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14/06/2022 | FRANCE | N°20/01708

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 14 juin 2022, 20/01708


ARRET N° 359



N° RG 20/01708 - N° Portalis DBV5-V-B7E-GBXG















S.A.R.L. SV ENDUIT

S.A.S. IDR CONSTRUCTION



C/



[O]

[D]

[T]

[R]



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 14 JUIN 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01708 - N° Porta

lis DBV5-V-B7E-GBXG



Décision déférée à la Cour : jugement du 21 juillet 2020 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 9].





APPELANTES :



S.A.R.L. SV ENDUIT

[Adresse 2]

[Localité 5]



S.A.S. IDR CONSTRUCTION

[Adresse 1]

[Localité 3]



ayant toute...

ARRET N° 359

N° RG 20/01708 - N° Portalis DBV5-V-B7E-GBXG

S.A.R.L. SV ENDUIT

S.A.S. IDR CONSTRUCTION

C/

[O]

[D]

[T]

[R]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 14 JUIN 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01708 - N° Portalis DBV5-V-B7E-GBXG

Décision déférée à la Cour : jugement du 21 juillet 2020 rendu par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 9].

APPELANTES :

S.A.R.L. SV ENDUIT

[Adresse 2]

[Localité 5]

S.A.S. IDR CONSTRUCTION

[Adresse 1]

[Localité 3]

ayant toutes les deux pour avocat Me Alexandre BRUGIERE de la SCP TEN FRANCE, avocat au barreau de POITIERS

INTIMES :

Monsieur [B] [O]

[Adresse 8]

[Localité 4]

Madame [S] [D]

[Adresse 8]

[Localité 4]

ayant tous les deux pour avocat Me Eva LUSTEAU, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

Madame [A] [T] épouse [R]

née le 03 Juin 1980 à [Localité 10]

[Adresse 7]

[Localité 6]

Monsieur [N], [L] [R]

né le 11 Mars 1980 à [Localité 11]

[Adresse 7]

[Localité 6]

ayant tous les deux pour avocat Me Magalie ROUGIER de la SCP ROUGIER VIENNOIS FERNANDES, avocat au barreau de SAINTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Madame Anne VERRIER, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS

Les consorts [U] ont confié le 27 janvier 2017 à la société Corp Habitat la construction d'une maison individuelle (CCMI) pour un prix de 132.100 euros.

Les époux [R] ont conclu le 1 er février 2017 un CCMI avec cette même société pour un prix de 309.610 euros.

Les sociétés SV Enduit (Enduit) et IDR construction (IDR), sous traitants, ont réalisé des travaux d'enduit, de placoplâtre et de couverture sur les deux chantiers précités.

Elles ont établi des factures qu'elles ont envoyées à la société Corp Habitat,entreprise principale.

Plusieurs factures sont restées impayées malgré des mises en demeure réitérées de l'entreprise principale, puis des maîtres de l'ouvrage.

La société Corp Habitat a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 29 juin 2018.

Par actes des 26 avril et 2 mai 2019, les sociétés Enduit et IDR ont assigné les maîtres de l'ouvrage sur le fondement de la faute délictuelle, demandé leur condamnation à leur payer les factures restant dues.

La société Enduit a demandé la condamnation des consorts [U] à lui payer la somme de 10 962,87euros, celle des époux [R] à lui payer la somme de 29 242 euros HT.

La société IDR a demandé la condamnation des consorts [U] à lui payer la somme de 4406,76, celle des époux [R] à lui payer la somme de 9541 euros HT.

Les maîtres de l'ouvrage ont conclu au débouté.

Par jugement du 21 juillet 2020 , le tribunal judiciaire de La Rochelle a débouté les sociétés Enduit et IDR Construction de l'ensemble de leurs demandes

Le premier juge a notamment retenu que :

Les sous-traitants ont déclaré leurs créances au liquidateur judiciaire de la société Corp habitat.

Les factures impayées des sociétés Enduit et IDR ont été adressées à l'entreprise principale.

Les maîtres de l'ouvrage ont été avisés par des courriers recommandés du 17 septembre 2018 et du 12 septembre 2018 du non-paiement des factures.

L'acceptation et l'agrément tacites des sous-traitants doivent résulter d'actes manifestant sans équivoque la volonté du maître de l'ouvrage. Une attitude simplement passive ne suffit pas.

La preuve que les maîtres de l'ouvrage ont été informés de l'intervention sur le chantier des sociétés Enduit et IDR en qualité de sous-traitant est insuffisante.

Ils n'ont pas commis de faute en ne mettant pas en demeure l'entreprise de faire accepter, faire agréer les sous-traitants , en ne s'assurant pas de l'existence d'une garantie de paiement.

Au regard du CCMI conclu, les maîtres de l'ouvrage pouvaient légitimement croire que le personnel présent dépendait du constructeur.

Une connaissance non équivoque n'est pas établie.

La seule participation des époux [R] à une réunion de chantier est insuffisante à établir la connaissance de la présence de sous-traitants.

Les époux [R] ont réglé les factures établies par l'entreprise principale.

Les sociétés Enduit et IDR étaient en revanche tenues en leur qualité de professionnelles de s'assurer que leur intervention était acceptée par les maîtres de l'ouvrage et que leurs conditions de paiement avaient été agréees.

Les demandes en paiement seront rejetées.

LA COUR

Vu l'appel en date du 19 août 2020 interjeté par les sociétés Enduit et IDR

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 18 novembre 2020 , les sociétés Enduit, IDR ont présenté les demandes suivantes :

Vu les dispositions de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance,

Vu les dispositions de l'article 1240 du code civil,

Dire les sociétés SV ENDUIT et IDR CONSTRUCTION recevables et bien fondées en leur appel,

Réformer l'entier jugement n°20/00184 rendu le 21 juillet 2020 par le Tribunal judiciaire de LA ROCHELLE,

Statuant à nouveau,

Constater la faute délictuelle des consorts [F] et les époux [R],

-En conséquence, condamner les consorts [F] à payer à la société SV ENDUIT la somme de 10 962,87 € HT et à la société IDR CONSTRUCTION la somme de 4 406,76 € HT,

-Condamner Monsieur et Madame [R] à payer à la société SV ENDUIT la somme de 29 242 € HT et à la société IDR CONSTRUCTION la somme de 9 541 €HT,

-Condamner solidairement les consorts [F] et les époux [R] aux entiers dépens et à payer aux sociétés SV ENDUIT et IDR CONSTRUCTION la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure engagée,

A l'appui de leurs prétentions, les sociétés Enduit et IDR soutiennent notamment que :

-Elles ont conclu un contrat-cadre de sous-traitance avec la société Corp Habitat les 29 mai et 6 décembre 2017. L'entreprise principale ne s'est pas acquittée malgré plusieurs mises en demeure. Elles ont déclaré leurs créances, ont assigné les maîtres de l'ouvrage.

-Le sous-traitant a une action directe contre le maître de l'ouvrage.

-Le maître de l'ouvrage engage sa responsabilité délictuelle lorsqu'il ne s'assure pas que les règles applicables à la sous-traitance sont respectées. Cette loi s'applique au CCMI.

-Le maître de l'ouvrage doit mettre en demeure l'entreprise de faire agréer les sous-traitants.

Il commet une faute en s'abstenant.

Il avait été informé par les sous-traitants de leur intention d'exercer l'action directe.

Il est tenu de réparer le préjudice qui correspond au solde du prix qui aurait dû leur être payé grâce à l'action directe.

La loi n'oblige pas le sous-traitant à se manifester auprès du maître de l'ouvrage.

Aucun lot technique n'était confié au constructeur.

Les consorts [F] ont été informés dès septembre 2018.

Le maître de l'ouvrage doit mettre en demeure l'entreprise principale lorsque le sous-traitant ne lui a pas été présenté ou n'a pas fourni de garanties.

Quand il est informé de difficultés de paiement, il doit mettre en demeure l'entreprise principale d'avoir à régulariser la situation.

La faute du maître de l'ouvrage est l' inaction, le fait d'avoir soldé le marché avec l'entreprise principale alors que le sous-traitant l'avait préalablement informé.

-Les SMS produits établissent leur connaissance de leur présence sur les chantiers.

Ils ont eu connaissance de son intervention au plus tard le 27 juin 2018, date de la mise en demeure par la société IDR.

Le protocole d'accord du 4 septembre 2018 conclu par les consorts [F] avec le garant de livraison a omis de prendre en compte les sommes dues aux sous-traitants.

Ils savaient qu'il existait des impayées, sont de mauvaise foi.

Ils ne prouvent pas avoir avoir réglé l'entreprise principale, ne produisent pas les factures correspondantes. Ils avaient les fonds pour régler les sous-traitants.

-Les SMS produits établissent la connaissance par les époux [R] de l'intervention des sous-traitants.

-Ils ont contacté directement le dirigeant de la société IDR sans passer par le constructeur.

Ils savaient que les travaux d'exécution étaient sous-traités, ont obtenu les coordonnées des sous-traitants. Ils devaient mettre en demeure l'entreprise principale.

La faute est l'inertie et le paiement de l'entreprise principale. Elle a privé les sous-traitants d'une chance d'être réglés.

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 9 février 2021, M. [O], Mme [D] ont présenté les demandes suivantes :

Vu l'article l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975,

Vu la loi no 90-1129 du 19 décembre 1990,

-CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de La Rochelle le 21 juillet 2020.

-CONDAMNER, en sus de la condamnation de première instance, solidairement les sociétés SV ENDUIT et IDR CONSTRUCTIONS à payer à Monsieur [B] [O] et Madame [S] [D] la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

A l'appui de leurs prétentions, les consorts [F] soutiennent notamment que :

-Le constructeur était en cessation de paiement le 29 juin 2018.

-Le 24 août 2018, ils ont signé un protocole d'accord avec le garant de livraison, la société HCCI. Ils avaient réglé la somme de 94 862,25 euros au constructeur.

Ils ont dû faire appel à d'autres entreprises afin de terminer les travaux.

-La faute consisterait à ne pas avoir mis en demeure l'entreprise principale de s'acquitter de ses obligations légales, ne pas s'être assurés de la constitution d'une garantie de paiement des sous-traitants.

-Les dispositions prévues par la loi du 31 décembre 1975 ne s'appliquent pas à la personne physique construisant un logement pour l'occuper elle-même.

Ils n'ont commis aucune faute. Ils n'avaient pas connaissance de la présence de sous-traitants.

-Le CCMI ne prévoit pas de recours à la sous-traitance.

Le contrat prévoit que leconstructeur fera réaliser sous son entière responsabilité les travaux compris dans le prix convenu.

-Ils sont allés une seule fois sur le chantier en mai 2018.

Les pièces produites ne permettent pas d'identifier expéditeur et destinataire. Les chantiers sont mélangés.

Les entreprises ne se sont jamais présentées comme des sous-traitantes, envoyaient leurs factures à l'entreprise principale.

-Les copies des mises en demeure adressées aux entreprises sont du 27 juin 2018, 14, 17 septembre 2018. Ils n'ont été informés du défaut de paiement que les 14 et 17 septembre 2018.

La société Corp Habitat a été placée en liquidation judiciaire le 29 juin 2018.

Il était impossible d'agir contre elle. Les sous-traitants ne se sont manifestés en cette qualité qu'après la procédure collective.

-La date de découverte du sous-traitant doit être antérieure au paiement de l'entreprise principale.

Les paiements à l'entreprise principale ont été faits avant le 3 avril 2018 aux dates d'échéance des factures.

-Le protocole est du 4 septembre 2018. Ils ont eu connaissance des impayés les 14 et 17 septembre 2018. La garantie de livraison n'a pas pour but d'indemniser les sous-traitants.

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 15 février 2021, les époux [R] ont présenté les demandes suivantes :

-confirmer le jugement du 21 juillet 2020

-Débouter la SARL SV ENDUIT et la SAS IDR CONSTRUCTION de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions en I'absence de faute des epoux [N] [G] [T] et de la possibilite d'une action directe des sous-traitants contre le maître d'ouvrage.

Subsidiairement, compte tenu des malfaçons affectant les travaux de couverture et de plaquisterie, dire et juger que les appelantes ne justifient d'aucune créance, ni d'ailleurs de leur admission au passif de la procédure collective de la societé CORP HABITAT.

-Y ajoutant, condamner la SARL SV ENDUIT et la SAS IDR CONSTRUCTION à payer aux epoux [R] la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1,500 €) à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'articIe 1240 du Code Civil, ainsi que la somme de TROIS MILLE EUROS (3.000 €) sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance et d'appeI.

A l'appui de leurs prétentions, les époux [R] soutiennent notamment que :

-Les factures ont été réglées à leur cocontractant, l'entreprise principale.

-Les travaux ont commencé le 21 juillet 2017, ont été arrêtés courant mai 2018 .

-Ils ont pris possession de leur maison courant octobre 2019 du fait de la défaillance de l'entreprise principale.

-Les sous-traitants se sont montrés très menaçants. La société Enduit a menacé de reprendre la charpente, couverture, zinguerie posées les 19 juin 2018.

Ils ont fait une déclaration à la gendarmerie le 20 juin 2018.

-Le dernier règlement est du 18 avril ou 21 mai 2018. Ils avaient réglé 75 % du prix.

-Ils ont mandaté un huissier de justice le 20 juin 2018.

Les travaux sont affectés de malfaçons.

-Ce sont les entreprises sous-traitantes qui sont fautives, qui n'ont pas vérifié qu'elles étaient agrées.

Les mises en demeure sont des 27 juin, 12 et 17 septembre 2018.

Les SMS sont postérieurs au paiement des factures.

-Le CCMI exclut la sous-traitance. Il permet d'avoir un seul cocontractant, décharge le maître de l'ouvrage.

-L'entreprise principale a été payée. Le statut des entreprises n'avait pas été porté à leur connaissance. S'ils les ont rencontrées, ils ne les ont pas identifiées comme sous-traitants.

-Subsidiairement. Le travail a été mal fait. Le montant des reprises s'est élevé à la somme de 20 895,80 euros HT.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 17 mars 2022 .

SUR CE

-sur les fautes des maîtres de l'ouvrage

Les sociétés Enduit et IDR fondent leurs demandes sur la loi du 31 décembre 1975 et l'article 1240 du code civil .

Selon l'article 12 de cette loi, le sous-traitant a une action directe contre le maître de l'ouvrage si l'entrepreneur principal ne paie pas les sommes dues en vertu du contrat de sous-traitance.

Cette action directe n'existe que si le maître de l'ouvrage a accepté le sous-traitant et agréé les conditions de paiement de son marché, subsiste même si l'entrepreneur principal est en état de liquidation judiciaire.

L'acceptation et l'agrément peuvent intervenir au moment de la signature du marché ou pendant son exécution, et même lors de l'exercice de l'action directe.

Le sous-traitant a une action directe contre le maître de l'ouvrage si l'entrepreneur principal ne paie pas, une mois après avoir été mis en demeure, les sommes dues en vertu du contrat de sous-traitance.

Le bénéfice de l'action directe est donc réservé aux sous-traitants qui ont adressé une mise en demeure à l'entrepreneur principal, une copie de cette mise en demeure au maître de l'ouvrage

En l'espèce, les sociétés IDR et Enduits justifient avoir mis en demeure l'entrepreneur principal, ont averti les maîtres de l'ouvrage qu'elles entendaient exercer l'action directe fondée sur l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975.

Ces actions directes étaient néanmoins vouées à l'échec puisque les sociétés IDR et Enduits n'avaient pas été agrées par les maîtres de l'ouvrage, ce qu'elles ne pouvaient ignorer.

Elles estiment néanmoins que les maîtres de l'ouvrage avaient connaissance de leur intervention sur leurs chantiers respectifs, qu'ils ont commis des fautes engageant leur responsabilité quasi-délictuelle dès lors qu'ils n'ont pas mis en demeure l'entreprise principale de les faire agréer.

Elles leur reprochent d'avoir continué de régler les factures émises par le constructeur général alors qu'ils avaient connaissance du non-paiement des sous-traitants.

Les maîtres de l'ouvrage font valoir qu'ils n'avaient pas connaissance de l'intervention des sous-traitants sur leurs chantiers, soutiennent avoir réglé les factures émises par leur unique cocontractant avant le placement du constructeur en liquidation judiciaire, indiquent n'avoir été destinataires des courriers des sous-traitants que postérieurement au paiement des factures.

Il est de droit constant qu'un sous-traitant dont l'entrepreneur principal n'a pas sollicité l'acceptation et l'agrément de ses conditions de paiement par le maître de l'ouvrage perd le bénéfice de l'action directe.

L'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 dispose que le maître de l'ouvrage doit, pour les contrats de travaux de bâtiment et de travaux publics, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ces obligations.

Ces dispositions s'appliquent aux marchés publics et privés.

Le contrat de construction de maison individuelle n'exclut pas le recours à la sous-traitance.

Les contrats produits sont les contrats de construction de maison individuelle entre les maîtres de l'ouvrage et la société Corp Habitat, les contrats de sous-traitance qui unissent l'entrepreneur général, la société Corp Habitat et les sociétés Enduit et IDR.

Ces derniers sont parfaitement muets sur la question de l'agrément, ne visent pas la loi du 31 décembre 1975.

Les consorts [F] et les époux [R] contestent avoir eu connaissance de l'intervention des sous-traitants.

Ils font observer que la particularité du CCMI , sa commodité, son intérêt est de contracter avec un constructeur unique qui se charge de la réalisation des lots.

Leur contrat prévoit expressément que la personne dénommée constructeur se charge de la construction pour le compte du client.

L'article 2-3 intitulé réalisation prévoit que le constructeur fera réaliser sous son entière responsabilité les travaux compris dans le prix convenu.

Le contrat n'évoque pas fût-ce de manière facultative le recours à la sous-traitance.

Les maîtres de l'ouvrage assurent que les sociétés Enduit et IDR ne se sont jamais présentées des comme sous-traitants, que cette qualité est apparue pour la première fois dans les courriers envoyés le 27 juin 2018 (courriers adressés par la société IDR Construction aux consorts [F] , aux époux [R]), le 17 septembre 2018 par la société Enduit.

Il n'est pas d'usage sur un chantier d'interroger le personnel présent sur son statut précis étant rappelé que les consorts [F], les époux [R] sont des particuliers, que le recours à la sous-traitance est certes répandu mais nullement systématique et que l'économie du contrat conclu avec un constructeur en charge de la réalisation de l'intégralité des lots a pu leur laisser penser de bonne foi que le personnel présent était salarié du constructeur.

Le contrat excluait également l'intervention d'un architecte.

Les maîtres de l'ouvrage étaient donc dépendants des informations données par le constructeur.

M. [K] , ex conducteur de travaux de la société Corp Habitat atteste que les maîtres de l'ouvrage savaient que des sous-traitants intervenaient sur leurs chantiers.

Il se garde de préciser comment cette information leur a été donnée, quand elle a été acquise.

Son attestation est trop imprécise pour être convaincante.

Le fait d'avoir eu des échanges directs avec le personnel des entreprises sous-traitantes est ambigu, équivoque.

Les échanges portant sur les travaux réalisés n'établissent pas la connaissance précise du cadre d'intervention des professionnels alors qu'il n'est pas démontré que les maîtres de l'ouvrage aient été destinataires de devis, factures,documents contractuels mettant en évidence leur qualité d'entreprises, de sociétés distinctes du constructeur et alors que les échanges associent presque systématiquement le conducteur de travaux du constructeur.

Il est certain en revanche ue la société Corp Habitat n'a pas satisfait à ses obligations d'entrepreneur principal, que les sociétés sous-traitantes connaissaient la loi du 31 décembre 1975 comme le démontrent les courriers dont elles ont pris l'initiative les 27 juin et 12 septembre 2018, courriers qui visent expressément les articles 12 et 13 de la loi du 31 décembre 1975 et annoncent l'exercice d'une action directe.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés Enduit et IDR faute pour celles-ci d'établir la connaissance certaine qu'avaient les maîtres de l'ouvrage de l'intervention de sous-traitants .

Il ressort en outre des productions que les dernières factures émises par la société Corp Habitat ont été réglées par les époux [R] le 21 mai 2018 pour les époux [R], par les consorts [F] le 3 avril 2018 avant réception des courriers des 27 juin et 12 septembre 2018 les informant de l'intervention de sous-traitants et de factures non réglées.

-sur les autres demandes

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge des sociétés Enduit et IDR .

Il est équitable de les condamner à payer aux intimés la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

-confirme le jugement entrepris

Y ajoutant :

-déboute les parties de leurs autres demandes

-condamne in solidum la société SV Enduit et la société IDR Construction aux dépens d'appel

-condamne in solidum la société SV Enduit et la société IDR Construction à payer aux consorts [F] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

-condamne in solidum la société SV Enduit et la société IDR Construction à payer aux époux [R] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/01708
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;20.01708 ?
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