Ordonnance n° 8
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28 Février 2019
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No RG 19/00009
No Portalis DBV5-V-B7D-FVDU
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SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA BANQUE SOLFEA
C/
L... N..., X... Y... épouse N..., SELARL BALLY MJ
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R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DU PREMIER PRÉSIDENT
RÉFÉRÉ
Rendue publiquement le vingt huit février deux mille dix neuf par M. Thierry HANOUËT, premier président de la cour d'appel de Poitiers, assisté de Mme Inès BELLIN, greffier,
Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le sept février deux mille dix neuf, mise en délibéré au vingt huit février deux mille dix neuf.
ENTRE :
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA BANQUE SOLFEA
[...]
Représentant : Me Chantal ROUSSEAU, substituée par Me Jérémy DELAUNAY, de la SELARL BRT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
DEMANDEUR en référé ,
D'UNE PART,
ET :
Monsieur L... N...
[...]
Représentant : Me Grégory ROULAND, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Jean THIBAULT, de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS
Madame X... Y... épouse N...
[...]
Représentant : Me Grégory ROULAND, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Jean THIBAULT, de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS
SELARL BALLY MJ Es qualité de «Mandataire liquidateur» de la Société « NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES DE FRANCE, exerçant sous l'enseigne GROUPE SOLAIRE DE FRANCE »
[...]
non comparante, ni représentée
DEFENDEURS en référé ,
D'AUTRE PART,
Par acte d'huissier délivré les 16 et 18 janvier 2019, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société BANQUE SOLFEA, a fait assigner en référé les époux N... et la SELARL BALLY MJ, ès qualité de liquidateur de la société NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES, sur le fondement des articles 519 et 524 du code de procédure civile, afin que soit ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire dont est assorti le jugement du tribunal d'instance de JONZAC en date du 21 novembre 2018 dont elle a relevé appel le 27 décembre suivant.
À l'audience du 7 février 2019, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE expose que l'exécution provisoire aurait des conséquences manifestement excessives en ce que les époux N... risquent de ne pas pouvoir rembourser le montant des sommes en cause, en cas de réformation du jugement, compte tenu de la modestie de leurs ressources.
Subsidiairement, afin de préserver sa créance, elle demande à être autorisée à consigner les fonds auprès de la Caisse des dépôts et des consignations.
Les époux N... s'opposent aux demandes de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE. Ils soulignent qu'il n'est pas établi que l'exécution provisoire aurait des conséquences manifestement excessives pour le débiteur, autre que le simple risque de non-remboursement, ni que la situation financière du créancier soit compromise, étant observé qu'ils sont propriétaires de leur immeuble d'habitation.
Reconventionnellement, ils sollicitent la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 600 euros par application de l'article 700 du CPC.
Vu les conclusions en réplique ;
La SELARL BALLY MJ n'a pas comparu.
MOTIFS :
En droit, l'article 524 du code de procédure civile dispose que lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants:
1o Si elle est interdite par la loi ;
2o Si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522.
Le même pouvoir appartient, en cas d'opposition, au juge qui a rendu la décision.
Lorsque l'exécution provisoire est de droit, le premier président peut prendre les mesures prévues au deuxième alinéa de l'article 521 et à l'article 522.
Le premier président peut arrêter l'exécution provisoire de droit en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article 12 et lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives".
L'appréciation du bien-fondé de la décision entreprise ressort exclusivement de l'appréciation de la cour statuant au fond, le premier président ou son délégataire n'ayant pas à se prononcer sur le bien fondé ou le mal fondé des moyens développés par la requérante au soutien de son appel mais uniquement sur les conséquences susceptibles d'être engendrées par l'exécution provisoire sur sa situation, eu égard à ses facultés de paiement ou aux facultés de remboursement de son adversaire dans l'hypothèse d'une infirmation du jugement dont appel.
Les critères d'appréciation tenant aux facultés de paiement du débiteur ou aux facultés de remboursement du créancier sont alternatifs et non cumulatifs.
Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire,
Par jugement du 21 novembre 2018, le tribunal d'instance de JONZAC a, notamment, prononcé la nullité du contrat de vente du 29 novembre 2012 conclu entre les époux N... et la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE (NOUVELLE REGIE DES JONCTIONS DES ENERGIES), prononcé la nullité du contrat de crédit afférent conclu entre les époux N... et la société BANQUE SOLFEA, aux droits de laquelle vient la partie en demande, condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à leur restituer la somme de 11 179,98 euros, à payer la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et ce, sous le bénéfice de l'exécution provisoire.
Il appartient à la partie en demande d'établir que l'exécution du jugement en cause aurait pour elle des conséquences manifestement excessives. Il suffit simplement qu'elle établisse qu'il existe un risque réel de non-remboursement.
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE indique qu'au moment de l'octroi de leur prêt les époux N... déclaraient un revenu mensuel de 2650 euros, qu'en cas de réformation ils devront lui rembourser une somme représentant cinq mois de revenus nets du couple, ce qui représente une somme très importante.
Les époux N... disposaient de revenus relativement modestes au moment de la souscription du prêt et leurs ressources actuelles, comme leurs charges, sont indéterminées au jour ou il est statué (aucune pièce n'est produite). Ils étaient propriétaires de leur immeuble d'habitation au moment de la souscription du prêt et rembourseraient un emprunt immobilier à hauteur de la somme de 565 euros par mois.
Ils n'ont plus la charge du prêt souscrit auprès de la BANQUE SOLFEA, soit 241 euros par mois, en sorte que leur capacité à emprunter se trouve restaurée d'autant.
Le montant des condamnations est important au regard des revenus des époux N.... Cependant, rien n'indique qu'ils seraient dans l'incapacité de solliciter un concours bancaire pour faire face à la restitution des sommes en cause en cas de réformation du jugement, étant relevé que, propriétaires immobiliers, ils présentent des garanties sérieuses de paiement.
Il en résulte que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n'établit pas que les époux N... seraient dans l'incapacité de rembourser les sommes versées en cas d'infirmation du jugement, en sorte que l'exécution du jugement en cause ne peut entraîner pour elle des conséquences manifestement excessives.
Sur la demande de consignation,
Afin de préserver sa créance, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE demande à être autorisée à consigner les fonds auprès de la Caisse des dépôts et des consignations.
La possibilité d'aménager l'exécution provisoire n'est pas subordonnée à la condition que cette exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
Le premier président bénéficie d'un pouvoir discrétionnaire (dispense de motivation) pour ordonner une consignation fondée sur les articles 521 et 524 du code de procédure civile.
La consignation garantit tout autant l'exécution de la condamnation que la restitution des sommes en cause en cas de réformation du jugement dont appel en sorte qu'elle se présente comme une mesure opportune qu'il convient d'ordonner.
Sur les autres demandes ;
Eu égard à la solution apportée au litige il n'apparaît pas qu'il puisse être alloué aux défendeurs une somme quelconque à titre de dommages et intérêts.
Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Thierry HANOUËT, premier président, statuant par mise à disposition au greffe, en matière de référé et par ordonnance réputée contradictoire :
DEBOUTONS la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire assortissant le jugement du tribunal d'instance de JONZAC en date du 21 novembre 2018 ;
ORDONNONS à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de consigner auprès de la Caisse des Dépôts et des Consignations le montant des condamnations mises à sa charge par le jugement du tribunal d'instance de JONZAC, en date du 21 novembre 2018 rendu entre les parties, dans un délai de deux mois, et d'en justifier auprès de la partie en défense ;
DEBOUTONS au surplus ;
CONDAMNONS les époux N... aux dépens.
Et nous avons signé la présente ordonnance avec le greffier.
Le greffier, Le premier président,
Inès BELLIN Thierry HANOUËT