ARRÊT N°526
N° RG 21/00224
N° Portalis DBV5-V-B7F-GFP7
S.A. SMA
C/
[T]
et autres (...)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 15 NOVEMBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 octobre 2020 rendu par le Tribunal Judiciaire de POITIERS
APPELANTE :
S.A. SMA
[Adresse 4]
[Localité 3]
ayant pour avocat postulant Me François MUSEREAU de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS
ayant pour avocat plaidant Me Samuel VIEL, avocat au barreau de POITIERS
INTIMÉS :
Monsieur [U] [T]
né le 20 Février 1971 à [Localité 7] (44)
[Adresse 2]
[Localité 5]
ayant pour avocat postulant et plaidant Me Stéphanie DUBIN-SAUVETRE de la SELARL GASTON - DUBIN SAUVETRE - DE LA ROCCA, avocat au barreau de POITIERS
Madame [C] [D]
née le 30 Juillet 1969 à [Localité 8] (86)
[Adresse 2]
[Localité 5]
ayant pour avocat postulant et plaidant Me Stéphanie DUBIN-SAUVETRE de la SELARL GASTON - DUBIN SAUVETRE - DE LA ROCCA, avocat au barreau de POITIERS
S.A.R.L. CONSTRUCTION AMÉNAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI
N° SIRET : 487 517 096
[Adresse 1]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Ludovic PAIRAUD de la SELARL PAIRAUD AVOCAT, avocat au barreau de DEUX-SEVRES
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre
Madame Anne VERRIER, Conseiller
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Le 23 septembre 2010 M. [T] et Mme [D] ont confié à la S.A.R.L. CAMI des travaux d'aménagement de leur maison de [Localité 5].
Le 31 janvier 2011 une facture était éditée pour un montant de 11 372,80 €.
Le 25 juin 2013 M. [T] et Mme [D] ont constaté des désordres.
Le 8 octobre 2015 un constat était dressé par Me [K], huissier de justice à [Localité 5] qui constatait de nombreux désordres.
M. [T] et Mme [D] ont fait assigner la S.A.R.L. CAMI devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Poitiers, et selon ordonnance du 26 septembre 2018, une expertise confiée à M. [N] a été ordonnée.
Suivant ordonnance du 3 avril 2019 le juge des référés a ordonné l'extension des opérations d'expertise à la société d'assurance SMA.
L'expert a déposé son rapport le 12 juillet 2019.
L'expert conclut que les travaux n'ont pas été réalisés dans les règles de l'art par la S.A.R.L. CAMI et estime le coût total des travaux de reprise à 6 695 € T.T.C.
Par acte d'huissier délivré le 4 juin 2020 M. [T] et Mme [D] ont fait assigner la S.A.R.L. CAMI et la SA SMA sur le fondement de l'article 1792 du code civil devant le tribunal judiciaire de POITIERS aux fins de :
' voir condamner in solidum la S.A.R.L. CAMI et la société d'assurance SMA à la somme de 6695 € au titre du coût des travaux de reprise
' les voir condamner in solidum à les indemniser de leur trouble de jouissance
à hauteur de 1 000 €
' les voir condamner in solidum à leur payer la somme de 3 500 € au titre de
l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.
L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 3 juillet 2020.
La société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES et la société SA SMA n'ont pas comparu pas et n'étaient pas représentées.
Par jugement réputé contradictoire en date du 02/10/2020, le tribunal judiciaire de POITIERS a statué comme suit :
'CONDAMNE in solidum la S.A.R.L. CAMI et la SMA SA - SAGENA à payer à M. [U] [T] et Mme [C] [D] la somme de
6 695 € T.T.C. assortie des intérêts au taux légal à compter de la signification de la présent décision ;
CONDAMNE in sollidum la S.A.R.L. CAMI et la SMA SA -SAGENA à payer à M. [U] [T] et Mme [C] [D] la somme de 800 €
en réparation de leur préjudice de jouissance ;
CONDAMNE in sollidum la S.A.R.L. CAMI et la SMA SA -SAGENA à payer à M. [U] [T] et Mme [C] [D] la somme de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE in sollidum la S.A.R.L. CAMI et la SMA SA - SAGENA à payer les dépens en ce compris les frais d'expertise de M. [N] et ceux du constat d'huissier dressé par Maître [K]'.
Le premier juge a notamment retenu que :
- il ressort tant du procès-verbal de constat d'huissier que des conclusions du rapport d'expertise judiciaire l'existence de malfaçons pouvant être reprochées à la S.A.R.L. CAMI, laquelle était tenue à une obligation de résultat à l'égard de M. [T] et Mme [D].
- l'origine de ces désordres concerne des travaux réalisés en dépit des règles de l'art.
- la S.A.R.L. CAMI sera condamnée in solidum avec son assureur à payer à M. [T] et Mme [D] la somme de 6 695 € au titre du coût des travaux de reprise préconisés par l'expert.
- il résulte des éléments du dossier que M. [T] et Mme [D] rapportent la preuve d'un trouble de jouissance et d'un préjudice direct et certain en découlant. Il leur sera alloué à ce titre la somme de 800 €.
LA COUR
Vu l'appel en date du 18/01/2021 interjeté par la société SA SMA
Vu l'appel en date du 18/01/2021 interjeté par la société S.A.R.L. CAMI
Vu l'ordonnance de jonction des deux procédures rendue le 09/02/2021
Vu l'article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 14/10/2021, la société SA SMA a présenté les demandes suivantes :
'Déclarer la SMA recevable et bien fondée en son appel.
Prononcer la nullité du jugement entrepris et subsidiairement le réformer.
Débouter M. [T] et Mme [D] de toutes leurs demandes, fins et prétentions.
Débouter la CAMI de son appel incident visant à faire déclarer inopposable la franchise contractuelle.
Mettre hors de cause la SMA.
Subsidiairement, dire que la SMA est fondée à opposer à la société CAMI la franchise contractuelle, quelque soit le fondement de la responsabilité retenue, et aux consorts [T] [D] si la responsabilité de la société CAMI est retenue sur le fondement contractuel de droit commun.
Condamner M. [T] et Mme [D] à payer à la SMA la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner M. [T] et Mme [D] aux entiers dépens.
Autoriser Maître François MUSEREAU, SELARL JURICA, avocats associés, à poursuivre directement le recouvrement des frais dont elle aura fait l'avance sans avoir reçu provision, dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions, la société SA SMA soutient notamment que:
- sur la nullité du jugement, le tribunal vise non seulement les dispositions de l'article 1792 du Code civil mais également celles de l'article 1231-1 du code civil et statue sur ce dernier fondement sans qu'il ait été évoqué.
Le principe de la contradiction n'a donc pas été respecté et le jugement entrepris doit être annulé.
- la SMA n'avait pas « choisi » de ne pas se faire représenter en première instance mais elle n'en n'avait pas eu le temps compte tenu de la brièveté du délai qui s'est écoulé entre l'assignation (4 juin 2020) et l'audience (3 juillet 2020).
- les conditions particulières sont signées par la CAMI qui ne conteste d'ailleurs pas le champ de la garantie aux seules activités déclarées.
- les désordres affectant le parquet, la pose des plinthes, la fenêtre de la chambre, le placoplâtre, concernent tous des activités non souscrites par la société CAMI auprès de la SMA.
- la fourniture et la pose de la poutre de renfort en sapin de section 100 × 300 mm est un ouvrage qui ne faisait pas partie ni du devis de travaux accepté par les consorts [T] [D] ni de la facture émise par la société CAMI qui a déclaré au cours des opérations d'expertise que cet ouvrage aurait été réalisé « gracieusement ».
- la société CAMI ne pouvait ignorer que la très grande majorité des travaux réalisés pour les consorts [T] [D] ne relevait pas des activités garanties par sa police d'assurance obligatoire.
- la société CAMI, déclare avoir réalisé des travaux qui ne font pas partie ni du devis accepté par le maître de l'ouvrage ni de sa facture émise mais cette déclaration non corroborée a été faite dans le seul et unique objectif de tenter d'obtenir la garantie de l'assureur responsabilité civile décennale.
- aucune pièce ne vient établir que cet ouvrage aurait été facturé et payé, et la garantie d'assurance obligatoire de responsabilité décennale n'est due qu'au titre des travaux de construction lorsque l'assuré est « titulaire d'un contrat de louage d'ouvrage ».
- la SMA sera mise hors de cause.
- sur la garantie décennale, faute de démontrer que la réception de l'ouvrage a eu lieu, les consorts [T] et [D] ne peuvent agir sur le fondement de la garantie décennale
A supposer que l'ouvrage ait été réceptionné, encore faudrait-il que les consorts [T] [D] démontrent que les désordres invoqués rendent l'ouvrage impropre à sa destination ou qu'ils nuisent à sa solidité.
- sur la responsabilité contractuelle de droit commun, ce risque n'est pas garanti par le contrat souscrit auprès de la SMA. L'exclusion de garantie stipulée aux conditions générales a donc vocation à s'appliquer et en outre la SMA n'était pas l'assureur de la CAMI pour ce type de risque au moment de la réclamation qui doit être faite pendant la durée de validité du contrat.
Le contrat souscrit par la société CAMI auprès de la SMA a été résilié à compter du 30 juillet 2012. Les consorts [T] [D] ont assigné la société CAMI en référé expertise par acte en date du 3 août 2018 et l'assureur de la société n'était pas la SMA, sauf à ce que la société CAMI ne démontre qu'elle n'était pas assurée pour le risque de responsabilité civile professionnelle à cette date.
- la franchise sera opposable à la société CAMI.
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 19/07/2021, la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI a présenté les demandes suivantes:
'Vu,
L'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde de droit de l'homme et de liberté fondamentale,
Le code de procédure civile notamment en ses articles 12, 14, 16, 114, 455,458, 473, 474, 514-1, 514- 3, 514-6, 455
Le jugement du tribunal judiciaire de Poitiers du 2 octobre 2020
La déclaration d'appel du 25/01/2021 et les moyens d'appel
Le bordereau de 12 pièces annexées à la demande
Il plaira à la Cour de :
RECEVOIR la S.A.R.L. CAMI en son recours et de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions en les jugeant bien fondées.
JUGER ET DIRE que les Consorts [T] et [D] ne font pas la preuve qui leur incombe d'avoir régulièrement cité la S.A.R.L. CONSTRUCTION ET AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES-CAMI à comparaître devant le tribunal judiciaire de Poitiers à l'audience du 3 juillet 2020.
JUGER ET DIRE que les Consorts [T] et [D] ne font pas la preuve qui leur incombe d'avoir régulièrement cité la SMA assureur de la S.A.R.L. CAMI à comparaître devant le tribunal judiciaire de Poitiers à l'audience du 3 juillet 2020
PRONONCER la nullité de l'assignation du 4 juin 2020 faute d'avoir été signifiée en la personne du représentant légal de CAMI ou au lieu de son siège social.
PRONONCER la nullité de l'assignation du 04 juin 2020 signifiée à la requête des consorts [T] et [D] pour violation des garanties procédurales de la S.A.R.L. CAMI et de son assureur.
JUGER ET DIRE que le jugement du 2 octobre 2020 RG 20/001172 a été prononcé en violation des garanties procédurales de la S.A.R.L. CAMI et de son assureur la SMA et de leur droit fondamental de prétendre à un procès équitable.
JUGER ET DIRE pour ces motifs que le jugement le jugement du 2 octobre 2020 RG 20/001172 du tribunal judiciaire de Poitiers a été improprement qualifié de réputé contradictoire en violation des dispositions combinées des articles 458 al. 1er ,473 et 474 du code de procédure civile.
JUGER ET DIRE qu'en condamnant la S.A.R.L. CAMI in solidum avec la SMA à payer les travaux de reprise des désordres qui lui sont imputés sur le fondement de la responsabilité encourues par les constructeurs d'ouvrages sur le fondement de l'article 1792 du Code civil, le jugement RG 20/0001172 du 2 octobre 2020 est entaché d'une erreur de droit qui le prive de toute motivation.
JUGER ET DIRE la franchise contractuelle dont se prévaut la SMA est inopposable à la société CAMI S.A.R.L. faut d'avoir été expressément soumis à la négociation et acceptée par cette dernière lors de la souscription de la police d'assurance.
DÉBOUTER en tout état de cause les consorts [T] et [D] de leurs demandes fins et conclusions.
STATUER ce que de droit sur les demandes, fins et conclusions de la SMA.
CONDAMNER in solidum M. [U] [T] et Mme [C] [D] aux entiers dépens d'instance et à payer à la S.A.R.L. CAMI une somme chacun de 3 000 € à titre d'indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile'.
A l'appui de ses prétentions, la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMÉNAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI soutient notamment que :
- le jugement déféré encourt l'annulation pour avoir méconnu les garanties procédurales de la concluante en première instance. Le gérant de la S.A.R.L. CAMI n'a pas été rendu destinataire ni d'un avis de passage de l'huissier de justice instrumentaire ni de la lettre simple prévue à l'article 658 du Code de procédure civile.
L'assureur de la S.A.R.L. CAMI, la SMA a été victime de cette même défaillance.
La S.A.R.L. CAMI et son assureur n'ont jamais été dûment et régulièrement cités à comparaître à l'audience du 3 juillet 2020 et l'assignation du 4 juin 2020 est foncièrement entachée de nullité du fait de l'absence ou de l'insuffisance des diligences de signification que le juge de première instance ne pouvait méconnaitre, alors que l'exécution provisoire de droit l'expose à des conséquences manifestement excessives.
- la nullité de l'assignation du 4 juin 2020 implique par voie de conséquence la nullité du jugement du 2 octobre 2020 et son exécution provisoire doit être arrêtée en prévention des conséquences manifestement excessives de son exécution.
- les travaux litigieux concernent des menues réparations d'entretien des ouvrages existant que la S.A.R.L. CAMI n'a fait que consolider sans intervenir sur la structure, le clos et le couvert de la maison individuelle des consorts [T] et [D].
- les désordres décrits ne relèvent pas du domaine de la responsabilité civile décennale des constructeurs d'ouvrages et il y a erreur manifeste d'application du droit.
L'annulation à défaut la réformation de l'entier dispositif du jugement déféré est pleinement encourue.
- en se bornant à reproduire in extenso l'opinion du technicien sans vérifier le bien fondé le juge de première instance a privé sa décision de toute motivation.
- la limitation conventionnelle de la garantie dilatoirement opposée par la SA SMA lui est inopposable.
Faute d'avoir été prélablement soumis à la négociation des parties et acceptée en tant que telle lors de la souscription des conditions particulières de la police d'assurance responsabilité civile décennale, la franchise alléguée s'avère inopposable à l'assuré.
- les consorts [T] et [D] ne pourront qu'être déboutés de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions.
- il y a lieu de statuer ce que de droit sur les demandes de la SMA et de la débouter pour le surplus de sa demande subsidiaire tendant à la limitation conventionnelle de son obligation de garantie.
Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 16/07/2021, M. [U] [T] et Mme [C] [D] ont présenté les demandes suivantes :
'Dire et juger la SA SMA recevable en son appel mais la déclarer mal fondée,
Dire le jugement du tribunal judiciaire dont appel non entaché de nullité,
Débouter la SA SMA de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Poitiers en l'ensemble de ses dispositions en ce qu'il a :
- condamné in solidum S.A.R.L. CAMI et la SMA - SA-SAGENA à payer à M. [U] [T] et Mme [C] [D] la somme de 6 695 € assortie au taux légal à compter de la signification de la présente décision,
- condamné in solidum S.A.R.L. CAMI et la SMA - SA-SAGENA à payer à M. [U] [T] et Mme [C] [D] la somme de 800 € en réparation de leur préjudice de jouissance,
- condamné in solidum S.A.R.L. CAMI et la SMA - SA-SAGENA à payer à M. [U] [T] et Mme [C] [D] la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum S.A.R.L. CAMI et la SMA - SA-SAGENA à payer les dépens en ce compris les frais d'expertise de M. [N] et ceux du constat d'huissier dressé par Me [K], Y ajoutant :
Condamner la SA SMA et la S.A.R.L. CAMI à la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile'.
A l'appui de leurs prétentions, M. [U] [T] et Mme [C] [D] soutiennent notamment que :
- sur la nullité du jugement, tant la SA SMA que la S.A.R.L. CAMI ont été assignées en bonne et due forme, nonobstant leur dénégation à ce sujet.
En outre, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. Il avait parfaitement, nonobstant l'absence de la S.A.R.L. CAMI et de son assureur à l'audience, la possibilité de requalifier les termes des demandes qui lui sont faites
- cela n'induit pas que le principe de la contradiction n'a pas été respecté puisque les défendeurs n'ont pas cru bon d'assister ou de se faire assister à l'audience, alors qu'ils ont été dûment assignés.
- il résulte du rapport d'expertise que l'ensemble des désordres s'agissant des plinthes, de la porte de la chambre, du placoplâtre résultent de la réalisation de travaux dans l'irrespect des règles de l'art, la poutre de renfort étant sous dimensionnée ce qui a entraîné, par la suite, les désordres dans les différentes pièces.
- la S.A.R.L. CAMI a reconnu, pendant les opérations d'expertise, que pour mettre en oeuvre l'ensemble des prestations sollicitées dans le devis, elle avait fait le choix de poser cette poutre en sapin 100*300 dans le cadre de la réalisation des travaux, objet du devis en date du 23 septembre 2010.
L'expert a clairement indiqué que le solivage support du parquet, repose sur la poutre de renfort en sapin 100*300 et non sur la poutre en chêne existante, ce qui permet de retenir la responsabilité de la société CAMI et la garantie de son assureur.
La poutre de renfort a seulement été clouée par des pointes lisses qui n'assurent pas un assemblage pouvant faire participer mécaniquement la poutre existante.
- selon l'expert, la poutre sapin doit être redressée puis les désordres consécutifs doivent être repris une fois les causes principales du désordre levées.
Il convient de remettre en jeu la porte, enlever les plinthes en les remplaçant par des neuves en médium, repasser un enduit sur les zones de placoplâtre abîmées et mal réalisées y compris mise en peinture, recalfeutrer le bâti haut de la fenêtre par joint silicone ton pierre et enfin percer la traverse haute de la fenêtre et incorporer une grille de ventilation.
Le jointoiement des lames du parquet est dû au non-respect du DTU applicable.
- les désordres recensés sont la résultante du non-respect par la société CAMI des règles de l'art et notamment des DTU et correspondent bien aux activités pour lesquelles elle était assurée auprès de la SA SMA
Les désordres proviennent de la pose de la poutre et ceux constatés résultent du travail inadapté réalisé par la S.A.R.L. CAMI qui engage sa responsabilité au sens de l'article 1792 du Code civil.
Or les conditions particulières produites par la société SAGENA permettent de mettre en évidence que la S.A.R.L. CAMI était assurée pour les travaux réalisés chez M. [T] et Mme [D] et l'origine des désordres trouve sa source dans la pose inadaptée de la poutre de renfort.
- ils sollicitent l'indemnisation de leur entier préjudice à hauteur de 6 695 €.
- au surplus, M. [T] et Mme [D] vont subir un trouble de jouissance puisque la chambre de leur fils ne pourra être utilisée pendant la période de reprise des travaux.
Ce trouble sera indemnisé à hauteur de 1 000 €.
- la société CAMI a reconnu, s'agissant notamment des désordres sur le parquet, les plinthes, la porte de la cuisine et la flèche de la poutre sapin, que certaines des prestations n'avaient pas été prévues au devis mais qu'elle a dû effectuer ces prestations pour réaliser son chantier, ce que l'expert a relevé.
- la flèche de la poutre qui est une poutre de renfort mise en oeuvre par la société CAMI est un élément de charpente bois qui a fléchi du fait de son mauvais sectionnement.
- la société CAMI n'a pas procédé gracieusement à la pose de la poutre et si même tel avait été le cas, cela ne pourrait entraîner une absence de responsabilité de sa part, en sa qualité de professionnelle.
- la réception tacite a bien eu lieu par le paiement de la facture et les consorts [T]-[D] peuvent ainsi agir sur le fondement de la garantie décennale alors qu'ils sont toujours restés dans les lieux.
- l'ouvrage est impropre à sa destination, au regard des désordres constatés.
- sur la responsabilité contractuelle de droit commun, si les deux fondements ont été rappelés par le tribunal, cela ne signifie pas pour autant qu'il a considéré que la condamnation devait intervenir uniquement au visa de l'article 1231-1 du code civil puisque l'article 1792 du code civil a également été cité.
Au regard de la nature des désordres constatés et du fait que la S.A.R.L. CAMI avait touché à la structure de l'immeuble, sa garantie était engagée.
- M. [T] et Mme [D] s'en rapportent sur la franchise de l'assureur.
- est versé l'arrêt rendu le 18/03/2021 en référé par la première présidence de la cour d'appel par lequel la société CAMI a été déboutée de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement entreprise, et condamnée à leur verser la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 27/06/2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande de nullité de l'assignation :
L'article 14 du code de procédure civile dispose que nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelé, étant rappelé qu'aux termes de l'article 654 du même code, la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet.
En l'espèce, il y a lieu de retenir que la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI et la société SA SMA, déjà présentes aux opérations d'expertises judiciaire ordonnées en référé, ont été régulièrement assignées devant le tribunal judiciaire de POITIERS par acte d'huissier du 4 juin 2021, sur le fondement de l'article 1792 du code civil.
Il résulte de la signification de l'assignation en date du 8 juin 2020 délivrée à la SARL CAMI que celle-ci a été délivrée à étude d'huissier, la signification mentionnant que 'le nom du destinataire figure sur l'enseigne commerciale' mais que 'personne ne répond à mes appels'.
L'huissier de justice précise avoir d'une part laissé un avis de passage, d'autre part avoir adressé à la société CAMI la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile.
S'agissant de la signification de l'assignation à la société SA SMA en date du 4 juin 2020, celle-ci a été régulièrement délivrée à personne morale, l'huissier indiquant avoir remis copie de l'acte à Mme [R] [F], hotesse d'accueil qui a déclaré être habilité à recevoir l'acte, la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile étant également adressée à la société SA SMA.
Il résulte de ces éléments que l'assignation a été régulièrement délivrée aux parties et il n'y a pas lieu de retenir la nullité de l'assignation ni du jugement sur ce motif, dès lors que l'huissier de justice a procédé à ces significations par des diligences suffisamment décrites et précises.
Sur la demande de nullité du jugement :
Si l'article 16 du code de procédure civil dispose que ' Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations', cette règle s'articule toutefois avec la possibilité de recueillir les explications auprès des parties, or les appelantes n'ont pas comparu en première instance, le jugement étant qualifié de réputé contradictoire.
Les défenderesses ne peuvent dans ces circonstances reprocher au premier juge d'avoir évoqué l'application des dispositions de l'article 1231-1 du code civil en sus de celles de l'article 1792, dès lors qu'il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, aux termes de l'article 12 du code de procédure civile, le jugement étant en l'espèce motivé en droit et en fait.
Il n'y a pas lieu en l'espèce de prononcer la nullité du jugement entrepris.
Sur le fond du litige :
Selon devis du 23 septembre 2010 d'un montant de 11734,55 € T.T.C., M. [T] et Mme [D] ont confié à la S.A.R.L. CAMI des travaux d'aménagement de leur maison de [Localité 5], lesquels ont fait l'objet d' une facture le 31 janvier 2011 d'un montant de 11 998,30 € T.T.C., celle-ci ayant été réglée.
Après constat d'huissier le 8 octobre 2015 relevant la présence de malfaçons, une expertise judiciaire était réalisée en présence des parties, confiée à M. [N] qui déposait son rapport le 12 juillet 2019.
Il résulte des conclusions argumentées du rapport d'expertise que 'la poutre de renfort mise en oeuvre en sapin 100x300 est sous dimensionnée ce qui a engendré des désordres dans les pièces'.
L'expert relève en réponse à un dire : 'lors des opérations d'expertise du 19 décembre 2018 et 29 mai 2019, la société CAMI a reconnu avoir fourni et posé la poutre de renfort en sapin 100x300 sans supplément'.
Cette pose, même intervenant hors devis initial, est de la responsabilité de la société SAMI dès lors qu'il est démontré que ce travail mal réalisé sur la structure fléchie de l'immeuble à géréré des désordres consécutifs qu'il convient de réparer, l'impropriété de l'immeuble à sa destination étant relevée
s'agissant d'un désordre de structure et de ses conséquences, puisque la poutre de renfort sous-dimensionnée a seulement été clouée par des pointes lisses qui n'assurent pas un assemblage pouvant faire participer mécaniquement la poutre existante.
L'expert préconise ainsi de redresser la poutre sapin 100*300 par vérinage dans la remise, la moiser par une seconde scellée entre murs et vissée par vis à bois type SFS disposées en quinconce.
Il y a lieu ainsi de :
- redresser la poutre en sapin
- remettre en jeu la porte
- enlever les plinthes en les remplaçant par des neuves en médium
- démonter et refaire à neuf l'ébrasement en parquet sapin compris finitions
- calfeutrer le bâti haut de la fenêtre par joint silicone
- reprendre le parquet,
cela pour un montant de 6695 € T.T.C. tel que retenu par l'expert judiciaire.
En l'espèce, il convient de retenir l'engagement de la garantie décennale de la société CAMI au titre des dispositions de l'article 1792 du code civil , après réception tacite du chantier résultant d'une volonté non équivoque du maître de l'ouvrage d'accepter les travaux dont les défauts n'étaient pas visibles, accompagnée du paiement complet du prix et de la prise de possession du bien après chantier.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI au paiement de la somme justifiée de 6695 € T.T.C. au regard de la valeur des travaux de reprise à exécuter, une somme de 800 € étant également à bon droit mise à sa charge au titre du préjudice de jouissance des intimés, en lien direct et certain avec les désordres qu'ils subissent et qui doivent être réparés.
Sur la garantie de la société SA SMA :
Il résulte des conditions particulières du contrat d'assurance que les
activités suivantes sont garanties :
- Maçonnerie béton armée
- charpente bois
- couverture zinguerie
- fumisterie du bâtiment
- carrelage et revêtements matériaux durs
Il doit être retenu que l'industrie contractuelle de la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI a été engagée sur le chantier au titre de travaux de pose d'une poutre de renfort en lien direct avec le devis établi.
Cette pose relève d'une activité de charpenterie et les conséquences directes et indirectes des désordres relevés au titre de la garantie décennale du constructeur doivent être couvertes par l'assureur décennale la société SA SMA, sous réserve du montant de sa franchise contractuelle qui s'appliquera en l'espèce, puisqu'opposable à l'assuré, qui l'a acceptée en souscrivant le contrat qui la stipule.
Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a condamné in solidum la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI et la société SA SMA, sous réserve toutefois de
l'application à la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI par la société SA SMA de l'application de sa franchise contractuelle dans leurs rapports entre elles.
Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:
Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'
Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge in solidum de la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI et de la société SA SMA.
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :
Il est équitable de condamner in solidum la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMENAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI et la société SA SMA à payer à M. [U] [T] et Mme [C] [D] la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
La somme allouée au titre des frais de première instance a été justement appréciée, le jugement entrepris devant être confirmé sur ce point.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
DIT n'y avoir lieu à nullité de l'assignation.
REJETTE la demande en nullité du jugement entrepris.
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
DIT que ces condamnations s'exécuteront sous réserve de l'application à la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMÉNAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI de la franchise contractuelle par la société SA SMA dans leurs rapports entre elles.
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.
CONDAMNE in solidum la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMÉNAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI et la société SA SMA à payer à M. [U] [T] et Mme [C] [D] à payer à la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
CONDAMNE in solidum in solidum la société S.A.R.L. CONSTRUCTION AMÉNAGEMENT DE MAISONS INDIVIDUELLES - CAMI et la société SA SMA aux dépens d'appel, étant rappelé que les dépens de première instance restent répartis ainsi que décidé par le premier juge.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,