lu reproduit l'ancien article L.123-26 du code de la consommation, que la société Aladdin Concept n'avait pas le droit de faire ce qu'elle faisait en exigeant de lui un acompte le jour du contrat.
Quant à la volonté de [T] [H] de réparer le vice, il n'en est produit ni preuve, ni indice.
La perception de deux chèques par la société Aladdin Concept le jour de la signature ne méconnaissait pas une règle relevant du formalisme du droit de la consommation, telle l'exigence de désigner précisément dans le contrat la nature et les caractéristiques des biens offerts ou des services proposés et les conditions d'exécution du contrat, mais violait la prohibition pénalement sanctionnée -par l'ancien article L.121-23, alinéa 1er, reproduit dans le contrat- pour le professionnel de percevoir directement ou indirectement la moindre contrepartie lors de la signature du contrat, et il ne saurait être recouru à la fiction de présumer que parce que le texte était reproduit dans le contrat et que le bien a été fourni, M. [H] aurait eu la volonté de réparer un tel vice, entièrement imputable à son cocontractant puisque la loi interdit au professionnel de se faire remettre une contrepartie avant l'expiration du délai de rétractation, sans énoncer que le consommateur qui cède à cette exigence enfreint lui-même une prohibition.
La confirmation de l'acte nul invoquée subsidiairement par l'intimée n'est donc pas établie.
L'appelant est ainsi fondé à voir, par infirmation du jugement, prononcer la nullité du contrat de vente d'un abri de piscine conclu le 6 juin 2017.
Cette nullité implique restitution, et l'appelant est fondé à solliciter la condamnation de l'intimée à lui restituer les (5.000 + 5.000 + 2.000) = 12.000 euros encaissés au moyen de trois chèques d'acomptes par la société Aladdin Concept et ce, à titre compensatoire, avec intérêts au taux légal à compter de leur remise soit du 6 juin 2017 sur 10.000 euros et du 8 février 2018 sur 2.000 euros.
M. [H] est aussi fondé à demander qu'Aladdin Concept lui rende le chèque n°17 7553011 de 34.630 euros qu'il lui avait remis et qu'elle ne conteste pas détenir encore.
Il n'y a pas lieu d'assortir d'une astreinte cette condamnation, eu égard à l'absence d'enjeu réel s'attachant à la restitution d'un chèque émis en 2017.
M. [H] soutient que la violation par l'intimée des règles du démarchage lui a causé un préjudice qu'il convient de réparer en lui allouant 10.000 euros de dommages et intérêts.
Il n'établit pas le préjudice qu'il aurait subi consécutivement à cette violation, et qui n'est pas en lien suffisant de causalité avec son inscription au fichier des incidents tenu à la Banque de France ni avec les frais, dépens et tracas liés aux différentes instances ayant opposé les parties devant le juge de l'exécution, tous liés à son émission d'un chèque sans provision frappé par lui d'opposition pour vol.
Cette demande sera donc rejetée.
La société Aladdin Concept succombe au procès et supportera les dépens de première instance et d'appel.
Elle versera une indemnité de procédure à M. [H] en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
la cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:
INFIRME le jugement déféré
statuant à nouveau :
DIT que la société Aladdin Concept s'est fait remettre indûment deux chèques d'acompte par [T] [H] le jour de la conclusion du contrat conclu hors établissement
ANNULE le contrat de vente d'un abri de piscine conclu le 6 juin 2017 entre [T] [H] et la SARL Aladdin Concept
CONDAMNE la société Aladdin Concept à restituer à [T] [H] la somme de 12.000 euros qu'elle a reçue de lui à titre d'acomptes, avec intérêts au taux légal à compter du 6 juin 2017 sur 10.000 euros et du 8 février 2018 sur 2.000 euros
ORDONNE à la SARL Aladdin Concept de restituer à [T] [H] le chèque n°17 7553011E de 34.630 euros daté du 8 février 2018 tiré sur La Banque Postale
DÉBOUTE [T] [H] de sa demande de dommages et intérêts
CONDAMNE la société Aladdin Concept aux dépens de première instance et d'appel
CONDAMNE la société Aladdin Concept à payer à [T] [H] la
somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,