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05/07/2022 | FRANCE | N°20/02725

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 05 juillet 2022, 20/02725


ARRET N°429



N° RG 20/02725 - N° Portalis DBV5-V-B7E-GD7V















COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU NIORTAIS



C/



S.A.R.L. DEUX SEVRES VEHICULES INDUSTRIELS

S.A.S. VOLVO TRUCKS FRANCE



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 05 JUILLET 2022





Numéro d'inscription au répertoire

général : N° RG 20/02725 - N° Portalis DBV5-V-B7E-GD7V



Décision déférée à la Cour : jugement du 07 septembre 2020 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIORT.







APPELANT :



COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU NIORTAIS

[Adresse 1]

[Localité 4]


...

ARRET N°429

N° RG 20/02725 - N° Portalis DBV5-V-B7E-GD7V

COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU NIORTAIS

C/

S.A.R.L. DEUX SEVRES VEHICULES INDUSTRIELS

S.A.S. VOLVO TRUCKS FRANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 05 JUILLET 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02725 - N° Portalis DBV5-V-B7E-GD7V

Décision déférée à la Cour : jugement du 07 septembre 2020 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIORT.

APPELANT :

COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU NIORTAIS

[Adresse 1]

[Localité 4]

ayant pour avocat Me Jean-Philippe LACHAUME de la SCP TEN FRANCE, avocat au barreau de POITIERS

INTIMEES :

S.A.R.L. DEUX SEVRES VEHICULES INDUSTRIELS

[Adresse 2]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me Isabelle LOUBEYRE de la SCP EQUITALIA, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Séverine SURMONT, avocat au barreau de DOUAI

S.A.S. VOLVO TRUCKS FRANCE

[Adresse 5]

[Localité 3]

ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Philippe BERNARD, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 16 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Le 18 février 2013, la communauté d'agglomération du Niortais a acquis auprès de la communauté urbaine Le Mans métropole un véhicule d'occasion lui permettant de collecter le verre de recyclage immatriculé AR 647 AS, pour un prix de 112 000 euros hors taxes, dont elle a pris possession dès le 5 décembre 2012, le véhicule affichant alors 7 500 km au compteur.

Le 14 août 2013, les ateliers de la communauté d'agglomération du Niortais ont réalisé un contrôle des niveaux à la suite de l'indication d'une pression d'huile moteur faible au tableau de bord.

Le véhicule a par la suite été confié à plusieurs reprises à la société Deux-Sèvres véhicules industriels DSVI pour entretien et dépannage, notamment pour déterminer l'origine de l'allumage du voyant de pression d'huile le 14 août 2013 et le 20 janvier 2014.

Finalement, le 3 mars 2014, la société DSVI a détecté une dégradation de l'arbre à cames du moteur ayant généré des désordres sur les éléments internes du moteur.

Une expertise amiable contradictoire a été diligentée par le cabinet d'expertise Auto Expertise Sévrienne à la demande de la SMACL, assureur protection juridique de la communauté d'agglomération du Niortais.

L'expert a rendu son rapport le 9 janvier 2015.

Saisi par requête de la communauté d'agglomération du Niortais, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a, par ordonnance du 9 juin 2015, ordonné une expertise technique au contradictoire de la société Volvo Trucks Rance et de la société DSVI, et a désigné M. [P] [C] en qualité d'expert, qui a déposé son rapport le 19 mai 2017.

Par actes d'huissier des 18 juillet et 1er août 2018, la communauté d'agglomération du Niortais a fait assigner la société DSVI et la société Volvo Trucks France devant le tribunal de grande instance de NIORT aux fins d'indemnisation de son préjudice contre la société DSVI et aux fins de jugement commun contre Volvo Trucks France.

Par ses dernières conclusions, la communauté d'agglomération du Niortais demandait au tribunal, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, à défaut 1147 ancien, 1231-1 nouveau et 1315 ancien, 1353 nouveau du code civil, 331 alinéa 2 du code de procédure civile, de :

- constater l'existence d'un vice caché, et à défaut le manquement de la société DSVI à son obligation de résultat,

- dire que la société DSVI est entièrement responsable des désordres survenus sur le véhicule de la communauté d'agglomération du Niortais,

- condamner la société DSVI à l'indemniser des entiers préjudices pour un montant total de 60805,56 euros T.T.C.,

- dire que cette somme produira intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- condamner la société DSVI à lui payer la somme de 13 751,99 euros T.T.C. correspondant aux frais d'expertise et honoraires d'expertise judiciaire,

- condamner la société DSVI à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

- déclarer commun à la société Volvo Trucks France le jugement à intervenir.

Par ses conclusions récapitulatives, la société DSVI demandait au tribunal de:

- déclarer irrecevables et mal fondées les demandes de la communauté d'agglomération du Niortais à son encontre formées sur le fondement de l'article 1641 du code civil,

- débouter la demanderesse de toutes ses demandes,

- débouter la société Volvo Trucks France de ses demandes.

A titre subsidiaire, elle demandait au tribunal de :

- déclarer la société Volvo Trucks France responsable des désordres affectant le moteur du véhicule appartenant à la communauté d'agglomération du Niortais,

- condamner la société Volvo Trucks France à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

- à tout le moins, déclarer responsable la société Volvo Trucks France des dommages à hauteur de 50 %,

- déclarer responsable la demanderesse des défauts affectant le véhicule pour un pourcentage d'imputabilité dans les travaux de reprise des dommages, frais, dépens et frais d'expertise judiciaire qui ne saurait être inférieur à la somme de 25%.

En tout état de cause, elle demandait la condamnation de la demanderesse ou de tout succombant à lui verser la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Par ses dernières conclusions, la société Volvo Trucks France demandait au tribunal, à titre principal, de rejeter les demandes formées à son encontre par la société DSVI. A titre subsidiaire, elle demandait que sa part de responsabilité soit limitée à 10 %, et à défaut 25 %. En tout état de cause, elle demandait que la partie succombante soit condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance.

Par jugement contradictoire en date du 07/09/2020, le tribunal judiciaire de NIORT a statué comme suit :

'DÉBOUTE la communauté d'agglomération du Niortais de toutes ses demandes ;

CONDAMNE la communauté d'agglomération du Niortais à payer à la société Deux-Sèvres véhicules industriels (DSVI) la somme de 2 000 euros surie fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la société Volvo Trucks France de ses demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la communauté d'agglomération du Niortais aux dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire'.

Le premier juge a notamment retenu que :

- la société DSVI n'étant pas le vendeur ni le fabricant du véhicule, elle ne saurait être tenue de garantir les vices cachés.

- l'obligation de résultat qui pèse sur le garagiste en ce qui concerne la réparation des véhicules de ses clients emporte à la fois présomption de faute et présomption de causalité entre la faute et le dommage mais il s'agit d'une présomption simple pouvant être combattue par la preuve contraire.

Le garagiste peut s'exonérer de sa responsabilité en démontrant qu'il n'a pas commis de faute, que sa prestation n'a été ni défectueuse ni insuffisante, que le dommage n'a aucun lien de causalité avec son intervention, ou que la faute de la victime a concouru à la réalisation du dommage.

- selon l'expertise amiable, le véhicule était affecté d'une anomalie antérieure à la vente, localisée au niveau de l'arbre à cames, et les investigations réalisées par la société DSVI en septembre 2013 n'ont pas permis d'identifier l'origine de la panne.

- selon le rapport d'expertise ordonnée par la juridiction administrative, les premiers défauts de pression d'huile ont été enregistrés en août 2013. Par la suite, 140 défauts de pression d'huile ont été constatés, malgré les interventions de la société DSVI. Celle-ci n'a pas effectué d'analyse d'huile.

- la société DSVI, comme la CAN, contestent les constatations de l'expert en ce qu'il a relevé 140 défauts.

- la société DSVI n'a pas été à même de détecter l'origine de l'allumage du voyant d'alerte de pression d'huile, ses interventions ont été inefficaces et n'ont pas permis d'empêcher les désordres causés au moteur.

- les deux experts affirment que la came la plus endommagée est celle de la pompe haute pression, que c'est la dégradation de cette came qui est à l'origine des désordres causés ensuite à la came d'échappement adjacente.

- les parties et experts font référence à une note d' information qui aurait été diffusée par Volvo Trucks France, fabricant du moteur, «permettant aux concessionnaires de remplacer l'arbre à cames ».

Cette note n'est pas produite au dossier de sorte que son contenu et sa date ne peuvent être vérifiés, mais Volvo Trucks France n'en conteste ni l'existence ni le contenu, affirme même que ses notes sont mises en ligne sur le système informatique qui lie le constructeur à son réseau de réparateurs et qu'il appartient à ces derniers de toujours s'assurer d'être parfaitement informés des notes émises par le constructeur.

Pourtant, il n'est pas établi que la société DSVI ait reçu cette note, ni que Volvo ait informé expressément ses réparateurs ou ses clients des anomalies constatées sur ses moteurs.

- tant les experts que la société Volvo Trucks France elle-même reconnaissent l'existence d'un vice interne du moteur. Si les interventions de la société DSVI n'ont pas permis de déceler ce vice avant le 3 mars 2014, les désordres ne sauraient être imputables à la société DSVI.

- la société DSVI ne pourra être tenue responsable des désordres causés au moteur, dont la cause réside exclusivement dans un vice de fabrication connu de la société Volvo Trucks France. La CAN sera déboutée de toutes les demandes formées à l'encontre de la société DSVI.

- la CAN ne forme aucune demande contre la société Volvo Trucks France. L'appel en garantie formé par la société DSVI contre Volvo Trucks France n'a pas lieu d'être examiné en l'absence de condamnation de DSVI

LA COUR

Vu l'appel en date du 25/11/2020 interjeté par la Communauté d'Agglomération du Niortais,

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 20/03/2022, la Communauté d'Agglomération du Niortais a présenté les demandes suivantes :

'Vu le jugement du 07 septembre 2020,

Vu les articles 1134, 1135 et 1147 du code civil dans leur version applicable au litige,

Vu le rapport d'expertise judiciaire du 19 mai 2017,

Vu l'article 331 alinéa 2 du code de procédure civile,

Déclarer la Communauté d'Agglomération du Niortais recevable en son appel.

Infirmer le jugement déféré.

STATUANT A NOUVEAU,

Juger qu'en sa qualité de représentant agréé du constructeur VOLVO TRUCKS et professionnelle de la réparation de véhicules industriels, la S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (D.S.V.I) n'a pas accompli les diligences à sa charge dans l'identification et la réparation de l'avarie de la benne de collecte DENNIS EAGLE, équipé d'un moteur VOLVO D7, immatriculé [Immatriculation 6], appartenant à la Communauté d'Agglomération du Niortais.

Juger que la S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (D.S.V.I) a manqué à son obligation de réparation de résultat du véhicule appartenant à la Communauté d'Agglomération du Niortais.

Condamner la S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (D.S.V.I) au paiement d'une somme totale de 60 805,56 €, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance du 1er août 2018 au titre de la réparation des préjudices subis par la Communauté d'Agglomération du Niortais.

Ordonner l'anatocisme.

Condamner la S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (D.S.V.I) au paiement d'un montant de 6 000 € à la Communauté d'Agglomération du Niortais par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; outre les entiers dépens, lesquels incluront les frais d'expertise judiciaire taxés à un montant de 13 751,99 € suivant ordonnance du président du tribunal administratif de POITIERS du 12 juin 2017, ceux de première instance et d'appel'.

A l'appui de ses prétentions, la Communauté d'Agglomération du Niortais soutient notamment que :

- elle conteste sa participation dans la réalisation du dommage.

Il n'est pas démontré par l'expertise que l'incrémentation de défauts dans le calculateur moteur génère automatiquement une alerte visuelle au tableau de bord.

En outre, lorsque le voyant « défaut de pression d'huile » est allumé, le véhicule roule en mode dégradé, à une vitesse limitée à 30 km/h : la CAN n'aurait jamais pu assurer son obligation de continuité du service public (la collecte de bacs de verre ménager) pendant plusieurs semaines en mode dégradé.

- les trois seules fois où le voyant s'est allumé au tableau de bord, la CAN a procédé dans la foulée à un contrôle préalable des niveaux puis le véhicule a été systématiquement amené au garage VOLVO, chez D.S.V.I à [Localité 4].

- les 140 alertes « défaut de pression d'huile » enregistrées dans le calculateur sont uniquement consultables au moyen de la valise électronique du constructeur et n'ont jamais été signalées ni vues au tableau de bord.

- le contrôle de la distribution au bout de 2000 heures d'utilisation ou au bout de douze mois n'incombait pas à la CAN dont la prise de jouissance s'est faite le 5 décembre 2012

- sur la responsabilité de DSVI, cette société est réparateur agréé NISSAN TRUCKS et VOLVO TRUCKS.

- Le garagiste doit suivre les prescriptions du constructeur ainsi que les conseils techniques donnés par les spécialistes.

- L'expert judiciaire évoque dans son rapport d'expertise que « DSVI a manqué à son obligation de résultat à deux reprises (défaut de pression d'huile) et n'a pas appliqué la note technique de VOLVO TRUCKS.

- la société VOLVO TRUCKS a précisé que toutes ses notes sont mises en ligne sur le système informatique reliant le constructeur à l'ensemble de son réseau de réparateurs et il appartient à ceux-ci d'en prendre connaissance.

- La société D.S.V.I est intervenue plusieurs fois et notamment dès le 20 septembre 2013 sur le capteur de pression d'huile et aurait dû soit se conformer à la note d'information de VOLVO TRUCKS, soit procéder à de plus amples investigations.

- la société D.S.V.I ne démontre ni avoir soumis le véhicule à la balise de diagnostic permettant de lire les données du calculateur, ni avoir procédé à un prélèvement d'huile aux fins d'analyse.

- elle ne pouvait ignorer les préconisations du constructeur de procéder au remplacement de l'arbre à came.

- elle a manqué à son obligation de résultat quant à l'identification des causes de la panne plusieurs fois réitérée.

- s'il s'agissait d'un vice de fabrication, il paraît rédhibitoire que la société D.S.V.I, professionnelle de la mécanique de véhicules industriels, n'ait pas tiré profit de ses relations privilégiées avec VOLVO TRUCKS FRANCE pour en identifier la cause.

- elle sollicite la prise en charge de son préjudice matériel de 49.625,05 € T.T.C., outre son préjudice économique retenu par l'expert pour un montant de 11 180,51 €, soit un total de 60 805,56 € T.T.C.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 29/07/2021, la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) a présenté les demandes suivantes :

'Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Niort le 7 septembre 2020,

Vu les articles 1134, 1147 anciens applicables en la cause et 1240 et 1241 du code Civil,

Vu le rapport d'expertise judiciaire de Mr [C],

A titre Principal,

Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Niort dans l'ensemble de ses dispositions,

Débouter la Communauté d'Agglomération du Niortais de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société DSVI.

Débouter la société VOLVO TRUCKS France de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Juger que la société DSVI n'a commis aucun manquement à l'origine des pannes affectant le moteur du véhicule appartenant à la Communauté d'Agglomération du Niortais et prononcer ainsi sa mise hors de cause.

A titre subsidiaire,

Juger responsable la société VOLVO TRUCKS France des désordres affectant le moteur du véhicule appartenant à la Communauté d'Agglomération du Niortais.

Condamner la société VOLVO TRUCKS France à garantir la société DSVI des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre en principal, accessoires et frais.

À tout le moins, déclarer responsable la société VOLVO TRUCKS France des dommages à hauteur de 50 %.

Juger responsable la Communauté d'Agglomération du Niortais des défauts affectant le véhicule compte-tenu de des conditions d'utilisation et de maintenance pour un pourcentage d'imputabilité dans les travaux de reprise des dommages, frais dépens et frais d'expertise judiciaire qui ne saurait être inférieur à la somme de 25 %.

En tout état de cause, et y ajoutant,

Condamner la Communauté d'Agglomération du Niortais ou tout succombant à régler à la société DSVI la somme de 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile exposé en appel ainsi qu'aux entiers frais et dépens d'instance en ce compris les frais d'expertise judiciaire'.

A l'appui de ses prétentions, la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) soutient notamment que :

- en juin 2013, la Communauté d'Agglomération du Niortais a porté le véhicule au garage DEUX SÈVRES VÉHICULES INDUSTRIELS - DSVI - afin que soit déterminé l'origine de l'allumage d'un voyant « check » sur le tableau de bord.

Après prise de possession du véhicule, la CAN effectuera par ses services techniques un contrôle des niveaux d'huile en août 2013.

En janvier 2014, le voyant « check » étant toujours allumé au tableau de bord, elle confiera

à nouveau le véhicule au garage DSVI qui diagnostiquera une dégradation de l'arbre à came du moteur générant des désordres aux éléments du moteur.

- toute panne survenant sur un véhicule après passage chez un garagiste n'est pas de facto susceptible d'engager sa responsabilité car il doit être démontré le lien de causalité entre le dommage et la réparation effectuée.

La présomption de faute alléguée par l'appelante n'est applicable qu'à la condition que le dommage survienne sur le véhicule postérieurement à l'intervention du professionnel.

- il incombe au client de prouver que le réparateur n'a pas remédié au défaut alors qu'il était décelable.

- il n'a pas été possible à l'expert d'établir de façon claire et techniquement irréfutable la cause des désordres constatés, l'hypothèse la plus vraisemblable étant malgré tout un défaut de fabrication de l'arbre à cames.

- au regard de l'avis donné par l'expert judiciaire, seule la société VOLVO TRUCKS France fabricante du moteur doit répondre des dommages.

- il existe un fait extérieur exonérant la société DSVI, soit un vice du moteur.

- la première alerte de pression d'huile enregistrée par l'utilisateur a lieu le 14 août 2013 qui conduira à un dépannage de la société DSVI. L'arbre à came est latéral et de ce fait, il n'est pas visible lors du contrôle de distribution.

L'expert n'a peut dater la dégradation de l'arbre de came d'échappement de sorte qu'il est impossible de dire si celle-ci aurait pu être détectée le 14 août 2013.

- c'est à compter de 2014, lorsque à nouveau le véhicule sera apporté chez elle pour l'allumage du voyant « check » que la société DSVI détectera une dégradation de l'arbre à came.

- la société DSVI n'est aucunement intervenue sur le moteur et ses divers composants et les dommages l'affectant ne sont aucunement en lien avec une action corrective qui aurait été menée par elle.

Il n'est pas démontré que le dommage affectant le véhicule trouve son origine dans la prestation de la société DSVI.

- l'outil de diagnostic ne permet pas de lire les valeurs figées associées aux occurrences (alertes visibles sur le tableau de bord du véhicule).

- il n'est pas justifié que les éléments d'informations contenus dans la note constructeur aient été effectivement portés à la connaissance des réparateurs et en temps opportun et qu'elle concernait le vice affectant le moteur du véhicule.

- à titre subsidiaire, il ne peut être retenu un pourcentage d'imputabilité de 50 % à sa charge.

La faute de DVSI ne serait que résiduelle car n'étant pas à l'origine de l'apparition du dommage.

- la société VOLVO TRUCKS FRANCE sera condamnée à garantir la société DSVI de l'ensemble des condamnations prononcées.

- l'expert judiciaire a également retenu la responsabilité de la Communauté d'Agglomération du Niortais, et il convient de lui appliquer une part de responsabilité de 25 %.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 11/03/2022, la société SAS VOLVO TRUCKS FRANCE, a présenté les demandes suivantes :

'Vu l'article 1231-1 du code Civil (anciennement 1147 du code Civil),

Vu l'article 1353 du code Civil (anciennement 1315 du code Civil),

Il est demandé à la cour d'appel de Poitiers de :

Déclarer la Communauté d'Agglomération du Niortais mal fondée en son appel,

A titre principal :

- Mettre hors de cause la société Volvo Trucks France en l'absence de demande formulée à son encontre par la Communauté d'Agglomération du Niortais ;

- Débouter la société DSVI de toute demande en garantie formée à l'encontre de la société Volvo Trucks France ;

A titre subsidiaire,

- Juger que la part de responsabilité de la société Volvo Trucks France ne saurait excéder 10 %, à défaut 25 %, conformément au rapport de l'expert judiciaire du 19 mai 2017 ;

En tout état de cause,

- Débouter la Communauté d'Agglomération du Niortais et la société DSVI de toutes demandes contraires aux présentes conclusions ;

- Condamner la partie qui succombera à verser à la société Volvo Trucks France la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- La condamner aux entiers dépens'.

A l'appui de ses prétentions, la société SAS VOLVO TRUCKS FRANCE (VTF) soutient notamment que :

- la Communauté d'agglomération du Niortais n'avait formé aucune demande à l'encontre de la société VTF, sollicitant seulement que le jugement à intervenir lui soit déclaré commun.

- seule la responsabilité de la société DSVI est engagée de plein droit à l'égard de la CAN, en raison des dommages causés par son manquement à son obligation de résultat. Le garagiste se doit de procéder à des réparations efficaces.

- le garagiste ne saurait invoquer le défaut affectant une pièce du véhicule pour obtenir son exonération.

- il lui appartient de procéder à une réparation efficace, sans omettre de s'enquérir de la difficulté auprès du constructeur ou de tenter un rapprochement avec celui-ci constructeur qui aurait pu l'orienter.

- l'alerte due à un défaut de lubrification du moteur est apparue le 25 juin 2013.

DSVI est intervenue à plusieurs reprises pour tenter de corriger les désordres, mais sans succès. Elle est donc intervenue à cinq reprises sur le capteur pression d'huile.

- cette absence d'identification des causes des désordres n'est pas seulement due à une simple négligence de la société DSVI, mais résulte aussi d'une faute caractérisée par la violation par la société DSVI des règles de l'art en ne procédant pas à l'analyse de l'huile.

- DSVI n'a pas utilisé la note d'information 1718 diffusée aux concessionnaires VOLVO.

- la communication d'une note technique par un constructeur ne peut valoir reconnaissance par ce dernier de l'existence d'un quelconque vice caché du véhicule.

- ces notes sont mises en ligne sur le système informatique qui lie le constructeur à son réseau de réparateurs, et il appartient à ces derniers de toujours s'assurer d'être parfaitement informés des notes émises.

La société DSVI ne pouvait ignorer les préconisations du constructeur résidant dans l'obligation de procéder au remplacement de l'arbre à cames en cas de défaut de pression d'huile.

- en ne prenant pas en compte les préconisations de la société VTF, sans même se rapprocher de ce dernier afin de l'informer des difficultés rencontrées, la société DSVI a manqué à son obligation de résultat à l'occasion des travaux d'entretien et de réparation effectués.

- la cause des pannes était décelable si la société DSVI s'était conformée aux règles de l'art et aux préconisations de la société VTF et seule sa responsabilité est engagée à l'égard de la CAN.

- à titre subsidiaire, sur le partage de responsabilité, s'il devait être fait droit à la demande de garantie, la part de responsabilité de la société VTF serait limitée à 10 %, à défaut 25 % conformément au rapport d'expertise judiciaire.

Quand bien même le vice de fabrication du moteur serait la cause initiale des désordres, les conséquences de ce vice découlent des manquements de la société DSVI, qui n'a pas décelé la fuite et n'a d'ailleurs pas procédé aux examens conformément aux règles de l'art pour identifier l'origine des désordres.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 21/03/2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'engagement des responsabilités :

L'article 1134 ancien du code civil dispose que :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi. »

Le principe de ces dispositions est repris désormais aux articles 1103 du code civil : ' les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits,' et 1104 du code civil 'les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi'.

L'engagement de la responsabilité contractuelle trouve son fondement dans l'article 1231-1 du code civil (1147 ancien) qui dispose que 'le débiteur est condamné, s'il y a lieu, à paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure'.

L'article 1353 du même code dispose que 'celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation'.

En l'espèce, selon facture en date du 18/02/2013, la Communauté d'Agglomération du Niortais a acquis auprès de la Communauté Urbaine LE MANS MÉTROPOLE une benne de collecte d'occasion de marque DENIS EAGLE, dotée d'un moteur VOLVO D7, immatriculée [Immatriculation 6].

La prise de jouissance par la CAN s'est faite de façon anticipée le 5 décembre 2012, le véhicule affichant 7500 kilomètres et la mise en service du véhicule par la CAN est intervenue le 1er février 2013.

Le 7 décembre 2012, la CAN a transporté le véhicule totalisant 7 667 kilomètres dans les ateliers du garage Deux-Sèvres Véhicules Industriels (D.S.V.I), concessionnaire VOLVO TRUCKS, afin que l'ABS et le train avant soient vérifiés. Le garage D.S.V.I a procédé au remplacement du calculateur et au réglage de la géométrie des trains.

En juin 2013, soit 7 mois après sa prise de possession, un voyant « Check » s'est allumé au tableau de bord, et la CAN a confié le véhicule indiquant 12.666 kilomètres au garage D.S.V.I afin d'en diagnostiquer la cause.

Ainsi, il est établi par les rapports d'expertise amiable et judiciaire que le 25 juin 2013, la société DSVI est intervenue afin de déterminer « l'origine de l'allumage d'un voyant [check] au tableau de bord ».

- le 20 septembre 2013, le véhicule a été confié à la société DSVI « afin de remédier à l'indication d'une pression d'huile moteur faible [...] (défaut constaté: pression d'huile faible, témoin « Check » allumé et manque de puissance ».

- le 20 janvier 2014, DSVI est intervenue « afin de déterminer l'origine de l'allumage du voyant Check au tableau de bord et l'indication d'une pression d'huile moteur faible, la communauté d'agglomération de Niort confie le camion au garage DSVI »,

' les 27 janvier et 28 février 2014, le véhicule a été de nouveau confié à la société DSVI pour remédier aux désordres signalés par le voyant « Check »,

- le 3 mars 2014, la société DSVI a détecté une dégradation de l'arbre à cames et a établi deux devis de réparation : l'un avec un échange moteur standard et le second en réparant le moteur.

Il convient de rappeler ici les principales constatations et les conclusions du rapport d'expertise judiciaire :

' DSVI est intervenu à la demande de la CAN et a remplacé le capteur de pression d'huile.

Les défauts de pression d'huile sont malgré tout réapparus et DSVI a réalisé une deuxième intervention le 20/01/2014, soit 5 mois plus tard, avec de nouveau le remplacement du capteur.

Les défauts de pression d'huile ont continué jusqu'au 03/03/2014...

La came la plus endommagée est celle de la pompe HP. C'est sans aucun doute celle-ci qui s'est dégradée la première et qui est à l'origine des désordres. Les désordres constatés sur la came d'échappement adjacente ont pu être causés par les particules métalliques de la came de pompe HP. Le nombre extrêmement élevé de défauts de pression d'huile (140), montre que les interventions de DSVI n'ont pas permis d'éviter ces défauts.

Dans un cas comme celui-ci où on constate beaucoup de défauts de pression d'huile, les règles de l'art sont d'effectuer une analyse d'huile, afin de vérifier l'état du moteur. Ni la CAN lors des vidanges, ni DSVI lors de ses interventions n'ont effectué d'analyse d'huile.

Sur ce moteur, l'arbre à came est latéral. De ce fait, il n'est pas visible lors du

contrôle de la distribution (jeu aux soupapes). Toutefois, la came d'échappement est suffisamment endommagée pour générer un jeu anormal sur cette soupape. Mais ne pouvant pas dater la dégradation de la came d'échappement, il est impossible de dire si celle-ci aurait pu être détectée en novembre 2013 lors du dernier entretien (contrôle préconisé de la 3 ème année)...

Les désordres sont dus à un défaut de lubrification. Celui-ci a été détecté par le calculateur moteur qui a généré des alertes au tableau de bord qui ont été enregistrées. L'absence d'action corrective a provoqué une aggravation importante des désordres et l'endommagement du moteur'...

L'expert a indiqué que : ' DSVI a manqué à son obligation de résultat lors de ses deux interventions en septembre 2013 et janvier 2014. Ils n'ont pas fait d'analyse d'huile malgré le nombre important d'alertes de pression d'huile. Bien que Volvo ait diffusé dans son réseau la note d'information 1718 permettant aux concessionnaires de remplacer l'arbre à came, DSVI ne l'a pas utilisée.

La CAN a continué à exploiter le véhicule alors que les alertes de pression d'huile étaient très fréquentes. Les alertes de pression d'huile allument un voyant rouge au tableau de bord. En cas d'allumage d'un voyant rouge, DENIS EAGLE demande l'arrêt immédiat du véhicule, ce que n'a visiblement pas respecté la CAN. Ils n'ont pas fait réaliser d'analyse d'huile lors des vidanges pour vérifier si les alertes de pression d'huile n'avaient pas endommagé le moteur.

VOLVO et DENIS EAGLE n'ont pas fixé de limite temporelle pour la durée de vie de l'huile moteur, ce qui est contraire aux règles de l'art, et peut entraîner une oxydation de l'huile et une perte de son pouvoir de lubrification'.

L'expert judiciaire conclut à la répartition de responsabilité suivante :

- VOLVO TRUCKS 25%

- COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DU NIORTAIS 25%

- DSVI 50%

Il a précisé : ' DSVI a manqué à son obligation de résultat à deux reprises (défaut de pression d'huile) et n'a pas appliqué la note technique de VOLVO TRUCKS préconisant de remplacer l'arbre à came en cas de défaut de pression d'huile. Pour ces deux raisons sa responsabilité est fortement engagée'... 'dans un cas comme celui-ci où on constate beaucoup de défauts de pression d'huile, les règles de l'art sont d'effectuer une analyse d'huile afin de vérifier l'état du moteur'.

L'expert judiciaire a pu au surplus indiquer : 'Suite à ma note n° 20, VOLVO TRUCKS m'a communiqué en diffusion restreinte son analyse qualité sur l'origine des usures d'arbres à cames qu'ils ont rencontré, et les différentes actions correctives qu'ils ont mises en place.

Sans pouvoir communiquer ce document, nous pouvons toutefois noter plusieurs points :

-Les problèmes rencontrés par VOLVO sont liés :

-à une maîtrise imparfaite du process de traitement thermique

-provoquent des défauts de pression d'huile

-La dernière modification du process a eu lieu en septembre 2009 et au numéro de série 10 831 547.

D'une part, nous pouvons relever que le numéro de série du moteur est le 10 859 614, donc ce moteur est postérieur mais très proche de la dernière amélioration mentionnée.

D'autre part, la description des défauts (pitting) correspond aux prémices des désordres relevés par le CETIM (écaillage).

Enfin, il ressort du document communiqué par VOLVO, qu'ils ont rencontré des difficultés à respecter les spécifications du plan à cause de la forme des cames.

C'est pourquoi, l'analyse de la root-cause et les conclusions qui en sont tirées dans le pré-rapport doivent être remises en question :

Si les analyses faites par le CETIM n'ont pas montré d'écart entre les valeurs mesurées (dureté et l'épaisseur de la cémentation) et le plan, il faut noter que la came de pompe GO qui est la plus endommagée, donc à l'origine des désordres, n'était plus mesurable sur le sommet de la came (trop endommagée).

Par conséquent, il est tout à fait envisageable que la root cause soit une dureté ou une épaisseur de cémentation insuffisante en sommet de la came HP, et que l'endommagement de celle-ci ait contaminé la came d'échappement adjacente et ait provoqué les alertes de pression d'huile.

S'il n'est pas possible d'établir de façon claire et techniquement irréfutable la root cause des désordres constatés, l'hypothèse la plus semblable est malgré tout un défaut de fabrication de l'arbre à came. L'erreur de DENIS EAGLE sur la périodicité de vidange n'ayant plus d'impact direct sur les désordres, sa responsabilité peut être écartée'.

Il résulte de ces éléments qu'il n'est pas établi par l'expertise que les 140 alertes «défaut de pression d'huile » enregistrées dans le calculateur du véhicule se soient traduites par une alerte au tableau de bord du véhicule, ou un enclenchement du fonctionement dégradé.

Il apparaît que ces alertes enregistrées dans le calculateur étaient uniquement consultables au moyen de la valise électronique du constructeur, et les trois seules fois où le voyant s'est allumé au tableau de bord, la CAN a systématiquement amené le véhicule au garage D.S.V.I à [Localité 4] (le 25/08/2013, 20 septembre 2013, 20 janvier 2014)

En outre, le contrôle de la distribution au bout de 2000 heures d'utilisation ou au bout de douze mois n'incombait pas à la CAN dont la prise de jouissance s'est faite le 5 décembre 2012 mais au précédent propriétaire du véhicule, et il n'est pas en outre établit que ce défaut ait participé aux dommages que le véhicule a connu.

Il ne peut dans ces circonstances être retenu une part de responsabilité de la Communauté d'Agglomération du Niortais dans la réalisation de son préjudice.

Par contre, la responsabilité de plein droit qui pèse sur le garagiste réparateur s'étend aux dommages causés par le manquement à son obligation de résultat, dès lors qu'est rapportée la preuve que les dysfonctionnements allégués dus à une défectuosité déjà existante au jour de l'intervention du garagiste sont reliés à celle-ci.

En l'espèce, il appartenait au professionnel de la réparation de prendre toutes dispositions et d'adopter toutes diligences pour satisfaire à son obligation.

Or, la société D.S.V.I est intervenue à plusieurs reprises dans le cadre d'une panne récurrente, notamment dès le 20 septembre 2013 sur le capteur de pression d'huile.

Elle ne démontre pas avoir soumis le véhicule à la balise de diagnostic permettant de lire les données du calculateur relatives aux 140 alertes enregistrées, ni surtout avoir procédé à un prélèvement d'huile aux fins d'analyse, s'agissant d'un manquement aux règles de l'art tel que relevé par l'expert judiciaire.

Si la société VOLVO TRUCKS FRANCE ne verse pas aux débats la preuve de la réalité de la transmission à la société D.S.V.I de sa note d'information 1718 qui n'est pas produite, la répétition de pannes sur un temps court aurait dû conduire la société DSVI à s'enquérir auprès du constructeur ou de son représentant en France, en sa qualité de concessionnaire, de la difficulté rencontrée.

Elle ne justifie d'aucune diligence en ce sens, et n'a pu bénéficier de l'analyse et des préconisation du constructeur.

La société D.S.V.I a ainsi manqué à son obligation de résultat quant à l'identification des causes de la panne plusieurs fois réitérée et a ignoré par son défaut de diligence les préconisations du constructeur de procéder au remplacement de l'arbre à came.

Il ne s'agit nullement d'un défaut indécelable et ses diverses interventions n'ont pas permis de remédier aux désordres, ceux-ci s'aggravant pour aboutir à un dommage majeur du fait de son inaction.

Il y a lieu en conséquence de retenir l'engagement de la responsabilité contractuelle de la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) à l'égard de sa cliente la Communauté d'Agglomération du Niortais.

Par contre, la garantie de la société VOLVO TRUCKS FRANCE doit être retenue au regard des condamnations prononcées à l'encontre de la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI), dès lors d'une part qu'il ressort du rapport d'expertise judiciaire que doit être retenue l'existence en l'espèce d'un vice de construction, soit un défaut de fabrication de l'arbre à came.

D'autre part, si la société VOLVO TRUCKS FRANCE soutient la diffusion à ses concessionnaires d'une note d'information 1718 permettant en principe à ceux-ci de remplacer l'arbre à came, l'effectivité de cette diffusion - qui manifeste la connaissance qu'avait le constructeur de la difficulté - n'est pas expressément démontrée par le constructeur à l'égard de la société DSVI.

La société VOLVO TRUCKS FRANCE ne pouvait se contenter d'indiquer que 'le garagiste doit suivre les prescriptions du constructeur', sans justifier de la transmission de ces informations, surtout lorsqu'elles ont trait à un désordre d'importance.

Enfin, il y a lieu de rappeler pour mémoire les conclusions de l'expertise amiable versées aux débats et débattues contradictoirement, qui corroborent elles-même les conclusions de l'expert judiciaire, puis que ce rapport retient : 'Dans l'état actuel du dossier, nous considérons que la communauté d'agglomération NIORTAISE a acquis un camion benne auprès de l'agglomération du MANS qui était affecté d'une anomalie antérieure à la vente, localisée au niveau de l'arbre à cames. Nous rappelons toutefois que ce défaut antérieur à la vente est imputable au constructeur du moteur VOLVO'.

En conséquence, la garantie de la société VOLVO TRUCKS FRANCE, constructeur, sera retenue à hauteur de 70 % des condamnations prononcées à l'encontre de la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI), cette société conservant seule la charge de 30 % des condamnations, au regard de l'engagement de sa responsabilité personnelle et de la part de sa propre carence dans la réalisation d'un dommage aggravé.

Sur les montants indemnitaires :

Au regard des conclusions de l'expertise judiciaire et des pièces versées, la Communauté d'Agglomération du Niortais justifie de son préjudice matériel à hauteur de la somme de 49.625,05 € T.T.C., décomposé en :

- coût du remplacement du moteur pour 39.388,43 € T.T.C.,

- frais accessoires à la remise en route du véhicule pour 2.290,60 € T.T.C.

- frais nécessaires à la remise en route de la benne du véhicule pour 7.946,02 € T.T.C.

La Communauté d'Agglomération du Niortais justifie également de son préjudice économique direct, tel que l'expert judiciaire l'a retenu, soit une somme de 11.180,51 € T.T.C.,

La société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) sera en conséquence condamnée à verser à la Communauté d'Agglomération du Niortais la somme de 60.805,56 € T.T.C., avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance du 1er août 2018, avec capitalisation des intérêts tel que sollicité.

La société SAS VOLVO TRUCKS FRANCE (VTF) sera condamnée à garantir la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) à hauteur de 70 %, soit la somme de 42 563,89 €, avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance du 1er août 2018, avec capitalisation des intérêts tel que sollicité

Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens de première instance qui comprennent les frais d'expertise pour un montant de 13 751,99€ et d'appel seront fixés à la charge de la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI), la société SAS VOLVO TRUCKS FRANCE (VTF) devant garantir la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) du paiement de ces sommes à hauteur de 70 %.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) à payer à la Communauté d'Agglomération du Niortais la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et d'appel.

La société SAS VOLVO TRUCKS FRANCE (VTF) sera condamnée à garantir la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) du paiement de cette somme à hauteur 70 %.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

INFIRME le jugement entrepris.

Statuant à nouveau de ces chefs,

CONDAMNE la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) à verser à la Communauté d'Agglomération du Niortais la somme de 60.805,56 T.T.C., avec intérêts au taux légal à compter du 1er août 2018, avec capitalisation des intérêts, comme prévu à l'article 1343-2 du code civil.

CONDAMNE la société SAS VOLVO TRUCKS FRANCE (VTF) à garantir la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) du paiement de cette somme à hauteur de 70 %, soit la somme de 42 563,89 €, avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance du 1er août 2018, avec capitalisation des intérêts comme prévu à l'article 1343-2 du code civil.

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

CONDAMNE la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) à payer à la Communauté d'Agglomération du Niortais la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et d'appel.

CONDAMNE la société SAS VOLVO TRUCKS FRANCE (VTF) à garantir la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) du paiement de cette somme due sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 70 %.

CONDAMNE la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) aux dépens de première instance qui comprennent les frais d'expertise pour un montant de 13 751,99 € et d'appel, la société SAS VOLVO TRUCKS FRANCE (VTF) devant garantir la société S.A.R.L. Deux-Sèvres Véhicules Industriels (DSVI) du paiement de ces sommes à hauteur de 70 %.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/02725
Date de la décision : 05/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-05;20.02725 ?
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