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15/09/2022 | FRANCE | N°19/01352

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 15 septembre 2022, 19/01352


ASB / AC































ARRET N°



N° RG 19/01352



N° Portalis DBV5-V-B7D-FXE7













CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DE LA VENDEE



C/



[N]

























RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale



ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022







Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 mars 2019 rendu par le tribunal de grande instance de La Roche-Sur-Yon, pôle social





APPELANTE :



CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DE LA VENDEE

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Mme [B] [X], munie d'un pouvoir







INTIMÉE :



Madame [V] [N]

[Adresse 1...

ASB / AC

ARRET N°

N° RG 19/01352

N° Portalis DBV5-V-B7D-FXE7

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DE LA VENDEE

C/

[N]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 mars 2019 rendu par le tribunal de grande instance de La Roche-Sur-Yon, pôle social

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DE LA VENDEE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Mme [B] [X], munie d'un pouvoir

INTIMÉE :

Madame [V] [N]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Ayant pour avocat Me Anne-Valérie PAPIN, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, les parties ou leurs conseils ne s'y étant pas opposés, l'affaire a été débattue le 10 mai 2022, en audience publique, devant :

Madame Anne-Sophie DE BRIER, Conseiller qui a présenté son rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente

Madame Anne-Sophie DE BRIER, Conseiller

Monsieur Jean-Michel AUGUSTIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lionel DUCASSE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, que l'arrêt serait rendu le 21 juillet 2022. A cette date le délibéré a été prorogé à la date de ce jour.

- Signé par Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente, et par Madame Astrid CATRY, greffière placée auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

Fin 2015 et jusqu'en 2016, Mme [V] [N], infirmière libérale conventionnée exerçant son activité à [Localité 4], a fait l'objet d'un contrôle de son activité par la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée, visant les actes et soins remboursés par la caisse entre le 1er décembre 2012 et le 31 mars 2016.

Par lettre du 3 août 2016, la caisse a informé Mme [N] des anomalies de facturation qu'elle avait relevées.

Par lettre du 15 novembre 2016, la caisse lui a notifié les griefs retenus :

- actes facturés mais non réalisés (faits qualifiés de fraude) : 9.143, 71 euros ;

- non respect de la NGAP en matière de facturation (faits qualifiés de faute) : 6.459, 85 euros ;

et l'a informée de son droit de formuler des observations et de demander à être de nouveau entendu, dans le délai d'un mois.

Par lettre du 15 novembre 2016, la caisse a notifié à Mme [N] un indu de 15.603, 56 euros, l'a informée du délai de deux mois dont elle disposait pour procéder au paiement de cette somme, présenter des observations ou contester la notification, et l'a informé de la mise en ouvre d'une procédure aux fins de pénalité financière ou avertissement.

Par lettre du 30 décembre 2016, la caisse lui a notifié un avertissement.

Mme [N] a contesté l'indu en saisissant la commission de recours amiable, qui dans sa séance du 21 décembre 2017 a rejeté son recours.

Le 5 février 2018, Mme [N] a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de La Roche sur Yon, devenu pôle social du tribunal de grande instance.

Par jugement du 29 mars 2019, le tribunal de grande instance de La Roche-sur-Yon, pôle social, a :

- déclaré la procédure de contrôle produite inopposable à Mme [N],

- rejeté la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la caisse aux dépens,

Par déclaration du 8 avril 2019, la caisse a relevé appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Soutenant oralement à l'audience ses conclusions, la caisse demande à la cour d'infirmer le jugement, et :

$gt; à titre principal :

- constater que les sommes indument versées s'élèvent à 15.603, 56 euros et condamner Mme [N] au paiement de cette somme,

- condamner Mme [N] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire et juger que ces sommes seront assorties des intérêts de droit à compter du 'présent jugement',

$gt; à titre subsidiaire :

- constater l'indu afférent à chaque assuré et condamner Mme [N] au paiement de ladite somme,

- condamner Mme [N] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire et juger que ces sommes seront assorties des intérêts de droit à compter du 'présent jugement',

$gt; à titre infiniment subsidiaire : constater l'indu reconnu par Mme [N] concernant les assurés suivants : Mme [D] [Z] (490 euros), Mme [A] (103, 20 euros), Mme [W] (10, 84 euros), et condamner Mme [N] à payer chacune de ces sommes.

Soutenant oralement à l'audience ses conclusions, Mme [N] demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la procédure de contrôle produite inopposable à Mme [N] et condamné la caisse aux dépens,

- débouter la caisse de ses autres demandes,

- condamner la caisse à payer une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées et oralement reprises à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande de nullité et d'inopposabilité

1. La caisse admet dans ses écritures que les premières enquêtes effectuées portaient sur l'activité de Mme [U], avant d'élargir son champ d'investigation à l'activité des trois praticiens du cabinet. Il ne peut être déduit de ce fait que l'enquête n'a pas été menée à l'encontre de Mme [N], mais de la seule Mme [U]. Il le peut d'autant moins que Mme [N] est désignée dans certains procès-verbaux d'enquête, soit personnellement soit conjointement avec ses deux confrères.

Ainsi, le déroulement de l'enquête à partir de l'activité de Mme [U], étendu à l'activité de M. [L] et de Mme [N], ne caractérise pas une violation des principes d'objectivité, de neutralité et d'impartialité prônés par la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé.

Mme [N] a en outre pu faire valoir ses observations.

Enfin, il appartient à la cour d'apprécier la force probante des actes d'enquête produits.

Aucune 'inopposabilité' ou 'nullité' de l'enquête n'est ainsi établie.

2. Par ailleurs, le code de la sécurité sociale organise les modalités d'un 'contrôle médical' tel que défini aux articles L. 315-1 et suivants, contrôle médical qui porte sur tous les éléments d'ordre médical qui commandent notamment l'attribution et le service de l'ensemble des prestations de l'assurance maladie, maternité et invalidité.

Ces dispositions précisent que le service du contrôle médical constate les abus en matière de soins, de prescription d'arrêt de travail et d'application de la tarification des actes et autres prestations, que ce service procède également à l'analyse, sur le plan médical, de l'activité des professionnels de santé dispensant des soins.

Ce service médical réalise des examens individuels de patients, il est composé de praticiens-conseils et des personnes placées sous leur autorité.

Le contrôle médical suppose ainsi une analyse médicale des situations, vise à contrôler les éléments médicaux qui conditionnent le bénéfice des prestations sociales.

Ce même article dispose que la procédure d'analyse de l'activité se déroule dans le respect des droits de la défense selon des conditions définies par décret. L'article R. 315-1-1 prévoit ainsi, en application de ce texte, que le service de contrôle médical informe le professionnel avant consultation des dossiers médicaux des patients, audition ou examen de ceux-ci. La Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé rappelle cette obligation d'information préalable dans le cadre d'un contrôle par le service du contrôle médical.

Mais en l'occurrence, le contrôle objet du litige est un contrôle effectué par les seuls services administratifs de la caisse, qui portait sur le respect des règles de tarification posées par la NGAP, du respect de l'adéquation entre les actes effectués et les règles de cotations, sans analyse médicale et notamment sans examen du patient, et visait à déterminer l'existence éventuelle de sommes indument versées au regard des articles L. 133-4, L. 162-1-7, L. 162-9 du code de la sécurité sociale, ou encore 5.2.7. a) de la convention nationale destinée à régir les rapports entre les infirmières et les infirmiers libéraux et les organismes d'assurance maladie, approuvée par arrêté du 18 juillet 2007.

Dès lors, le grief avancé par Mme [N], tenant au défaut d'information préalable au contrôle, n'est pas pertinent dans le cadre du présent litige.

Il en est de même des griefs avancés à propos de la notification et de la forme du compte-rendu d'entretien du 16 novembre 2016.

Par ailleurs, la cour retient que Mme [N] a pu formuler ses observations auprès de la caisse, notamment lors d'un entretien le 20 septembre, avant notification de l'indu du 15 novembre 2016, puis qu'elle a été mise en mesure de faire de nouvelles observations dans le cadre des dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale. Elle ne peut donc en aucune manière se prévaloir d'une atteinte aux droits de la défense.

Mme [N] se prévalant également de la Charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé, il est rappelé qu'il ne résulte ni de celle-ci, ni des textes applicables en matière de recouvrement de l'indu, qu'un défaut d'application de la charte serait de nature à entraîner l'annulation de la procédure, étant à cet égard observé qu'il n'est prévu aucune sanction en cas de non-respect de la charte, dont le préambule rappelle qu'elle n'a pas vocation à se substituer aux textes législatifs, réglementaires et conventionnels mais qu'elle n'a pour objectif que de contribuer au bon déroulement des opérations de contrôle.

Ainsi, il apparaît que la procédure de contrôle telle que définie par les textes a été respectée.

Il y a donc lieu de rejeter la demande de nullité de la procédure de vérification.

Sur l'indu

1. En vertu de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale dans ses différentes versions applicables au litige, en cas d'inobservation des règles de tarification ou de facturation :

1° Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7 [...] ;

2° Des frais de transports mentionnés à l'article L. 321-1 [L. 160-8 à partir du 1er janvier 2016],

l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement.

Il en est de même en cas de facturation en vue du remboursement, par les organismes d'assurance maladie, d'un acte non effectué ou de prestations et produits non délivrés.

L'article L. 162-1-7 (version en vigueur du 22 décembre 2010 au 28 janvier 2017) précité vise notamment la prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé, dans le cadre d'un exercice libéral [.]. Il subordonne cette prise en charge ou ce remboursement à l'inscription de l'acte ou de la prestation sur une liste établie dans les conditions fixées à cet article.

En outre, en application de l'article L. 162-9 du code de la sécurité sociale, dans ses différentes versions applicables au litige, les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les auxiliaires médicaux sont définis par une convention nationale conclue entre l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et une ou plusieurs des organisations syndicales nationales les plus représentatives de la profession. Cette convention détermine, notamment, les obligations des caisses primaires d'assurance maladie et celles des auxiliaires médicaux, ainsi que la possibilité de mettre à la charge de l'auxiliaire médical qui ne respecte pas les mesures prévues au 3° du présent article, une partie de la dépense des régimes d'assurance maladie, correspondant aux honoraires perçus au titre des soins dispensés dans des conditions ne respectant pas ces mesures.

L'article 5.2.7. a) de la convention nationale destinée à régir les rapports entre les infirmières et les infirmiers libéraux et les organismes d'assurance maladie, approuvée par arrêté du 18 juillet 2007, prévoit que seuls donnent lieu à un remboursement par l'assurance maladie les actes pour lesquels l'infirmière atteste qu'ils ont été dispensés et rémunérés, conformément à la réglementation en vigueur.

L'erreur ou la négligence du solvens ne font pas obstacle à l'exercice par lui de l'action en répétition.

De même, la bonne foi de l'accipiens ne saurait priver une caisse de son droit au remboursement des sommes indûment versées. Les développements de Mme [N] relatifs à des maladresses ou erreurs d'utilisation du logiciel sont donc inopérants au stade de la caractérisation de l'indu.

2.Selon l'article 1315 ancien du code civil, auxquels ne déroge pas l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Ainsi, il appartient à la caisse qui engage une action en répétition de l'indu fondée, en application de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, sur la méconnaissance des règles de tarification et de facturation, de justifier de la nature et du montant de cet indu (2e civ., 5 avril 2012, 11-14.385 à 11-14.390), d'établir l'existence du paiement d'une part, son caractère indu d'autre part, étant précisé que cette preuve peut être rapportée par tout moyen (cf. par analogie 2e civ., 27 janvier 2022, 20-18.132, Publié).

Dans le cadre de ce régime probatoire, les procès-verbaux des agents de contrôle établis conformément aux dispositions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale font foi jusqu'à preuve du contraire.

Lorsque la caisse établit la nature et le montant de l'indu, il appartient au professionnel de santé d'apporter des éléments pour contester l'inobservation des règles de facturation et de tarification retenue par l'organisme de prise en charge au terme du contrôle (cf. 2e civ, 28 novembre 2013, n° 12-26.506 ; 12 mars 2020, n° 19-10.817 ; 3 juin 2021, n° 19-25.055).

En l'espèce, la caisse produit, pour chaque assuré concerné dont l'indu est contesté :

- un tableau présentant, notamment, acte par acte, le montant remboursé par la caisse, le montant de l'indu considéré (« montant anomalie »), le motif de cette anomalie (cotation erronée, .), le grief (« fictif », NGAP, .), et le moyen de preuve (« législation », « enquête », .),

- diverses pièces justificatives.

La cour estime que, ce faisant, la caisse établit la nature et le montant de l'indu, de sorte qu'il appartient à Mme [N] d'apporter des éléments contraires.

3.Assurée Mme LB (du 9 novembre 2014 au 2 novembre 2015)

La caisse reproche à Mme [N] des actes fictifs, plus précisément d'avoir facturé, pour chaque jour où il est intervenu, des actes infirmiers de soins (AIS3) alors qu'aucun soin n'était dispensé à l'assurée. Elle soutient que l'AMAD intervient quotidiennement auprès de Mme [N] depuis le 20 octobre 2015. Elle ajoute qu'avant cette date, soit l'assurée se débrouillait seule, soit la fille de l'assurée passait lever sa mère, et qu'au regard des éléments du dossier la réalisation de soins d'hygiène par des infirmiers n'était pas justifiée.

A cet égard, il est rappelé que selon l'article 11 « Soins infirmiers à domicile » du chapitre 1 « soins de pratique courante » du titre XVI « Soins infirmiers » de la NGAP, la séance de soins infirmiers (cotée AIS3) comprend l'ensemble des actions de soins liées aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie, visant à protéger, maintenir, restaurer ou compenser les capacités d'autonomie de la personne. La cotation forfaitaire par séance inclut l'ensemble des actes relevant de la compétence de l'infirmier réalisés au cours de la séance, la tenue du dossier de soins et de la fiche de liaison éventuelle.

S'agissant des actes facturés, la cour relève qu'il s'agit d'AIS3 (outre les déplacements afférents), de sorte que les développements de Mme [N] relatifs à la mise en oeuvre d'un programme d'aide personnalisée (cotation AIS3,1) ou aux actes définissant une 'séance de surveillance clinique infirmière et de prévention (cotation AIS4) sont inopérants. En outre, les éléments versés aux débats par l'une et l'autre partie établissent que l'AMAD (aides à domicile intervenant depuis le 20 octobre 2015) intervenait sept jours sur sept matin et soir pour des actions de lever/coucher, accompagnement à la toilette, mise en place du change, ... ; qu'avant cette date sa fille passait la lever, sinon l'assurée se débrouillait seule ; que les infirmiers ('ils'), sans distinction entre eux, ne passaient qu'une fois par jour et pas tous les jours, pour une prise de tension à la demande, une prise de sang une ou deux fois par an, prendre des nouvelles, cela en moins de dix minutes. Il est ainsi établi qu'aucun soin d'hygiène n'était dispensé.

Par ailleurs, la préparation et la surveillance du traitement médicamenteux ne pouvaient être facturés dès lors que l'assurée ne présentait pas de troubles psychiatrique, ce qui est admis.

Les éléments apportés par Mme [N] ne concernent pas la période litigieuse.

L'indu est donc bien caractérisé, à hauteur de 1.625, 58 euros.

5.Assurée Mme [G] (du 9 novembre 2014 au 21 février 2016)

La caisse reproche à Mme [N] d'avoir facturé 2 à 3 AIS3 à l'occasion de ses deux passages quotidiens au domicile de l'assurée, et d'y avoir ajouté des AMI (acte médico-infirmier, telle une injection, une prise de sang). .

Mme [N] ne peut efficacement soutenir qu'il passait trois fois par jour pendant la période contrôlée, alors que l'assurée, entendue à deux reprises, a évoqué seulement deux passages et précisé en octobre 2016 que les infirmiers désormais passaient trois fois par jour, depuis 2-3 mois, soit postérieurement à la période contrôlée. Les attestations produites par Mme [N] ne remettent aucunemenet en cause cette fréquence de deux passages par jour pendant la période contrôlée.

Il est également rappelé qu'une séance de soins infirmiers comprend l'ensemble des actions de soins liées aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie, visant à protéger, maintenir, restaurer ou compenser les capacités d'autonomie de la personne, et que la cotation forfaitaire par séance inclut l'ensemble des actes relevant de la compétence de l'infirmier réalisés au cours de la séance, la tenue du dossier de soins et de la fiche de liaison éventuelle. Une cotation AIS3 ne peut donc être cumulée avec une cotation AMI.

C'est donc à tort que Mme [N] a facturé des AMI.

Par ailleurs, les éléments produits démontrent que la facturation de deux AIS3 pour deux passages par jour au domicile de Mme [N] n'est pas remise en cause par la caisse, qui s'oppose en revanche à la facturation de 3AIS sur une même journée au regard de la durée des soins prodigués.

Il est rappelé à cet égard que la cotation AIS 3 est possible « par séance d'une demi-heure, à raison de 4 au maximum par 24 heures ».

Il est également rappelé que pour être valablement facturé, l'acte doit non seulement avoir été prescrit, mais effectivement réalisé.

Or selon l'enquête réalisée, aucune séance ne durait environ 1h pour justifier une cotation de 2 AIS3.

L'indu est donc bien caractérisé, à hauteur de 861, 30 euros.

7.Assurés : les époux [T] et [H] (du 9 novembre 2014 au 2 février 2016)

La caisse reproche à Mme [N] d'avoir facturé deux passages alors qu'elle n'en effectuait qu'un en réalité, d'avoir facturé des soins d'hygiène dispensés à Mme [M] alors que celle-ci était autonome pour sa toilette, et d'avoir facturé des indemnités de déplacement pour chacun des deux assurés alors que les soins étaient effectués au cours du même passage au domicile commun.

Le fait que M. [T] n'ait jamais été entendu par l'enquêtrice ne suffit pas en soi à exclure tout indu, dès lors que d'autres éléments sont susceptibles d'être probants.

Il ressort des premières déclarations de Mme [H] que Mme [N] ne passait qu'une fois par jour avant la fin du mois de janvier 2016, et le caractère sibyllin des déclarations faites quelques mois plus tard, en octobre 2016 (« est-il arrivé que les infirmiers passent deux fois par jour avant fin janvier 2016 ' depuis 1 an. ») ne permet pas de contredire les premières déclarations. Cela d'autant moins qu'en février 2016 Mme [H] avait indiqué qu'il n'y avait pas de soins dispensés le soir, juste une discussion. Les attestations et courriers versées aux débats émanant de Mme [H], rédigée au présent postérieurement à la période litigieuse, et étant contradictoires entre eux, ne contredisent pas les déclarations.

Aucun élément des débats ne permet de penser que l'agent assermenté de la caisse a influencé les réponses de l'assurée.

S'agissant de Mme [H], Mme [N] ne peut efficacement prétendre à une cotation AIS3 alors qu'aucune DSI n'est versée aux débats pour en préciser la teneur et que l'assurée a déclaré faire sa toilette elle-même.

Mme [N] admet la double facturation d'indemnité de déplacement alors que les soins étaient effectués aux deux membres du couple à l'occasion du même passage au domicile.

L'indu est caractérisé à hauteur de 1.733 euros concernant M. [T] et à hauteur de 2.528, 88 euros concernant Mme [H].

8.Assuré : M. [K] (du 9 novembre 2014 au 1er décembre 2015)

La caisse reproche à Mme [N] d'avoir facturé deux passages par jour alors qu'il ne passait en réalité qu'une seule fois. L'assuré entendu lors de l'enquête a effectivement indiqué en février 2016 que 'le cabinet médical' (tout infirmier du cabinet alternativement) passait chaque jour vers 7h-7h15, et confirmé en octobre 2016 que les infirmiers ne passait qu'une seule fois par jour, le matin, en 2013, 2014, 2015 ; qu'ils ne passaient 2 fois par jour que depuis 2-3 mois, soit postérieurement à la période contrôlée. L'attestation rédigée par l'assuré en août 2016 à la demande d'un infirmier ne permet pas de contredire ses déclarations à l'agent enquêteur puisqu'il s'exprime au présent et non sur la période litigieuse. L'ordonnance du Dr [P] porte sur des soins en 2012, hors période litigieuse.

Par ailleurs, la DSI établie par Mme [U] ne permet pas d'établir les soins effectivement réalisés.

L'indu est caractérisé à hauteur de 2.012, 30 euros.

9. Assurée : Mme [E] (du 9 novembre 2014 au 2 février 2016)

La caisse reproche à Mme [N] d'avoir côté de manière inappropriée des pansements d'ulcère qui ne correspondaient pas à des pansements lourds et complexes, ce que Mme [N] conteste.

Mme [N] ne justifie pas que le(s) pansement(s) réalisé(s) répondaient aux critères d'un pansement lourd et complexe tel que défini à l'article 3 du titre XVI « Soins infirmiers ». L'attestation du Dr [S] est à cet égard inprécise. Les cotations AMI4 et MCI n'étaient donc pas justifiées.

Par ailleurs, l'attestation du fils de l'assurée, qui a fait appel à l'AMAD pour assurer les repas et les toilettes de sa mère, établit suffisamment que l'infirmière passait trois fois par jour pour la préparation et la prise de médicaments, et non pour une séance de soins infirmiers, au demeurant non justifiée.

L'indu est caractérisé à hauteur de 3.648, 76 euros.

10. Assurée : Mme MG (du 9 novembre 2014 au 12 janvier 2015)

Les pièces versées aux débats, telles que les déclarations de l'assurée recueillie par l'agent assermenté, établissent que Mme [N] ne passait qu'une seule fois au domicile de l'assurée. L'attestation de celle-ci, que produit l'infirmière, a été écrite par la professionnelle de santé avant d'être signée de l'assurée et n'est pas suffisamment précise pour établir l'existence de deux passages. Il est donc considéré que l'indu afférent est établi.

Cet unique passage s'effectuait vers 7h selon l'assurée mais la prescription médicale n'indique nullement la nécessité impérieuse d'un passage de nuit (20h-8h), de sorte que la majoration de nuit n'était pas due.

L'article 23.2 de la NGAP énonce que lorsque l'infirmier(ère) réalise à domicile un pansement lourd et complexe ou des soins inscrits au titre XVI à un patient en soins palliatifs, ces prises en charge donnent lieu à la majoration de coordination infirmier(ère) (MCI) du fait du rôle spécifique de l'infirmier(ère) en matière de coordination, de continuité des soins et de gestion des risques liés à l'environnement. La prise en charge en soins palliatifs est définie comme la prise en charge d'un patient ayant une pathologie grave, évolutive, mettant en jeu le pronostic vital. Elle vise à soulager la douleur et l'ensemble des symptômes digestifs, respiratoires, neurologiques et autres, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage.

En l'espèce, les ordonnances produites ne permettent de caractériser ni une prescription de pansement lourd et complexe, ni un patient en soins palliatifs, de sorte que la majoration MCI était indue.

L'indu est donc caractérisé à hauteur de 456, 55 euros.

11.Assurée : Mme [R] (du 6 décembre 2014 au 26 novembre 2015)

L'assurée a indiqué en décembre 2015 que Mme [U] ne passait qu'une fois par jour, le matin vers 8h15, puis confirmé en octobre 2016 que la pratique de chacun des trois infirmiers du cabinet était de ne passer qu'une fois par jour, à partir de 8 heures. Elle précise qu'elle faisait ses piqûres elle-même, ce qui est cohérent avec l'ordonnance initiale du centre hospitalier de [Localité 5], qui a prescrit en décembre 2014 deux passages par jour pendant une semaine puis un seul passage, pour aide à l'adaptation des doses d'insuline.

L'assurée a déclaré que Mme [N] passait chez elle après 8h, et Mme [N] ne conteste pas avoir indument facturé des majorations de nuit.

L'indu est donc caractérisé à hauteur de 2.688, 24 euros.

12.Assurée : Mme [J] (du 21 au 28 septembre 2015)

L'assurée entendue par l'enquêteur assermenté a affirmé que l'infirmier ne passait qu'une fois par jour, dans la matinée (entre 9h30 et 12h30). Le fait que cette assurée ait signé le procès-verbal de l'enquêteur sans relecture, comme elle l'indique dans une attestation, ne permet pas de remettre en cause la sincérité du recueil des déclarations de l'assurée par l'enquêteur.

L'indu est caractérisé à hauteur de 10, 84 euros.

13.Assurée : Mme [O] (du 21 février au 12 avril 2015)

Les prescriptions ne mentionnent pas la nécessité impérieuse d'un passage de nuit, de sorte que la majoration afférente ne pouvait être facturée par l'infirmier.

L'indu est donc caractérisé à hauteur de 38, 11 euros.

14. Il en résulte que la caisse est bien fondée à réclamer à Mme [N] la restitution d'un indu de 15.603, 56 euros.

Le jugement est donc infirmé, et la cour, statuant à nouveau, condamne Mme [N] à payer à la caisse ladite somme, avec intérêt au taux légal à compter de la présente décision, conformément à la demande.

Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie succombante pour l'essentiel, Mme [N] est condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Par suite, Mme [N] se trouve condamnée à payer à la caisse une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement rendu le 29 mars 2019 par le tribunal de grande instance, pôle social, de La Roche sur Yon,

Statuant à nouveau de ce chef,

Rejette la demande de nullité et d'inopposabilité de l'enquête et de la procédure de vérification / contrôle,

Condamne Mme [V] [N] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée la somme de 15.603, 56 euros correspondant à l'indu, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Et y ajoutant,

Condamne Mme [V] [N] à payer à la caisse la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [N] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/01352
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;19.01352 ?
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