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20/10/2022 | FRANCE | N°22/000502

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 06, 20 octobre 2022, 22/000502


Ordonnance n° 64

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20 Octobre 2022
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No RG 22/00050 - No Portalis DBV5-V-B7G-GTLJ
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Société ASSOCIATION GPA
C/
[H] [P]
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R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE

RÉFÉRÉ

Rendue publiquement le vingt octobre deux mille vingt deux par Mme Estelle LAFOND, conseillère, agissant sur délégation du premier président de la cour d'appe

l de Poitiers, assistée de Mme Astrid CATRY, greffière placée,

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le s...

Ordonnance n° 64

---------------------------
20 Octobre 2022
---------------------------
No RG 22/00050 - No Portalis DBV5-V-B7G-GTLJ
---------------------------
Société ASSOCIATION GPA
C/
[H] [P]
---------------------------

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE

RÉFÉRÉ

Rendue publiquement le vingt octobre deux mille vingt deux par Mme Estelle LAFOND, conseillère, agissant sur délégation du premier président de la cour d'appel de Poitiers, assistée de Mme Astrid CATRY, greffière placée,

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le six octobre deux mille vingt deux, mise en délibéré au vingt octobre deux mille vingt deux.

ENTRE :

ASSOCIATION GROUPE PLURI-ASSOCIATIF - GPA
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par son avocat postulant Me Amélie GUILLOT substituant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS ,

représentée par son avocat plaidant Me Christophe PARIER de la SELARL CHP AVOCAT, avocat au barreau de BERGERAC

en présence de Mme [S] [Z], directrice des ressources humaines de l'association, munie d'un pouvoir spécial

DEMANDEUR en référé ,

D'UNE PART,

ET :

Monsieur [H] [P]
[Adresse 2]
[Localité 3]

représenté par Me Déborah PERIO substituant Me Ségolène BARDET, avocat au barreau de DEUX-SEVRES

DEFENDEUR en référé ,

D'AUTRE PART,

Faits et procédure :

Monsieur [H] [P] a été recruté par l'association GPA selon contrat à durée indéterminée en date du 1er janvier 2017.

Il exerçait ses fonctions au sein de la Maison d'Enfants à Caractère Social (MECS) gérée par l'association GPA.

Monsieur [H] [P] a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave notifié le 24 février 2020 et a saisi le conseil des prud'hommes de Niort le 22 octobre 2020.

Selon jugement en date du 5 avril 2022, le conseil des prud'hommes de Niort a :

- rejeté le rabat de l'ordonnance de clôture,
- rejeté le sursis à statuer ;
- dit que le licenciement de Monsieur [H] [P] est dénué de cause réelle et sérieuse ;
- fixé en application des dispositions de l'article R.1454-28 du code du travail à 7 045,98 euros brut la moyenne mensuelle des salaires de Monsieur [H] [P] ;
- condamné l'association GPA à verser à Monsieur [H] [P] les sommes suivantes :
o 46 503,47 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés inclus,
o 5 620,05 euros au titre de la mise à pied ;
o 46 207,53 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
o 49 321,86 euros au titre de dommages et intérêts ;
o 14 012,41 euros au titre des congés payés restant dus ;
o 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné par application de l'article L.1235-4 du code du travail, le remboursement par l'association GPA à l'ASSEDIC des indemnités de chômage payés à Monsieur [H] [P] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé par le Conseil dans la limite de trois mois d'indemnités de chômage ;
- débouté Monsieur [H] [P] du surplus de ses demandes ;
- débouté l'association GPA de sa demande reconventionnelle ;
- condamné l'association GPA aux entiers dépens.

L'association GPA a interjeté appel du jugement selon déclaration enregistrée le 22 avril 2022.

Par exploit en date du 26 juillet 2022, l'association GPA a fait assigner Monsieur [H] [P] devant la première présidente de la cour d'appel de Poitiers aux fins d'obtenir, à titre principal, sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile, l'arrêt de l'exécution provisoire assortissant le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Niort le 5 avril 2022, à hauteur des condamnations d'un montant de 112 343,46 euros comprenant :
o 46 503,47 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés inclus,
o 5 620,05 euros au titre de la mise à pied ;
o 46 207,53 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
o 14 012,41 euros au titre des congés payés restant dus.

L'affaire, appelée à l'audience du 25 août 2022, a été renvoyée à la demande des parties à l'audience du 22 septembre 2022, puis à l'audience du 6 octobre 2022.

Au titre des moyens sérieux d'annulation ou de réformation, l'association GPA fait valoir que Monsieur [H] [P] aurait fondé une partie de ses demandes indemnitaires sur des éléments obtenus frauduleusement et que le conseil des prud'hommes de Niort a rejeté sa demande de sursis à statuer dans l'attente de connaître l'issue de la plainte qu'elle avait déposée contre Monsieur [H] [P] auprès du procureur de la République près le tribunal judiciaire de Niort pour vol, recel de vol et extraction de données des systèmes informatiques de l'association GPA alors que la preuve des connexions et des transferts frauduleux aurait été rapportée.

L'association GPA expose en outre que le conseil des prud'hommes de Niort aurait retenu que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse sur la base d'arguments juridiques qui n'auraient pas été soulevés ou débattus contradictoirement par les parties dans le cadre de la procédure prud'homale.

Elle soutient encore que le conseil des prud'hommes aurait fait une mauvaise appréciation de la gravité des fautes reprochées à Monsieur [H] [P] et aurait, à tort, déclaré comme prescrits certains des faits fautifs qui auraient servi de base au licenciement de ce dernier.

Elle expose enfin que les condamnations pécuniaires prononcées à son encontre seraient exorbitantes et non justifiées.

L'association GPA soutient par ailleurs que l'exécution provisoire de la décision querellée aurait pour elle des conséquences manifestement excessives en ce qu'elle empêcherait la MECS de faire face à ses charges d'exploitation eu égard au montant des condamnations prononcées (112 343,46 euros) et que Monsieur [H] [P] ne présenterait pas de garanties suffisantes de restitution des fonds versés au titre de l'exécution provisoire en cas de réformation du jugement.

L'association GPA sollicite, à titre subsidiaire, par application de l'article 521 du code de procédure civile, l'autorisation de consigner le montant des condamnations assorties de l'exécution provisoire entre les mains de Madame la bâtonnière de l'ordre des avocats du barreau de Bergerac, soit la somme de 112 343,46 euros, jusqu'à ce qu'il soit statué sur l'appel interjeté.
L'association GPA conclut au rejet des demandes de Monsieur [H] [P].

Monsieur [H] [P] sollicite qu'il soit fait sommation à l'association GPA de produire les comptes définitifs et votés en assemblée générale pour les exercices 2020 et 2021, les budgets prévisionnels établis l'année N pour l'année N+1 de GPA et de toutes les entités, notamment de la MECS ainsi que les éléments relatifs à la cession de GPA MANAGEMENT.
Monsieur [H] [P] s'oppose à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire de l'association GPA.
Il fait valoir que l'association GPA ne démontrerait pas l'existence de conséquences manifestement excessives qu'aurait pour elle l'exécution provisoire de la décision déférée et qu'elle ne justifierait d'aucun moyen sérieux d'annulation ou de réformation.

Monsieur [H] [P] ne s'oppose pas à la demande subsidiaire de consignation des condamnations assorties de l'exécution provisoire, mais sollicite que les fonds soient consignés sur un compte ouvert au nom de son conseil auprès du barreau des DEUX-SEVRES.

Il sollicite la condamnation de l'association GPA à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Motifs :

Sur la demande principale d'arrêt de l'exécution provisoire :

L'article 514-3 du code de procédure civile prévoit qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Il en découle que l'arrêt de l'exécution provisoire est subordonné à la réalisation des deux conditions, cumulatives, suivantes : la démonstration de l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision qui en est assortie, et la justification de ce que l'exécution de cette décision risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Les conséquences manifestement excessives s'apprécient notamment par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d'infirmation de la décision assortie de l'exécution provisoire.

Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d'infirmation.

L'association GPA, qui a la charge de la preuve, soutient que l'exécution provisoire de la décision déférée aurait pour elle des conséquences manifestement excessives en ce qu'elle empêcherait la MECS de faire face à ses charges d'exploitation eu égard au montant des condamnations prononcées.

Elle fait valoir que la personnalité de l'association GPA est propre et qu'elle ne se confond pas avec les associations qu'elle fédère, de sorte que les charges d'exploitation de la MECS doivent être exclusivement assumées par le budget MECS.

L'association GPA indique que la MECS n'est pas compris dans le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM) conclu entre l'association GPA, l'Agence Régionale de Santé (ARS) et le conseil départemental et qu'elle ne peut prétendre au bénéfice des ressources allouées dans le cadre du CPOM à d'autres établissements gérés par l'association GPA.

L'association GPA procède par allégations sans justifier de sa situation et notamment de l'absence de mutualisation des comptes de l'association. L'association GPA étant seule partie à l'instance, il convient d'apprécier la situation au regard de l'association GPA, en sa qualité d'entité principale, et non de son seul établissement MECS.
L'association GPA se contente de verser aux débats une attestation de son commissaire aux comptes, de laquelle il ressort un résultat comptable négatif de – 207 216 euros à la clôture de l'exercice 2021, ainsi qu'une attestation de son expert-comptable, faisant état d'un résultat comptable négatif de l'ordre de – 343 073 euros au titre de l'exercice 2020 et de – 207 216 euros au titre de l'exercice 2021. Ces seuls éléments concernant l'établissement MECS, sont insuffisants à démontrer la situation de l'association GPA et ne permettent pas d'en déduire que le paiement des condamnations mises à sa charge avec exécution provisoire aurait des conséquences irrémédiables pour elle, d'autant de l'association sollicite, à titre subsidiaire, l'autorisation de consigner le montant des condamnations assorties de l'exécution provisoire, ce qui suppose de disposer des fonds.
Enfin, quand bien même l'association GPA serait dans l'impossibilité de s'acquitter des condamnations mises à sa charge en l'état, elle n'apporte aucun élément sur sa capacité d'emprunt.

Quant aux garanties de restitution des fonds de Monsieur [H] [P], là encore, l'association GPA procède par allégations, sans justifier que la situation de Monsieur [H] [P] serait de nature à faire craindre une impossibilité de restituer les sommes versées en cas de réformation du jugement entrepris.

Ainsi, l'association GPA n'établit pas l'existence de circonstances susceptibles de constituer les conséquences manifestement excessives de l'exécution du jugement au sens de l'article 514-3 du code de procédure civile.

En conséquence, en l'absence d'une des conditions permettant l'arrêt de l'exécution provisoire, et sans examiner la pertinence des moyens soulevés à l'appui de l'appel, l'association GPA sera déboutée de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire.

Sur la demande subsidiaire de consignation :

L'article 521 alinéa 1er du code de procédure civile dispose que la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

Rappel doit être fait de ce que,

- la possibilité d'aménagement de l'exécution provisoire prévue par cet article n'est pas subordonnée à la condition que cette exécution risque d'entrainer des conséquences manifestement excessives,

- l'autorisation de consigner relève du pouvoir discrétionnaire du premier président;

- il n'entre pas dans les pouvoirs du premier président d'apprécier la régularité ou le bien-fondé de la décision entreprise.

En l'espèce, si l'association GPA ne justifie pas d'un risque de non restitution des sommes en cas de réformation du jugement, il y a lieu de constater que Monsieur [H] [P] ne s'oppose pas à la consignation des fonds, tel qu'il l'a indiqué par l'intermédiaire de son conseil, lors de l'audience du 6 octobre 2022.

La consignation garantit pour chacune des parties que le montant des condamnations sera versé à qui de droit en cas de confirmation ou de réformation du jugement. Dès lors, il convient de constater l'intérêt que représente cette mesure, notamment en l'absence d'opposition de l'intimé, ce dernier sollicitant néanmoins que les fonds soient versés sur le compte CARPA de son avocat auprès du barreau des Deux-Sèvres et non entre les mains de Madame la bâtonnière de l'ordre des avocats du barreau de Bergerac, tel que sollicité par l'association GPA.

L'association GPA sera condamnée à consigner les sommes sur un compte ouvert au nom Maître Ségolène BARDET, auprès du barreau des DEUX-SEVRES.

Il convient d'allouer à Monsieur [H] [P], qui a été contraint de se défendre en justice, la somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Partie succombante au principal à la présente instance de référé, l'association GPA en supportera les dépens.

Décision :

Par ces motifs, nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, statuant par ordonnance contradictoire :

Déboutons l'association GPA de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Niort le 5 avril 2022 ;

Disons que l'exécution provisoire ne sera pas poursuivie si l'association GPA, dans le délai de deux mois suivant le prononcé de la présente ordonnance, consigne sur un compte ouvert au nom de Maître Ségolène BARDET, auprès du barreau des DEUX-SEVRES, en sa qualité de conseil de Monsieur [H] [P], les sommes dues en vertu du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Niort le 5 avril 2022, qui y resteront jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur l'appel de ce jugement ;

Disons que la somme consignée devra être libérée en exécution de l'arrêt à intervenir à la suite de l'appel régularisé par l'association GPA contre le jugement dont s'agît ;

Condamnons l'association GPA à payer à Monsieur [H] [P] la somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons l'association GPA aux dépens ;

Déboutons du surplus.

Et nous avons signé la présente ordonnance avec le greffier.

La greffière, La conseillére,

[D] [I] [Y] [E]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 06
Numéro d'arrêt : 22/000502
Date de la décision : 20/10/2022
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Niort, 05 avril 2022


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2022-10-20;22.000502 ?
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