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25/11/2015 | FRANCE | N°14/03669

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 25 novembre 2015, 14/03669


ARRET No 791
R. G : 14/ 03669

X...
C/
SAS BERTIN NATIONAL
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2015

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/ 03669
Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 10 septembre 2014 rendu par le Conseil de prud'hommes des SABLES D'OLONNE.

APPELANTE :
Mademoiselle Bénédicte X...née le 21 Novembre 1975 à PARIS de nationalité Française ... 85220 LA CHAIZE GIRAUD
Représentée par Me Isabelle BLANCHARD de l

a SELARL ISABELLE BLANCHARD, substituée par Me Jimmy SIMONNOT, avocats au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

INTIMEE :
S...

ARRET No 791
R. G : 14/ 03669

X...
C/
SAS BERTIN NATIONAL
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2015

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/ 03669
Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 10 septembre 2014 rendu par le Conseil de prud'hommes des SABLES D'OLONNE.

APPELANTE :
Mademoiselle Bénédicte X...née le 21 Novembre 1975 à PARIS de nationalité Française ... 85220 LA CHAIZE GIRAUD
Représentée par Me Isabelle BLANCHARD de la SELARL ISABELLE BLANCHARD, substituée par Me Jimmy SIMONNOT, avocats au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

INTIMEE :
SAS BERTIN NATIONAL No SIRET : 387 935 505 Rue des Electriciens ZI La Bégaudière 85800 ST GILLES CROIX DE VIE
Représentée par Me Pierre LUBET, substitué par Me Marie JOURNOT, avocats au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Octobre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Eric VEYSSIERE, Président Monsieur Jean-Paul FUNCK-BRENTANO, Conseiller Monsieur Jean-Michel AUGUSTIN, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Christine PERNEY

ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
-Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Eric VEYSSIERE, Président, et par Madame Christine PERNEY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE

Mme Bénédicte X...a été embauchée par la société Naulet en qualité d'aide prothésiste dentaire dans le cadre de deux contrats de travail à durée déterminée dont le premier a débuté le 4 avril 2005 et la relation de travail s'est poursuivie à compter du 17 avril 2006 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée.
Le contrat de travail de Mme Bénédicte X...a été transféré au profit de la société Bertin National en octobre 2006.
La société Bertin National exploite un laboratoire de prothèse dentaire.
Elle appartient au groupe Bertin et la convention collective des prothésistes dentaires s'applique dans l'entreprise.
Le 29 mars 2012, la société Bertin National a convoqué Mme Bénédicte X...à un entretien préalable à son éventuel licenciement. Cet entretien a eu lieu le 18 avril 2012 et à cette occasion la société Bertin National a proposé à Mme Bénédicte X...d'adhérer à un contrat de sécurisation professionnelle.
Mme Bénédicte X...a adhéré à ce contrat le 4 mai 2012.
Le 9 mai 2012, la société Bertin National a notifié à Mme Bénédicte X...la rupture d'un commun accord de son contrat de travail du fait de son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle.
Le 19 avril 2013, Mme Bénédicte X...a saisi le conseil de prud'hommes des Sables d'Olonne aux fins, sous le bénéfice de l'exécution provisoire du jugement à intervenir et en l'état de ses dernières prétentions, de voir :- à titre principal condamner la société Bertin National à lui payer la somme de 20 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- à titre subsidiaire condamner la société Bertin National à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du non respect des critères d'ordre des licenciements,- en tout état de cause :
- dire que les sommes allouées produiront intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif de l'instance pour celles ayant un caractère de salaire ou d'accessoire de salaire, et à compter de la décision à intervenir pour les autres sommes, et que ces intérêts seront capitalisés par application de l'article 1154 du code civil,- fixer son salaire moyen brut à la somme de 1 543, 96 euros,- condamner la société Bertin National à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- condamner la société Bertin National aux entiers dépens.
Par jugement en date du 10 septembre 2014, le conseil de prud'hommes des Sables d'Olonne a :- débouté Mme Bénédicte X...de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- dit que les règles relatives à l'ordre des licenciements n'ont pas été respectées par la société Bertin National et condamné cette dernière à payer à Mme Bénédicte X...les sommes suivantes : * 6 176 euros à titre d'indemnité en réparation de son préjudice pour perte injustifiée de son emploi, * 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter de la notification de sa décision et que ces intérêts seront capitalisés par application de l'article 1154 du code civil,- débouté la société Bertin National de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné la société Bertin National aux entiers dépens.
Le 30 septembre 2014, Mme Bénédicte X...a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions reçues au greffe le 14 septembre 2015, et reprises oralement à l'audience, Mme Bénédicte X...demande à la cour :- d'infirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a retenu le non respect par l'employeur des critères d'ordre des licenciements et statuant à nouveau :- à titre principal, de condamner la société Bertin National à lui payer la somme de 20 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- à titre subsidiaire, de condamner la société Bertin National à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du non respect des critères d'ordre des licenciements,- en tout état de cause :- condamner la société Bertin National à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et une somme du même montant sur ce même fondement au titre des frais irrépétibles de l'appel,- condamner la société Bertin National aux entiers dépens.
Par conclusions déposées au greffe le 11 septembre 2005, et développées oralement à l'audience, la société Bertin National sollicite de la cour qu'elle confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit qu'elle n'avait pas respecté les règles relatives à l'ordre des licenciements et l'a condamnée à ce titre à payer à Mme Bénédicte X...la somme de 6 176 euros, déboute Mme Bénédicte X...de l'ensemble de ses demandes, et condamne cette dernière à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle sollicite en outre de la cour qu'elle rejette des débats les pièces no 63 et 64 que Mme Bénédicte X...lui a communiquées tardivement. Mme Bénédicte X...ne conteste pas la communication tardive de ces deux pièces.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées et oralement reprises à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de la société Bertin National tendant à voir écarter des débats les pièces no 63 et 64 produites par la salariée
L'article 16 alinéas 1et 2 du code de procédure civile énonce : " Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ".
Or en l'espèce, Mme Bénédicte X...a produit aux débats les deux nouvelles pièces dont s'agit l'avant-veille de l'audience, ne permettant pas ainsi à la société Bertin National sinon d'en prendre connaissance du moins de vérifier l'exactitude de leur contenu et d'y apporter un commentaire précis.
Dans ces conditions la cour ordonne le rejet de ces deux pièces des débats.

Sur la demande de Mme Bénédicte X...tendant à voir juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse
Mme Bénédicte X...soutient que lorsque, comme en l'espèce, la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle, l'employeur doit avoir exposé au salarié concerné le ou les motifs économiques de cette rupture au plus tard au jour de l'adhésion de ce salarié à ce contrat.
Elle ajoute qu'en l'espèce tel n'a pas été le cas, son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle étant intervenue le 4 mai 2012 et l'information relative au motif économique de la rupture ne lui ayant été donnée à titre personnel que le 9 mai suivant.
L'employeur objecte que, comme l'ont relevé les premiers juges, Mme Bénédicte X...a nécessairement eu connaissance des motifs économiques à l'origine de la rupture de son contrat de travail puisque d'une part les procès-verbaux des réunions des représentants du personnel relatives au projet de restructuration et de compression des effectifs ont été mis à la disposition de l'ensemble des salariés et d'autre part les motifs économiques de la rupture ont été exposés à la salariée lors de l'entretien préalable et donc avant qu'elle n'ait adhéré au contrat de sécurisation professionnel.
Mme Bénédicte X...évoque également au titre de cette demande, l'absence de difficultés économiques tant au niveau de la société Bertin National qu'au niveau du groupe auquel celle-ci appartient.
L'employeur fait valoir au contraire que non seulement aucune des entités du groupe Bertin n'avait réalisé de bénéfices en 2011 mais en outre que toutes étaient déficitaires et que leurs pertes cumulées s'élevaient à plus de 2 millions d'euros.
Mme Bénédicte X...fait valoir enfin que la société Bertin National a manqué à son obligation de reclassement à son égard, précisant d'une part qu'elle n'a jamais été informée par l'employeur de l'existence de trois postes disponibles au sein du groupe Bertin au jour de la rupture de son contrat de travail et d'autre part qu'une autre salariée de l'entreprise, Mme A..., a été affectée sur son poste de travail.
L'employeur objecte qu'il a respecté son obligation de reclassement vis à vis de Mme Bénédicte X...et que si certes il existait trois postes disponibles au sein du groupe Bertin, aucun de ces postes ne correspondait au profil professionnel de Mme Bénédicte X.... Il ajoute que Mme A...n'a pas été affectée sur le poste de Mme Bénédicte X...mais a retrouvé le sien après un congé parental.
Sur le premier moyen de la salariée, il est constant qu'elle a adhéré le 4 mai 2012 au contrat de sécurisation professionnelle que lui a proposé l'employeur.
Il est de principe que l'employeur doit notifier les motifs économiques de la rupture du contrat de travail du salarié qui accepte le contrat de sécurisation professionnelle par un document écrit, soit remis contre décharge soit envoyé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au plus tard au moment de l'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle.
Cette notification permet en effet de porter à la connaissance du salarié concerné les raisons de la rupture de son contrat de travail qui va découler de son acceptation du contrat de sécurisation professionnelle.
Aussi en vertu de ce principe la société Bertin National devait-elle avoir notifié par écrit à Mme Bénédicte X...les motifs économiques de la rupture de son contrat de travail au plus tard le 4 mai 2012.
L'information des représentants du personnel dans l'entreprise ou la mise à disposition de l'ensemble des salariés des procès-verbaux des réunions des représentants du personnel ayant eu pour objet le projet de restructuration et de compression des effectifs dont fait état l'employeur ne sauraient satisfaire à l'obligation qui pèse sur lui quant à la notification individuelle des motifs économiques de la rupture du contrat de travail du salarié qui accepte le contrat de sécurisation professionnelle.
Par ailleurs la société Bertin National ne justifie aucunement que, comme elle l'allègue, elle a informé Mme Bénédicte X...des motifs économiques en raison desquels son contrat de travail serait rompu dans l'hypothèse de son acceptation du contrat de sécurisation professionnelle.
Dans ces conditions le licenciement de Mme Bénédicte X...se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En vertu des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail lesquelles sont applicables en l'espèce, et compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme Bénédicte X..., de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer la somme de 11 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dépens et les frais irrépétibles
Mme Bénédicte X...ayant obtenu gain de cause, les dépens tant de première instance que d'appel seront supportés par la société Bertin National.
En outre il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme Bénédicte X...les frais par elle exposés et non compris dans les dépens, et il sera donc mis à la charge de la société Bertin National une indemnité de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l'appel, la cour infirmant par ailleurs le jugement déféré sur ce point et allouant à Mme Bénédicte X...une indemnité de 1 200 euros sur ce même fondement au titre des frais irrépétibles de première instance.

PAR CES MOTIFS
LA COUR,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la société Bertin National de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamné cette dernière aux entiers dépens ;
Et statuant à nouveau :
Ordonne le rejet des pièces no 63 et 64 produites aux débats par Mme Bénédicte X...;
Condamne la société Bertin National à payer à Mme Bénédicte X...la somme de 11 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société Bertin National à verser à Mme Bénédicte X...la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance ;
Et y ajoutant :
Condamne la société Bertin National à verser à Mme Bénédicte X...la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l'appel ainsi qu'aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/03669
Date de la décision : 25/11/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2015-11-25;14.03669 ?
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