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28/03/2006 | FRANCE | N°271

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 28 mars 2006, 271


JYF/SD COUR D'APPEL DE POITIERS Chambre Sociale ARRET DU 28 MARS 2006 ARRET N AFFAIRE N : 04/02781 AFFAIRE : Isabelle X... C/ SARL Y... APPELANTE : Madame Isabelle X... ... Représentée par M. Michel Z... (Délégué syndical ouvrier)(muni d'un pouvoir) Suivant déclaration d'appel du 09 Septembre 2004 d'un jugement AU FOND du 26 AOUT 2004 rendu par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE SAINTES. INTIMEE : SARL Y... 6 rue des Méchains 17160 MATHA Représentée par Me Bernard GERMAIN (avocat au barreau de SAINTES) En présence de M. Bertrand Y... - Gérant COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du

délibéré : Président : Yves DUBOIS, Président Conseiller : ...

JYF/SD COUR D'APPEL DE POITIERS Chambre Sociale ARRET DU 28 MARS 2006 ARRET N AFFAIRE N : 04/02781 AFFAIRE : Isabelle X... C/ SARL Y... APPELANTE : Madame Isabelle X... ... Représentée par M. Michel Z... (Délégué syndical ouvrier)(muni d'un pouvoir) Suivant déclaration d'appel du 09 Septembre 2004 d'un jugement AU FOND du 26 AOUT 2004 rendu par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE SAINTES. INTIMEE : SARL Y... 6 rue des Méchains 17160 MATHA Représentée par Me Bernard GERMAIN (avocat au barreau de SAINTES) En présence de M. Bertrand Y... - Gérant COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : Président : Yves DUBOIS, Président Conseiller : Isabelle GRANDBARBE, Conseiller Conseiller : Jean Yves FROUIN, Conseiller Greffier : Michel GENITEAU, Greffier uniquement présent(e) aux débats, DEBATS :

A l'audience publique du 14 Février 2006,

Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries.

L'affaire a été mise en délibéré et les parties avisées de la mise à disposition de l'arrêt au greffe le 28 Mars 2006

Ce jour a été rendu contradictoirement et en dernier ressort, l'arrêt suivant : ARRET :

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme X..., engagée le 30 juillet 1997 en qualité d'employée de bureau par la société Y..., a été licenciée pour faute grave, le 27 janvier 2004.

Par jugement en date du 26 août 2004, le conseil de prud'hommes de Saintes a rejeté l'ensemble des demandes de Mme X....

Mme X... a régulièrement interjeté appel du jugement dont elle sollicite l'infirmation. Elle soutient qu'elle travaille pour la société Y... depuis 1984, que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et conclut à la condamnation de la société à

lui payer les sommes de :

- 888 euros, à titre de dommages et intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement,

- 2 082, 88 euros, à titre d'indemnité de préavis et congés payés afférents,

- 3 520 euros, à titre d'indemnité de licenciement,

- 22 594, 56 euros, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle demande également la condamnation de l'employeur au rachat des points de retraite pour la période de 1984 à fin juillet 1997.

La société Y... conclut à la confirmation du jugement attaqué et à la condamnation de Mme X... à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur le licenciement

- En ce qui concerne la régularité du licenciement

Il est constant que l'entretien préalable s'est déroulé en présence d'un huissier de justice qui a consigné les déclarations de chacune des parties au contrat de travail dans un constat.

Cela étant, il n'apparaît pas au vu de ce constat ou des autres éléments du dossier que l'huissier de justice présent à l'entretien préalable se soit comporté comme assistant l'employeur lors de l'entretien ni qu'il en ait détourné l'objet en se transformant en enquêteur. Il en ressort, au contraire, qu'il s'est borné à consigner les propos de l'un et de l'autre, Mme X... étant assistée de son mari, membre du personnel de l'entreprise.

Dans ces conditions, et même s'il n'est pas dans l'objet ou la

finalité de l'entretien préalable, qui doit conserver le caractère d'un échange informel et spontané, d'y convier un huissier de justice, il ne résulte pas en l'espèce de sa présence, que pouvait justifier le climat très conflictuel de la rupture, une inobservation de la procédure de licenciement par l'employeur.

Aussi y a t-il lieu de rejeter la demande de Mme X... de ce chef.

- En ce qui concerne le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement, qui fixe les termes et les limites du litige, énonce que le licenciement de Mme X... a été prononcé en raison de son absence injustifiée au travail, le 12 janvier 2004, son altercation avec Mme Y..., le 13 janvier 2004, son abandon de poste le même jour, et ses insultes par téléphone à Mme Y... concernant le gérant.

Il ressort des pièces du dossier que l'employeur a notifié à la salariée par lettre du 13 janvier 2004 un avertissement à raison de son absence injustifiée au travail, le 12 janvier 2004. Il a donc par là-même épuisé son pouvoir disciplinaire de ce chef et ne pouvait plus procéder à un licenciement disciplinaire de la salariée pour le même motif.

S'agissant de l'altercation avec Mme Y... en date du 13 janvier 2004 et de ses insultes à Mme Y... par téléphone, elles sont contestées par Mme X... et reposent sur les seules déclarations de Mme Y..., épouse du gérant et de son mari dont il est constant qu'il n'en a pas été témoin. Au surplus, s'il est probable qu'il y a bien eu altercation, le 13 janvier 2004, aucun élément du dossier ne permet de déterminer de manière certaine que c'est Mme X... plutôt que Mme Y... qui en est à l'origine.

Enfin, en ce qui concerne l'abandon de poste de Mme X..., le 13 janvier 2004, elle ne peut lui être imputée à faute pour deux raisons : d'abord, le contrat de travail de Mme X... était suspendu ce

jour-là en vertu d'un arrêt de travail de son médecin traitant qui couvrait la journée du 13 janvier de sorte que si Mme X... s'est rendue à l'entreprise pour faire le point elle n'y était pas tenue. Ensuite, et en toute hypothèse, il est établi par un certificat médical qu'elle n'a quitté l'entreprise, le 13 janvier 2004 que pour se rendre chez son médecin parce qu'elle ne se sentait pas bien, ce qui a été constaté par le médecin et ne peut donc lui être reproché. Il suit de ces motifs que, contrairement à ce qu'a jugé le conseil de prud'hommes, le licenciement n'est pas justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il convient donc d'infirmer le jugement attaqué de ce chef et, au vu des pièces produites pour justifier du préjudice ayant résulté pour la salariée de la perte de son emploi, de condamner la société Y... à lui payer la somme de 9 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre la somme de 2 082, 88 euros à titre d'indemnité de préavis et congés payés afférents.

Sur le travail dissimulé

Il ressort de plusieurs attestations précises, circonstanciées et concordantes, ainsi que des copies de livres de comptabilité de la société qu'elle tenait, que Mme X... a commencé à travailler pour le compte de la société Y... et dans un lien de subordination à l'égard de cette société à compter de l'année 1984. C'est ici le lieu de préciser qu'il ne peut être reproché à Mme X... de produire des documents de l'entreprise dont elle a eu connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions et qui sont strictement nécessaires à l'exercice de ses droits dans le litige l'opposant à l'employeur.

Or, ce n'est qu'à partir de l'année 1997 que la société lui a fait signer un contrat de travail.

Il s'ensuit que pendant la période allant de 1984 à 1997, la société

Brillaud s'est soustraite intentionnellement à l'accomplissement de l une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320, ce qui constitue en vertu de l'article L. 324-10 un travail dissimulé par dissimulation d'emploi.

Dès lors, Mme X... est fondée à prétendre à l'indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire prévue par l'article L. 324-11-1 du code du travail dans cette hypothèse, soit la somme de 5 648, 64 euros, puisqu'aussi bien cette indemnité se cumule avec les indemnités de toute nature auxquelles un salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail, à la seule exception de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement (Cass.soc. 12 janvier 2006, no 04-42.190, P+B+R+I).

Corrélativement, Mme X... ne peut prétendre à une indemnité de licenciement, seule l'indemnité forfaitaire d'un montant plus élevé pouvant lui être allouée.

Il importe, en conséquence, d'infirmer le jugement attaqué, de condamner la société Y... à payer à Mme X... la somme de 5 648, 64 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé, et de rejeter sa demande en paiement d'une somme à titre d'indemnité de licenciement. Sur le rachat de points de retraite

En l'état des écritures, pièces et explications verbales de Mme X..., la Cour ne dispose pas des éléments suffisants pour statuer sur ce chef de demande. Aussi y a t-il lieu d'ordonner la réouverture des débats, d'inviter Mme X... à formaliser plus précisément sa demande et les parties à s'expliquer contradictoirement.

Sur la demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

En application de ce texte, il convient de condamner la société Y..., partie perdante et tenue aux dépens, à payer à Mme X... ,

au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, tels les honoraires d'avocat, une somme qui sera déterminée dans le dispositif ci-après.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

- Réforme le jugement du conseil de prud'hommes de Saintes en date du 26 août 2004 et, statuant à nouveau,

- Dit que le licenciement de Mme X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- Rejette la demande de Mme X... à titre de dommages et intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement,

- Condamne la société Y... à payer à Mme X... la somme de 2 082, 88 euros à titre d'indemnité de préavis et congés payés afférents,

- Condamne la société Y... à payer à Mme X... la somme de 9 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 5 648, 64 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- Avant dire droit sur la demande de Mme X... en rachat de points de retraite,

- Ordonne la réouverture des débats

A l'audience du 12 juin 2006 9 heures 15 pour formalisation par Mme X... de sa demande et discussion contradictoire des parties,

- Condamne la société Y... à payer à Mme X... la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- Condamne la société Y... aux dépens de première instance et d'appel.

Ainsi prononcé et signé par Monsieur Yves DUBOIS, Président assisté

de Madame Joùlle BONMARTIN, Greffier.

Le Greffier,

Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 271
Date de la décision : 28/03/2006
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Formalités légales - Entretien préalable - Présence d'un tiers - Conditions - /

Même s'il n'est pas dans l'objet ou la finalité de l'entretien préalable, qui doit conserver le caractère d'un échange informel et spontané, d'y convier un huissier de justice, il ne résulte pas de sa présence, que pouvait justifier le caractère très conflictuel de la rupture, une inobservation de la procédure de licenciement par l'employeur, dès lors qu'il n'apparaît pas que l'huissier de justice se soit comporté comme assistant l'employeur lors de l'entretien, ni qu'il en ait détourné l'objet en se transformant en enquêteur, se bornant à consigner les propos de l'une et l'autre des parties au contrat de travail


Références :

Code du travail, articles L. 122-14, L. 324-10 et L. 324-11-1

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. DUBOIS, Président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2006-03-28;271 ?
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