X... D'APPEL DE POITIERS CHAMBRE SOCIALE, ARRET DU 25 NOVEMBRE 2003 APPELANT: SA KUHN AUDUREAIJ BP 19 85260 LA COPECHAGNIERE Représentant : Me Jean-René KERLOCH (avocat au barreau de NANTES) Suivant déclaration d'appel du 24 Mai 2002 d'un jugement AU FOND du 22 AVRIL 2002 rendu par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES LA ROCHE SUR YON. INTIME: Monsieur Y... COMPOSITION DE LA X... lors des débats et du délibéré:
Président :
Yves DUBOIS, Président Conseiller:
Isabelle GRANDBARBE, Conseiller Conseiller :
Jean-Yves FROUIN, Greffier :
Edith JACQUEMET, Greffier uniquement présent(e) aux débats,
DEBATS:
A l'audience publique du 15 Octobre 2003,
Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries.
L'affaire a été mise en délibéré au 25 Novembre 2003
Ce jour a été rendu, contradictoire et en dernier ressort, l'arrêt suivant: ARRET:
Monsieur Y... a été engagé à compter du 20 avril 1998 par la société KUHN ANDUREAU SA en qualité de cadre ingénieur production; il a été licencié le 6 octobre 2000 pour insuffisance professionnelle et dispensé d'exécuter son préavis.
Par jugement du 22 avril 2002, le Conseil des Prud'hommes de La Roche Sur Yon, considérant que le licenciement n'avait pas de cause réelle et sérieuse, a condamné l'employeur à payer au salarié la somme de 25 768,21 ä à titre de dommages et intérêts et la somme de 762,25 ä en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Il a fait application des dispositions de l'article L 122-14-4 du Code du Travail relatives au remboursement des indemnités de chômage par
l'employeur.
La société KUHN AINDUREAU a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Vu les conclusions déposées et développées oralement à l'audience de plaidoirie, par lesquelles la société KUHN ANDUREAU sollicite la réformation du jugement entrepris; entend voir débouter Monsieur Y... de toutes ses demandes et réclame la somme de 1000 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;
Vu les conclusions développées oralement à l'audience de plaidoirie et reçues au greffe le 23 septembre 2000, par lesquelles Monsieur Y... demande la confirmation du jugement entrepris et réclame la somme de 8 590 ä à titre de dommages et intérêts pour le préjudice de santé subi depuis le licenciement et au delà de l'audience du conseil des prud'hommes et la somme de 1000 ä au titre des frais irrépétibles d'appel; MOTIFS DE LA DECISION:
La société KUHN ANDUREAU est une entreprise de matériel agricole, qui employait 156 salariés en décembre 2000.
Z... expose qu'en recrutant Monsieur Y... en qualité d'ingénieur de production, elle souhaitait lui confier ensuite le poste de Monsieur A..., responsable de production, qui devait prendre sa retraite en février 2002 et qu'il seconderait jusque là. Z... s'est aperçu notamment à l'occasion d'une formation en management assurée par le cabinet PROPULS que Monsieur Y... était incapable d'assumer ses tâches et de succéder à Monsieur A... Z... lui a proposé de démissionner au cours d'une réunion du 27 septembre 2000, ce que l'intéressé a refusé. C'est dans ces conditions que la société KUHN ANDUREAU a licencié le salarié pour incompétence professionnelle le 6 octobre 2000.
Le conseil des prud'hommes a retenu que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse puisqu'il avait pour motivation
première le fait que dans un futur proche, le salarié risquait de ne pas remplir ses nouvelles fonctions mais qu'en ce qui concerne ses fonctions actuelles, aucun reproche sérieux ne lui était fait.
La promesse d'engagement du 20 janvier 1998 mentionne que la mission de Monsieur Y... est la suivante: "Vous assisterez le responsable de production dans les projets industriels de Kahn Andureau. Après une période de formation interne à nos métiers, des projets d 'amélioration de notre productivité vous seront confiés."
Le contrat de travail signé le 20 juillet 1998 indique qu'il a pour objet la mise en production de nouveaux produits et comporte une clause de mobilité géographique, sans qu'aucune allusion ne soit faite à la possibilité d'être promu responsable de production.
Il résulte de la lettre de la société KUHN ANDUREAU adressée au salarié le 2 octobre 2000 pour expliquer le licenciement envisagé que c'est bien son incapacité à occuper le poste de responsable de production malgré les formations qui lui ont été dispensées, qui lui est reprochée.: "... Cette procédure est motivée par le fait que nous pensons que vous n'êtes pas, après deux années passées dans notre entreprise, apte a assurer le poste de Responsable de production chez Kahn Andureau. Nous vous avons recruté dans cet esprit, le profil du poste décrit auprès du conseil en recrutement était rédigé en ce sens..."
Le rapport du cabinet PROPULS, qui a été chargé de former les chefs d'équipe aux techniques de communication et de management, établi en octobre 2000, relate qu'il n'a pas pu mener à bien sa mission parce que la seule préoccupation des intéressés était la succession de Monsieur A... et que Monsieur Y... leur apparaissait incapable d'y faire face en raison de son discrédit auprès du personne par son manque de charisme, d'écoute et de connaissance des métiers, surtout en
comparaison des éminentes qualités du directeur actuel.
Les éléments sus-visés d'appréciation confirment l'analyse du premier juge. Monsieur Y... a déçu l'employeur sur ses possibilités à remplacer Monsieur A...
La société KUHN ANDUREAU tente de prouver une incompétence de Monsieur Y... au poste occupé.
Toutefois, elle l'a évalué de façon satisfaisante dans les fiches de notation professionnelle en novembre 1998. Z... a augmenté son salaire en mai 1999 de 150 ä par mois en précisant que cette mesure est "justifiée à nos yeux par votre motivation et la qualité de la tenue du poste, qui vous est confié".
Z... a procédé à une évaluation professionnelle en janvier 2000, qui ne met nullement en garde l'intéressé sur les carences, qui lui seront reprochées neuf mois plus tard. En particulier, les rubriques de notation sur la connaissance des métiers, sur une opération qui lui a été confiée et sur l'organisation pour recueillir les suggestions de la maîtrise mentionnent des résultats obtenus conformes ou supérieurs à la normale. Les objectifs, qui lui ont été impartis, concernent la mise en place de l'organisation pour éviter des ruptures d'approvisionnement dans l'usine, le fonctionnement et l'implantation de deux robots et le développement de l'ordre dans toute l'usine. Aucun élément du dossier n'indique que les objectifs n'ont pas été atteints. Les attestations versées aux débats par l'employeur émanant de Monsieur A... et de quelques salariés font état de difficultés relationnelles et dans certains cas techniques avec Monsieur Y..., en particulier concernant un nouveau robot, mais ne suffisent pas à caractériser l'incompétence de ce dernier à son poste compte tenu des autres éléments sus-visés du dossier.
Il y a lieu d'observer que le recrutement d'un cadre sous entend normalement une évolution de carrière, qui peut être, comme dans le
cas d'espèce, une perspective précise de remplacement d'un supérieur hiérarchique, dont la date de départ est prévue. Pour autant, ni l'employeur, ni le salarié ne sont liés par ce qui n'est qu'une simple éventualité sans engagement de part et d'autre. Comme l'a dit le premier juge, il ne peut être procédé à un licenciement pour une incompétence professionnelle à des fonctions non exercées actuellement. La société KUHN ANDUREAU, qui pouvait envisager un autre recrutement pour la succession de son directeur de production devant intervenir 17 mois plus tard, ne pouvait se séparer du salarié pour sa supposée future incapacité à être promu à ce futur poste.
Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris, étant précisé qu'en application de l'article 1154 alinéa 2, la condamnation prononcée par le conseil des prud'hommes porte intérêt au taux légal à compter de son prononcé.
Monsieur Y... ne prouve pas que la maladie nerveuse, dont il fait état, soit consécutive au licenciement, dont les conséquences ont été par ailleurs entièrement indemnisées, étant précisé qu'il a retrouvé un emploi en janvier 2001.
Il y a lieu de le débouter de sa demande de dommages et intérêts complémentaires.
En application des articles 696 et 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, la partie, qui succombe, supporte les dépens et le paiement à la partie adverse d'une indemnité au titre des frais de procès non compris dans les dépens, tels les honoraires d'avocat, qui sera déterminée dans le dispositif ci-après. PAR CES MOTIFS:
LA X...:
Confirme le jugement entrepris;
A... ajoutant,
Déboute Monsieur Y... de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice de santé;
Condamne la société KUHN ANDUREAU aux dépens et au paiement à Monsieur Y... de la somme de 900 ä en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.