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30/06/2022 | FRANCE | N°19/03021

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 30 juin 2022, 19/03021


VC/LD































ARRET N° 465



N° RG 19/03021

N° Portalis DBV5-V-B7D-F24A













MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DU LIMOUSIN



C/



[E]

























RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale



ARRÊT DU 30 JUI

N 2022









Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 septembre 2019 rendu par le pôle social du tribunal de grande instance de LA ROCHELLE





APPELANTE :



MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DU LIMOUSIN

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 4]



Représentée par M. [G] [W], muni d'un pouvoir





INTIMÉ :



Monsieur [F] [E]

né le 21 mai 1951 ...

VC/LD

ARRET N° 465

N° RG 19/03021

N° Portalis DBV5-V-B7D-F24A

MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DU LIMOUSIN

C/

[E]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 septembre 2019 rendu par le pôle social du tribunal de grande instance de LA ROCHELLE

APPELANTE :

MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DU LIMOUSIN

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par M. [G] [W], muni d'un pouvoir

INTIMÉ :

Monsieur [F] [E]

né le 21 mai 1951 à [Localité 6] (36)

[Adresse 3]

[Adresse 8]

[Localité 2]

Représenté par Me Patrick LAVAUD, avocat au barreau de SAINTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, les parties ou leurs conseils ne s'y étant pas opposés, l'affaire a été débattue le 15 Mars 2022, en audience publique, devant :

Madame Valérie COLLET, Conseiller qui a présenté son rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente

Madame Anne-Sophie DE BRIER, Conseiller

Madame Valérie COLLET, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lionel DUCASSE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile que l'arrêt serait rendu le 09 juin 2022. A cette date le délibéré a été prorogé au 30 juin 2022.

- Signé par Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente, et par Monsieur Lionel DUCASSE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par lettre recommandée avec avis de réception du 30 avril 2018, la M.S.A. du Limousin a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de La Rochelle, statuant en matière agricole, d'un recours sur succession exercé à l'encontre de M. [F] [E] et tendant au remboursement d'une somme de 15 366,51 € versée, au titre du fonds national de solidarité devenu le fonds de solidarité vieillesse, à sa mère, [H] [E], bénéficiaire de cette allocation du 1er janvier 1988 au 30 septembre 2010.

Par jugement du 3 septembre 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de La Rochelle a :

- rejeté le moyen tendant à voir déclarer irrecevable l'action de la MSA du Limousin,

- débouté la MSA de l'intégralité de ses demandes,

- débouté M. [E] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la MSA du Limousin aux dépens de l'instance nés à compter du 1er janvier 2019,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.

Au soutien de sa décision, le tribunal a d'abord considéré, au visa des articles L.815-13 dans sa version issue de la loi du 30 novembre 2010, D.815-4 dans sa version issue du décret du 12 janvier 2007 et D.815-5 dans sa version issue du décret du 26 décembre 2011:

- que les dispositions de la loi du 30 novembre 2010 ne font pas dépendre l'entrée en vigueur de l'article L.815-13 de son décret d'application et que si l'article D.815-5 dans sa version issue du décret du 26 décembre 2011 n'existait pas au jour du décès de [H] [E], il est applicable au litige dès lors qu'il ne constitue qu'une disposition d'application de l'article L.815-13 en vigueur avant le décès,

- que M. [E] ne démontrait pas que les bâtiments litigieux étaient indissociables du capital d'exploitation,

- que la MSA a justement intégré les biens immobiliers dans l'actif net de la succession servant de base au recouvrement,

Puis le tribunal a considéré, au visa des articles L.815-13, L815-6, D.813-3 du code de la sécurité sociale, de l'article 1315 du code civil et de l'article D.723-223 du code rural et de la pêche maritime :

- que s'il est constant que Mme [E] a perçu l'allocation entre 1997 et 2010, la MSA ne produit pas d'éléments suffisants pour prouver que cette allocation a été versée antérieurement à 1997 ni qu'elle a rempli l'obligation d'information de son adhérente,

- que les documents invoqués par la caisse (microfiches et livres fiscaux consultables au siège de [Localité 7]) sont insuffisants, à défaut pour la caisse de produire devant le tribunal des éléments propres à établir la réalité de ses allégations,

- que de même la caisse ne produit aucun élément démontrant qu'elle a rempli son obligation d'information, le seul fait que le dossier retraite de Mme [E] ait été détruit en application du décret 2007-508 du 3 avril 2017 n'étant pas de nature à l'exonérer de cette obligation légale.

La MSA du Limousin a interjeté appel de cette décision par acte du 10 septembre 2019.

L'affaire a été fixée à l'audience du 20 octobre 2021 puis a été renvoyée à l'audience du 15 décembre 2021 et enfin à l'audience du 15 mars 2022.

La MSA du Limousin, s'en remettant à ses conclusions transmises le 13 juillet 2021, demande à la cour, réformant la décision déférée, de condamner M. [E] à lui payer la somme de 15 366,51 € au titre du fonds de solidarité vieillesse versé à sa mère.

Elle expose, en substance :

- que n'ayant pu obtenir du notaire en charge du règlement de la succession le remboursement de l'allocation versée à feue Mme [E], elle a, par lettre recommandée avec avis de réception du 31 juillet 2017, mis en demeure M. [F] [E] d'y procéder, dans la limite de sa quote-part (moitié) de droits successoraux,

- s'agissant de la valeur de l'héritage ;

$gt; que l'article D815-5 du code de la sécurité sociale, en sa version applicable à la date du décès, prévoyait que le capital d'exploitation agricole est constitué des éléments suivants : terres, cheptel mort ou vif, bâtiments d'exploitation, éléments végétaux constituant le support permanent de la production tels que arbres fruitiers et vignes, ainsi que les éléments inclus dans le fonds agricole créé, le cas échéant par l'exploitant en application de l'article L311-3 du code rural et de la pêche maritime,

$gt; que dès lors la maison d'habitation n'entre pas dans la catégorie des bâtiments d'exploitation et que, mur mitoyen ou non, c'est à bon droit qu'elle l'a intégrée dans le calcul de l'actif net successoral,

$gt; que l'actif net de la succession s'élève à 146 470,56 euros et dépasse donc le seul de 39 000 euros pour permettre la récupération de l'allocation sur la succession,

- s'agissant de la preuve des versements, elle produit les justificatifs du versement du FSV pour la période de 1997 à 2010 et que pour la période antérieure, les justificatifs sont archivés sur des 'micro-fiches' et des 'livres fiscaux' consultables à la MSA de [Localité 7],

- qu'elle n'est pas en mesure de produire l'imprimé de la demande d'allocation remplie par Mme [E] puisqu'elle n'avait l'obligation de conserver ces documents que pendant 5 ans après le décès,

- que par arrêt du 1er juillet 2021, la cour d'appel de Poitiers a fait droit à sa même demande présentée à l'encontre de M. [T] [E], frère de M. [F] [E]

Aux termes de ses conclusions transmises le 4 mars 2022 auxquelles il a indiqué s'en remettre, M. [E] demande à la cour de :

- confirmer la décision du tribunal relative à l'absence de preuve de la créance de la MSA,

- A défaut, condamner la caisse de la MSA à lui payer la somme de 15 366,51 euros en réparation du préjudice lié à l'absence d'information de Mme [H] [E] de la restitution des aides versées,

- confirmer la décision du tribunal en ce qu'il a considéré applicable l'article L.815-13 du code de la sécurité sociale,

- l'infirmer en ce qu'il a considéré qu'il n'apportait pas les preuves de son bénéfice,

- dire que l'immeuble en cause, ainsi que sa grange, sont indissociables de l'exploitation agricole et que la grange était affectée à une activité agricole,

- en conséquence, débouter la MSA de sa demande,

- condamner la MSA à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient pour l'essentiel :

- que la MSA ne rapporte pas la preuve de la créance qu'elle invoque,

- que la MSA ne produit pas le formulaire de demande d'allocation de solidarité formée par Mme [H] [E] alors qu'elle aurait dû le conserver puisqu'une difficulté existait quant à la récupération des sommes, avant l'expiration du délai de 5 ans de conservation des documents,

- qu'il n'était pas informé, pas plus que sa mère, de l'existence d'une restitution possible des arrérages,

- que s'il avait été informé, il est certain qu'il n'aurait pas laissé sa mère entrer dans ce dispositif dont il avait les moyens de la dispenser et que cette dernière n'aurait pas non plus souhaité y entrer,

- qu'il convient de retirer de l'actif net de la succession l'ensemble immobilier évalué à 200 000 euros de sorte que l'actif net est inférieur à 39 000 euros ce qui exclut toute obligation de restitution,

A l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 9 juin 2022 prorogé au 30 juin 2022.

MOTIFS

L'article 815-12 ancien du code de la sécurité sociale, applicable aux allocations attribuées selon les règles en vigueur avant le 1er janvier 2006, dispose que les arrérages servis au titre de l'allocation supplémentaire sont recouvrés en tout ou partie sur la succession de l'allocataire lorsque l'actif net est au moins égal à un montant fixé par décret, soit en l'espèce, la somme de 39 000 € visée à l'article D815-1 ancien du code de la sécurité sociale.

S'agissant du moyen tiré du non-respect de l'article L815-6 du code de la sécurité sociale, il y a lieu de considérer :

- que ce texte dispose que les caisses de retraite sont tenues d'adresser à leurs adhérents, au moment de la liquidation de l'avantage vieillesse, toutes les informations relatives aux conditions d'attribution de l'allocation supplémentaire du fonds national de solidarité et aux procédures de récupération auxquelles les allocations du fonds donnent lieu,

- que si la MSA du Limousin ne justifie pas avoir communiqué à Mme [E] les informations visées à l'article L815-6 au moment de la liquidation de ses droits, ce défaut d'information n'est pas sanctionné par la déchéance de la caisse de son droit au remboursement des arrérages mais par sa condamnation à d'éventuels dommages-intérêts, sous la condition de la preuve, non rapportée en l'espèce, d'un préjudice en lien direct de causalité avec ce manquement - M. [E] se contentant de procéder par voie d'affirmation ce qui est inopérant.

S'agissant de la preuve de la créance de la caisse, il convient de considérer que le paiement étant un fait, la preuve peut en être rapportée par tous moyens et qu'en l'espèce celle-ci est suffisamment établie par les relevés d'information annuels sur les revenus de feue Mme [E] détaillant pour chaque exercice fiscal le montant des allocations versées au titre du fonds de solidarité, de 1997 à 2010.

S'agissant de l'assiette du recours et de la valorisation de l'actif successoral, il y a lieu de considérer :

- que l'article D815-5 du code de la sécurité sociale, en sa rédaction applicable issue de l'ordonnance 2010-462 du 6 mai 2010, dispose que, pour l'application de l'article L815-13, le capital d'exploitation agricole (exclu de l'actif inclus dans l'assiette du recours) est constitué des éléments suivants : terres, cheptel mort ou vif, bâtiments d'exploitation, éléments végétaux constituant le support permanent de la production tels qu'arbres fruitiers et vignes, ainsi que les éléments inclus dans le fonds agricole créé, le cas échéant, par l'exploitant, en application de l'article L311-3 du code rural et de la pêche maritime,

- que l'inclusion dans ce capital d'exploitation agricole des 'bâtiments d'habitation occupés à titre de résidence principale par le bénéficiaire de l'allocation ... qui comprennent un mur mitoyen à un bâtiment d'exploitation agricole inclus dans ce capital et des autres bâtiments d'habitation affectés à l'usage exclusif de l'exploitation et qui sont soit implantés sur des terres incluses dans ce capital, soit situés à une distance ne pouvant excéder cinquante mètres des bâtiments agricoles ou des terres qui constituent ce capital, soit nécessaires à l'activité de l'exploitation' a été instituée par le décret 2011-1972 du 26 décembre 2011, entré en vigueur postérieurement au décès de Mme [E], survenu le 25 juin 2011 et donc inapplicable en l'espèce,

- qu'il ne peut dès lors être fait droit à la contestation soulevée par M. [E] relativement à la détermination de l'actif successoral, la maison familiale d'habitation ne pouvant être incluse dans le capital d'exploitation agricole exclu de l'assiette du recours.

Il convient dès lors, réformant les chefs du jugement expressément critiqués, de condamner M. [F] [E] à payer à la MSA du Limousin, en application de l'article L815-12 ancien du code de la sécurité sociale, la somme de 15 366,51 € et de débouter M. [F] [E] de sa demande de dommages et intérêts, faute de démonstation d'un préjudice en lien avec le manquement de la MSA.

M. [E] sera condamné aux entiers dépens d'appel et de première instance (s'agissant à l'égard de ceux-ci de ceux nés à compter du 1er janvier 2019) et sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement rendu le 3 septembre 2019 par le Pôle social du tribunal de grande instance de La Rochelle en toutes ses dispositions critiquées,

Statuant à nouveau sur les chefs du jugement critiqués,

Condamne M. [F] [E] à payer à la MSA du Limousin, en application de l'article L815-121 ancien du code de la sécurité sociale, la somme de 15 366,51 € à titre de remboursement des arrérages d'allocation FNS/FSV perçus sur la période comprise entre le 1er octobre 1988 et le 30 septembre 2010,

Déboute M. [F] [E] de sa demande de dommages et intérêts,

Déboute M. [F] [E] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [F] [E] aux entiers dépens d'appel et de première instance (s'agissant à l'égard de ces derniers, de ceux nés à compter du 1er janvier 2019).

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/03021
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.03021 ?
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