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26/09/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006951803

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Ct0173, 26 septembre 2006, JURITEXT000006951803


YD/JB

COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRET DU 26 SEPTEMBRE 2006 ARRET N AFFAIRE N : 05/03428 AFFAIRE :

Marthe X... C/ Roselyne Y..., C.P.A.M. DEUX-SEVRES NIORT, D.R.A.S.S. POITOU-CHARENTES POITIERS APPELANTE : Madame Marthe X... 43 rue du 114 Régiment d'Infanterie 79400 ST MAIXENT L ECOLE Représentée par Me Christèle TOURAINE (avocat au barreau de NIORT) Suivant déclaration d'appel du 14 Novembre 2005 d'un jugement AU FOND du 10 OCTOBRE 2005 rendu par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE NIORT. INTIMEES :

Madame Roselyne Y... 196

rue de la Burgonce 79000 NIORT Comparante en personne, assistée de Me Eric DABIN (...

YD/JB

COUR D'APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRET DU 26 SEPTEMBRE 2006 ARRET N AFFAIRE N : 05/03428 AFFAIRE :

Marthe X... C/ Roselyne Y..., C.P.A.M. DEUX-SEVRES NIORT, D.R.A.S.S. POITOU-CHARENTES POITIERS APPELANTE : Madame Marthe X... 43 rue du 114 Régiment d'Infanterie 79400 ST MAIXENT L ECOLE Représentée par Me Christèle TOURAINE (avocat au barreau de NIORT) Suivant déclaration d'appel du 14 Novembre 2005 d'un jugement AU FOND du 10 OCTOBRE 2005 rendu par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE NIORT. INTIMEES :

Madame Roselyne Y... 196 rue de la Burgonce 79000 NIORT Comparante en personne, assistée de Me Eric DABIN (avocat au barreau de NIORT) C.P.A.M. DEUX-SEVRES NIORT 20 place du Port B.P 8517 79041 NIORT CEDEX Représentée par M. Paul Z... muni d'un pouvoir de représentation D.R.A.S.S. POITOU-CHARENTES POITIERS Avenue de Northampton BP 559 86020 POITIERS CEDEX Non comparante ni représentée COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Président :

Yves DUBOIS, Président Conseiller

: Isabelle GRANDBARBE, Conseiller Conseiller : Jean Yves FROUIN, Conseiller Greffier : Joùlle A..., Greffier uniquement présent(e) aux débats, DEBATS :

A l'audience publique du 28 Juin 2006,

Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries.

L'affaire a été mise en délibéré et les parties avisées de la mise à disposition de l'arrêt au greffe le 26 Septembre 2006

Ce jour a été rendu par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, l'arrêt suivant : ARRET :

Madame X... a régulièrement interjeté appel d'un jugement du 10 Octobre 2005 par lequel le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Deux-Sèvres l'a déboutée de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur Madame Y... dans la survenance de l'accident du travail dont elle a été victime le 20 Mai 1998.

B... entend voir infirmer cette décision, dire que l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur, fixer au maximum la majoration de la rente qui lui a été allouée, ordonner une expertise médicale et une enquête pour évaluer son préjudice personnel; elle réclame une provision de 4.573 ç et une somme de 1.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile.

Madame Y... conclut à la confirmation du jugement entrepris et réclame la somme de 5.000 ç au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Deux-Sèvres s'en rapporte à justice.

La Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales Poitou-Charentes ne s'est pas présentée ni fait représenter, bien que régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 28 Mars 2006.

MOTIFS

Vu, développées oralement à l'audience, les conclusions reçues au Greffe le 16 Mai 2006 pour l'appelante et le 9 Juin pour l'intimée.

Madame X... était employée depuis le 15 Janvier 1993 au magasin "CADO-LISTES" exploité à Saint Maixent l'Ecole par Madame Y... B... a dû interrompre son activité le 21 Mai 1998 pour syndrome dépressif réactionnel, au lendemain d'un entretien avec son employeur. Le 24 Août 1998, elle a été déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise par le médecin du travail qui a constaté un risque immédiat pour la salariée. S'en est suivi son licenciement pour inaptitude le 4 Septembre 1998.

Considérant que sa maladie était due au climat de reproches et de menaces installé dans l'entreprise et à son encontre par le conjoint de Madame Y... sans que celle-ci prenne les mesures qui s'imposaient pour préserver son équilibre psychologique, Madame X... a saisi la juridiction prud'homale pour contester son licenciement puis le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale pour faire reconnaître l'origine professionnelle de sa maladie.

Par Arrêt du 30 Mai 2000, la Cour d'Appel de céans a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, jugeant que l'attitude fautive de l'employeur était à l'origine de l'inaptitude de Madame X... dont il avait pris acte pour rompre le contrat de travail.

Par jugement du 20 Juin 2001 aujourd'hui définitif, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Deux-Sèvres a dit que Madame X... avait été victime d'un accident du travail le 20 Mai 1998.

Pour dire néanmoins que Madame Y... ne pouvait avoir conscience d'un risque de détérioration de la santé psychologique de Madame X... et n'avait donc pas commis de faute inexcusable, le même

Tribunal a considéré dans le jugement entrepris que de par son professionnalisme et son expérience la salariée bénéficiait d'une réelle autonomie, les patrons étant fréquemment absents, que le climat ambiant entre collègues et avec les clients était normal, que les disputes entre Monsieur Y... et sa maîtresse, également employée au magasin, étaient "restreintes", enfin que les menaces proférées par le conjoint de l'employeur avaient été uniques et collectives, de sorte que Madame X... n'avait pas été l'objet d'un harcèlement particulier.

Cependant, l'appelante ne soutient pas avoir été victime de harcèlement moral mais soumise à des conditions de travail telles que sa santé psychologique s'en est trouvée profondément dégradée, et ce sans que l'employeur ne satisfasse aux obligations qui lui incombaient en vertu des dispositions de l'article L 230-2 du Code du Travail.

Or, il convient de rappeler que l'événement reconnu comme accident du travail a été l'entretien du 20 Mai 1998 au cours duquel Monsieur et Madame Y... ont formulé à l'encontre de Madame X... qui revenait de congés divers griefs comme la présence de poussière sur des étagères. Dans son jugement du 20 Juin 2001, le Tribunal a considéré établie l'existence au cours de cet entretien de menaces faisant suite à celles que la salariée avait déjà subies, notamment au mois de Février 1998.

Le comportement de l'employeur et de son conjoint, et les craintes que pouvait en éprouver Madame X..., sont attestés par des faits datant le l'été 1997 et relatés par Monsieur et Madame C... qui, très satisfaits des conseils et de la prestation fournie par Madame X... à l'occasion de la préparation de leur liste de mariage, avaient vu cette liste annulée par erreur par Madame Y... pendant les congés de sa salariée. Revenus au magasin pour régler l'incident

et ses conséquences, ces clients disent avoir été choqués par l'arrogance de Monsieur et Madame Y... et affirment qu'ils n'ont pas hésité à essayer de faire porter la responsabilité du différend à Madame X..., laquelle était présente et "atterrée".

Par ailleurs, il n'est pas contesté que, bien que son épouse soit seul employeur, Monsieur Y... intervenait en permanence dans le magasin, sans que l'on sache à quel titre, que l'une des employées était sa maîtresse et qu'il avait avec elle de fréquentes altercations au vu et au su de tous, y compris de la clientèle ainsi qu'il résulte des attestations versées aux débats.

C'est ainsi qu'au mois de Février 1998 un véritable esclandre, décrit par plusieurs témoins, a été provoqué par lui et s'est terminé par des menaces de licenciement pour faute grave à l'encontre de l'appelante et de sa collègue.

Ainsi, le syndrome dépressif consécutif à un accident du travail, constaté le 21 Mai 1998 et qui a justifié la déclaration d'inaptitude à tous postes dans l'entreprise, n'est pas dû uniquement aux circonstances de l'entretien du 20 Mai 1998 mais constitue l'aboutissement d'un processus de dégradation de l'état psychologique de Madame X... causé par l'instauration dans l'entreprise d'un climat de violence et de menaces - peu important que la salariée n'ait pas été exclusivement visée - que l'employeur n'ignorait pas et qu'il n'a pas cherché à arrêter en prenant les mesures qui lui incombaient.

Dans ces conditions, contrairement à ce qu'a dit le premier juge, l'accident du travail est bien dû à la faute inexcusable de l'employeur.

Il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement entrepris, de fixer au maximum la majoration de la rente, étant précisé que celle-ci suivra l'évolution du taux d'IPP, et d'ordonner une mesure

d'expertise aux fins de déterminer et d'évaluer les préjudices visés à l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale.

En l'état, l'appelante ne produit aucun élément de nature à justifier sa demande d'indemnité provisionnelle.

Enfin, il sera fait application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile dans les conditions précisées au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Infirme le jugement entrepris et,

Statuant à nouveau,

Dit que l'accident du travail dont Madame X... a été victime le 20 Mai 1998 est dû à la faute inexcusable de Madame Y...

Fixe au maximum la majoration de la rente accident du travail et dit qu'elle suivra l'évolution du taux d'IPP.

Avant dire droit sur la réparation du préjudice personnel de Madame X...,

Ordonne une expertise et commet pour y procéder

Monsieur le Docteur Alain D...

C.H.G.

Service de Psychiatrie et de psychologie

Secteur III

79021 NIORT CEDEX

Lequel aura pour mission, après avoir examiné Madame X..., s'être fait remettre tous documents utiles et s'être entouré de tous renseignements à charge d'en indiquer la source, de fournir tous éléments permettant d'apprécier le préjudice causé par les

jour suivant la demande.

Déboute Madame X... de sa demande d'indemnité provisionnelle.

Condamne Madame Y... à payer à Madame X... la somme de 800 ç au titre des frais irrépétibles.

Ainsi prononcé et signé par Monsieur Yves DUBOIS, Président de Chambre, assisté de Madame Joùlle A..., Greffier. Le Greffier,

Le Président,cédure Civile;

Dit qu'à cet effet l'expert commis, saisi par le Greffe, devra accomplir sa mission contradictoirement, en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées, les entendre en leurs observations, répondre à leurs dires, et déposer rapport de ses opérations avec son avis dans un délai de trois mois à compter du jour où il aura été saisi de sa mission par le Greffe, sauf prorogation des opérations dûment autorisée par le magistrat chargé du contrôle sur demande de l'expert;

Dit que cette mesure d'expertise sera effectuée sous le contrôle du Président de la Chambre à qui il en sera référé en cas de difficulté; Dit que les frais d'expertise seront à la charge de la Madame Y... qui devra rembourser à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Deux-Sèvres les sommes avancées par celle-ci, avec intérêts au taux légal à compter du quinzième jour suivant la demande.

Déboute Madame X... de sa demande d'indemnité provisionnelle.

Condamne Madame Y... à payer à Madame X... la somme de 800 ç au titre des frais irrépétibles.

Ainsi prononcé et signé par Monsieur Yves DUBOIS, Président de Chambre, assisté de Madame Joùlle A..., Greffier. Le Greffier,

Le Président, Le Greffier,

Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006951803
Date de la décision : 26/09/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. Dubois, Président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2006-09-26;juritext000006951803 ?
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