JYF/CP
COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRET DU 26 FEVRIER 2008
ARRET N 109
AFFAIRE N : 06/00892
AFFAIRE : Madeleine X... pris(e) en sa qualité de responsable
de la Librairie GREFINE C/ Isabelle DE Y...
APPELANTE :
Madame Madeleine X..., pris(e) en sa qualité de responsable de la Librairie GREFINE
...
17000 LA ROCHELLE
Représentée par Me Luc-Pierre BARRIERE (avocat au barreau de LA ROCHELLE) substitué par Me BOUQUET
Suivant déclaration d'appel du 20 mars 2006 d'un jugement au fond du 01 mars 2006 rendu par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE ROCHEFORT SUR MER.
INTIMÉE :
Madame Isabelle DE Y...
...
17000 LA ROCHELLE
Représenté par Me Patricia GUILLAUME-ENNOUCHI (avocat au barreau de NIORT)
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Président : Yves DUBOIS, Président
Conseiller : Isabelle GRANDBARBE, Conseiller
Conseiller : Jean Yves FROUIN, Conseiller
Greffier : Christine PERNEY, Greffier, uniquement présent aux débats,
DÉBATS :
A l'audience publique du 15 janvier 2008,
Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries.
L'affaire a été mise en délibéré et les parties avisées de la mise à disposition de l'arrêt au Greffe le 26 février 2008.
Ce jour a été rendu contradictoirement et en dernier ressort, l'arrêt suivant :
ARRÊT :
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme De Y..., engagée à compter du 1er juin 1985 en qualité de vendeuse par Mme X..., a été licenciée pour motif économique, le 1er juillet 2003, à son retour de congé parental d'éducation. Elle a saisi le conseil de prud'hommes de La Rochelle d'une contestation du bien-fondé de son licenciement, puis, après s'être désistée de sa demande, a saisi le conseil de prud'hommes de Rochefort, en application de l'article 47 du nouveau code de procédure civile, de la même demande, après que M. A..., époux de la défenderesse et conseiller prud'homme au conseil de prud'hommes de La Rochelle se soit présenté devant ce conseil pour représenter son épouse. Le conseil de prud'hommes de La Rochelle a rendu deux décisions de caducité, respectivement le 12 juillet 2004 et le 10 octobre 2005.
Par jugement en date du 1er mars 2006, le conseil de prud'hommes de Rochefort a écarté les exceptions de procédure soulevées par Mme X..., dit que le licenciement de Mme De Y... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et condamné Mme X... à payer à Mme De Y... une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Mme X... a interjeté appel du jugement dont elle sollicite l'infirmation. Elle conclut, à titre principal, à la péremption de l'instance et, subsidiairement, au rejet de la demande de Mme De Y... en faisant valoir que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse. Elle sollicite la condamnation de Mme De Y... à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Mme De Y... conclut à la confirmation du jugement attaqué et à la condamnation de Mme X... à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Sur la péremption de l'instance
Sans que l'on comprenne très bien l'argumentation dans son ensemble, Mme X... sollicite, à titre principal, dans le dispositif de ses écritures, que soit constatée la péremption de l'instance, mais fait également valoir dans les motifs des mêmes écritures, l'inapplicabilité de l'article 47 du nouveau code de procédure civile, la litispendance, et l'unicité de l'instance.
Il ressort des éléments constants du dossier :
- que Mme De Y... a saisi le conseil de prud'hommes de Rochefort, le 9 juillet 2004, d'une demande dirigée contre Mme X..., alors qu'une instance était pendante entre les mêmes parties devant le conseil de prud'hommes de La Rochelle
- que, le 12 juillet 2004, le conseil de prud'hommes de La Rochelle a rendu une décision de caducité de la demande.
Or, ne heurte pas le principe de l'unicité de l'instance une seconde demande introduite devant un autre conseil de prud'hommes avant que le conseil de prud'hommes initialement saisi ait constaté son dessaisissement.
Par ailleurs, la caducité de la demande, intervenue en vertu de l'article R. 516-16 du code du travail, emporte extinction de l'instance et seul le demandeur à l'instance peut réitérer, une fois, la même demande en application du même texte.
Il suit de ces règles que, ni l'unicité de l'instance, ni la litispendance ne peuvent être opposées à Mme De Y... dès lors qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes de Rochefort avant le dessaisissement du conseil de prud'hommes de La Rochelle, et que ce dernier s'est trouvé dessaisi par l'effet de la déclaration de caducité.
Reste à déterminer si l'article 47 du nouveau code de procédure civile était applicable, en l'espèce.
Aux termes de ce texte, lorsqu'un magistrat ou un auxiliaire de justice est partie à un litige qui relève de la compétence d'une juridiction dans le ressort de laquelle celui-ci exerce ses fonctions, le demandeur peut saisir une juridiction située dans un ressort limitrophe.
Il résulte des pièces du dossier et des termes du jugement du conseil de prud'hommes de Rochefort que lors de la tentative de conciliation devant le conseil de prud'hommes de La Rochelle, M. A... s'est présenté à l'audience avec un pouvoir à l'effet de représenter son épouse. Par là même, M. A... s'est comporté comme une partie au litige au sens de l'article 47 du nouveau code de procédure civile. Or, M. A... est conseiller prud'homme au conseil de prud'hommes de La Rochelle.
En conséquence, les conditions d'application de l'article 47 du nouveau code de procédure civile étaient réunies, et Mme De Y... était bien fondée à saisir une juridiction située dans un ressort limitrophe, tel que le conseil de prud'hommes de Rochefort.
Il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a écarté les exceptions de procédure soulevées par Mme X..., étant précisé qu'il n'est aucunement justifié de la péremption de l'instance.
Sur le licenciement
Il résulte de l'article L. 122-14-2 du code du travail que, lorsque le licenciement est prononcé pour motif économique, la lettre de licenciement doit énoncer les motifs économiques invoqués par l'employeur, ce qui implique qu'elle doit comporter l'énonciation de la raison économique du licenciement (difficultés économiques, mutations technologiques, ou réorganisation de l'entreprise) et l'énonciation de son incidence sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié (suppression de son emploi, transformation de son emploi, ou modification de son contrat de travail). A défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En l'espèce, la lettre de licenciement énonce que le licenciement économique de Mme De Y... a été prononcé au motif qu'"il n'est pas possible de rajouter une personne à l'effectif actuel, composé comme vous le savez d'une comptable vendeuse, d'une vendeuse à plein temps, et d'une vendeuse à tiers temps".
Il apparaît ainsi que la lettre de licenciement ne mentionne ni la raison économique du licenciement, ni son incidence sur l'emploi ou le contrat de travail de la salariée.
En conséquence, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Il importe, en conséquence de confirmer en toutes ses dispositions le jugement attaqué.
Sur la demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
En application de ce texte, il convient de condamner Mme X..., partie perdante et tenue aux dépens, à payer à Mme De Y..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, tels les honoraires d'avocat, une somme qui sera déterminée dans le dispositif ci-après.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Rochefort en date du 1er mars 2006,
Y ajoutant,
Condamne Mme X... à payer à Mme De Y... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne Mme X... aux dépens d'appel.
Ainsi prononcé et signé par Monsieur Yves DUBOIS, Président de Chambre, assisté de Madame Christine PERNEY, Greffier.
Le Greffier, Le Président.