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28/06/2022 | FRANCE | N°20/01835

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 28 juin 2022, 20/01835


ARRÊT N° 393



N° RG 20/01835





N° Portalis DBV5-V-B7E-GCBD













SA AXA FRANCE IARD



C/



S.C.I. LE BARDON

CGPA

S.A.R.L. PROXIA COURTAGE



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 28 JUIN 2022







Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 juil

let 2020 rendu par le Tribunal Judiciaire de NIORT





APPELANTE :



SA AXA FRANCE IARD

[Adresse 3]

[Localité 6]



ayant pour avocat postulant Me Marion LE LAIN de la SCP DROUINEAU-VEYRIER- LE LAIN-BARROUX-VERGER, avocat au barreau de POITIERS



ayant pour avocat plaidant Me Osanne VINCE...

ARRÊT N° 393

N° RG 20/01835

N° Portalis DBV5-V-B7E-GCBD

SA AXA FRANCE IARD

C/

S.C.I. LE BARDON

CGPA

S.A.R.L. PROXIA COURTAGE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 juillet 2020 rendu par le Tribunal Judiciaire de NIORT

APPELANTE :

SA AXA FRANCE IARD

[Adresse 3]

[Localité 6]

ayant pour avocat postulant Me Marion LE LAIN de la SCP DROUINEAU-VEYRIER- LE LAIN-BARROUX-VERGER, avocat au barreau de POITIERS

ayant pour avocat plaidant Me Osanne VINCELOT, avocat au barreau de PARIS du Cabinet CORDELIER & Associés

INTIMÉES :

Société CGPA

[Adresse 2]

[Adresse 7]

[Localité 5]

ayant pour avocat postulant Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

ayant pour avocat plaidant Me Jennifer KNAFOU, avocat au barreau de PARIS

S.A.R.L. PROXIA CONSTRUCTION ASSURANCES

anciennment dénommée PROXIA COURTAGE

[Adresse 8]

[Adresse 1]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

ayant pour avocat plaidant Me Jennifer KNAFOU, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller qui a présenté son rapport

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS

La SCI Le Bardon (SCI), propriétaire d'un bien immobilier situé à Niort avait souscrit un contrat d'assurance multirisque professionnel auprès de la société Axa France Iard (Axa) à effet du 1er août 2005 par l'intermédiaire de la société Proxia Courtage (Proxia).

Par lettre recommandée du 12 décembre 2014, la SCI a avisé la société Proxia que le bâtiment serait vide de tout occupant à compter du 31 décembre 2014.

La société Proxia a transmis ce courrier à la société Axa le 19 janvier 2015.

L'assureur a répondu par courriel le 20 janvier 2015 :

'S'agissant d'une modification du risque, il convient de passer par un remplacement du contrat existant. Pour précision, le risque devenant vide et étant exclu de nos critères de souscription, le contrat sera passé en temporaire six mois et en formule incendie uniquement.

Restant dans l'attente de l'autorisation de remplacement. '

Le 31 mars 2015, l'immeuble était vandalisé.

La SCI déclarait un sinistre le 1er avril 2015.

La compagnie Axa refusait sa garantie, refus notifié le 7 avril 2015, réitéré le 28 août 2015.

Le préjudice d'abord évalué à 598 616 euros s' aggravait faute de travaux pour atteindre 831 054 euros courant mars 2017.

La SCI a assigné la société Proxia et son assureur , la société CGPA devant le juge des référés.

Une expertise judiciaire était ordonnée le 15 novembre 2016.

L' expert a déposé son rapport le 30 janvier 2018.

Par actes des 5 et 6 avril 2018, la SCI a assigné les sociétés Axa, Proxia, CGPA devant le tribunal de grande instance de Niort aux fins de condamnation in solidum à l' indemniser.

Courant juillet 2018, l'immeuble a été arasé. Le terrain a ensuite été vendu.

La société Axa a conclu au débouté, demandé reconventionnellement à être relevée indemne par le courtier et son assureur des condamnations prononcées à son encontre.

Par jugement du 27 juillet 2020 , le tribunal judiciaire de Niort a notamment statué comme suit :

'-condamne la SA Axa France Iard à verser à la SCI Le Bardon la somme de 1.280 834,69 euros avec intérêts au taux légal à compter du 5 avril 2018

-déboute la SA AXA France IARD de toutes ses demandes contre la société Proxia Courtage et son assureur la société CGPA ;

-condamne la SA AXA France IARD à verser à la société Proxia Courtage et son assureur la société CGPA une somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamne la SA AXA France IARD aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les dépens de l'instance de référé et les frais d'expertise judiciaire ;

Le premier juge a notamment retenu que :

-sur la responsabilité contractuelle de l'assureur à l'égard de la SCI

La SCI justifie avoir déclaré le sinistre au courtier le 1er avril 2015.

La société Axa a refusé sa garantie au motif que le contrat ne couvrait pas la garantie vandalisme. Elle a maintenu ce refus alors que le contrat initial n'était pas remplacé.

Elle n'a diligenté aucune expertise amiable.

La société Axa ne saurait contester que le contrat initial n'avait pas été remplacé, qu'elle a continué à percevoir les primes, qu'il aurait dû recevoir application.

Le refus de garantie était manifestement abusif.

La société Axa a manqué à son devoir de loyauté et engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de la SCI. Elle sera tenue d'indemniser l'entier préjudice.

La dégradation de l'immeuble depuis la survenance du sinistre est la conséquence directe et certaine de l'inertie de l'assureur.

Le préjudice correspond à la valeur du bien avant sinistre puisque l'immeuble a été rasé.

-sur la responsabilité du courtier à l'égard de la SCI

La SCI demande la condamnation in solidum de l'assureur et du courtier au motif que le courtier aurait manqué à son devoir d'information, ne lui a pas permis de souscrire un contrat mieux adapté.

Le courtier devait répercuter à l'assurée la réponse d'Axa du 20 janvier 2015.

Cependant, ce défaut d'information a eu pour effet de laisser se poursuivre le contrat multirisque en cours de sorte que le sinistre aurait dû être garanti par Axa.

Le projet de nouveau contrat n'a été émis par Axa que le 9 avril 2015 postérieurement au sinistre.

Le préjudice subi par la SCI n'est pas du au défaut d'information et de conseil du courtier, mais au seul refus illégitime de garantie opposé par la société Axa.

La SCI sera donc déboutée de ses demandes dirigées à contre le courtier et son assureur.

-sur la responsabilité du courtier à l'égard d'Axa

La société Axa devait proposer conformément à l'article L.113-4 du code des assurances la résiliation du contrat ou une augmentation de prime, n'a fait ni l'un ni l'autre.

Elle sera déboutée de ses demandes dirigées contre le courtier.

La société Axa devait garantir le sinistre.Son refus illégitime d'indemniser le sinistre est à l'origine du préjudice subi par la SCI.

Il n'y a pas de lien causal entre la faute du courtier qui n'a pas répercuté la réponse de l'assureur à l'assuré et le préjudice de l'assureur.

LA COUR

Vu l'appel en date du 3 septembre 2020 interjeté par la société Axa

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 23 mars 2022 , la société Axa a présenté les demandes suivantes :

Vu la jurisprudence suscitée,

Vu le jugement rendu le 27 juillet 2020 par le Tribunal judiciaire de NIORT

-RECEVOIR AXA FRANCE IARD en son appel et la déclarer bien fondée ;

-INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de NIORT en ce qu'il a :

-débouté la SA AXA France IARD de toutes ses demandes contre la société Proxia Courtage et son assureur la société CGPA ;

-condamné la SA AXA France IARD à verser à la société Proxia Courtage et son assureur la société CGPA une somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné la SA AXA France IARD aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les dépens de l'instance de référé et les frais d'expertise judiciaire ;

-CONFIRMER le jugement entrepris sur le surplus ;

Statuant à nouveau,

DIRE ET JUGER les demandes de la société AXA France IARD recevables et bien fondées ;

-CONDAMNER in solidum PROXIA COURTAGE et CGPA à payer à AXA FRANCE IARD la somme de 825.000 euros en réparation du préjudice subi par AXA FRANCE IARD ;

-CONDAMNER en toute hypothèse PROXIA COURTAGE et CGPA in solidum à relever et garantir AXA FRANCE IARD de la somme de 825.000 euros correspondant aux condamnationsprononcées à son encontre par le jugement du Tribunal Judiciaire de Niort du 27 juillet 2020,diminué des sommes abandonnées par la SCI LE BARDON aux termes du protocole d'accord transactionnel signé par AXA FRANCE IARD et la SCI LE BARDON ;

-CONDAMNER in solidum PROXIA COURTAGE et CGPA, à payer à AXA FRANCE IARD la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont recouvrement direct au profit de Maître Marion LE LAIN en application de l'article 699 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, la société Axa soutient notamment que :

-Après jugement, un accord a été trouvé avec la SCI.La société Axa s'est désistée de ses demandes dirigées contre la SCI.

-Les négligences fautives du courtier sont à l'origine de son préjudice.

-Le tribunal a fait une mauvaise application de la faculté de résiliation.

-La faute du courtier peut causer un préjudice à l'assureur.

-Le courtier commet une faute en ne transmettant pas immédiatement à l'assureur l' accord de l'assuré pour la souscription d'un nouveau contrat alors que la situation nécessitait une souscription rapide.

-Elle reproche à la société Proxia le délai qui s'est écoulé entre les 12 décembre 2014 et 19 janvier 2015, le défaut de transmission immédiate à l'assurée du mail du 20 janvier 2015.

Il a été transmis 3 mois plus tard.

-Elle a dû de ce fait assurer l'immeuble.

-Le courtier a répondu le 2 avril 2015 seulement.

-Elle n'avait pas renoncé à modifier le contrat.

-L'article L.113-4 du code des assurances ne s'applique que dans l'hypothèse d'une aggravation de risque. Il s'agissait en l'espèce d'une diminution de garantie.

-Elle a perdu une chance de voir signer un avenant limité à la garantie incendie.

-Elle aurait pu refuser sa garantie si l' avenant avait été signé.

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 15 mars 2022, les sociétés CGPA et Proxia ont présenté les demandes suivantes :

Vu les articles 16 et suivants du code de procédure civile ;

Vu les articles L 111-2, L 113-4 du code des assurances ;

Vu les articles 1147 et suivants du code civil dans leur version antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ;

Vu les articles 1382 et suivants du code civil dans leur version antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces communiquées ; Vu la jurisprudence citée ;

IL EST DEMANDÉ A LA COUR DE :

- Déclarer AXA mal fondée en son appel ; l'en débouter

- Confirmer le jugement rendu le 27 juillet par le Tribunal Judiciaire de NIORT en ce qu'il a débouté la SCI LE BARDON et la société AXA France IARD de toutes leurs demandes, fins et conclusions tournées à l'encontre de la société PROXIA CONSTRUCTION ASSURANCES et de CGPA.

En conséquence,

- Débouter la société AXA FRANCE IARD de son appel en garantie et de toutes ses demandes tournées à l'encontre de la société PROXIA CONSTRUCTION ASSURANCES et de CGPA.

En tout état de cause,

- Juger que la garantie de CGPA ne saurait être recherchée que conformément aux clauses et conditions du contrat d'assurance, dans les limites des plafonds prévus au contrat et sous déduction de la franchise correspondant à 20% du montant du sinistre avec un minimum de 5.500€ et un maximum de 7.500€ ;

- Condamner la société AXA FRANCE IARD à verser à la société PROXIA CONSTRUCTION ASSURANCES et à CGPA la somme de 15.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner AXA FRANCE IARD aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Jérôme CLERC, avocat au Barreau de Poitiers dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

A l'appui de leurs prétentions, les sociétés Proxia et CGPA soutiennent notamment que :

-Le jugement a autorité de la chose jugée en ce qu'il a débouté la SCI de ses demandes d'indemnisation dirigées contre le courtier.

-L' assureur a indemnisé son assuré en exécution du contrat souscrit pour lequel il a perçu une prime. La garantie d'Axa est contractuellement due.

-Elle devait résilier le contrat ou proposer une majoration de prime si la situation relevait d'une aggravation de risque.

-L' information du courtier ne permet pas de modifier le contrat ni de réduire les garanties.

-La société Axa a procédé à un nouvel appel de prime pour la période du 1er août 2015 au 31 juillet 2016. Le contrat ne sera résilié que le 1er août 2016 pour non paiement de primes.

-Le 15 avril 2015, Axa écrivait à Proxia , rappelait que le remplacement du contrat n'a pu être acté que le 2 avril 2015.

-Les droits et obligations se cristallisent à la date du sinistre.

-Le courtier est le mandataire de l'assuré, non de l'assureur. Il n'a pas commis de faute.

Il a répercuté l' information. L'assureur en avait connaissance plus de 2 mois avant le sinistre. -Ce n'est pas au courtier d'autoriser le remplacement.

-Seul l' assureur pouvait résilier le contrat. Le contrat peut être résilié avant son échéance principale dans le délai d'un mois après la date d'envoi d'une lettre recommandée.

-L' assurée n'était pas tenue d'accepter la modification envisagée par l'assureur.

-C'est la décision de l'assureur ne pas résilier le contrat qui est à l' origine de son préjudice.

-L'assureur ne peut plus se prévaloir de l'aggravation. Il a maintenu le contrat d'origine incluant la garantie vandalisme. Il estimait alors qu'il y avait aggravation de risque.

-S'il avait joué son rôle dès la survenance du sinistre, les désordres ne se seraient pas aggravés.

-Axa a fait le choix de transiger. La somme de 825 000 euros a été versée en exécution du contrat d'assurance.

-L'assureur a encaissé la prime qui correspond au risque.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 24 mars 2022.

SUR CE

-sur la faute du courtier

La société Axa reproche à la société Proxia d'avoir empêché le remplacement du contrat d'assurance souhaité.

Elle soutient devant la cour que la situation ne correspondait pas à une aggravation du risque mais à une réduction de celui-ci.

En l'absence de contrat entre le courtier et l'assureur, la responsabilité recherchée est donc délictuelle ou quasi-delictuelle.

Il appartient à l'assureur de démontrer une faute du courtier en relation avec le préjudice subi, soit l'indemnisation de l'assurée.

L'article L. 113-4 du code des assurances dispose: En cas d'aggravation de risque en cours de contrat, l' assureur a la faculté de dénoncer le contrat ou de proposer un nouveau montant de prime.

Si l'assuré ne donne pas suite à la proposition ou s'il refuse expressément le nouveau montant dans le délai de 30 jours à compter de la proposition, l'assureur peut résilier le contrat au terme de ce délai à condition d'avoir informé l'assuré de cette faculté en la faisant figurer en caractères apparents dans la lettre de proposition.

Les conditions particulières produites stipulent:

-durée du contrat:

Ce contrat est souscrit pour la période courant du 1er août 2005 jusqu'à la date d'échéance principale. Il est reconduit tacitement d'année en année, sauf résiliation par l'une des parties dans les cas et conditions prévus aux Conditions générales avec préavis de deux mois.

Il couvre notamment l'événement vandalisme.

Il est de jurisprudence constante que l' assureur ne peut plus se prévaloir de l'aggravation des risques quand après avoir été informé de quelque manière que ce soit il a manifesté son consentement au maintien de l'assurance spécialement en continuant à recevoir les primes ou en payant après sinistre une indemnité.

Le fait de continuer à encaisser des primes après avoir été informé de l'aggravation traduit de la part de l'assureur la volonté de maintenir l'assurance.

En cas de réduction de risque en cours de contrat, l'assuré a droit à une diminution du montant de la prime.

Si l'assureur n' y consent pas, il peut dénoncer le contrat.

L' assureur doit rappeler les dispositions du présent article à l'assuré lorsque celui-ci l'informe soit d'une aggravation soit d'une diminution de risque.

Il ressort du courriel du 20 janvier 2015 que l'assureur avait analysé la situation comme une modification de risque. Il avait envisagé un contrat temporaire de 6 mois garantissant le seul risque incendie.

Force est de relever que le courriel envoyé au courtier n'évoque ni dénonciation du contrat, ni augmentation de prime, ni réduction de prime.

Il envisage un 'remplacement', un nouveau contrat d'une durée de six mois.

Si le courriel indique ' pour précision, le risque devenant vide et exclu de nos critères de souscription, le contrat sera passé en temporaire 6 mois et en formule incendie uniquement ', l'utilisation du futur est maladroite.

En effet, en sa qualité d'assureur, la société Axa n'ignore pas que cette proposition ne peut se concrétiser sans émission d' une offre de contrat, suivie d'une acceptation de l'assurée.

Elle conclut au demeurant son courriel par la formule univoque suivante : restant dans l'attente de l'autorisation de remplacement.

La cour relève qu'elle n'indique pas qu'une réponse urgente ou rapide est souhaitée.

L'assureur attend donc du courtier (et ne peut attendre de lui autre chose ) un 'retour' de l'assurée sur la modification qu'il envisage.

Il compte sur le courtier pour présenter sa proposition et lui transmettre la position de l'assurée.

Les pièces produites ne permettent pas de savoir quand exactement le courtier a informé l'assurée , si la SCI s'est prononcée et dans quel sens.

Il est certain en revanche que l'assureur n'a pas re-interrogé le courtier, qu'il n'a pas pris l'initiative d'écrire à l'assurée au regard des informations dont il avait été destinataire concernant la modification du risque.

L'assureur a attendu le 9 avril 2015 pour transmettre à l'assurée un projet de conditions particulières correspondant au courriel du 20 janvier 2015.

Force est de relever que le 15 avril 2015, la société Axa écrivait à l'assurée rappelant sa réponse du 20 janvier 2015 et motivant le changement de contrat par l'aggravation du risque (pièce 2 des intimées) en contradictions avec la position soutenue dans ses écritures d'appel .

Il est constant que l'assureur avait encaissé la prime relative au contrat en cours pour la période du 1er août 2014 au 31 juillet 2015.

Il résulte donc des éléments précités que l'assureur a été informé en temps utile de la modification résultant du départ du locataire.

S'il a indiqué au courtier qu'il envisageait la résiliation du contrat, son remplacement par un contrat d'une durée de six mois limité au risque incendie, il n'a jamais informé son assurée d'une aggravation ou d'une diminution de risque, n'a tiré aucune conséquence de son analyse.

Il savait que l'ancien contrat était toujours en cours d'exécution, le courriel envoyé le 20 janvier 2015 étant resté sans réponse.

Il ne pouvait donc ignorer devoir sa garantie en cas de sinistre, l'a néanmoins refusée.

Il n'est nullement démontré que le silence du courtier après le 20 janvier 2015 soit fautif d'une part , ni qu'il ait contribué au préjudice subi par l'assureur d'autre part, ce dernier ayant en fin de compte supporté les conséquences de son inertie.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Axa de ses demandes d'indemnisation et de garantie dirigées contre les sociétés Proxia et CGPA.

-sur les autres demandes

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de l'appelante.

Il est équitable de la condamner à payer aux intimées la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS :

statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

dans les limites de l'appel interjeté

-confirme le jugement entrepris

Y ajoutant :

-déboute les parties de leurs autres demandes

-condamne la SA AXA France Iard aux dépens d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Clerc

-condamne la SA AXA France Iard à payer aux sociétés Proxia Construction Assurances et CGPA la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/01835
Date de la décision : 28/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-28;20.01835 ?
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