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26/11/2002 | FRANCE | N°JURITEXT000006941761

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 26 novembre 2002, JURITEXT000006941761


COUR D' APPEL DE POITIERS Chambre Sociale ARRET DU 26 NOVEMBRE 2002 APPELANT. Association A, Représentant Me F.Xavier CHEDAINEAU (avocat au barreau de POITIERS) Suivant déclaration d' appel du 11 Juillet 2001 d 'un jugement AU FOND du 18 JUIN 2001 rendu par le CONSEIL DE PRUD 'HOMMES de POITIERS. INTIMES: Madame X..., Comparante assistée de Monsieur Gilbert Y... (Délégué syndical ouvrier) Monsieur Z..., Comparant assisté de Monsieur Y... (délégué syndical ouvrier) COMPOSITION DE LA COUR lors des débats, en application de l' article 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile et à dÃ

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COUR D' APPEL DE POITIERS Chambre Sociale ARRET DU 26 NOVEMBRE 2002 APPELANT. Association A, Représentant Me F.Xavier CHEDAINEAU (avocat au barreau de POITIERS) Suivant déclaration d' appel du 11 Juillet 2001 d 'un jugement AU FOND du 18 JUIN 2001 rendu par le CONSEIL DE PRUD 'HOMMES de POITIERS. INTIMES: Madame X..., Comparante assistée de Monsieur Gilbert Y... (Délégué syndical ouvrier) Monsieur Z..., Comparant assisté de Monsieur Y... (délégué syndical ouvrier) COMPOSITION DE LA COUR lors des débats, en application de l' article 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile et à défaut d' opposition des avocats des parties ou des parties: Monsieur Yves DUBOIS, faisant fonction de A... Rapporteur, après avoir entendu les plaidoiries et explications des parties, assisté de Edith JACQUEMET, Greffier, uniquement présent(e) aux débats, en a rendu compte à la Cour composée de: Monsieur Yves DUBOIS B..., Monsieur Pascal VIDEAU A..., Madame Annick FELTZ, A....

DEBATS: A l' audience publique du 23 Octobre 2002, Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries. Puis l' affaire a été mise en délibéré au 26 Novembre 2002. Ce jour a été rendu contradictoire et en dernier ressort l 'arrêt suivant

ARRET: Madame X... a été engagée le 1er Août 1991 par l'association A en qualité de garde de nuit, et Monsieur Z... le 18 Septembre 1993 comme surveillant de nuit; ils effectuent l' un et l' autre des heures de nuit en chambre de veille, rémunérées en application de la Convention Collective du 15 Mars 1966 à raison de trois heures pour les neuf premières heures de présence; Le 19 Novembre 1999, ils ont saisi le Conseil des Prud' hommes de Poitiers pour obtenir paiement d' un rappel de salaire pour toutes les heures en chambre de veille; Par un jugement rendu le 18 Juin 2001 sous la présidence du Juge Départiteur, le Conseil des Prud hommes, après avoir écarté l'

application de l' article 29 de la Loi du 19 Janvier 2000 et déclaré non valable le système d' équivalence institué par la Convention Collective du 15 Mars 1966, a condamné l' employeur au paiement des sommes suivantes: - à Madame X...: - rappel de salaires de 1994 à 1998 :

170.096,87 F (25.931,10E) - congés payés correspondants :

17.009,68 F (2.593,11 E) - frais irrépétibles :

2.000,00 F (304,90 E) - à Monsieur Z...: - rappel de salaires de 1994 à 1998 :

167.275,00 F (25.500,91 E) - congés payés correspondants :

16.727,50 F (2.550,09 E) - frais irrépétibles :

2.000,00 F (304,90 E) L'association A a régulièrement interjeté appel de cette décision dont elle sollicite la réformation; elle entend voir débouter les salariés de toutes leurs demandes et réclame la somme de 1.500E sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile; Madame X... et Monsieur Z... concluent à la confirmation du jugement entrepris mais entendent voir ajouter aux condamnations prononcées des rappels de salaire au titre des heures effectuées les Dimanches et jours fériés, soit 6.766,76 E pour Madame X... et 6.225,96 E pour Monsieur Z..., outre les congés payés correspondants; ils réclament chacun la somme de 800 E au titre des frais irrépétibles d' appel;

MOTIFS Pour faire droit aux demandes des salariés, le Conseil des Prud' hommes a considéré d' une part qu' à défaut d' un Décret ou d' un Arrèté d' extension , la Convention Collective du 15 Mars 1966 n' avait pu valablement instituer un régime d' équivalence, d' autre part que le principe de la prééminence du droit et la notion de procès équitable, résultant de l' article 6.1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l' Homme, s' opposaient, sauf pour d' impérieux motifs d 'intérèt général, à l' ingérence du

pouvoir législatif dans l 'administration de la justice afin d' influer sur le dénouement d' un litige, ce pourquoi il a écarté l 'application de l' article 29 de la Loi du 19 Janvier 2000; Cependant, en vertu du texte susvisé, inclus dans le chapitre IX de la Loi "Aubry Il" intitulé "Sécurisation juridique ", sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les versements effectués au titre de la rémunération des périodes de permanence nocturne, comportant des temps d' inaction, effectuées sur le lieu de travail en chambre de veille par le personnel en application des clauses des Conventions Collectives nationales et accords collectifs nationaux de travail agréés en vertu de l' article 16 de la Loi n° 75-535 relative aux institutions sociales et médico-sociales, en tant que leur montant serait contesté par le moyen tiré de l' absence de validité desdites clauses; Il faut rappeler en premier lieu que cette mesure a été décidée par le législateur dans le cadre d' une vaste réforme comportant notamment une définition par la Loi du 13 Juin 1998 de la notion de temps de travail telle que les heures en chambre de veille des personnels régis par la Convention Collective du 15 Mars 1966 correspondaient désormais à du temps de travail effectif; par ailleurs, le décompte conventionnel des heures en chambre de veille s' analyse en un régime d' équivalence, lequel ne peut être institué que par décret ou par une Convention Collective ou un accord étendu; or, en raison du secteur professionnel qu' elle intéresse, la Convention Collective en cause a fait l 'objet d' un agrément mais non d' un Arrêté d' extension; Il convient de souligner en second lieu que pendant plus de vingt ans non seulement le mode conventionnel de décompte et de rémunération des heures en chambre de veille a été appliqué dans tous les établissement du secteur professionnel régi par la Convention Collective du 15 Mars 1966, mais que ce régime a été constamment

approuvé par la Cour de Cassation, encore par une décision du 9 Mars 1999 publiée à son Bulletin, jusqu' à ce que dans un Arrêt du 29 Juin de la même année elle constate l' illicéité du régime d' équivalence, toutes les associations du secteur concerné en charge d' établissements d' internat se trouvant dès lors exposées à des demandes de rappels de salaire du type de celles de Monsieur Z... et Madame X...; Dans ces conditions, contrairement à ce qu' a dit le premier juge, l 'intervention du législateur, validée par le Conseil Constitutionnel, n' est pas contraire aux dispositions de l' article 6.1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l' Homme, en ce que d' une part elle n' a pas remis en cause des décisions de justice irrévocables et n' a eu pour objet que de limiter pour l' avenir la portée d' un revirement jurisprudentiel, et en ce que d' autre part elle est justifiée par d 'impérieux motifs d' intérêt général, à savoir la nécessité d' une sécurité juridique dans les rapports institués de longue date par la négociation au sein d' une profession et la pérennité des associations en charge du service public d' accueil, d' hébergement et de suivi des personnes handicapées; l 'importance des sommes allouées à Monsieur Z... et à Madame X... permet de mesurer le coût d' une "régularisation" sur l' ensemble du secteur professionnel concerné, qui a été estimé entre 4 et 7 milliards de francs; Il y a lieu, en conséquence, de réformer le jugement entrepris et de débouter Monsieur Z... et Madame X... de leurs demandes, y compris de celles présentées pour la première fois devant la Cour au titre des Dimanches et jours fériés, qui sont la conséquence des demandes initiales; Enfin, il est équitable de ne pas faire application en l' espèce des dispositions de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile PAR CES MOTIFS,

LA COUR, Réforme le jugement entrepris et, Statuant à nouveau, Déboute Monsieur Z... et Madame X... de leurs demandes; Déboute

l'association A de sa demande au titre des frais irrépétibles; Condamne Monsieur Z... et Madame X... aux dépens de première instance et d' appel; Ainsi prononcé publiquement par Monsieur DUBOIS, B... de Chambre, et signé par lui-même et Monsieur C..., Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006941761
Date de la décision : 26/11/2002
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 OE 1

L'article 29 de la loi du 19 Janvier 2000 valide, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les versements effectués au titre de la rémunération des périodes de permanence nocturne, comportant des temps d'inaction, effectuées sur le lieu de travail en chambre de veille. Cette intervention législative n'est pas contraire à l'article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme en ce que, d'une part elle n'a pas remis en cause des décisions de justice irrévocables et n'a eu pour objet que de limiter pour l'avenir la portée d'un revirement jurisprudentiel (arrêt de la Cour de Cassation du 29 Juin 1999 constatant l'illice'té du régime d'équivalence) et en ce que, d'autre part, cette intervention est justifiée par d'impérieux motifs d'intérêt général, à savoir la sécurité juridique et la pérennité des associations chargées d'un service public.


Références :

Article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2002-11-26;juritext000006941761 ?
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