La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/11/2022 | FRANCE | N°21/00591

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 15 novembre 2022, 21/00591


ARRÊT N°533



N° RG 21/00591



N° Portalis DBV5-V-B7F-GGMS















[N]

[B]



C/



[S]

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 15 NOVEMBRE 2022





Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 février 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire de POITIERS





AP

PELANTS :



Monsieur [I] [N]

né le [Date naissance 6] 1956 à [Localité 16] (79)



Madame [K] [B] épouse [N]

née le [Date naissance 7] 1958 à [Localité 14] (85)



demeurant tous deux au : [Adresse 3]

[Localité 18]



ayant tous deux pour avocat postulant et plaidant Me Philippe BROTTI...

ARRÊT N°533

N° RG 21/00591

N° Portalis DBV5-V-B7F-GGMS

[N]

[B]

C/

[S]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 15 NOVEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 février 2021 rendu par le Tribunal Judiciaire de POITIERS

APPELANTS :

Monsieur [I] [N]

né le [Date naissance 6] 1956 à [Localité 16] (79)

Madame [K] [B] épouse [N]

née le [Date naissance 7] 1958 à [Localité 14] (85)

demeurant tous deux au : [Adresse 3]

[Localité 18]

ayant tous deux pour avocat postulant et plaidant Me Philippe BROTTIER de la SCP PHILIPPE BROTTIER - THIERRY ZORO, avocat au barreau de POITIERS

INTIMÉE :

Madame [P] [S]

[Adresse 5]

ayant pour avocat postulant Me Thomas DROUINEAU de la SCP DROUINEAU-LE LAIN-VERGER-BERNARDEAU, avocat au barreau de POITIERS

ayant pour avocat plaidant Me Lola BERNARDEAU, avocat au barreau de POITIERS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] ont acquis par acte du 30 septembre 2013 des immeubles situés à [Localité 18], soit :

-section AH n° [Cadastre 10], lieudit [Adresse 4] pour une surface de 00 ha 10 a 92 ca

-section AH n° [Cadastre 12], lieudit [Localité 15] pour une surface de 00 ha 03 a 51 ca

-section AH n° [Cadastre 13], lieudit [Localité 15] pour une surface de 00 ha 28 a 26 ca.

S'estimant titulaires de deux droits de passage l'un devant qui n'est pas discuté et l'autre derrière, ils sont entrés en conflit avec la nouvelle propriétaire de la parcelle voisine, Mme [P] [S] épouse [D].

Ne pouvant parvenir à un accord, ils ont saisi le tribunal d'instance qui par jugement du 25 mars 2019, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Poitiers.

Aux termes de leurs dernières écritures, M. et Mme [N] sollicitaient de voir dire que le fond leur appartenant cadastré AH 01 numéro [Cadastre 13] bénéficie de deux servitudes de passage sur le fond appartenant à Mme [S] cadastré AH 01 numéro [Cadastre 9], de voir désigner un géomètre expert aux fins d'en déterminer l'assiette, de condamner la défenderesse à leur payer la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de leur conseil.

Mme [P] [S], aux termes de ses dernières écritures, concluait au débouté des demandes formulées, à la condamnation des demandeurs à lui payer la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par jugement contradictoire en date du 02/02/2021, le tribunal judiciaire de POITIERS a statué comme suit :

'Rejette les demandes formulées par M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N].

Rejette les autres demandes.

Condamne [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] aux dépens'.

Le premier juge a notamment retenu que :

- les demandeurs prétendent pouvoir se prévaloir de titres dont ils ne justifient pas, la copie d'un acte authentique ancien étant illisible et donc inexploitable.

Ils n'établissent pas l'existence d'une servitude conventionnelle, les différentes attestations communiquées s'avérant inopérantes à l'établir.

- les demandeurs prétendent que leur terrain est enclavé, ce qui les contraint à

passer sur la propriété de la défenderesse à deux endroits, soit devant et derrière

la maison d'habitation.

Toutefois, les pièces versées faute de précision, de clarté ou de nature probante, ne permettent pas d'établir un état d'enclave et la demande doit être rejetée.

LA COUR

Vu l'appel en date du 23/02/2021 interjeté par M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N]

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 29/07/2021, M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] a présenté les demandes suivantes :

'Vu les articles 637 et suivants du Code Civil, 694 du Code Civil,

Vu les actes notariés de 1924 et 1944 et l'attestation notariale de Me [L] du 17.02.2021.

Réformer le jugement dont appel.

Dire et juger recevable et bien fondés M. et Mme [N] en toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Dire et juger que le fonds de M. et Mme [N] cadastré AH 01 n°[Cadastre 13] bénéficie de la servitude de passage sur le fond de Mme [S]-[D] cadastré AH 01 n°[Cadastre 9], tel qu'elle est mentionnée dans l'acte du 22 mars 1924 et du 26 décembre 1944.

Dire et juger irrecevable et particulièrement mal fondée Mme [S] épouse [D] en toutes ses demandes, fins et conclusions contraires.

Condamner Mme [S]-[D] au paiement d'une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP BROTTIER avocat sur ses affirmations de droit, en application de l'article 699 du CPC.

A l'appui de leurs prétentions, M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] soutiennent notamment que :

- le droit de passage arrière est maintenant querellé par Mme [F] (nouvelle propriétaire) alors même qu'il est conventionnel (pièce 13) et notarié (pièces 22-23) et il importe que son assiette soit déterminéeM. [Z] le précédent propriétaire de la parcelle de Mme [S] leur avait fait un papier attestant de cette servitude de son vivant puisque la servitude ne figurait pas dans l'acte des époux [N].

- la servitude est visée aux actes notariés de 1924 et 1944 qui n'est pas illisible.

- en l'espèce, la servitude de passage a été établie au profit du fonds dominant cadastré AH 01 n°[Cadastre 13] en raison d'un état d'enclave, qui est attesté par la mairie de [Localité 18] elle-même.

- plusieurs témoignages confirment d'ailleurs l'issue insuffisante à la voie publique, ce qui explique l'usage continu de ce droit de passage depuis près d'un siècle (Pièces n°14 et 15) conforme aux actes notariés antérieurs produits.

- les consorts [N] possèdent trois parcelles cadastrées AH 01 n°[Cadastre 10], [Cadastre 12]

et [Cadastre 13], constituées d'une maison d'habitation, d'une grange, d'un champ à l'arrière et d'un jardin à l'avant. Or, le champ situé à l'arrière de la maison (AH [Cadastre 13]) n'est accessible que depuis le chemin passant à l'arrière de la maison, le long de la parcelle cadastrée AH 01 n°[Cadastre 9].

Les consorts [N] ont indispensablement besoin de passer par ce chemin, sans quoi ils n'ont plus la possibilité d'entretenir et de cultiver le champ, comme la mairie et les témoins l'attestent.

- l'existence d'une servitude de surcroît conventionnelle est établie par titre même si elle a été oubliée dans le dernier acte comme l'écrit Me [L], Notaire (pièce 23) mais qui figurait expressément dans les actes antérieurs.

- M. [Z], ancien propriétaire du fonds de Mme [S], l'a confirmé par un acte sous seing privé (pièce n°13) puisqu'elle avait été omise dans l'acte d'achat des appelants.

- Si Mme [S] conteste ce document, il convient qu'elle aille au bout de son raisonnement et sollicite une expertise en écriture comparative.

- il est incontestable qu'il existe bel et bien un droit de passage arrière comme l'attestent les titres de 1924 et 1944, et qui sont les derniers, avant ceux établis aux noms des propriétaires actuels.

- ce n'est pas la construction du préau en limite séparative AH [Cadastre 10] avec la parcelle AH [Cadastre 13] qui en interdit son accès à M. et Mme [N]. Déjà le cadastre 1832 ou des documents plus récents montrent qu'il y avait des bâtiments sur toute la longueur séparative entre les parcelles AH [Cadastre 10] et AH [Cadastre 13], écroulés pour certains au moment de l'achat de leur propriété par M. et Mme [N].

Si l'accès à la parcelle AH [Cadastre 13] est possible à pied depuis la parcelle AH [Cadastre 10], il est par contre impossible depuis la parcelle AH [Cadastre 10] avec un véhicule puisque la largeur est insuffisante.

- la parcelle AH [Cadastre 13] se trouve bien en enclave, et peu importe qu'existe une

servitude notariale

- le droit de passage sur la parcelle AH [Cadastre 9] n'était pas empierré avant 2015. Il est donc normal que les prises de vue google earth ne montrent pas clairement l'emprise du chemin avant.

- la présence d'une clôture ancienne témoigne du droit de passage.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 05/05/2022, Mme [P] [S] a présenté les demandes suivantes :

'Vu les dispositions des articles 637, 688 et 691 du code civil,

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Il est demandé à la cour d'appel de POITIERS de bien vouloir,

RECEVOIR Mme [P] [S] épouse [D] en ses demandes et l'y déclarer bien fondée,

Ce faisant,

CONFIRMER en tous points le jugement rendu par le tribunal judiciaire de POITIERS en date du 2 février 2021,

DÉBOUTER M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] de leur demande de reconnaissance de l'existence d'une servitude de passage sur le fonds appartenant à Mme [P] [S] épouse [D],

CONDAMNER M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] à verser à Mme [P] [S] épouse [D] la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] aux entiers dépens de l'instance'.

A l'appui de ses prétentions, Mme [P] [S] soutient notamment que:

- elle a accepté la succession de son parrain M. [T] [Z] et est désormais propriétaire de 3 parcelles cadastrées :

* section AH numéro [Cadastre 8] pour une surface de 00 ha 29 a 30 ca,

* section AH numéro [Cadastre 9] pour une surface de 00 ha 87 a 79 ca,

* section AH numéro [Cadastre 11] pour une surface de 00 ha 06 a 82 ca.

- une procédure de médiation n'a pas abouti.

- la parcelle AH [Cadastre 10] appartenant aux consorts [N] n'est pas enclavée, car elle bénéficie d'un droit de passage sur la parcelle AH [Cadastre 11] appartenant à Mme [D].

La parcelle AH [Cadastre 13], adjacente à la AH [Cadastre 10], peut bénéficier du même droit de passage.

Des travaux ont été entrepris par les consorts [N], qui ont créé un bâtiment sur la limite séparative des parcelles AH [Cadastre 10] et [Cadastre 13].

Il ressort des prises de vue GOOGLE EARTH versées aux débats que ce bâtiment n'existait pas par exemple en l'an 2015, mais apparaît en 2018.

- M. et Mme [N] ont bénéficié d'un droit de passage sur la parcelle AH [Cadastre 9] qui leur a été accordé pour la durée de leurs travaux par Mme [S], d'où l'apparition d'un chemin à ce moment.

- la parcelle AH [Cadastre 13] n'est pas enclavée au sens de l'article 682 du code civil, puisqu'elle est desservie par le chemin rural longeant les parcelles [Cadastre 8], [Cadastre 9] et [Cadastre 1], et qu'elle peut bénéficier du droit de passage sur la parcelle AH [Cadastre 11] pour accéder à la voie publique.

- il n'existe pas de servitude conventionnelle : en l'absence de production de titre valable, la demande des époux [N] ne pourra qu'être rejetée.

En effet, la charge doit être établie au profit du fonds et non pas de la personne.

L'engagement d'un propriétaire vis-à-vis d'un autre n'est pas interdit mais ne constitue pas une servitude, sans qu'il existe un droit de suite.

Mme [S] a donc la possibilité de ne pas souhaiter perpétuer cet engagement au profit des époux [N].

- le document dactylographié versé aux débats en pièce n°13 par les consorts [N], il comporte une signature illisible dont il n'est absolument pas certain qu'elle soit celle de M. [Z], ni qu'elle ait été écrite de sa main.

- M. [Z] mentionne un droit de passage à la charge d'une parcelle et au profit d'une autre. Cependant, il ne s'agit là que d'un acte recognitif et non d'un acte constitutif, qui ne comporte pas de référence à un acte constitutif de servitude.

- l'attestation notariée versée est sans valeur.

- les autres pièces versées par les appelants ne sont pas probantes.

- M. [Y], qui a connu M. [Z], atteste qu'il n'y a jamais eu de droit de passage autre que celui de la cour de la parcelle AH [Cadastre 11].

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 22/08/2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'existence d'une servitude conventionnelle de passage :

L'article 691 du code civil dispose que : "les servitudes continues non apparentes, et les servitudes discontinues apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titres. La possession même immémoriale ne suffit pas pour les établir, sans cependant qu'on puisse attaquer aujourd'hui les servitudes de cette nature déjà acquises par la possession, dans les pays où elles pouvaient s'acquérir de cette manière."

Aux termes de l'article 688 du code civil, "les servitudes sont ou continues, ou discontinues. Les servitudes continues sont celles dont l'usage est ou peut être continuel sans avoir besoin du fait actuel de l'homme : tels sont les conduites d'eau, les égouts, les vues et autres de cette espèce.

Les servitudes discontinues sont celles qui ont besoin du fait actuel de l'homme pour être exercées : tels sont les droits de passage, puisage, pacage et autres semblables."

L'article 695 du même code dispose que : 'le titre constitutif de la servitude, à l'égard de celles qui ne peuvent s'acquérir par la prescription, ne peut être remplacé que par un titre récognitif de la servitude, et émané du propriétaire du fonds asservi'.

Ainsi, les servitudes discontinues, tel qu'un droit de passage, ne peuvent s'établir que par titre, aux termes des dispositions de l'article 691 du code civil.

Elle l'espèce, M. et Mme [N], propriétaires des parcelles section AH n° [Cadastre 10], lieudit [Adresse 4] pour une surface de 00 ha 10 a 92 ca, section AH n° [Cadastre 12], lieudit [Localité 15] pour une surface de 00 ha 03 a 51 ca, et section AH n° [Cadastre 13], lieudit [Localité 15] pour une surface de 00 ha 28 a 26 ca, soutiennent en premier lieu l'existence d'une servitude conventionnelle de passage au profit de cette dernière parcelle, fonds dominant, sur la parcelle cadastrée section AH numéro [Cadastre 9] pour une surface de 00 ha 87 a 79 ca, fonds servant appartenant à Mme [S], héritière de M. [Z].

S'il est relevé que les titres de propriété versés aux débats, dont l'acte d'acquisition du 30 septembre 2013 de M. et Mme [N] ne font pas mention d'une telle servitude conventionnelle , sont désormais produits aux débats copies d'un acte de vente du 22 mars 1924 ainsi que d'un acte de donation partage du 26 décembre 1944, certes manuscrits, mais qui sont lisibles et donc exploitables.

Ainsi qu'en atteste Maître [X] [L] le 17 février 2021, cet acte reçu par Maître [M], alors notaire à [Localité 17], le 22 mars 1924, fait état d'une vente par Monseigneur [V] à M. et Mme [E] [W] (aux droits desquels se trouvent aujourd'hui M. et Mme [C]), précisant, relativement à la parcelle alors désignée comme partie de la parcelle située « derrière les bâtiments présentement vendus », aujourd'hui cadastrée AH [Cadastre 13] :« Pour l'exploitation de cette partie de pièce de terre, M. et Mme [R] [W] auront un droit de passage à pied, à cheval et en voiture, à toute heure du jour et de la nuit sur les parties de cette pièce de terre vendues à Mme Veuve [W] et à Mme [G])'.

Aux termes de cet acte, il est également précisé selon le noraire, que les biens vendus proviennent d'une propriété de plus grande importance dont le surplus est vendu à Mme Veuve [W] née [A] d'une part, et Mme Veuve [G] née [W], d'autre part, respectivement mère et soeur de M. [E] [W].

Egalement, est versée aux débats copie d'une donation partage intervenue, faisant expressément rappel de servitude.

Il s'agit d'un acte reçu par Maître [H], alors notaire à [Localité 17], le 26 décembre 1944, contenant donation-partage par Mme Veuve [W] née [A], à ses trois enfants et seuls présomptifs héritiers, au nombre desquels M. [E] [W] et Mme Veuve [G].

Aux termes de cet acte a notamment été attribuée à M. [E] [W], une parcelle de terre située à [Localité 18], lieudit « [Localité 15] » avec la Société Civile Professionnelle titulaire d'un Office Notariale précision qu'elle joignait d'un côté M. [E] [W], d'un autre côté Mme [G], et au bout les bâtiments également compris à ladite donation-partage.

Comme l'indique le notaire, l'origine de propriété de ces différents biens précise que Mme Veuve [W] les avait acquis de Monseigneur [V], suivant acte reçu par Me [M], notaire susnommé, le 22 mars 1924, faisant ainsi expressément référence à l'acte précédemment évoqué.

Cette parcelle attribuée à M. [E] [W] a été réunie avec celle que ce dernier avait lui-même acquise ainsi qu'il est dit ci-dessus, et est aujourd'hui identifiée au cadastre sous le numéro [Cadastre 13] de la section AH.

L'existence d'une servitude conventionnelle, postérieurement omise dans les actes postérieurs, est ainsi établie, d'autant qu'est versé aux débats un courrier du 24 février 2014, signé tant de M. [N] que de l'auteur de Mme [S], M. [Z], qui indique que ce dernier certifie 'qu'il existe depuis de nombreuses décennies un droit de passage allant de la parcelle cadastrée feuille 000 AH 01 n° [Cadastre 9] , dont je suis propriétaire vers la parcelle cadastrée feuille 000 AH 01 n° [Cadastre 13], dont M.. [I] [N] et Mme [K] [B] sont propriétaires'.

Ce document mentionnant expressément l'existence d'une servitude de passage de la parcelle lieudit [Localité 15] pour une surface de 00 ha 03 a 51 ca, et section AH n° [Cadastre 13], fond dominant, sur la parcelle cadastrée section AH numéro [Cadastre 9] pour une surface de 00 ha 87 a 79 ca, fond servant, émane du propriétaire du fond asservi et est suffisamment précis pour avoir qualité de titre recognitif, en sus des titres établis en 1924 et 1944.

Au surplus, le neveu de [T] [Z], [O] [Z], a indiqué par courrier du 24 avril 2018 qu'au début 2014, 'mon oncle a appris à M. [N] l'existence d'un droit de passage situé derrière chez lui parcelle M [Cadastre 9] qui permettait l'accès au champs, parcelle N [Cadastre 13]".

Ce courrier, en dépit de son défaut de formalisme, conserve une force probante et doit être apprécié, en contradiction avec l'attestation de M. [Y] qui indiquait que M. [Z] 'ne m'a jamais fait part d'un droit de passage existant sur le terrain '.

La réalité de ce droit est également attestée par le maire de la commune de [Localité 18] le 27 novembre 2019, qui indiquait qu'un chemin partant de la [Adresse 4] traverse les parcelles AH [Cadastre 13] et AH [Cadastre 9] qui permettait d'accéder à la parcelle AH [Cadastre 2] appartenant à la collectivité, et mentionnait que 'cette servitude trentenaire...' doit être conservée par M. [N].

Il ressort ainsi des actes produits qu'existe en l'espèce une servitude conventionnelle de passage, établie depuis 1924 au profit de la parcelle lieudit [Localité 15], section AH n° [Cadastre 13], fonds dominant, sur la parcelle cadastrée section AH numéro [Cadastre 9] pour une surface de 00 ha 87 a 79 ca, fonds servant.

Il y a lieu en conséquence, sans qu'il soit besoin de statuer sur une éventuelle situation d'enclave, d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. et Mme [N] de leurs demandes et de dire que le fonds de M. et Mme [N] cadastré AH 01 n°[Cadastre 13] bénéficie de la servitude de passage sur le fonds de Mme [S]-[D] cadastré AH 01 n°[Cadastre 9], tel qu'elle est mentionnée dans les actes du 22 mars 1924 et du 26 décembre 1944.

Cette servitude s'exercera ainsi par toute personne ou véhicule, à toute heure du jour et de la nuit, tel que prévu à l'acte du 22 mars 1924.

Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens de première instance et d'appel seront fixés à la charge de Mme [P] [S].

Il sera fait application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP BROTTIER, avocat.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner in solidum M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] à payer à Mme [P] [S] la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

INFIRME le jugement entrepris.

Statuant à nouveau,

CONSTATE l'existence d'une servitude conventionnelle de passage établie depuis 1924 au profit de la parcelle sise commune de [Localité 18], lieu dit '[Localité 15]', section AH n° [Cadastre 13], fonds dominant, sur la parcelle cadastrée section AH numéro [Cadastre 9] pour une surface de 00 ha 87 a 79 ca, fonds servant.

DIT que cette servitude s'exercera ainsi par toute personne ou véhicule, à toute heure du jour et de la nuit, comme prévu à l'acte du 22 mars 1924.

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

CONDAMNE in solidum M. [I] [N] et Mme [K] [B] épouse [N] à payer à Mme [P] [S] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et d'appel.

CONDAMNE Mme [P] [S] aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la SCP BROTTIER, avocat.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/00591
Date de la décision : 15/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-15;21.00591 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award