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07/06/2022 | FRANCE | N°21/01998

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 07 juin 2022, 21/01998


ARRÊT N° 350



N° RG 21/01998



N° Portalis DBV5-V-B7F-GJ2F















S.A.R.L. TOURSNORD



C/



S.A. GENERALI IARD

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 07 JUIN 2022







Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 juin 2021 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE >




APPELANTE :



S.A.R.L. TOURSNORD

[Adresse 3]

[Adresse 3]



ayant pour avocat postulant et plaidant Me Jonathan ROUXEL de la SCP ROUXEL JEHANNOT DE BARTILLAT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT







INTIMÉE :



S.A. GENERALI IARD

N° SIRET : 552 062 663
...

ARRÊT N° 350

N° RG 21/01998

N° Portalis DBV5-V-B7F-GJ2F

S.A.R.L. TOURSNORD

C/

S.A. GENERALI IARD

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 07 JUIN 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 juin 2021 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE

APPELANTE :

S.A.R.L. TOURSNORD

[Adresse 3]

[Adresse 3]

ayant pour avocat postulant et plaidant Me Jonathan ROUXEL de la SCP ROUXEL JEHANNOT DE BARTILLAT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

INTIMÉE :

S.A. GENERALI IARD

N° SIRET : 552 062 663

[Adresse 4]

[Adresse 4]

ayant pour avocat postulant Me Eric DABIN de la SELARL ERIC DABIN, avocat au barreau de DEUX-SEVRES

ayant pour avocat plaidant Me Fanny AUDEBERT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 07 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Madame Anne VERRIER, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La société Toursnord exploite un hôtel-restaurant à Tours sous l'enseigne 'Campanile Tours'.

Elle a souscrit auprès de la société Generali Iard un contrat d'assurance à effet du 4 avril 2019 garantissant les risques liés à l'activité exercée de : 'Hôtel avec ou sans restaurant'. Ce contrat prévoit notamment une indemnisation de l'assurée en cas de décision administrative de fermeture emportant une interruption totale ou partielle des activités.

La société Toursnord a déclaré le 2 avril 2020 un sinistre, son activité d'hébergement et de restauration ayant été totalement interrompue du 17 mars au 2 juin 2020 par l'effet des décisions gouvernementales de lutte contre de l'épidémie de Covid-19. L'assureur a refusé sa garantie au motif que l'activité d'hébergement n'avait pas été interdite.

Le 2 novembre 2020, la société Toursnord a déclaré un second sinistre lié à l'application du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, pour la période du 29 octobre 2020 au 28 janvier 2021. L'assureur a de nouveau refusé sa garantie.

Autorisée à assigner à bref délai, la société Toursnord a fait citer la société Generali Iard devant le tribunal de commerce de La Rochelle par acte du 15 février 2021. Elle a à titre principal demandé paiement des sommes de 170.049,24 € correspondant à l'indemnisation des pertes d'exploitation subies du 17 mars 2020 au 2 juin 2020 et de 224.178,50 euros, s'agissant des pertes d'exploitation subies du 29 octobre 2020 au 28 janvier 2021. Elle a exposé que les décisions gouvernementales avaient conduit à une interruption totale puis partielle de ses activités, selon elle garantie par le contrat souscrit. Elle a précisé justifier de sa perte d'exploitation par la production d'une attestation de son expert-comptable et des aides reçues, déduites des montants sollicités.

La société Generali a soutenu ne pas devoir sa garantie concernant l'activité hôtelière. Elle a admis la devoir s'agissant de l'activité de restauration et s'est associée à la demande subsidiaire d'expertise de la société Toursnord.

Par jugement du 4 juin 2021, le tribunal de commerce de La Rochelle a statué en ces termes :

'Vu le contrat d'assurance,

Vu les articles L113-1, L.I21-1 et L113-5 du code des assurances,

Vu les articles 1103, 1104, 1110, 1170, 1171, 1190, 1343-2 du Code civil,

Vu les articles 10, 143, 144, 153, 514, 696, 699 et 700 du Code de procédure civile,

Vu les pièces versées aux débats,

Reçoit la société TOURSNORD en ses demandes, les dit fondées partiellement, il lui fera droit en partie ;

Dit mal fondée la demande de société TOURSNORD de voir obliger la société GENERALI IARD à appliquer une demande d'indemnisation concernant la partie hôtelière prévue au contrat ;

En conséquence,

Déboute la société TOURSNORD de sa demande d'indemnisation concernant ses pertes financières, occasionnées par la pandémie « COVID 19 », sur la partie hôtellerie de son activité ;

Ordonne une expertise et désigne à cet effet Monsieur [V] [G] demeurant [Adresse 5] Tél : [XXXXXXXX02] Fax [XXXXXXXX01] Mél : [Courriel 8] en qualité d'expert, qui aura pour mission, parties présentes ou dûment appelées, en attendant tous sachant de :

' Convoquer les parties et de se faire remettre toutes les pièces nécessaire à la réalisation de sa mission,

' Les entendre en leurs explications,

' Rechercher la nature des conventions entre les parties et préciser les obligations en résultant pour chacune des parties,

' Evaluer le montant de la perte financière des parties de l'activité de la demanderesse, entraînées par les fermetures administratives successives liées à la pandémie dite « COVID 19 » et fixer le montant de l'indemnité à verser par son assureur ;

L'Expert Judiciaire désigné devra évaluer l'indemnisation de la société TOURSNORD telle que découlant des polices d'assurance liant les parties et de manière plus générale, suivre le principe indemnitaire, principe d'ordre public prévu à l'article L. 121-1 du code des assurances ;

Fixe à la somme de 2000 € le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, provision qui devra être versée par moitié chacune, par les soins des deux parties dans un délai de quinze jours, à compter de la date où la présente décision sera devenue définitive, au greffe du tribunal de commerce de LA ROCHELLE, par application des dispositions de l'article 269 du CPC,

Rappelle qu'à défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque sauf prorogation de délai ou relevé de caducité qui pourrait être ordonné à la requête de l'une des parties se prévalant d'un motif légitime et l'instance poursuivie,

Dit que l'expert donnera connaissance de ses conclusions aux parties, et répondra à tous dires de leur part dans le délai qu'il leur aura imparti, avant d'établir un rapport définitif qu'il déposera au greffe du tribunal, et ce dans le délai de 2 mois consécutifs à la consignation des frais.

Ordonne le sursis à statuer sur la totalité des demandes indemnitaires de la société TOURSNORD, attachées à son activité de restauration en salle, dans l'attente du rapport de l'expert judiciaire désigné,

Fait droit à la demande de provision de la société TOURSNORD,

Condamne la société GENERALI IARD à verser à la société TOURSNORD une somme provisionnelle de 40.000,00 €, à valoir sur l'indemnité contractuelle due,

Rappelle que l'exécution provisoire du jugement est de droit,

Réserve l'application des dispositions de l'article 700 et des dépens'.

Il a considéré que les arrêtés des 14 et 25 mars 2020 et le décret du 29 octobre 2020 n'avaient pas emporté une fermeture administrative de l'activité d'hôtellerie et que dès lors, la société Generali ne devait pas sa garantie. Il a constaté que la société Generali ne contestait pas le principe de sa garantie s'agissant de l'activité restauration.

Par déclaration reçue au greffe le 28 juin 2021, la société Toursnord a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées le 22 mars 2022, elle a demandé de :

'A titre principal,

' INFIRMER le jugement du Tribunal de Commerce de La Rochelle du 4 juin 2021, mais seulement en ce qu'il a :

- Dit mal fondée la demande de la société TOURSNORD de voir obliger la société GENERALI IARD à appliquer une demande d'indemnisation concernant la partie hôtelière prévue au contrat;

En conséquence,

- Débouté la société TOURSNORD de sa demande d'indemnisation concernant ses pertes financières, occasionnés par la pandémie « COVID 19 » sur la partie hôtellerie de son activité ;

- Ordonné une expertise et désigné à cet effet Monsieur [V] [G] en qualité d'expert, qui aura pour mission, parties présentes ou dûment appelées, en attendant tous sachant de :

*convoquer les parties et se faire remettre toutes les pièces nécessaires à la réalisation de sa mission,

*les entendre en leurs explications,

*rechercher la nature des conventions entre les parties et préciser les obligations en résultant pour chacune des parties,

*évaluer le montant de la perte financière des parties de l'activité de la demanderesse, entraînées par les fermetures administratives successives liées à la pandémie dite « COVID 19 » et fixer le montant de l'indemnité à verser par son assureur.

L'expert judiciaire désigné devra évaluer l'indemnisation de la société TOURSNORD telle que découlant des polices d'assurance liant les parties et de manière générale, suivre le principe indemnitaire, principe d'ordre public prévu à l'article L. 121-1 du code des assurances;

- Fixé à la somme de 2000€ le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être versée par moitié chacune, par les soins des deux parties dans un délai de 15 jours, à compter de la date où la présente décision sera devenue définitive, au greffe du Tribunal de commerce de la Rochelle, par application des dispositions de l'article L. 121-1 du code des assurances;

- Dit que l'expert donnera connaissance de ses conclusions aux parties, et répondra à tous dires de leur part dans le délai qui leur aura été imparti, avant d'établir un rapport définitif qu'il déposera au greffe du tribunal de commerce, et ce dans un délai de 2 mois consécutif à la consignation des frais;

- Ordonné le sursis à statuer sur la totalité des demandes indemnitaires de la société TOURSNORD, attachées à son activité de restauration en salle, dans l'attente du rapport d'expertise désigné,

- Condamné la société GENRALI IARD à verser à la société TOURSNORD une somme provisionnelle de 40000€ à valoir sur l'indemnité contractuelle due,

- Réservé l'application des dispositions de l'article 700 et des dépens.

Et, STATUANT A NOUVEAU:

' DÉCLARER recevable et bien fondée la société TOURSNORD en toutes ses demandes, tant en première instance qu'en appel;

' DEBOUTER la société GENERALI IARD de l'ensemble de ses demandes tant en première instance qu'en appel;

' CONDAMNER la société GENERALI IARD à payer à la société TOURSNORD la somme de 170 049,24 euros, avec intérêts légaux à compter du 3 juillet 2020 capitalisés dans les conditions 25 prévues par l'article 1343-2 du Code civil, au titre de l'indemnisation due en application du contrat d'assurance pour les pertes d'exploitation subies du 17 mars 2020 au 2 juin 2020;

' CONDAMNER la société GENERALI IARD à payer à la société TOURSNORD la somme de 224 178,50 euros, avec intérêts légaux à compter du 2 novembre 2020 capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du Code civil, au titre de l'indemnisation due en application du contrat d'assurance pour les pertes d'exploitation subies du 29 octobre 2020 au 28 janvier 2021;

' CONDAMNER la société GENERALI IARD à verser à la société TOURSNORD la somme de 7500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la première instance et de l'instance d'appel ;

' CONDAMNER la société GENERALI IARD aux dépens de première instance et d'appel.

A titre subsidiaire,

' INFIRMER le jugement du Tribunal de Commerce de La Rochelle du 4 juin 2021, mais seulement en ce qu'il a :

- Dit mal fondée la demande de la société TOURSNORD de voir obliger la société GENERALI IARD à appliquer une demande d'indemnisation concernant la partie hôtelière prévue au contrat;

En conséquence,

- Débouté la société TOURSNORD de sa demande d'indemnisation concernant ses pertes financières, occasionnés par la pandémie « COVID 19 » sur la partie hôtellerie de son activité ;

- Ordonné le sursis à statuer sur la totalité des demandes indemnitaires de la société TOURSNORD, attachées à son activité de restauration en salle, dans l'attente du rapport d'expertise désigné,

- Condamné la société GENRALI IARD à verser à la société TOURSNORD une somme provisionnelle de 40000€ à valoir sur l'indemnité contractuelle due,

- Réservé l'application des dispositions de l'article 700 et des dépens.

Et, STATUANT A NOUVEAU, de :

' DÉCLARER recevable et bien fondée la société TOURSNORD en toutes ses demandes, tant en première instance qu'en appel;

' DEBOUTER la société GENERALI IARD de l'ensemble de ses demandes, tant en première instance qu'en appel;

' CONDAMNER la société GENERALI IARD à verser une provision de 197 000,00 euros à la société TOURSNORD à valoir sur le montant définitif de l'indemnité ;

' ORDONNER le sursis à statuer sur les demandes de condamnation au paiement de l'indemnité définitive due en application du contrat d'assurance dans l'attente du rapport de l'expert judiciaire désigné;

' CONDAMNER la société GENERALI IARD à verser à la société TOURSNORD la somme de 7500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la première instance et de l'instance d'appel ;

' CONDAMNER la société GENERALI IARD aux dépens de première instance et d'appel'.

Elle a exposé que :

- le décret du 16 mars 2020 n° 2020-260 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19 et les arrêtés des 14 et 15 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19 avaient imposé la fermeture totale du bar et du restaurant et celle partielle de l'hébergement aux personnes n'ayant pas justifié d'un motif impérieux d'ordre sanitaire, familial ou professionnel ;

- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire avait emporté les mêmes conséquences.

Elle a soutenu que ces dispositions avaient conduit à une fermeture partielle de l'activité d'hébergement sur décision de l'autorité administrative, dont les conséquences étaient garanties au contrat d'assurance. Elle a précisé qu'elle avait déduit de sa demande indemnitaire les aides perçues de l'Etat.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 décembre 2021, la société Generali Iard a demandé de :

'Vu les polices d'assurance de la société Toursnord

Vu la jurisprudence,

[...]

- Confirmer le Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de La Rochelle le 4 juin 2021 ;

- Juger qu'une réfaction doit être appliquée à l'indemnité qui sera chiffrée par l'Expert Judiciaire ;

- Débouter la société Toursnord de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner la société Toursnord à verser à la Compagnie Generali la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- La condamner aux entiers dépens'.

Elle a maintenu ne pas devoir sa garantie s'agissant de l'activité d'hébergement, aucune décision de fermeture administrative n'étant intervenue. Elle a précisé que les préfets avaient compétence pour fermer les établissements en cas de circonstances particulières.

S'agissant de la garantie de l'activité bar-restauration qu'elle ne conteste pas, elle a demandé de préciser la mission d'expertise, en ce que l'expert devait prendre en considération pour évaluer la perte subie la baisse d'activité survenue en 2020 et non se limiter à une comparaison de l'année 2020 avec les résultats compatible des deux années précédentes.

L'ordonnance de clôture est du 24 mars 2022.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 mars 2022, la société Generali Iard a demandé de :

'Vu les polices d'assurance de la société Toursnord

Vu la jurisprudence,

[...]

- Ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture prononcée le 24 mars dernier et accueillir les présentes écritures ;

- Confirmer le Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de La Rochelle le 4 juin 2021 ;

- Juger qu'une réfaction doit être appliquée à l'indemnité qui sera chiffrée par l'Expert Judiciaire ;

- Débouter la société Toursnord de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner la société Toursnord à verser à la Compagnie Generali la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- La condamner aux entiers dépens'.

Elle a produit 7 nouvelles décisions de tribunaux de commerce ([Localité 7], [Localité 6], [Localité 9]).

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR L'ORDONNANCE DE CLOTURE

L'article 802 auquel renvoie l'article 907 du même code dispose que : 'Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office'. L'article 803 du même code précise que : 'l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue', que : 'la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation' et que : 'l'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision du tribunal'.

La production aux débats postérieurement à l'ordonnance de clôture de 7 jugements de tribunaux de commerce, le plus ancien du 20 septembre 2021, le plus récent du 17 janvier 2022, n'est pas une cause grave de nature à fonder la révocation de l'ordonnance de clôture.

Pour ces motifs, la demande de révocation de l'ordonnance de clôture sera rejetée et les conclusions n° 2 de la société Generali Iard notifiées le 29 mars 2022 seront déclarées irrecevables ainsi que les pièces nouvelles produites.

SUR LES STIPULATIONS CONTRACTUELLES

Un avenant au contrat d'assurance de groupe n° AM752238/C6588 a été conclu entre l'appelante dénommée : 'Hôtel Campanile sarl Toursnord' et la société 'Generali Conseils' par l'intermédiaire de Val'Assurances.

Il y est indiqué en première page que : 'L'assuré exerce les activités suivantes : Hôtel avec ou sans restaurant'.

Cet avenant, à effet au 4 avril 2019, stipule en page 13 et 14 que :

'FERMETURE ADMINISTRATIVE

Nous garantissons au titre du chapitre « soutien financier » de 1'annexe 100% pro «hôtel-restaurant », le paiement d' une indemnité résultant de 1'interruption totale ou partielle des activités de 1'Assuré, consécutive à 1a fermeture totale ou partielle d'un établissement assuré, par suite d'une décision des autorités compétentes.

Par dérogation partielle à cette annexe la garantie est étendue à :

o Mise en quarantaine des locaux assurés par ordre des autorités sanitaires ;

o Empoisonnement causé par la consommation d' aliments ou de boissons fournis à la clientèle de 1'établissement assuré ;

o Assassinat ou suicide dans l'établissement assuré ;

o Prise d' otage.

Il est précisé que 1'extension de perte d' exploitation suite à la fermeture administrative après sinistre RC a pour objet de garantir la perte d'  exploitation subie par l'établissement assuré, dès 1ors qu'une négligence ou faute n'est pas à 1' origine du préjudice causé.

Le montant de garantie ne pourra excéder 25 % du montant de la marge brute avec un maximum de 1 000 000,00 e avec une période d' indemnisation limitée à 3 mois.

IMPOSSIBILITE D'ACCES

L'Assureur indemnisera 1'Assuré des Pertes d'Exploitation telles que définies aux conditions générales, résultant de 1'interruption totale ou partielle des activités de son entreprise, et consécutives à une interdiction d'accès édictée par 1es autorités compétentes à la suite de la provenance ou la prévention, dans le voisinage, d'un incendie ou d' une explosion assurés au titre du présent contrat'.

Ces stipulations sont claires et ne nécessitent pas d'être interprétées pour recevoir application.

SUR LA PÉRIODE COURANT DU 17 MARS AU 2 JUIN 2020

L'article 1134 ancien du code civil (articles 1103, 1104 et 1193 nouveaux) applicable en l'espèce dispose notamment que 'les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites'.

L'article 1er de l'arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19 dispose que :

'Afin de ralentir la propagation du virus covid-19, les établissements relevant des catégories mentionnées à l'article GN1 de l'arrêté du 25 juin 1980 susvisé figurant ci-après ne peuvent plus accueillir du public jusqu'au 15 avril 2020:

[...]

- au titre de la catégorie N : Restaurants et débits de boissons ;

-[...]

Pour l'application du présent article, les restaurants et bars d'hôtels, à l'exception du « room service », sont regardés comme relevant de la catégorie N : Restaurants et débits de boissons. L'ensemble des établissements de cette catégorie sont en outre autorisés à maintenir leurs activités de vente à emporter et de livraison.

Les dispositions du présent article sont applicables sur le territoire de la République'.

L'arrêté du 15 mars 2020 a complété l'arrêté du 14 mars 2020. L'article 1er de l'arrêté du 14 mars mars a été modifié en ce que notamment :

'I. - Afin de ralentir la propagation du virus covid-19, les établissements relevant des catégories mentionnées à l'article GN1 de l'arrêté du 25 juin 1980 susvisé figurant ci-après ne peuvent plus accueillir du public jusqu'au 15 avril 2020 :

[...]

« - au titre de la catégorie N : Restaurants et débits de boissons, sauf pour leurs activités de livraison et de vente à emporter, le 'room service' des restaurants et bars d'hôtels et la restauration collective sous contrat ;

[...]

« II. - Les établissements relevant de la catégorie M peuvent toutefois continuer à recevoir du public pour les activités figurant en annexe du présent arrêté'.

L'annexe de l'article 1er de l'arrêté du 14 mars 2020 modifié portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19 précise que :

'Les activités mentionnées au II de l'article 1er sont les suivantes :

[...]

Hôtels et hébergement similaire'.

L'article 3 du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire dispose que :

'I. - Jusqu'au 31 mars 2020, tout déplacement de personne hors de son domicile est interdit à l'exception des déplacements pour les motifs suivants en évitant tout regroupement de personnes :

1° Trajets entre le domicile et le ou les lieux d'exercice de l'activité professionnelle et déplacements professionnels insusceptibles d'être différés ;

2° Déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle et des achats de première nécessité dans des établissements dont les activités demeurent autorisées par l'article 8 du présent décret ;

3° Déplacements pour motifs de santé à l'exception des consultations et soins pouvant être assurés à distance et, sauf pour les patients atteints d'une affection de longue durée, de ceux qui peuvent être différés ;

4° Déplacements pour motif familial impérieux, pour l'assistance des personnes vulnérables et pour la garde d'enfants ;

5° Déplacements brefs, dans la limite d'une heure quotidienne et dans un rayon maximal d'un kilomètre autour du domicile, liés soit à l'activité physique individuelle des personnes, à l'exclusion de toute pratique sportive collective et de toute proximité avec d'autres personnes, soit à la promenade avec les seules personnes regroupées dans un même domicile, soit aux besoins des animaux de compagnie ;

6° Déplacements résultant d'une obligation de présentation aux services de police ou de gendarmerie nationales ou à tout autre service ou professionnel, imposée par l'autorité de police administrative ou l'autorité judiciaire ;

7° Déplacements résultant d'une convocation émanant d'une juridiction administrative ou de l'autorité judiciaire ;

8° Déplacements aux seules fins de participer à des missions d'intérêt général sur demande de l'autorité administrative et dans les conditions qu'elle précise.

II. - Les personnes souhaitant bénéficier de l'une de ces exceptions doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d'un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l'une de ces exceptions.

III. - Le représentant de l'Etat dans le département est habilité à adopter des mesures plus restrictives en matière de trajets et déplacements des personnes lorsque les circonstances locales l'exigent'.

L'article 5 de ce décret a sauf exception prohibé les déplacements entre l'outre-mer et la métropole.

L'article 8 de ce même décret précise que :

'I. - Les établissements relevant des catégories mentionnées par le règlement pris en application de l'article R. 123-12 du code de la construction et de l'habitation figurant ci-après ne peuvent plus accueillir du public jusqu'au 15 avril 2020 :

[...]

- au titre de la catégorie N : Restaurants et débits de boissons, sauf pour leurs activités de livraison et de vente à emporter, le « room service » des restaurants et bars d'hôtels et la restauration collective sous contrat ;

[...]

II. - Les établissements relevant du I peuvent toutefois continuer à recevoir du public pour les activités figurant en annexe'.

Ce décret mentionne en annexe que :

'Les activités mentionnées au II de l'article 8 sont les suivantes :

[...]

Hôtels et hébergement similaire'.

La société Toursnord exerce une activité d'hôtellerie-restauration.

Les dispositions précitées ont imposé la fermeture de l'activité de restauration. La société Générali Iard admet devoir sa garantie s'agissant de cette activité.

Ces mêmes dispositions n'ont pas emporté la fermeture administrative de l'hôtel. Elles ont de fait limité la clientèle potentielle. L'arrêt de l'activité d'hôtellerie est une décision de gestion de l'établissement.

La garantie de l'assureur se limite dès lors aux conséquences de la fermeture partielle de l'hôtel-restaurant, ayant affecté la seule activité de restauration.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a exclu la garantie de la société Generali Iard s'agissant de l'activité hôtellerie.

SUR LA PÉRIODE COURANT DU 29 OCTOBRE 2020 AU 28 JANVIER 2021

L'article 4 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire dispose notamment que :

'I. - Tout déplacement de personne hors de son lieu de résidence est interdit à l'exception des déplacements pour les motifs suivants en évitant tout regroupement de personnes :

1° Déplacements à destination ou en provenance :

a) Du lieu d'exercice ou de recherche d'une activité professionnelle et déplacements professionnels ne pouvant être différés ;

b) Des établissements ou services d'accueil de mineurs, d'enseignement ou de formation pour adultes mentionnés aux articles 32 à 35 du présent décret ;

c) Du lieu d'organisation d'un examen ou d'un concours ;

2° Déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle, des achats de première nécessité, des retraits de commandes et des livraisons à domicile ;

3° Déplacements pour effectuer des consultations, examens et soins ne pouvant être assurés à distance et pour l'achat de médicaments ;

4° Déplacements pour motif familial impérieux, pour l'assistance aux personnes vulnérables et précaires, pour la garde d'enfants, ainsi que pour les déménagements ;

5° Déplacements des personnes en situation de handicap et leur accompagnant;

6° Déplacements brefs, dans la limite d'une heure quotidienne et dans un rayon maximal d'un kilomètre autour du domicile, liés soit à l'activité physique individuelle des personnes, à l'exclusion de toute pratique sportive collective et de toute proximité avec d'autres personnes, soit à la promenade avec les seules personnes regroupées dans un même domicile, soit aux besoins des animaux de compagnie ;

7° Déplacements pour répondre à une convocation judiciaire ou administrative ou pour se rendre dans un service public ou chez un professionnel du droit, pour un acte ou une démarche qui ne peuvent être réalisés à distance ;

8° Participation à des missions d'intérêt général sur demande de l'autorité administrative.

II. - Les personnes souhaitant bénéficier de l'une de ces exceptions doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d'un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l'une de ces exceptions.

Les mesures prises en vertu du I ne peuvent faire obstacle à l'exercice d'une activité professionnelle sur la voie publique dont il est justifié dans les conditions prévues à l'alinéa précédent.

III. - Le représentant de l'Etat dans le département est habilité à adopter des mesures plus restrictives en matière de trajets et déplacements des personnes lorsque les circonstances locales l'exigent'.

Les articles 10 et 11 de ce décret ont sauf exception prohibé les déplacements entre l'outre-mer et la métropole.

L'article 40 de ce même décret dispose notamment que :

'. - Les établissements relevant des catégories mentionnées par le règlement pris en application de l'article R. 123-12 du code de la construction et de l'habitation figurant ci-après ne peuvent accueillir du public :

1° Etablissements de type N : Restaurants et débits de boisson ;

2° Etablissements de type EF : Etablissements flottants pour leur activité de restauration et de débit de boisson ;

3° Etablissements de type OA : Restaurants d'altitude ;

4° Etablissements de type O : Hôtels, pour les espaces dédiés aux activités de restauration et de débit de boisson.

Par dérogation, les établissements mentionnés au présent I peuvent continuer à accueillir du public pour leurs activités de livraison et de vente à emporter, le room service des restaurants et bars d'hôtels et la restauration collective sous contrat'.

Aux termes de l'article 41 :

'I. - Sauf lorsqu'ils constituent pour les personnes qui y vivent un domicile régulier, les établissements suivants ne peuvent accueillir de public :

1° Les auberges collectives ;

2° Les résidences de tourisme ;

3° Les villages résidentiels de tourisme ;

4° Les villages de vacances et maisons familiales de vacances ;

5° Les terrains de camping et de caravanage.

II. - Par dérogation, les établissements mentionnés au 1° à 5° du I peuvent accueillir des personnes pour l'accomplissement de mesures de quarantaine et d'isolement mises en 'uvre sur prescription médicale ou décidées par le préfet dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19.

III. - Les établissements thermaux mentionnés à l'article R. 1322-52 du code de la santé publique ne peuvent accueillir du public'.

Comme précédemment ces dispositions n'ont pas imposé la fermeture de l'activité d'hôtellerie gérée par la société Toursnord, seule l'ayant été celle de restauration. Pour cette seconde période, la garantie de l'assureur se limite aux conséquences de la fermeture partielle de l'hôtel-restaurant ayant affecté la seule activité de restauration.

Le jugement sera en conséquence également confirmé de ce chef.

SUR LA PROVISION

[I] [C], expert-comptable a dans une attestation en date du 12 mars 2021 apprécié à 226.044 € la perte d'exploitation de l'appelante sur la seconde période. Cette attestation, qui ne distingue pas entre les activités de restauration et d'hôtellerie, est insuffisante à fonder une augmentation de la provision accordée par le premier juge. Son montant a été pertinemment évalué. Le jugement sera en conséquence confirmé de ce chef.

SUR L'INDEMNISATION A VENIR

La société Generali Iard demande que l'indemnité qui sera proposée par l'expert soit réduite de 25 % en considération de la perte de clientèle qui aurait nécessairement été subie en raison des circonstances épidémiques, indépendamment de toute fermeture administrative.

Cette demande est prématurée, les termes du rapport d'expertise n'étant pas connus. Le tribunal a pertinemment sursis à statuer sur les demandes indemnitaires et ce chef de prétention entre dans le périmètre de ces demandes. Elle sera pour ces motifs déclarée irrecevable devant la cour.

SUR LES DEMANDES PRÉSENTÉES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Le premier juge a pertinemment réservé l'application de ces dispositions.

Les circonstances de l'espèce n'en justifient de même pas l'application devant la cour.

SUR LES DÉPENS

La charge des dépens d'appel incombe à l'appelante.

PAR CES MOTIFS,

statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

REJETTE la demande de la société Generali Iard de révocation de l'ordonnance de clôture ;

DECLARE en conséquence irrecevables les conclusions de la société Generali Iard notifiées par voie électronique le 29 mars 2022, sauf en ce qu'elles sollicitent la révocation de l'ordonnance de clôture et les pièces n° 28 à 34 produites après l'ordonnance de clôture ;

CONFIRMEle jugement du 4 juin 2021 du tribunal de commerce de La Rochelle ;

y ajoutant,

DECLARE irrecevable devant la cour la demande de la société Generali Iard de réduction de 25 % de l'indemnité à sa charge qui serait proposée par l'expert judiciaire ;

REJETTE les demandes présentées en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Toursnord aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01998
Date de la décision : 07/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-07;21.01998 ?
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