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20/09/2022 | FRANCE | N°21/03548

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 20 septembre 2022, 21/03548


ARRET N°451



N° RG 21/03548 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GNZV















[J]



C/



Etablissement Public REGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU DE LA CHAR ENTE-MARITIME



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03

548 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GNZV



Décision déférée à la Cour : ordonnance du 23 novembre 2021 rendue par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de SAINTES.





APPELANT :



Monsieur [C] [J]

né le 07 Mars 1952 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 4]



a...

ARRET N°451

N° RG 21/03548 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GNZV

[J]

C/

Etablissement Public REGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU DE LA CHAR ENTE-MARITIME

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03548 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GNZV

Décision déférée à la Cour : ordonnance du 23 novembre 2021 rendue par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de SAINTES.

APPELANT :

Monsieur [C] [J]

né le 07 Mars 1952 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 4]

ayant pour avocat Me Julien NOGARET de la SELARL NOGARET & LAINE, avocat au barreau de SAINTES

INTIMEE :

REGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU DE LA CHAR ENTE-MARITIME

[Adresse 6]

[Localité 2]

ayant pour avocat Me Olivier LOPES de la SELARL BENDJEBBAR - LOPES, avocat au barreau de SAINTES substituée par Me Virginie DUCOURNEAU, avocat au barreau de SAINTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 27 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [C] [J], propriétaire d'une résidence secondaire située [Adresse 1], a observé lors d'un séjour sur place début 2019 que le compteur d'eau reflétait une consommation de près de 1.300 m3 d'eau depuis le précédent relevé, très supérieure au volume moyen de 40 m3 d'eau habituellement utilisé.

Contactée par M. [C] [J], la Régie d'Exploitation des Services d'Eaux de la Charente-Maritime (R.E.S.E.) a dépêché un technicien le 4 mars 2019 en vue d'une vérification du compteur d'eau.

Le 6 mars 2019 M. [J] a fait remplacer par un artisan la vanne d'arrêt d'eau défectueuse et le groupe de sécurité fuyard du chauffe-eau de son habitation.

Il a été destinataire d'une facture d'un montant de 2.168,62 € émise le 9 janvier 2020 par la R.E.S.E. correspondant à une consommation de 1.310 m3 d'eau entre le 11 juillet 2018 et le 19 juillet 2019.

M. [J] s'est rapproché de la R.E.S.E. en vue d'un dégrèvement, sans résultat, puis a saisi le médiateur de l'eau qui a conclu comme suit le 8 janvier 2021 :

« il ressort de l'analyse du médiateur de l'eau qu'aucun élément concret et indiscutable ne permet d'expliquer de façon certaine la surconsommation.

(...) En l'espèce, pour les raisons précisées plus haut, l'hypothèse d'un dysfonctionnement du compteur est très peu probable et le médiateur de l'eau écarte cette hypothèse.

(...) dans le cas présent, les hypothèses les plus probables pouvant expliquer la surconsommation sont la survenance d'un voire plusieurs écoulements au niveau d'un appareil sanitaire ou une consommation effective, éventuellement accidentelle.

En conséquence, il apparaît que les hypothèses susceptibles d'être retenues pour expliquer la surconsommation constatée conduisent à conclure que la consommation enregistrée par le compteur correspond au volume réel d'eau ayant transité par ce dernier. »

Par acte d'huissier délivré le ler juillet 2021 M. [C] [J] a assigné l'établissement public RÉGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU DE LA CHARENTE MARITIME (R.E.S.E.) devant le juge des référés du tribunal judiciaire de SAINTES, pour entendre ordonner une expertise au visa de l'article 145 du code de procédure civile, et condamner la R.E.S.E. au paiement de la somme de 1.500 €à titre de provision sur les frais irrépétibles, outre les dépens.

M. [J] indiquait qu'il entend rechercher la responsabilité de la R.E.S.E. et concluait que cette dernière n'était pas fondée à lui opposer la prescription de deux mois attachée aux recours contre les décisions administrative. Il ajoutait que sa demande d'expertise ne visait pas uniquement à contester la facture du 9 janvier 2020, mais à déceler l'origine des surconsommations d'eau afin qu'il soit ordonné à la R.E.S.E. d'effectuer tous travaux de réparation nécessaires si cette dernière était reconnue à l'issue de l'expertise judiciaire responsable des fuites ou autres événements provoquant ces surconsommations d'eau.

La R.E.S.E. sollicitait en réponse que le juge des référés déboute M. [J] de ses demandes et le condamne au paiement de la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par ordonnance contradictoire en date du 23/11/2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de SAINTES a statué comme suit :

'Déboutons M. [C] [J] de ses demandes,

Condamnons M. [C] [J] aux dépens,

Condamnons M. [C] [J] à payer à la Régie d'Exploitation des Services d'Eaux de la Charente-Maritime la somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile'.

Le premier juge a notamment retenu que :

- s'il n'appartient pas au juge des référés de prendre position sur un débat de fond, il doit néanmoins rechercher la probabilité de faits susceptibles d'être invoqués dans un litige éventuel et l'utilité de la mesure invoquée, en s'assurant notamment que cette action n'est pas manifestement vouée à l'échec.

- l'expertise sollicitée par M. [J] vise à établir l'origine de l'augmentation significative de sa consommation d'eau intervenue sur la période du 11 juillet 2018 au 6 mars 2019.

Les développements de la R.E.S.E. relatifs à la prescription de l'action en contestation des titres exécutoires sont donc inopérants pour conclure à la prescription de toute action au fond ouverte à M. [J], ce dernier disposant de la faculté d'engager la responsabilité contractuelle du fournisseur d'eau en cas de manquement dans l'exécution de la prestation.

- toutefois M. [J] ne produit pas le moindre élément susceptible de rattacher sa surconsommation d'eau avérée à une quelconque défaillance imputable service des eaux.

La fuite des toilettes, le remplacement de la vanne d'arrêt et du groupe de sécurité du chauffe eau relèvent de la seule responsabilité du propriétaire.

- les réparations effectuées ont mis un terme à la consommation anormale d'eau.

- la précédente surconsommation de 2013 avait pris fin lors d'un précédent remplacement du groupe de sécurité du chauffe-eau.

- M. [J] prétend que son compteur d'eau aurait été posé en 1992mais il est établi par ses références que ce compteur date de 2009.

- M. [J] ne justifie d'aucun motif légitime à l'obtention de la mesure sollicitée et sera débouté de sa demande.

LA COUR

Vu l'appel en date du 18/12/2021 interjeté par M. [C] [J]

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 20/04/2022, M. [C] [J] a présenté les demandes suivantes:

'Vu l'article 145 du code de procédure civile,

Vu la jurisprudence citée,

Vu l'ordonnance du juge des référés près le tribunal judiciaire de SAINTES en date du 23 novembre 2021,

Vu les pièces versées aux débats,

JUGER M. [C] [J] recevable et bien fondé en son appel,

DÉBOUTER la Régie d'Exploitation des Services des Eaux de Charente-Maritime de toutes demandes, fins et conclusions contraires,

INFIRMER en l'ensemble de ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des référés près le tribunal judiciaire de SAINTES le 23 novembre 2021,

En conséquence et statuant à nouveau,

ORDONNER une mesure d'expertise judiciaire et commettre pour y procéder tel expert qu'il plaira à la cour avec mission habituelle en la matière et notamment :

ENTENDRE les parties en leurs explications, le cas échéant, tout sachant,

SE FAIRE remettre tous documents utiles,

SE RENDRE sur les lieux du litige, décrire les installations concernées et en particulier les canalisations, en tant que de besoin sur pièces,

DIRE s'ils présentent ou s'ils présentaient des désordres, des non-conformités, les énumérer,en rechercher l'origine et en particulier celle des surconsommations d'eau,

INDIQUER les remèdes pouvant être apportés, les chiffrer,

DONNER à la juridiction tous les éléments permettant de statuer sur les responsabilités encourues et les préjudices annexes.

En tout état de cause,

CONDAMNER la Régie d'Exploitation des Services des Eaux de Charente-Maritime à verser à M. [C] [J] la somme de 3.500€ à titre de provision sur les frais irrépétibles.

CONDAMNER la Régie d'Exploitation des Services des Eaux de Charente-Maritime aux entiers dépens'.

A l'appui de ses prétentions, M. [C] [J] soutient notamment que :

- le 9 janvier 2020, il était rendu destinataire d'une facture référencée 19021360 Y établie pour un montant de 2.168,62 € et correspondant à une consommation inhabituelle d'un volume de 1.310 m3 survenue sur une période de 3 mois, au sein de sa résidence secondaire, cela au regard de ses consommations précédentes et postérieures.

- les services de la R.E.S.E. devaient effectuer une recherche de fuite mais son technicien se bornait à effectuer un contrôle jugé « sommaire » par M. [J] [C].

- une précédente fuite en 2013 avait donné lieu à dégrèvement de 59% de sa consommation.

- un goutte à goutte à une vanne ne peut expliquer une telle consommation.

- il avait sollicité le changement du compteur posé en 1992 mais cela lui avait été refusé.

Il n'avait pas été informé d'un changement de compteur en 2009, ni ses voisins qui disposent des clefs.

- M. [J] [C] conteste l'émission de la facture référencée 19021360Y en date du 9 janvier 2020, qu'il a réglée depuis sa déclaration d'appel, après commandement de payer.

- il est de bonne foi et a entrepris de nombreuses démarches amiables.

- la prescription éditée par l'article L. 1.617-5 du code général des collectivités territoriales est inopposable à M. [J] en raison du non-respect par la R.E.S.E. des dispositions de l'article R421-5 du code de justice administrative.

Ces délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision, ce qui n'est pas le cas comme le reconnaissait la R.E.S.E.

- il ne peut non plus être reproché à M. [J] [C] de ne pas avoir agi dans un délai raisonnable.

- M. [J] [C] n'était pas informé de sa surconsommation et ne l'apprenait que lors de la réception de sa facture, document qui ne comportait par ailleurs aucune mention relative aux voies de recours qui lui étaient offertes.

- il a respecté la procédure prévue à l'article 48 du règlement de service, et il ne peut être soutenu le recours de l'abonné dans un délai de prescription de deux mois alors même que son Règlement de service prévoit expressément qu'un délai d'attente de deux mois conditionne la mise en place d'une médiation.

- M. [J] ne sollicite pas un simple remboursement ou dégrèvement, mais l'expertise de son installation et des canalisations.

- la demande d'expertise judiciaire n'a par ailleurs pas uniquement pour vocation la simple contestation de la facture litigieuse mais la réalisation de travaux de réparation visant à prévenir la survenance de ces surconsommations.

Il serait en outre en droit d'obtenir réparation sur le fondement de l'article 1240 du code civil si la responsabilité de la R.E.S.E. était retenue par l'expert, ou sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

- sa demande d'expertise vise à déceler l'origine des surconsommations, les responsabilités encourues et les travaux nécessaires.

- le médiateur de l'Eau concluait qu'il n'existe aucun élément concret et indiscutable qui permette d'expliquer de façon certaine la surconsommation.

- M. [J] ne peut faire appel à un autre opérateur que la Régie d'Exploitation des Services des Eaux de Charente-Maritime.

- M. [J] n'a jamais demandé de limiter cette expertise à sa propre installation, il sollicite une expertise portant sur toute l'installation que ce soit en amont comme en aval de son compteur.

- il ne paraît pas extraordinaire de supposer qu'un dysfonctionnement du compteur ou du réseau de la R.E.S.E. serait la cause d'une surconsommation ou d'une surfacturation, et une expertise du compteur apparaît nécessaire, au vu de la récurrence des surconsommations.

- M. [J] est désormais contraint d'effectuer un contrôle minutieux de sa consommation d'eau accompagné d'une fermeture systématique de son compteur d'eau ainsi que de son compteur électrique, à chaque départ et ce depuis l'incident de 2013.

- M. [J] verse aux débats des éléments sérieux qui permettent d'affirmer que les surconsommations ne relèvent pas de sa responsabilité et la R.E.S.E. ne peut raisonnablement soutenir que l'origine de la fuite viendrait de l'installation privée de M. [J] [C].

- le médiateur de l'eau fait référence à de simples hypothèses, et aucunement à des certitudes, au regard de ses examens pour le moins lacunaires, sans examen de terrain.

- seule une expertise judiciaire permettra de mettre un terme au litige existant entre les parties.

- le juge des référés tirait d'une prétendue absence de preuve un défaut d'intérêt légitime de la demande d'expertise, alors qu'il n'y a pas lieu de réclamer un commencement de preuve.

Il est par ailleurs erroné de retenir que M. [C] [J] ne produit pas le moindre élément susceptible de rattacher sa surconsommation d'eau avérée à une quelconque défaillance imputable au service des eaux, au regard d'une surconsommation inexpliquée de plus de 1300 m3 d'eau.

Il n'appartenait pas au juge des référés de prendre position sur un débat au fond.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 24/02/2022, la RÉGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAUX DE LA CHARENTE-MARITIME (R.E.S.E.) a présenté les demandes suivantes :

'La RÉGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAUX DE LA CHARENTE-MARITIME demande qu'il plaise à la cour de :

- DIRE M. [J] recevable mais mal fondé en son appel ;

- CONFIRMER l'ordonnance du 23 novembre 2021 en l'ensemble de ses dispositions ;

- DÉBOUTER M. [J] en l'ensemble de ses demandes ;

- CONDAMNER M. [J] au paiement d'une somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel ;

A l'appui de ses prétentions, la RÉGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAUX DE LA CHARENTE-MARITIME (R.E.S.E.) soutient notamment que :

- M. [J] écrit dans un courrier adressé au médiateur de l'eau, avoir constaté en mars 2019, « lors d'un contrôle de l'installation » à son arrivée après trois mois d'absence, « une consommation d'eau anormale » : ' le compteur indiquait une consommation de 1300 m3 en moins de trois mois'.

Il a en réalité constaté cette augmentation courant février 2019 puisqu'à sa demande, un agent se déplaçait le 25 février 2019 et ne constatait aucun dysfonctionnement du compteur.

- un professionnel agréé requis par M. [J], a trouvé une fuite sur « le robinet d'arrêt général situé dans l'entrée de la maison et qui était fermé » ainsi qu'une « petite fuite » « sur le bloc de sécurité du chauffe-eau.

- il lui était indiqué le 09/01/2020 ne pouvoir faire droit à sa demande de dégrèvement du 13 mars 2019, dans la mesure où 'l'origine de la fuite concerne les équipements sanitaires, de chauffage, des appareils ménagers'. La position était confirmée le 11 juin 2020.

- il saisissait le médiateur de l'eau le 6 novembre 2020. Le médiateur lui répondait le 8 janvier 2021, écartant l'hypothèse d'un dysfonctionnement du compteur.

- il y a lieu à confirmation de l'ordonnance entreprise en ce que M. [J], ne justifie d'aucun motif légitime, en ce que l'action au fond est prescrite.

- en l'espèce, la R.E.S.E. a édité une facture en date du 09 janvier 2020 pour un montant de 2.168,62 € qui doit être considérée comme un titre exécutoire de recette individuel.

- le tribunal judiciaire est compétent pour se prononcer sur les contestations relatives au bien-fondé de la créance, mais l'action en contestation d'un titre individuel est enfermée dans un délai de 2 mois à compter de la réception du titre.

- la Cour de cassation se contente de s'assurer que le titre et les voies de recours ont bien été portés à la connaissance du débiteur, peu importe la manière, que ce soit par lettre simple, par lettre recommandée avec avis de réception ou par exploit d'Huissier de justice

- la mise en jeu de la responsabilité contractuelle de la R.E.S.E. que M. [J] prétend viser et la contestation de sa consommation d'eau reviennent à contester un titre exécutoire, ce qui n'est manifestement plus possible.

- il y a absence de motif légitime dès lors qu'aucun élément ne permet de conclure à un probable dysfonctionnement du compteur .

- seuls les volumes d'eau consommés après le compteur peuvent être mesurés, de telle sorte que, si une fuite se produit en amont du compteur, cela n'entraînera aucune surconsommation pour l'abonné. Le compteur ne peut enregistrer que les volumes d'eau consommés en aval.

- toute fuite intervenant en amont, soit avant le compteur, ne peut pas faire l'objet d'une facturation.

- l'installation située en aval du compteur, soit entre le compteur et les points d'arrivée d'eau de l'abonné est la seule propriété de ce dernier.

- la R.E.S.E. ne peut pas être tenue pour responsable d'une fuite intervenue après le compteur puisqu'il s'agit de l'installation privative de l'abonné.

- il appartient à l'abonné d'effectuer une surveillance continue de l'installation après le compteur, dont il est le propriétaire, ce que lui impose le règlement du service qui a un caractère réglementaire. Or, de nombreux éléments plaident au contraire pour un défaut de surveillance de M. [J] de son installation, à commencer par les absences prolongées.

- M. [J] ne rapporte aucun élément qui permettrait de supposer qu'un dysfonctionnement du compteur ou du réseau de la R.E.S.E. serait la cause d'une surconsommation ou d'une surfacturation

- le compteur n'a rien de vétuste, et le premier juge a relevé que le compteur a été posé en 2009, plus exactement le 13 octobre 2009, soit moins de 11 ans avant les faits.

- le juge des référés n'a pas exigé du demandeur qu'il apporte un commencement de preuve, dès lors que M. [J] n'avance même pas une explication vérifiable à sa surconsommation d'eau pouvant impliquer la R.E.S.E. alors qu'il est le seul à pouvoir en apporter.

- la cour n'a pas à suppléer à la carence des parties dans l'administration de la preuve.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 25/04/2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'existence d'un motif légitime :

L'article 145 du code de procédure civile dispose que 's'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé'.

L'article 146 du code de procédure civile dispose toutefois qu'une 'mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve'.

Il appartient dans ce cadre au juge des référés d'apprécier la légitimité de la demande d'expertise présentée en référé, au regard de la plausibilité d'un procès au fond et de l'utilité, voir la pertinence dans cette perspective, de la mesure d'instruction sollicitée.

Si l'existence d'une contestation sérieuse ne constitue pas en elle-même un obstacle à la saisine du juge des référés, le demandeur ne peut prétendre par contre à l'existence d'un motif légitime lorsque sa prétention est manifestement vouée à l'échec.

M. [J] a été destinataire le 09 janvier 2020 d'une facture référencée 19021360 Y établie pour un montant de 2.168,62 € et correspondant selon lui à une consommation inhabituelle en moins de 3 mois d'un volume de 1.310 m3.

Il indiquait au médiateur de l'eau avoir constaté en mars 2019, «lors d'un contrôle de l'installation » à son arrivée après trois mois d'absence, « une consommation d'eau anormale».

Il avait en réalité constaté cette augmentation courant février 2019 puisqu'à sa demande, un agent de la R.E.S.E. se déplaçait le 25 février 2019 mais ne constatait aucun dysfonctionnement du compteur.

M. [J] a alors fait intervenir un professionnel agréé, qui trouvait une fuite sur «le robinet d'arrêt général situé dans l'entrée de la maison et qui était fermé» ainsi qu'une « petite fuite » « sur le bloc de sécurité du chauffe-eau», selon facture ROYAL ELEC du 11 mars 2019.

S'agissant de l'intérêt légitime au regard de la prescription de l'action engagée, si l'article L. 1.617-5 du code général des collectivités territoriales dispose que:

« 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur.

Toutefois, l'introduction devant une juridiction de l'instance ayant pour objet de contester le bien-fondé d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local suspend la force exécutoire du titre.

L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite.

2° La contestation qui porte sur la régularité d'un acte de poursuite est présentée selon les modalités prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales ».

Il convient de retenir d'une part que le bref délai de 2 mois pour agir ne court qu'à la condition que les délais et voix de recours aient été portés à la connaissance de M. [J], ce qui n'est nullement démontré avec l'évidence requise en référé au regard des pièces des débats et notamment de la facture litigieuse, d'autre part que la demande d'expertise présentée par l'appelant ne peut être réduite à la contestation du bien fondé du titre exécutoire que constitue la facture du 9 janvier 2020.

En effet, M. [J] évoque en effet l'engagement de la responsabilité de la R.E.S.E. ainsi que la nécessaire recherche de l'origine de la surconsommation et des travaux nécessaires, ce qui ne relève pas de la seule contestation d'une facture.

L'action que pourrait engager M. [J] n'est ainsi pas, à ce titre, manifestement vouée à l'échec.

Par contre, M. [J] ne justifie d'aucun élément accréditant que la surconsommation qu'il dénonce puisse être le fait des installations de la R.E.S.E., avant compteur.

Il est rappelé que le compteur lui-même, changé le 13 octobre 2009, ne peut comptabiliser que le débit d'eau entrant, les installations en aval du compteur étant de la responsabilité de leur propriétaire, en l'espèce M. [J] qui a charge de leur surveillance.

Or, l'appelant ne fournit aucun indice en faveur de l'existence d'une fuite en amont du compteur, étant précisé qu'elle n'impliquerait pas une surconsommation dont témoignerait le compteur d'eau, ni l'existence de désordres en relation avec la surconsommation détectée en l'espèce par l'indice compteur.

Par contre, le professionnel agréé, intervenant en mars 2019 sur demande de M. [J], a pu relever l'existence de 2 fuites d'eau, au robinet d'arrêt général de la maison et sur le bloc de sécurité du chauffe-eau, et il est également fait état d'une fuite au niveau des toilettes réparée en février 2019.

Depuis ces réparations, intervenues sur les éléments d'équipement de M. [J], celui-ci ne fait plus état de nouvelle surconsommation de son installation, étant relevé que le compteur demeure le même depuis 2009.

Au regard de ces constats, le médiateur de l'eau a pu conclure :

'il ressort de l'analyse du Médiateur de l'eau qu'aucun élément concret et indiscutable ne permet d'expliquer de façon certaine la surconsommation...

En l'espèce, pour les raisons précisées plus haut, l'hypothèse d'un dysfonctionnement du compteur est très peu probable et le Médiateur de l'eau écarte cette hypothèse...

Dans le cas présent, les hypothèses les plus probables pouvant expliquer la surconsommation sont la survenance d'un voire plusieurs écoulements au niveau d'un appareil sanitaire ou une consommation effective, éventuellement accidentelle.

En conséquence, il apparaît que les hypothèses susceptibles d'être retenues pour expliquer la surconsommation constatée conduisent à conclure que la consommation enregistrée par le compteur correspond au volume réel d'eau ayant transité par ce dernier...'.

Il résulte de ces éléments que M. [J] ne justifie pas de la légitimité de sa demande d'expertise judiciaire, dès lors que sa mise en cause de la responsabilité de la R.E.S.E. ne s'appuie sur aucun élément versé aux débats, et qu'il ne peut être suppléé à la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.

Il sera ajouté que depuis l'intervention d'un artisan, l'installation a été modifiée, ce qui n'est pas non plus en faveur de l'utilité d'ordonner une mesure technique.

L'ordonnance entreprise sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a débouté M. [C] [J] de ses demandes.

Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de M. [C] [J].

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner M. [C] [J] à payer à la RÉGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAUX DE LA CHARENTE-MARITIME (R.E.S.E.) la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La somme allouée au titre des frais de première instance a été justement appréciée, l'ordonnance entreprise devant être confirmée sur ce point.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

CONFIRME l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

CONDAMNE M. [C] [J] à payer à la RÉGIE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAUX DE LA CHARENTE-MARITIME (R.E.S.E.) la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE M. [C] [J] aux dépens d'appel, étant rappelé que les dépens de première instance restent répartis ainsi que décidé par le premier juge.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/03548
Date de la décision : 20/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-20;21.03548 ?
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