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10/05/2022 | FRANCE | N°20/01541

France | France, Cour d'appel de Poitiers, 1ère chambre, 10 mai 2022, 20/01541


ARRÊT N°254



N° RG 20/01541





N° Portalis DBV5-V-B7E-GBMA















S.A.S. COCV YPO CAMP



C/



[F]

[C]

[V]





















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 10 MAI 2022







Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 juin 2020 rendu par le Tribunal

Judiciaire de LA ROCHELLE





APPELANTE :



S.A.S. YPO CAMP COCV

19 Route de la Rochelle

17300 VERGEROUX



ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS



ayant pour avocat plaidant Me Pierre ALLUAUME, avocat au barreau de ...

ARRÊT N°254

N° RG 20/01541

N° Portalis DBV5-V-B7E-GBMA

S.A.S. COCV YPO CAMP

C/

[F]

[C]

[V]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 10 MAI 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 juin 2020 rendu par le Tribunal Judiciaire de LA ROCHELLE

APPELANTE :

S.A.S. YPO CAMP COCV

19 Route de la Rochelle

17300 VERGEROUX

ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

ayant pour avocat plaidant Me Pierre ALLUAUME, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉS :

Monsieur [G] [F]

né le 10 Février 1941 à ASSENAY

2 Chemin du Merzeau

17260 ST ANDRÉ DE LIDON

Madame [W] [C] épouse [P]

née le 15 Février 1963 à CARIGNAN

1 Pontcereau du Haut

17120 EPARGNES

Madame [E] [V] épouse [F]

née le 05 Juin 1942 à CARIGNAN

2 Chemin du Merzeau

17260 SAINT ANDRÉ DE LIDON

ayant tous pour avocat postulant Me Cécile HIDREAU de la SCP BODIN-BOUTILLIER-DEMAISON-GIRET-HIDREAU-SHORTHOUSE, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

ayant pour avocat plaidant Me Brice GIRET, avocat au barreau de la ROCHELLE-ROCHEFORT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 28 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Madame Anne VERRIER, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS

Suivant bon de commande du 15 mai 2016, la société Ypo Camp (COCV) qui a pour objet la vente de véhicules de loisirs neufs ou d'occasion a vendu aux consorts [F]-[P] un camping-car d'occasion de marque MC Louis, modèle Yearling 72, pour un prix de 40 000 euros.

Le bon de commande portait sur un véhicule ayant parcouru 42 500 km, incluait une extension de garantie (moteur et cellule ) de 120 mois.

Un acompte de 20 000 euros était versé à la commande.

La livraison est intervenue le 1er juillet 2016.

La facture mentionne en page 1 un kilométrage de 47 427 km.

La garantie 120 mois a été remplacée par deux garanties cellule, porteur de 12 mois prenant fin le 1er juillet 2017.

Le certificat de cession rempli par le vendeur le 1er juillet 2016 n'a pas renseigné la mention relative au kilométrage. 'Merci d'indiquer le kilométrage inscrit au compteur suivi de la mention non garanti.'

Le 28 avril 2017, une vidange est réalisée à 49 637km.

Le 8 août 2017, une panne moteur est survenue alors que le véhicule avait parcouru 54 470 km.

Le coût des travaux de réparation était estimé à la somme de 10 449,30 euros, travaux incluant la dépose-remplacement-pose du moteur.

Par courrier du 25 août 2017, les acquéreurs ont mis en demeure leur vendeur de prendre en charge les frais de réparations, rappelé avoir acheté le véhicule à 47 427 km.

Par courrier du 26 août 2017, le vendeur déclinait toute garantie, précisait qu'elle avait expiré le 1er juillet 2017.

Une expertise amiable était confiée au cabinet Limousin Expertise le 16 novembre 2017.

Les opérations avaient lieu le 16 novembre 2017 en présence du vendeur.

L'expert excluait toute faute de conduite ou défaut d'entretien depuis l' achat, constatait la destruction du moteur.

Il envisageait 2 hypothèses: une rupture fortuite de la soupape d'échappement ou une détérioration en lien avec le remplacement du kit de distribution par M. [Y] qui avait vendu le véhicule à la société COCV.

Une seconde expertise était réalisée après dépose de la culasse chez un concessionnaire Fiat, Ital Auto le 11 janvier 2018.

L'expert constatait la destruction du moteur en lien avec la rupture d'une tête de soupape d'échappement sur le cylindre n°2, estimait le coût des travaux à la somme de 15. 977, 93 euros.

Il concluait a une panne en relation avec la rupture d'une pièce d'origine

Il rappelait que le vendeur n'était pas intervenu sur le moteur , penchait pour une panne interne au moteur imputable au constructeur.

Il excluait l' hypothèse d'un mauvais calage de distribution suite au remplacement de la courroie de distribution réalisé par M. [Y] .

Par acte du 13 juillet 2018, les acquéreurs ont assigné leur vendeur devant le juge des référés aux fins d'expertise judiciaire qui a été ordonnée le 16 octobre 2018.

M. [J] a déposé son rapport le 18 juin 2019.

Il indiquait que la panne-moteur était la conséquence d'une défaillance d'un injecteur de gazole, chiffrait les frais de remise en état à la somme de 16 887,61 euros.

L'expert déplorait l' absence de mesures conservatoires prises.

Il indiquait n'avoir pu réaliser de prélèvement d'huile du fait de la vidange réalisée, n'avoir pu analyser l'injecteur de gazole détruit.

Il concluait qu'il lui était difficile de dire avec certitude si le défaut à l'origine des désordres était en germe antérieurement à la vente du fait de l'impossibilité de réaliser diverses analyses.

L'expertise mettait en évidence un écart inexpliqué de 5092 km entre la commande et la livraison.

Par acte du 16 juillet 2019, les acquéreurs ont assigné leur vendeur devant le tribunal de grande instance de La Rochelle aux fins de voir prononcer la nullité de la vente pour erreur déterminante et réticence dolosive, pour non-conformité, subsidiairement, la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Par jugement du 30 juin 2020 , le tribunal judiciaire de La Rochelle a statué comme suit :

«

- DECLARE irrecevable l'action fondée sur le défaut de conformité,

-DEBOUTE les requérants de leurs actions fondées sur les vices du consentement et la non-conformité,

-CONDAMNE la SAS YPO CAMP à restituer à Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M. [G] [F] la somme de 40.000 € en restitution du prix de vente en garantie des vices cachés,

-DIT que Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M.[G] [F] devront restituer le véhicule à la SAS YPO CAMP dès restitution du prix de vente,

-CONDAMNE la SAS YPO CAMP à verser à Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M. [G] [F] la somme de 1162 € en réparation des préjudices matériels, toutes causes confondues,

-CONDAMNE la SAS YPO CAMP à verser à Madame [E] [F],Madame [W] [P] et M. [G] [F] la somme de 1500€ en réparation du trouble de jouissance,

-CONDAMNE la SAS YPO CAMP à verser à Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M. [G] [F]chacun la somme de 500 € en réparation du préjudice moral,

-DEBOUTE les parties de leurs plus amples demandes,

-CONDAMNE la SAS YPO CAMP à verser à Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M. [G] [F] la somme de 4000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

-CONDAMNE la SAS YPO CAMP aux dépens incluant les frais d'expertise judiciaire,

-ORDONNE l'exécution provisoire. »

Le premier juge a notamment retenu que :

- sur l' action en nullité,

La mention de 47 427 km était apposée sur le bon de livraison et sur la facture établis le 1er juillet 2016.

Le témoignage du technicien qui aurait commis une erreur sur le kilométrage n'est pas produit.

Il n'a pas été entendu par l'expert.

Il y a une opacité du vendeur sur l'entretien du véhicule avant la vente.

L' acquéreur ne prouve pas que le véhicule a été livré avec un kilométrage qui n'était pas celui présenté lors de la vente.

Les kilomètres supplémentaires sont apparus postérieurement à la vente lors de la livraison.

Le vice du consentement devant être recherché lors de la vente n'est pas démontré.

- sur l' action en conformité

Il est de droit constant que l' inexactitude du kilométrage constitue un manquement à l'obligation de délivrance. Il suffisait néanmoins de regarder le compteur pour le connaître.

La non-conformité était apparente.

L' action fondée sur l'article L.217-12 du code de la consommation est prescrite, doit s'exercer dans les deux ans à compter de la délivrance du bien.

- sur la garantie des vices cachés

La panne s'est produite alors que les acquéreurs avaient parcouru 7043 km.

Il est établi que le véhicule a été laissé en hivernage.

Le vendeur avait acquis le véhicule le 15 mars 2015, l'a utilisé ou un tiers l'a utilisé entre le 15 mars et le 1er juillet 2015.

Le véhicule était supposé atteindre 150 000 km sans grand incident.

Il a été parfaitement entretenu avant et après la vente. Il a circulé dans des circonstances inconnues durant 5000 km.

La nature de la panne établit un vice lié à la fragilité d'un organe technique. Le défaut est nécessairement antérieur à la vente.

Le vendeur qui est un professionnel sera tenu à garantie.

- sur les préjudices

Les préjudices seront évalués aux sommes de 372 euros au titre des frais d'assurance, de 790 euros au titre de des frais de carte grise, de 1500 euros au titre du préjudice de jouissance, de 500 euros chacun au titre du préjudice moral.

La demande au titre des frais de gardiennage sera rejetée, le paiemnt effectif des factures n'étant pas démontré.

LA COUR

Vu l'appel en date du 28 juillet 2020 interjeté par la société Ypo Camp Cocv

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 2 avril 2021, la société YPO Camp a présenté les demandes suivantes :

Vu les articles 1137 et suivants du Code civil,

Vu les articles L.217-1 et suivants du Code de la consommation,

Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,

Vu les articles 1229 et 1352-1 et suivants du Code civil,

Vu la jurisprudence précitée,

Il est demandé à la Cour d'Appel de Poitiers de :

Déclarer le présent appel bien fondé,

-In limine litis, DIRE ET JUGER que la Cour n'est saisie d'aucun appel incident de la part des consorts [F]-[P].

-CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de La Rochelle le 30 juin 2020 en ce qu'il a :

-déclaré irrecevable l'action fondée sur le défaut de conformité,

-débouté les consorts [F] et [P] de leurs actions fondées sur les vices du consentement et la non-conformité.

-INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de La Rochelle le 30 juin 2020 pour le surplus.

Il est demandé à la Cour d'Appel de Poitiers, statuant à nouveau, de :

A titre principal,

DIRE ET JUGER que la garantie légale des vices cachés ne saurait s'appliquer à défaut de démonstration de l'antériorité du vice,

-DEBOUTER Monsieur et Madame [F] et Madame [P] de l'ensemble de leurs demandes.

A titre subsidiaire,

-CONDAMNER les consorts [F]-[P] à verser à la société YPO CAMP COCV la somme de 4.030,00 euros au titre de leur bénéfice de jouissance, ainsi qu'une somme à déterminer au titre des éventuelles dégradations et détériorations commises sur le véhicule qui doit faire l'objet de la restitution.

En tout état de cause,

-DEBOUTER les intimées de l'intégralités de leurs demandes, fins et conclusions,

-CONDAMNER solidairement Monsieur et Madame [F] et Madame [P] à verser à la société YPO CAMP COCV la somme de 5.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

-CONDAMNER solidairement Monsieur et Madame [F] et Madame [P] aux entiers dépens.

A l'appui de ses prétentions, la société YPO Camp soutient notamment que:

-L'appel incident formé par les intimés est irrecevable dans la mesure où les intimés ne sollicitent à aucun moment l'infirmation du jugement.

-Elle a acheté le camping-car fin mars 2016, l'a revendu le 15 mai 2016, ne l'a pas utilisé.

-Les acquéreurs ont attendu l'expertise judiciaire pour se prévaloir d'une difficulté relative au kilométrage.

-Le tribunal s'est trompé, a cru à tort qu'elle était restée propriétaire du camping-car une année.

-Le contrôle technique du 15 mars 2016 ne faisait état d'aucune difficulté. Il est antérieur à l'acquisition du véhicule par le vendeur.

-Elle a seulement préparé le véhicule avant livraison.

-L'expert ne peut établir l' antériorité du vice caché.

-Une erreur a été commise lors de la livraison s'agissant de la mention du kilométrage ( 47 427 km mentionnés au lieu de 42 427 km). Les acquéreurs n'ont rien dit.

-C'est M. [D], ex salarié de la société qui a commis une erreur en rédigeant le bon de livraison. Il atteste en ce sens.

-Cette erreur n'affecte en rien les qualités essentielles du véhicule.

-Le véhicule n'a pas parcouru 5000 km en un mois et demi. Il a été livré avec 42 427 km le 1er juillet 2016 malgré ce qui a été écrit.

-La vidange avait été faite à 42 427 km.

-L' erreur faite sur le bon de livraison a été reprise sur la facture.

-Elle conteste tout dol, toutes manoeuvres, n'a pas fait preuve d'opacité.

-Le défaut de délivrance conforme suppose un produit livré ne correspondant pas à la commande. L'action de ce chef est prescrite.

-Les désordres mécaniques touchent le moteur, sont la conséquence d'une défaillance d'un injecteur de gazole.

-Le véhicule a été vidangé. Sans huile, l'expert n'a pas pu analyser, vérifier la présence de carburant dans le lubrifiant et donc évaluer l'antériorité du dysfonctionnement de l'injecteur du cylindre n°2.

-Le tribunal a affirmé que le vice était lié à la fragilité d'un organe technique, qu'il était nécessairement antérieur à la vente sans l'établir.

Les causes de défaillance d'un injecteur sont nombreuses.

-Subsidiairement, les acquéreurs se sont servis de leur camping-car, doivent conserver à leur charge le coût de la carte grise, de l' assurance.

-Les frais de dépose mécanique qu'ils ont exposés avant expertise ont été engagés selon leur bon vouloir.

-Elle conteste l'existence des préjudices de jouissance et moral.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 5 janvier 2021 , les époux [F] et Mme [P] ont présenté les demandes suivantes :

Vu les anciens articles 1110 et suivants et 1134 du code civil (devenus 1112-1 et 1137 et suivants),

Vu les articles 1603 et suivants et 1641 et suivants du code civil,

Vu les articles 11, 139, 275, 515, 696, 699 et 700 du code de procédure civile,

À titre principal,

dire et juger que le consentement des consorts [F]-[P] était vicié en raison de la réticence dolosive de la société COCV YPO CAMP quant à l'augmentation du kilométrage du véhicule.

Dire et juger que l'erreur lors de la vente entraîne la nullité du contrat.

-Prononcer la nullité de la vente du camping-car d'occasion de marque MC LOUIS, modèle YEARLING 72, immatriculé AC-942-PW intervenue entre les consorts [F]-[P] et la société COCV YPO CAMP.

À titre subsidiaire,

Dire et juger que le camping-car cédé aux consorts [F]-[P] par la société COCV YPO CAMP n'a pas fait l'objet d'une délivrance conforme

-Prononcer la résolution de la vente du camping-car d'occasion de marque MC LOUIS, modèle YEARLING 72, immatriculé AC-942-PW intervenue entre les consorts [F]-[P] et la société COCV YPO CAMP.

A titre très subsidiaire,

Dire et juger que le camping-car cédé aux consorts [F]-[P] était affecté d'un vice caché au moment de la vente constitué par la défectuosité d'un injecteur de gazole.

Dire et juger que les consorts [F]-[P] ne pouvaient, en qualité d'acquéreur profane, déceler ce vice lors de la vente.

-Prononcer la résolution de la vente du camping-car d'occasion de marque MC LOUIS, modèle YEARLING 72, immatriculé AC-942-PW intervenue entre les consorts [F]-[P] et la société COCV YPO CAMP.

À titre infiniment subsidiaire,

-Ordonner à la société COCV YPO CAMP la production des pièces et éléments justifiant de tout entretien du véhicule ou opération effectuée sur ce dernier entre sa reprise auprès de Monsieur [Y] et sa livraison aux consorts [F]-[P], et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du jugement à intervenir.

-Ordonner à la société COCV YPO CAMP la production des pièces et éléments justifiant du différentiel de 5 000 kilomètres constaté entre le bon de commande du 15 mars 2016 et le bon de livraison du 1er juillet 2016, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du jugement à intervenir.

En tout état de cause,

-Condamner la société COCV YPO CAMP à payer aux consorts [F]-[P] la somme de 40.000,00 €.

Dire et juger que la société COCV YPO CAMP devra récupérer le véhicule litigieux elle-même et à ses frais en respectant un délai de prévenance de 15 jours.

Dire et juger que passé le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt, la société COCV YPO CAMP sera réputée avoir renoncé au droit de récupérer le véhicule litigieux et que les consorts [F]-[P] pourront s'en débarrasser.

-Condamner la société COCV YPO CAMP à verser aux consorts [F]-[P] les sommes de :

-15 300 € au titre des frais de gardiennage ITAL AUTO.

- 708,83 € auprès de la société TOURNERIOUX comprenant gardiennage et main d''uvre pour expertise (602,82 + 106,01),

- 620 euros pour les frais d'assurance,

- 790,00 euros pour les frais de mise en route,

- 821,83 € pour les frais de dépose mécanique d'ITAL AUTO,

- 67,25 et 90,00 euros pour les frais d'intervention inutile d'ITAL AUTO,

- 480,00 et 300,00 euros pour les frais de treuillage et transport de TRANS'ALLURE

-Condamner la société COCV YPO CAMP à verser aux consorts [F]-[P] la somme de 7 300 € au titre du préjudice de jouissance subi.

-Condamner la société COCV YPO CAMP à verser aux consorts [F]-[P] la somme de 4 500 € (1 500 € chacun) au titre du préjudice moral.

-Condamner la société COCV YPO CAMP à verser aux consorts [F]-[P] la somme de 5 000 € au titre des frais irrépétibles d'appel.

-Condamner la société COCV YPO CAMP aux entiers dépens d'appel.

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société YPO CAMP au paiement de la somme de 4.000,00 euros au titre des frais irrépétibles de première instance outre les entiers dépens de première instance comprenant les frais d'expertise judiciaire.

A l'appui de ses prétentions, les consorts [F]-[P] soutiennent notamment que :

-Le vendeur n'a pas coopéré à l'expertise.

-Il existe un différentiel de 5000 km entre la commande et la livraison. Les acquéreurs ont réalisé la différence plus tard.

-Le vendeur a loué le véhicule ou a voyagé entre la commande et la livraison alors qu'ils avaient versé un acompte de 20 000 euros.

-4 ans après, un ancien salarié, M. [D], indique avoir fait une erreur. C'est un témoignage de complaisance. Ce n'est pas lui qui a signé le bon de livraison. Les acquéreurs n'ont été en contact qu'avec M. [T].

-Le kilométrage est une qualité substantielle.

-Ils ont signé un bon de commande mentionnant 42 500km , kilométrage vraisemblable au regard du contrôle technique du 1 er mars 2016 qui mentionnait (42 335 km).

-Lors de la livraison, ils n'ont pas remarqué le kilométrage mentionné sur la facture.

Ils sont âgés. Un vendeur consciencieux les aurait avertis.

-Ils demandent la nullité de la vente.

-Le professionnel a une obligation d'information, n'a pas attiré leur attention sur le kilométrage qui figurait sur le bon de livraison et la facture.

-Le bon de commande matérialise l' essentiel des engagements contractuels du vendeur.

Il sert de référence pour apprécier la délivrance conforme.

Le vendeur ne s'est pas expliqué sur la différence sauf par une erreur de notation.

-La réalité du kilométrage est incertaine. Le délai d'exercice de l'action en nullité est de 5 ans.

-L'entretien correct du véhicule, son utilisation conforme permettent de présumer l'antériorité du vice caché. Le vice est la défaillance d'un injecteur qui est resté trop longtemps ouvert.

Une quantité trop importante de carburant a été injectée.

La destruction totale de l'injecteur lors de l'avarie moteur a empêché la poursuite des investigations. Il s'agit d'un défaut très important survenu un an après la vente.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 31 janvier 2022 .

SUR CE

-sur la recevabilité de l'appel incident

L'article 914 du code de procédure civile dispose que les parties soumettent au conseiller de la mise en état , qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu'à la clôture de l'instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat tendant à :

-déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel.

Les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour d'appel la caducité ou l'irrecevabilité après la clôture de l'instruction.

La demande formée par la société COCV relative à l'irrecevabilité de l'appel incident formé par les intimés est donc irrecevable.

-sur l' objet du litige

Le vendeur demande l'infirmation du jugement qui a retenu que les conditions de la garantie des vices cachés étaient réunies, subsidiairement, conclut au débouté.

Il ressort des conclusions que les acquéreurs demandent l'infirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente pour vices cachés, demandent à titre principal la nullité de la vente pour erreur, délivrance non conforme, à titre subsidiaire, la confirmation du jugement.

-sur la nullité de la vente pour vice du consentement

L'ancien article 1110 du code civil dispose que l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet.

Les acquéreurs soutiennent avoir acquis un véhicule ayant parcouru 47 427 km alors qu'ils croyaient acquérir un véhicule ayant parcouru 42 500 km, kilométrage qui figurait sur le bon de commande.

Ils estiment donc avoir commis une erreur sur une qualité substantielle du véhicule, le kilométrage, un écart de 5000 km étant un écart significatif pour un véhicule d'occasion.

Il ressort des CGV figurant au verso du bon de commande produit un article 3 relatif à la formation du contrat.

Il indique : toute vente fera l'objet d'un bon de commande établi par le vendeur et dûment rempli par l'acheteur.

La vente est ferme et ne pourra en conséquence être modifiée que d'un commun accord des parties matérialisé par un écrit.

La livraison donnera lieu à l'établissement d'un bon de livraison dûment signé par l'acheteur.

Le vendeur reconnaît une difficulté , soutient que le kilométrage réel était bien 42 500 km, assure que celui mentionné sur la facture et le bon de livraison soit 47 427 km est erroné, qu'il s'agit d'une simple erreur de plume commise par son préposé.

Il assure que le kilométrage du véhicule acquis correspond au kilométrage mentionné sur le bon de commande et non sur la facture.

Il produit en appel une attestation émanant de M. [D] qui indique le 5 août 2020: 'Je reconnais avoir fait une erreur sur le bon de livraison que j'ai signé avec les clients du 1er juillet 2016. Le kilométrage est de 42 247 et non 47 427 km. '

L' attestation produite n'est pas de nature à emporter la conviction dans la mesure où le kilométrage convenu était de 42 500 km et non 42 247 km, où l'ancien salarié n'explique pas comment il a pu se tromper, quand et comment il a connu son erreur.

Elle n'est pas non plus de nature à établir le kilométrage réel du véhicule vendu étant observé que lors de l'expertise amiable contradictoire réalisée par le cabinet Limousin Expertise, le vendeur n'a pas contesté que le kilométrage était de 47 427 km à la date de livraison.

Il n'a pas non plus estimé utile de rectifier l'erreur des acquéreurs qui rappelaient le 25 août 2017 avoir acquis un véhicule ayant parcouru 47 427 km.

Il apparaît à la lecture de la facture que plusieurs modifications sont intervenues entre le bon de commande et la livraison, modifications afférentes au kilométrage, aux garanties (nature et durée), modifications dont

l'acquéreur n'a pas été informé alors même que le prix avait été fixé en fonction du kilométrage de 42 500 km, que l'acquéreur avait versé un acompte de 20 000 euros.

Le vendeur ne s'explique nullement sur ces modifications unilatérales d'une vente présentée comme étant ferme.

S'il est certain que le kilométrage de 47 427 figure sur le bon de livraison et la facture, les acquéreurs n'avaient aucune raison de vérifier cette mention faute d'information particulière donnée par les vendeurs.

Le défaut de mention du kilométrage parcouru sur le certificat de cession n'était pas de nature à appeler l'attention des acquéreurs sur les modifications intervenues depuis la signature du bon de commande.

Il est de droit constant que l'erreur n'est cause de nullité que dans la mesure où elle porte sur les qualités substantielles de la chose vendue. Elle doit porter sur une qualité expressément ou tacitement convenue.

Il est également constant que l'erreur provoquée par un dol est toujours excusable.

En l'espèce, les acquéreurs avaient contracté sur la base d'un contrôle technique réalisé à 42 335 km , donc peu de temps avant l'établissement du bon de commande (42 500 km), contrôle technique leur permettant de penser que le véhicule était en bon état d'entretien.

Ils avaient cru acquérir un véhicule ayant parcouru 42 500 km.

Cet écart de près de 5000 km est tout à fait substantiel lorsqu'il est rapporté au kilométrage du véhicule, soit presque 10%.

Les 4927 km parcourus entre la commande et la livraison , le manque de transparence sur les conditions d'utilisation du véhicule entre la commande et la livraison , l'absence de mention du kilométrage (serait-il non garanti) sur le certificat d'immatriculation ont provoqué une erreur des acquéreurs sur les caractéristiques du véhicule acquis, véhicule dont la valeur est indexée

s'agissant d'un véhicule d'occasion sur son kilométrage et son bon état d'entretien apparent.

Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté les consorts [F]-[P] de leur demande de nullité de la vente pour vice du consentement .

Il n'est pas contesté que la nullité de la vente entraîne son anéantissement rétroactif, la répétition du prix de vente.

-sur les dommages et intérêts

Le droit de demander la nullité d'un contrat n'exclut pas une action en réparation des préjudices subis.

Les acquéreurs demandent le remboursement des frais exposés qui suivent:

a) frais de gardiennage

Ils soutiennent avoir exposé des frais de gardiennage, produisent une facture Ital auto établie le 10 mai 2019 d'un montant de 15 300 euros correspondant aux frais exposés entre le 20 décembre 2017 et le 13 mai 2019, une facture 'gardiennage Ets Tournerioux ' établie le 30 novembre 2017 d'un montant de 708,83 euros correspondant aux frais exposés entre le 8 août 2017 et le 30 novembre 2017.

Les frais de gardiennage seront évalués au vu des factures produites à la somme de 16 008,83 euros.

b) frais d'assurance

Les acquéreurs produisent le contrat d'assurance souscrit.

Du fait de la nullité de la vente dont l'effet est rétroactif, ils sont fondés à demander le remboursement des cotisations qu'ils ont réglées à hauteur de 620 euros.

c) frais divers :

Les acquéreurs sollicitent des frais de mise en route de 790 euros, des frais de dépose mécanique Ital Auto de 821,83 euros, des frais d'intervention Ital auto de 67,25 et 90 euros, des frais de treuillage et de transport de 480 et 300 euros.

Il résulte des pièces produites que sont seuls justifiés les frais de dépose pour 821,83 euros (facture mentionnée par l'expert judiciaire).

Seule la somme de 821, 83 euros sera retenue.

e) préjudices de jouissance, préjudice moral

Le vendeur estime à tort que ce préjudice n'est pas établi.

Il résulte de l'immobilisation du véhicule depuis le 8 août 2017.

Le tribunal l' a évalué à juste titre à la somme de 1500 euros.

Le défaut de jouissance du camping-car acheté un prix conséquent et tombé en panne un peu plus d'une année après son acquisition à causé un préjudice moral à ses propriétaires , préjudice qui a été évalué par le premier juge à la somme de 500 euros, évaluation que la cour approuve.

-sur les autres demandes,

Le vendeur demande , à titre subsidiaire, la condamnation des consorts [F]-[P] à lui payer la somme de 4030 euros au titre du 'bénéfice de jouissance ' , ainsi qu'une ' somme à déterminer au titre des éventuelles dégradations et détériorations commises sur le véhicule qui doit faire l'objet de la restitution '.

En raison de l'effet rétroactif de l'annulation de la vente, le vendeur n'est pas fondé à obtenir une indemnité correspondant à l' utilisation de la chose par l'acquéreur.

Il sera également débouté de sa demande formée au titre d'éventuelles dégradations, le préjudice évoqué étant manifestement incertain.

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge de l'appelante .

Il est équitable de la condamner à payer aux intimés la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS :

statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

-dit irrecevable la demande d'irrecevabilité de l'appel incident formée par la société COCV

-infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a

-condamné la SAS YPO CAMP à restituer à Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M. [G] [F] la somme de 40.000 € en restitution du prix de vente

-dit que Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M.[G] [F] devront restituer le véhicule à la SAS YPO CAMP dès restitution du prix de vente,

-condamné la SAS YPO CAMP à verser à Madame [E] [F],Madame [W] [P] et M. [G] [F] la somme de 1500€ en réparation du trouble de jouissance,

-condamné la SAS YPO CAMP à verser à Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M. [G] [F]chacun la somme de 500 € en réparation du préjudice moral,

-débouté les parties de leurs plus amples demandes,

-condamné la SAS YPO CAMP à verser à Madame [E] [F], Madame [W] [P] et M. [G] [F] la somme de 4000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

-condamné la SAS YPO CAMP aux dépens incluant les frais d'expertise judiciaire,

Statuant de nouveau :

-prononce la nullité de la vente du camping-car immatriculé AC-9426 PW intervenue entre les consorts [F]-[P] et la société COCV Ypo Camp pour vice du consentement.

-condamne la société COCV Ypo Camp à payer aux consorts [F]-[P] les sommes de :

.16 008, 83 euros au titre des frais de gardiennage

. 821,83 euros au titre des frais de dépose mécanique

. 620 euros au titre des frais d'assurance

. 790 euros au titre des frais de carte grise

Y ajoutant :

-déboute les parties de leurs autres demandes

-condamne la société COCV Ypo Camp aux dépens d'appel

-condamne la société COCV Ypo Camp à payer aux consorts [F]-[P] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/01541
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;20.01541 ?
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