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26/02/2008 | FRANCE | N°114

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Ct0193, 26 février 2008, 114


IG/CP

COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRET DU 26 FEVRIER 2008

ARRET N 114

AFFAIRE N : 07/00343

et 07/00490

AFFAIRE : UDAF DES DEUX-SEVRES C/ Serge X...

APPELANTE ET INTIMEE :

UDAF DES DEUX-SEVRES

...

BP 8519

79025 NIORT CEDEX 09

Représenté par Me Servane JULLIE (avocat au barreau de NANTES)

Suivant déclaration d'appel du 05 janvier 2007 d'un jugement au fond du 28 novembre 2006 rendu par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE NIORT.

INTIME ET APPELANT :

Monsieur Serge X...


42 Cours du Maréchal Foch

33000 BORDEAUX

Comparant

assisté de Me Thierry Y... (avocat au barreau de POITIERS)

Suivant déclaration d'appel du 06 ...

IG/CP

COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRET DU 26 FEVRIER 2008

ARRET N 114

AFFAIRE N : 07/00343

et 07/00490

AFFAIRE : UDAF DES DEUX-SEVRES C/ Serge X...

APPELANTE ET INTIMEE :

UDAF DES DEUX-SEVRES

...

BP 8519

79025 NIORT CEDEX 09

Représenté par Me Servane JULLIE (avocat au barreau de NANTES)

Suivant déclaration d'appel du 05 janvier 2007 d'un jugement au fond du 28 novembre 2006 rendu par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE NIORT.

INTIME ET APPELANT :

Monsieur Serge X...

42 Cours du Maréchal Foch

33000 BORDEAUX

Comparant

assisté de Me Thierry Y... (avocat au barreau de POITIERS)

Suivant déclaration d'appel du 06 février 2007 d'un jugement au fond du 28 novembre 2006 rendu par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE NIORT.

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Président : Yves DUBOIS, Président

Conseiller : Isabelle GRANDBARBE, Conseiller

Conseiller : Jean Yves FROUIN, Conseiller

Greffier : Annie FOUR, Greffier, uniquement présent aux débats,

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 janvier 2008,

Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries.

L'affaire a été mise en délibéré et les parties avisées de la mise à disposition de l'arrêt au Greffe le 26 février 2008.

Ce jour a été rendu contradictoirement et en dernier ressort, l'arrêt suivant :

ARRÊT :

M. X..., qui était directeur de l'Union Départementale des Associations Familiales (UDAF) de la Charente depuis le 1er janvier 2001, a été engagé le 1er novembre 2004 en qualité de directeur, par permutation de son poste avec celui du directeur des Deux-Sèvres, par l'UDAF des Deux-Sèvres (UDAF 79), qui reprenait son contrat de travail ; il a été licencié le 7 février 2006 sans préavis ni indemnité, après mise à pied conservatoire du 26 janvier 2006.

Par jugement du 28 novembre 2006, le Conseil des Prud'hommes de Niort, considérant que le licenciement n'était pas justifié par une faute grave mais avait une cause réelle et sérieuse, a prononcé l'annulation de la mise à pied et a condamné l'employeur à payer au salarié les sommes suivantes :

- indemnité de préavis :

33 959,88 €

- congés payés correspondants :

3 395,98 €

- indemnité conventionnelle de licenciement :

31 531,65 €

- frais irrépétibles :

200 €.

L'UDAF 79 a régulièrement interjeté appel le 05 janvier 2007 de cette décision dont elle sollicite l'infirmation en ce que la faute grave n'a pas été retenue comme motif de licenciement; elle demande à la cour de constater: "que M. X... s'est enferré dans une attitude de dénigrement et de dévalorisation constante tant de ses collaborateur que des représentants du personnel et des partenaires de l'UDAF, malgré l'intervention de la Présidence de l'UDAF"; "que le comportement de M. X... est d'autant plus grave, compte tenu de ses fonctions de directeur" "que les missions qu'il lui appartenait de mener à bien, en qualité de directeur, n'excusent, ni ne légitiment de tels agissements"; elle entend voir débouter M. X... de toutes ses demandes et sollicite la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

M. X... a formé appel le 06 février 2007 du jugement entrepris dont il sollicite l'infirmation partielle ; il demande à la cour de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, de porter le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à la somme de 84 899,70 €, de lui allouer les sommes suivantes, outre celles qui lui ont été octroyées :

- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

70 000 €

- dommages et intérêts pour procédure vexatoire :

15 000 €

- rappel de congés payés pour la période de janvier 2003 à septembre 2004 :

8 085,68 €

et de condamner l'employeur à la remise sous astreinte de documents conformes et à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile. Il expose que la convention collective nationale applicable prévoit que le licenciement doit être précédé de 2 sanctions préalables, excepté le licenciement pour faute grave ou lourde, de sorte que le premier juge, qui a retenu l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, n'a pas tiré toutes les conséquences de sa qualification en disant le licenciement fondé ; il conteste sur le fond les faits, qui lui sont reprochés, exposant qu'avant son arrivée, "l'UDAF 79 "vivait : "un désastre comptable et financier" nécessitant des décisions ; qu'il a prises.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Vu, développées oralement à l'audience, les conclusions reçues au greffe le 3 juillet 2007 pour l'appelante et le 3 décembre 2007 pour l'intimé ;

Il y a lieu de prononcer la jonction des procédures d'appel ;

La lettre de rupture formule les griefs suivants à l'encontre de M. X..., qui a été mis à pied à titre conservatoire le 26 janvier 2006 :

"1- Attitude blessante, humiliante et de dénigrement constant que vous adoptez à l'égard des salariés" : le président de l'UDAF 79, M. Z..., rappelle que le 10 janvier 2006, il a reçu des salariés un courrier dénonçant les méthodes de management de M. X..., notamment "le climat de suspicion et de contrôle permanent, l'attitude irrespectueuse et humiliante, les critiques incessantes", que les instantes représentatives du personnel l'avait déjà alerté, qu'un audit avait été fait en avril 2005 soulignant l'absence de communication, dont souffraient les salariés de la part du directeur, que, malgré cet audit, il a constaté la persistance de l'attitude de M. X..., son comportement inadmissible envers ses directeurs adjoints, Mme A... et M. B..., et envers ses collaborateurs pendant les réunions d'encadrement, les propos humiliants tenus ;

"2- Propos injurieux tenus lors de manifestations extérieures, en votre qualité de directeur de l'UDAF excédant amplement votre liberté d'expression": il est reproché à M. X... d'avoir tenu, au cours d'une réunion des directeurs des UDAF courant novembre 2005, des propos inadmissibles envers son prédécesseur, en critiquant ses compétences devant des salariés, des bénévoles et les directeurs et d'avoir accablé de reproches des partenaires des UDAF comme la société SIGMA, allant jusqu'à traiter de "malfaisant" son représentant ;

"3- Echec total dans vos relations avec les instances représentatives du personnel": il est rappelé que l'inspecteur du travail a été saisi par les représentants du personnel sur les dysfonctionnements que génère son attitude, qu'il a tenu des propos particulièrement blessants ou déstabilisants à des représentants du personnel dans un contexte qui est précisé dans la lettre, qu'à ce jour, aucune communication n'est plus possible au sein du comité d'entreprise.

Il résulte de l'audit réalisé par l'UNAF les 26 et 27 octobre 2004, à la demande du directeur sortant et de M. X..., que l'UDAF 79 était bien organisée et dynamique, qu'elle était reconnue et appréciée par les partenaires institutionnels et associatifs mais qu'elle devait poursuivre sa restructuration en concentrant ses efforts prioritairement sur le service comptable, que les procédures comptables devaient être revues entièrement, que l'association était largement endettée. M. X... expose qu'en réalité, l'UDAF 79 était largement déficitaire et sous la menace d'un refus de certification des comptes de la part du commissaires aux comptes, ainsi qu'il résulte du bilan 2004 et d'un courrier du commissaires aux comptes, qu'elle était l'objet courant 2005 de plusieurs lettres des juges des tutelles lui rappelant ses obligations et l'informant de leur refus de continuer à lui confier des mesures tant que les demandes en cours n'étaient pas traitées. Il présente un rapport de la comptable, Mme C..., de septembre 2005 démontrant les mesures prises pour faire face à ces dysfonctionnements graves, notamment en allouant au service les moyens nécessaires à son bon fonctionnement. Il produit par ailleurs le courrier de l'inspecteur du travail du 15 février 2006 constatant l'absence de délit d'entrave du comité d'entreprise. Il démontre également les difficultés rencontrées avec le logiciel de la société SYGMA, qu'il a critiqué lors de la réunion des directeurs des UDAF. Il justifie enfin qu'il a du mettre fin à juste titre à un usage dans l'entreprise sur les congés payés, ce qui a contribué à sa mauvaise réputation.

Si M. X... démontre ainsi qu'il a pris ses fonctions dans des conditions difficiles et qu'il a du faire face à une situation nécessitant des réorganisations et des décisions peu populaires, il demeure qu'il a agi de façon brutale et totalement inhumaine.

La cour relève :

- que l'audit effectué à sa prise de fonction mentionnait expressément le souci permanent de transparence, d'information et de communication ainsi que l'écoute et le dialogue pratiqués et appréciés du personnel dans le fonctionnement quotidien de l'UDAF 79,

- que le bureau de l'association avait attiré son attention dans sa séance du 3 mars 2005 sur les difficultés humaines présenté par son projet de réorganisation des services,

- que néanmoins, M. X... imposait le 8 mars 2005 son organigramme comportant des modifications de postes très importantes sans aucune concertation préalable, ni préparation des intéressés, notamment de sa directrice adjointe, Mme A..., qui était rétrogradée à un poste de chef de service,

- que cette décision entraînait une vive réaction du personnel dénonçant, dans un tract, "une réorganisation à la hussarde" et demandant, dans une pétition, le respect des valeurs humaines défendues par les associations familiales, que le président de l'UDAF intervenait auprès du personnel et faisait une mise en garde écrite au directeur ;

- qu'un nouvel audit était diligenté par l'UNAF en avril 2005 confirmant le climat d'inquiétude et la nécessité impérative pour M. X..., même si certains salariés appréciaient ses qualités d'organisateur, de retrouver la confiance de l'ensemble des salariés, beaucoup d'entre eux étant décrits comme étant en souffrance, en associant les cadres à la réorganisation des services, en communiquant avec le personnel, en faisant circuler l'information,

- que la situation a néanmoins empiré allant jusqu'à un mouvement de grève le 26 avril 2005, action engagée pour la 1ère fois dans l'entreprise,

- que dans un courrier adressé au président de l'UDAF 79 en mai 2005, Mme A... faisait état de l'absence d'information sur le devenir du projet ayant donné lieu à la protestation du mois de mars précédent et sur l'incertitude quant à sa situation personnelles ;

- qu'en juin 2005, plusieurs cadres se plaignaient de la persistance de l'absence de communication et de concertation,

- que le 12 décembre 2005, Mme A... et M. B..., directeurs adjoints, alertaient à nouveau le président sur le mauvais climat social,

- que le comité d'entreprise se plaignait d'entrave de sa part,

- que le 15 décembre 2005, le directeur de l'UDAF 45 dénonçait auprès du président de l'UDAF 79 les propos tenus par M. X..., à qui il écrivait également, lors de leur rencontre nationale, au sujet de son prédécesseur, dont il remettait publiquement en cause les compétences et au sujet de la société SIGMA, dont le directeur était traité de malfaisant,

- que le 9 janvier 2006, le président de l'UDAF 79 était interpellé une nouvelle fois par les salariés sur la dégradation des conditions de travail, l'absence de discussion, le climat de suspicion entretenu par le directeur, ses propos humiliants et que le président procédait à l'audition de l'ensemble du personnel,

- que dans une lettre du 25 janvier 2006, M. B..., directeur adjoint depuis 1993, exposait au président la dégradation des relations de travail avec M. X..., qui le traitait de façon si humiliante en l'abaissant ("Vous avez encore quelques échelons à gravir pour être compétent"), ou en faisant passer ses ordres par sa secrétaire, en ne lui donnant aucune délégation claire ou en ne répondant pas à ses questions, qu'il en est arrivé à douter de ses capacités, qu'il a du prendre des antidépresseurs et qu'il a eu un arrêt de travail de 3 semaines,

- que par lettre du 1er février 2006, 7 cadres confirmaient les dire de M. B... et décrivaient le comportement dénigrant et humiliant de M. X..., qui remettait notamment en cause leurs compétences devant le personnel,

- que les représentants du personnel dénonçaient par écrit son comportement à leur égard et saisissaient l'inspecteur du travail.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. X... a bien commis des fautes dans sa mission de direction de l'UDAF 79, qui étaient d'une gravité telle que, contrairement à l'appréciation du premier juge, il ne pouvait pas encore être maintenu en poste pendant les 6 mois de son préavis, la chronologie des faits démontrant la vitesse à laquelle le climat social se dégradait et le témoignage de M. B... étant édifiant sur son attitude, qui était proche du harcèlement moral à l'égard de ses collaborateurs, de sorte que l'association ne pouvait pas laisser perdurer les faits.

Il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris et de débouter M. X... de ses demandes afférentes au licenciement.

Sur le rappel de congés payés pour la période de janvier 2003 à septembre 2004 d'un montant de 8 085,68 €, le premier juge a rejeté cette demande en considérant qu'elle était afférente au contrat de travail liant M. X... à l'UDAF 16. Le salarié soutient que la créance est due par l'UDAF 79 à qui son contrat de travail a été transféré contractuellement. Il résulte en effet du contrat de travail que l'UDAF 79 a accepté de reprendre le contrat de travail de M. X... avec application "à titre volontaire et conventionnel, des dispositions de l'article L 122-12 al 2 du Code du travail". Par conséquent, en vertu de son engagement, l'UDAF 79 devait reprendre toutes les obligations de l'UDAF 16 envers le salarié, en particulier sur le solde des congés payés. Il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris et de faire droit à la demande de ce chef.

M. X..., qui succombe à titre principal, supporte les dépens ; néanmoins, compte tenu du bien fondé d'un chef de ses demandes, il sera dispensé du paiement à la partie d'une indemnité en application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Prononce la jonction des procédures no 07/490 et 07/343 ;

Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau :

Déboute M. X... de ses demandes afférentes à son licenciement pour faute grave ;

Condamne l'UDAF 79 à payer à M. X... la somme de 8 085,68 € à titre de rappel de congés payés ;

Condamne M. X... aux dépens et le dispense du paiement de l'indemnité prévue à l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Ainsi prononcé et signé par Monsieur Yves DUBOIS, Président de Chambre, assisté de Madame Annie FOUR, Greffier.

Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Ct0193
Numéro d'arrêt : 114
Date de la décision : 26/02/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Niort, 28 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2008-02-26;114 ?
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