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08/11/2022 | FRANCE | N°21/00569

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 08 novembre 2022, 21/00569


ARRÊT N°520



N° RG 21/00569



N° Portalis DBV5-V-B7F-GGLD













[H]



C/



[G]



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2022







Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 décembre 2020 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE





AP

PELANTE :



Madame [M] [H] née [T]

née le 11 Avril 1971 à [Localité 5] (75)

[Adresse 1]

[Localité 6]



ayant pour avocat postulant Me Stéphane FERRY de la SELARL OPTIMA AVOCATS, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT













INTIMÉE :



Madame [P] [G]

née le 12 Avril 1976 à...

ARRÊT N°520

N° RG 21/00569

N° Portalis DBV5-V-B7F-GGLD

[H]

C/

[G]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 décembre 2020 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE

APPELANTE :

Madame [M] [H] née [T]

née le 11 Avril 1971 à [Localité 5] (75)

[Adresse 1]

[Localité 6]

ayant pour avocat postulant Me Stéphane FERRY de la SELARL OPTIMA AVOCATS, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

INTIMÉE :

Madame [P] [G]

née le 12 Avril 1976 à [Localité 4] (21)

[Adresse 3]

[Localité 2]

ayant pour avocat postulant Me Vincent LAGRAVE de la SCP LAGRAVE - JOUTEUX, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 Septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller qui a présenté son rapport

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS

Par compromis de vente du 5 décembre 2019, Mme [H] s'engageait à acheter à Mme [G] une maison à usage d'habitation située à [Localité 6] pour un prix de 170 000 euros.

La réitération de la vente devait intervenir 'au plus tard le 28 février 2020 '.

L'acte prévoyait une clause pénale d'un montant de 17 000 euros.

Après signature du compromis, Mme [H] a revisité l'immeuble.

Le 7 mars 2020, elle a informé son notaire qu'elle n'entendait plus acquérir, s'étant persuadée de l'existence de désordres affectant l'immeuble.

Par courrier du 10 avril 2020 adressé au notaire de l'acquéreur, le notaire du vendeur indiquait que Mme [G] n'entendait pas poursuivre l'exécution forcée de la vente, demandait en revanche le paiement de la pénalité convenue.

Le conseil de Mme [G] a mis en demeure Mme [H] par courrier recommandé du 5 juin 2020 de lui régler la somme de 17 000 euros, courrier refusé par son destinataire.

Par acte du 17 juillet 2020, Mme [G] a assigné Mme [H] devant le tribunal judiciaire de La Rochelle aux fins de :

-voir juger le compromis de vente caduc,

-la condamner au paiement des sommes de :

.17 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2020,

. 2000 euros en réparation du préjudice moral subi.

Mme [H] n'a pas constitué avocat.

Par jugement réputé contradictoire du 15 décembre 2020, le tribunal judiciaire de La Rochelle a notamment statué comme suit :

'-constate que le compromis de vente du 5 décembre 2019 est caduc

-condamne Mme [H] à payer à Mme [G] la somme de 17 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision. '

Le premier juge a notamment retenu que :

Il ressort des productions que Mme [H] a refusé de régulariser l'acte authentique de vente.

Les désordres relevés par l'acquéreur ne sont pas établis alors que l'immeuble a été réhabilité par des professionnels et qu'il est toujours garanti.

Il y a lieu de constater la caducité du compromis de vente et de condamner Mme [H] au paiement de la clause pénale dont ni la validité, ni le montant ne sont contestés.

Les intérêts courront à compter du jugement qui seul détermine le principe et le montant de la créance.

Le préjudice moral allégué par la venderesse n'est pas établi.

LA COUR

Vu l'appel en date du 22 février 2021 interjeté par Mme [H]

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 21 mai 2021 , Mme [H] a présenté les demandes suivantes :

Vu les articles 1231-5 et suivants du code civil,

Vu les pièces produites au débat,

-Dire et juger Madame [H] parfaitement recevable en son appel dirigé contre le jugement du Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE du 15 décembre 2020

-Réformer/Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a a constaté la caducité du compromis de vente en date du 5 décembre 2019 et a condamné Madame [M] [H] à payer à Madame [G] la somme de 17.000€ avec intérêts au taux légal à compter de la décision outre 1.500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de l'instance.

Statuant à nouveau :

' A titre principal, débouter Madame [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

' A titre subsidiaire, ramener à l'euro symbolique, ou à tout à le moins à de plus justes proportions, le montant de la clause pénale mise à la charge de Madame [H],

- En toute hypothèse, condamner Madame [G] à payer à Madame [H] la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

A l'appui de ses prétentions, Mme [H] soutient en substance que :

-Les parties n'avaient pas convenu de sanctionner le non-respect du délai de réitération par la caducité.

-Le dépassement du délai convenu pour réitérer la vente n'est pas sanctionné par la caducité sauf si cette sanction est prévue ou si les parties ont fait de la réitération un élément constitutif de leur consentement. Le tribunal a commis une erreur de droit.

-La clause pénale sanctionne la défaillance d'une partie qui ne régularise pas une vente alors que les conditions en sont réunies.

-Les dispositions contractuelles prévoient une mise en demeure qui n'a pas été faite.

-L' immeuble était affecté d'infiltrations volontairement dissimulées par la venderesse qui a recouru à des manoeuvres.

Elle produit des attestations rédigées par des artisans qui ont visité l'immeuble, identifié des désordres.

-Elle souffre d'une syndrome anxieux majeur et de phobie administrative.

-Subsidiairement, la cour fera usage de son pouvoir modérateur et réduira le montant de la clause pénale.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 3 août 2021, Mme [G] a présenté les demandes suivantes :

Vu l'article 1231-5 du code civil

Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Vu les éléments du dossier,

Plaise à la Cour de :

-Confirmer en tous points le jugement du 15 décembre 2020 du Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE ;

-Rejeter les demandes de Mme [H] ;

-Condamner Madame [H] à la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de 1'instance ;

A l'appui de ses prétentions, Mme [G] soutient en substance que :

-Le compromis de vente prévoyait une condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt.

-Mme [H] ayant constaté que de l'eau s'était infiltrée le long d'un conduit du poële a changé d'avis.

-La venderesse peut demander au juge de constater la caducité du compromis.

Cela ne cause aucun grief à Mme [H].

-Celle-ci avait été avisée par les notaires des conséquences de son revirement. Elle a été de plus mise en demeure par courrier recommandé le 5 juin 2020.

-Elle voulait en fait aménager la cave en pièce habitable.

-La petite infiltration le long du poêle était sans gravité. Le problème avait été réglé.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 27 juin 2022 .

SUR CE

- sur la caducité de la vente

L'article 1186 du code civil dispose : un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît.

La date convenue pour la réitération de la vente était le 28 février 2020.

Il est constant que cette date n'a pas été respectée.

Les échanges se sont poursuivis après cette date et cela jusqu'au 10 avril 2020, date à laquelle la venderesse a pris acte du refus de réitération de l'acquéreur.

Il est donc certain que la promesse est devenue caduque le 10 avril 2020, l'acquéreur ayant exprimé son refus univoque d'acquérir, refus accepté par la venderesse.

Le jugement sera donc confirmé ce qu'il a retenu que le compromis de vente du 5 décembre 2019 était caduc.

- sur la condamnation de Mme [H] au paiement de la clause pénale

La clause intitulée stipulation de pénalité est ainsi rédigée:

'Au cas où , toutes les conditions relatives à l'exécution des présentes étant remplies, l'une des parties ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles, elle devra verser à l'autre partie la

somme de 17 000 euros à titre de dommages et intérêts conformément aux dispositions de l'article 1231-5 du code civil.

Sauf inexécution définitive, la peine n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.'

L'acte prévoyait la réitération authentique de la vente en page 22 :

'En cas de réalisation des conditions suspensives stipulées au compromis, la signature de l'acte de vente authentique aura lieu au plus tard le 28 février 2020.

L' acte précisait que la date d'expiration du délai n'était pas extinctive mais constitutive du point de départ de la période à partir de laquelle l'une des parties pourra obliger l'autre à s'exécuter.

Il ajoutait : 'Si le défaut de réitération à la date prévue de réalisation dûment constaté provient de la défaillance de l'acquéreur, le vendeur pourra toujours renoncer à poursuivre l'exécution de la vente.

Les parties seront alors libérées de plein droit de tout engagement sauf à tenir compte de la responsabilité de l'acquéreur par la faute duquel le contrat n'a pu être exécuté, avec les conséquences financières attachées notamment la mise en oeuvre de la stipulation de pénalité, et de dommages-intérêts si le vendeur subit un préjudice direct distinct de celui couvert par la clause. '

Le compromis prévoyait une condition suspensive relative à l' obtention d'un crédit de 25 000 euros, la réception de l'offre devant intervenir au plus tard le 31 janvier 2020.

Mme [H] ne justifie pas avoir demandé le prêt convenu, ni s'être vu notifier un refus de prêt.

Elle a seulement adressé un courriel à l' agence immobilière le 16 février 2021, et fait état d'une remontée d'humidité sur la chape de béton, d'une fuite visible via des écoulements sur le mur.

Elle produit des attestations émanant d'artisans (électricien, plombier, maçon) qui indiquent tous avoir visité l'immeuble le 27 février 2020.

Elle assure que ce sont leurs observations qui l'ont dissuadée d'acquérir.

Elle a averti son notaire qui a avisé le notaire de la venderesse de sa décision en des termes univoques: ' Mme [H] n'entend pas poursuivre l'acquisition de cet immeuble '.

Le notaire a donc porté à la connaissance de la venderesse une décision présentée comme définitive, irréversible.

Le défaut de réitération a pour seule cause le revirement de l'acquéreur qui a changé d'avis et refusé de réitérer la vente.

L'inexécution étant définitive, le vendeur n'avait pas l'obligation de mettre en demeure l'acquéreur de payer la clause pénale.

Il l'a fait néanmoins ainsi qu'il ressort de la lettre recommandée qui a été adressée à Mme [H] le 5 juin 2020.

Il est établi que le pli a été refusé par le destinataire.

Les conditions de paiement de la clause pénale sont donc réunies, l'échec de la vente étant imputable à la seule décision de Mme [H].

- sur la réduction de la clause pénale

L'article 1231-5 du code civil dispose: lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.

Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.

Le refus d'acquérir a été connu le 7 mars 2020, plus de trois mois après la signature du compromis de vente et alors que la réitération aurait dû intervenir avant le 28 février 2020 .

Si le refus d'achat a été accepté par la venderesse, elle a subi un préjudice lié à l'immobilisation du bien , à l'obligation d'exposer des charges fixes.

Rien n'empêchait Mme [H] de prendre la précaution de faire visiter l'immeuble avant la signature du compromis par des artisans, ce qu'elle a négligé de faire.

Il n'est pas démontré que la clause qui représente 10 % de la valeur du bien soit manifestement excessive au regard des usages .

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [H] à payer à Mme [G] la somme de 17 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

- sur les autres demandes

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de Mme [H].

Il est équitable de condamner Mme [H] à payer à Mme [G] la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS :

statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

-confirme le jugement entrepris

Y ajoutant :

-déboute les parties de leurs autres demandes

-condamne Mme [H] aux dépens d'appel

-condamne Mme [H] à payer à Mme [G] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/00569
Date de la décision : 08/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-08;21.00569 ?
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