La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/12/2007 | FRANCE | N°07/01730

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Ct0173, 11 décembre 2007, 07/01730


JYF/CP

COUR D'APPEL

DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRET DU 11 DECEMBRE 2007

ARRET N

AFFAIRE N : 07/01730

AFFAIRE : LAITERIE DE MONTAGNE D'AUZANCES C/ Gérard X...

DEMANDEUR :

LAITERIE DE MONTAGNE D'AUZANCES

...

23700 AUZANCES

Représenté par la SCP MUSEREAU-MAZAUDON (avoués à la Cour)

Assisté de Me Y... (avocat à Montluçon)

Suivant déclaration de saisine du 15 Mai 2007 après arrêt de la Cour de Cassation du 21 Février 2007 cassant et annulant l'arrêt rendu par la COUR D'APPEL DE LIMOGES

le 07 MARS 2005 sur appel d'un jugement du 26 juillet 2004 rendu par le Conseil de Prud'hommes de GUERET ;

DEFENDEUR :

Monsieur Gérard X...

....

JYF/CP

COUR D'APPEL

DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRET DU 11 DECEMBRE 2007

ARRET N

AFFAIRE N : 07/01730

AFFAIRE : LAITERIE DE MONTAGNE D'AUZANCES C/ Gérard X...

DEMANDEUR :

LAITERIE DE MONTAGNE D'AUZANCES

...

23700 AUZANCES

Représenté par la SCP MUSEREAU-MAZAUDON (avoués à la Cour)

Assisté de Me Y... (avocat à Montluçon)

Suivant déclaration de saisine du 15 Mai 2007 après arrêt de la Cour de Cassation du 21 Février 2007 cassant et annulant l'arrêt rendu par la COUR D'APPEL DE LIMOGES le 07 MARS 2005 sur appel d'un jugement du 26 juillet 2004 rendu par le Conseil de Prud'hommes de GUERET ;

DEFENDEUR :

Monsieur Gérard X...

...Ecole de la Garde

23000 GUERET

Représenté par Me MAZURE (avocat au barreau de Guéret)

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

Président : Yves DUBOIS, Président

Conseiller : Isabelle GRANDBARBE, Conseiller

Conseiller : Jean Yves FROUIN, Conseiller

Greffier : Christine PERNEY, Greffier uniquement présent(e) aux débats,

DEBATS :

A l'audience publique du 06 Novembre 2007,

Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries.

Vu les conclusions écrites du Ministère Public,

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 11 Décembre 2007

Ce jour a été rendu, Contradictoire et en dernier ressort, l'arrêt suivant :

ARRET :

EXPOSÉ DU LITIGE

M. X... a été engagé à compter du 3 juin 1964 à Busseau sur Creuse en qualité d'agent administratif par la société Compagnie des fromages. L'activité collecte de lait et négoce producteurs de la société Compagnie des fromages a été reprise, le 1er juillet 2003, par la société Laiterie de montagne d'Auzances. Par lettre du 22 septembre 2003, cette dernière société a fait savoir à M. X... dont le contrat de travail lui avait été transféré en application de l'article L. 122-12, aliéna 2 du code du travail, qu'à compter du 1er janvier 2004, son lieu de travail serait situé à Auzances et non plus à Busseau sur Creuse. M. X... a répondu, le 10 octobre 2003, qu'il refusait cette mutation, puis a saisi la juridiction prud'homale, le 26 janvier 2004, pour demander le paiement de diverses sommes, notamment à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'arrêt de la cour d'appel de Limoges en date du 7 mars 2005 qui, infirmant le jugement du conseil de prud'hommes de 26 juillet 2004, avait rejeté l'ensemble des demandes de M. X..., a été cassé, le 21 février 2007(no 06-40.257), sauf en ce que M. X... avait été débouté de ses demandes au titre de solde de RTT et de congés payés, la présente cour d'appel étant désignée comme cour d'appel de renvoi.

M. X... soutient que la société Laiterie montagne d'Auzances ne pouvait lui imposer une modification de son contrat de travail, que la rupture du contrat de travail lui incombe et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et il conclut à la condamnation de la société à lui payer les sommes de 3 273, 44 euros et 18 020, 20 euros à titre respectivement d'indemnité de préavis et d'indemnité de licenciement, celle de 24 550, 80 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et celle de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct de la rupture du contrat de travail.

La société Laiterie fromages d'Auzances conclut au rejet de l'ensemble des demandes de M. X... et à sa condamnation à lui payer la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la qualification de la rupture

Il est de règle que l'employeur ne peut modifier le contrat de travail sans l'accord du salarié et qu'en cas de modification unilatérale imposée par l'employeur au salarié, celui-ci est fondé à faire valoir qu'en agissant ainsi l'employeur a rompu le contrat de son fait et que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par ailleurs, le changement du lieu de travail du salarié constitue une modification de son contrat de travail si le contrat n'était pas assorti d'une clause de mobilité géographique à moins que le changement de lieu de travail ne s'effectue à l'intérieur d'un même secteur géographique.

En l'espèce, il est constant que le contrat de travail de M. X... ne comportait pas de clause de mobilité géographique.

Il importe donc de déterminer si l'ancien lieu de travail -Busseau sur Creuse- et le nouveau lieu de travail -Auzances- se situaient ou non dans un même secteur géographique, ce qui s'apprécie en considération du temps de trajet supplémentaire imposé au salarié.

A cet égard, il ressort des éléments du dossier que la distance entre Busseau sur Creuse et Auzances est de 51 kms sur une route assez sinueuse et fortement exposée en hiver à des conditions de circulation difficiles en raison des intempéries, en sorte que le temps de trajet - qui est de l'ordre de 55 minutes à 1 heure quand les conditions de circulation sont normales - peut être sensiblement supérieur pendant toute une période de l'année comprise entre le mois de décembre et le mois de mars.

Il suit de ces éléments qu'il ne peut être considéré que Busseau sur Creuse et Auzances sont situés dans un même secteur géographique.

En conséquence, en notifiant à M. X... par lettre du 22 septembre 2003 que son lieu de travail serait situé, au 1er janvier 2004, à Auzances et en lui précisant, le 15 décembre 2003 après son refus, que faute de se présenter il serait considéré comme absent et démissionnaire, la société Laiterie de montagne lui a imposé unilatéralement une modification de son contrat de travail.

M. X... est dès lors bien fondé à prétendre qu'en agissant ainsi la société a rompu le contrat de travail et que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences pécuniaires

Le conseil de prud'hommes de Guéret, dans son jugement du 26 juillet 2004, tout en énonçant à bon droit que la rupture était imputable à la société Laiterie de montagne d'Auzances et en condamnant la société à payer à M. X... des sommes à titre d'indemnité de préavis et d'indemnité de licenciement, avait paradoxalement rejeté les autres demandes du salarié, notamment sa demande à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il convient donc de confirmer le jugement attaqué sur la qualification de la rupture du contrat de travail en précisant qu'elle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur les indemnités de rupture mais de le réformer pour le surplus et, au vu des pièces produites pour justifier du préjudice ayant résulté pour M. X... de la perte de son emploi, de condamner la société à lui payer la somme de 24 550, 80 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il n'est pas justifié, en revanche, par M. X... d'un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi en sorte que sa demande à titre de dommages et intérêts de ce chef sera rejetée, étant ici observé que la rupture a pris effet comme l'avait jugé le conseil de prud'hommes au 2 janvier 2004, c'est-à-dire au jour où la modification du contrat de travail du salarié imposée par la société devenait effective.

Sur la demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

En application de ce texte, il convient de condamner la société Laiterie de montagne d'Auzances, partie perdante et tenue aux dépens, à payer à M. X..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, tels les honoraires d'avocat, une somme qui sera déterminée dans le dispositif ci-après.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Guéret en date du 26 juillet 2004 sur la rupture sauf à préciser qu'elle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur les indemnités de rupture et sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Le réforme, pour le surplus, et y ajoutant,

Condamne la société Laiterie de montagne d'Auzances à payer à M. X... la somme de 24 550, 80 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Rejette la demande de M. X... à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi,

Condamne la société Laiterie de montagne d'Auzances à payer à M. X... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne la société Laiterie de montagne d'Auzances aux dépens d'appel.

Condamne aux dépens d'appel.

Ainsi prononcé et signé par Madame Isabelle GRANDBARBE, Conseiller le plus ancien en remplacement du président de Chambre empêché, assistée de Madame Christine PERNEY, greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : 07/01730
Date de la décision : 11/12/2007

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Modification - Modification imposée par l'employeur - Modification du lieu de travail - Refus du salarié - // JDF

Il est de règle que l'employeur ne peut modifier le contrat de travail sans l'accord du salarié et qu'en cas de modification unilatérale imposée par l'employeur au salarié, celui-ci est fondé à faire valoir qu'en agissant ainsi l'employeur a rompu le contrat de son fait et que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le changement de lieu de travail du salarié constitue une modification de son contrat de travail si le contrat n'était pas assorti d'une clause de mobilité géographique à moins que le changement de lieu de travail ne s'effectue à l'intérieur d'un même secteur géographique, la notion de (même) secteur géographique s'appréciant en considération du temps de trajet supplémentaire imposé au salarié entre l'ancien lieu de travail et le nouveau lieu de travail.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2007-12-11;07.01730 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award