La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2002 | FRANCE | N°JURITEXT000006940355

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 18 juin 2002, JURITEXT000006940355


COUR D' APPEL DE POITIERS Chambre Sociale ARRET DU 18 JUIN 2002 AFFAIRE N° 01/01353 APPELANT: Monsieur X..., Représentant : Me Xavier BARGE (avocat au barreau de CLERMOND FERRANT) Suivant déclaration d' appel du 12 Avril 2001 d 'un jugement AU FOND du 12 MARS 2001 rendu par le CONSEIL DE PRUD' HOMMES de POITIERS. INTIME: Société S, Représentant : Me Philippe MISSEREY (avocat au barreau de POITIERS) COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré: Président:

Yves DUBOIS, Président Conseiller : Pascal VIDEAU, Conseiller Conseiller: Annick FELIZ, Conseiller Greffier : Edi

th JACQUEMET, Greffier uniquement présent(e) aux débats,

DEBATS...

COUR D' APPEL DE POITIERS Chambre Sociale ARRET DU 18 JUIN 2002 AFFAIRE N° 01/01353 APPELANT: Monsieur X..., Représentant : Me Xavier BARGE (avocat au barreau de CLERMOND FERRANT) Suivant déclaration d' appel du 12 Avril 2001 d 'un jugement AU FOND du 12 MARS 2001 rendu par le CONSEIL DE PRUD' HOMMES de POITIERS. INTIME: Société S, Représentant : Me Philippe MISSEREY (avocat au barreau de POITIERS) COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré: Président:

Yves DUBOIS, Président Conseiller : Pascal VIDEAU, Conseiller Conseiller: Annick FELIZ, Conseiller Greffier : Edith JACQUEMET, Greffier uniquement présent(e) aux débats,

DEBATS: X... l'audience publique du 22 Mai 2002, Les conseils des parties ont été entendus en leurs explications, conclusions et plaidoiries. L' affaire a été fixée pour que le délibéré soit rendu au 18 Juin 2002 Ce jour a été rendu, contradictoirement et en dernier ressort, l 'arrêt suivant :

ARRET: La Société S a pour clients les professionnels de la coiffure auxquels elle vend des produits de coiffure en concurrence avec l' Oréal, Wella et Perma. Monsieur X... a été engagé par la SA S à compter du 29 août 1988 en qualité de chef de région. Le 1er janvier 1996 il a été promu directeur des ventes de la région 1 représentant la moitié de la France. Il est avec son collègue de la région 2, le collaborateur direct du directeur commercial. La rémunération a été de 692.014F. soit 105.496,85 E en 1999 outre 541.051 F. soit 82.482,69 E de frais payés (missions, réceptions, déplacements, repas, hôtel...). X... la suite d' un entretien préalable survenu le 7 mars 2000 Monsieur X... a été licencié pour faute grave le 10 mars 2000. Par jugement du 12 mars 2001 le Conseil de Prud' hommes de Poitiers a: - dit le licenciement pour cause réelle et sérieuse, - condamné la SA S à payer à Monsieur X... les sommes de:

251.779,88 F. soit 38.383,60 E au titre de l' indemnité de

licenciement,

171.668,16F. soit 21.170,64 E au titre de l' indemnité de préavis,

5.000 F. soit 762,25 E au titre de l 'article 700 du nouveau code de procédure civile. Monsieur X... a régulièrement interjeté appel de ce jugement. Il entend voir: - dire son licenciement abusif; - confirmer le jugement en ce qui concerne les sommes allouées au titre de l' indemnité de licenciement et du préavis, -fixer à 720.335,71 E le montant des dommages-intérêts dus en réparation de son préjudice moral et financier. Il réclame la somme de 6.000 E au titre des frais irrépétibles. La SA S conclut à la réformation du jugement entrepris et entend voir dire le licenciement pour faute grave justifié. Elle sollicite voir débouter Monsieur X... de ses demandes et réclame la somme de 5.000 E au titre des frais irrépétibles. MOTIFS: Il convient d' analyser les différents griefs visés dans la lettre de rupture à laquelle il y a lieu de se référer expressément. Sur le 1er grief:

comportement vexatoire et insultant à l 'égard d' un client très important de l 'entreprise : Il résulte d' un courrier du 21 février 2000 de Mr. C, PDG d un groupe de 40 salons de coiffure et important client de la société S, qu' au cours d' un voyage professionnel au Canada, du 15 au 22 février 2000, Mr. X... l 'a insulté publiquement devant les clients de la société S. Rentré immédiatement en France il a réclamé à cette dernière le remboursement de son voyage et de ses frais et a indiqué qu' il ne désirait plus avoir Mr. X... comme interlocuteur lui interdisant la visite de ses salons de coiffure. Les premiers juges ont considéré que la teneur des propos tenus n' étant pas rapportée, il leur était impossible d' apprécier le caractère vexatoire ou non du comportement de Mr. X... et si les propos de ce dernier étaient véritablement insultants. Cependant il est justifié que pour conserver ce client important la société S a payé à Mr. C la somme de 25.800 F. hors taxes soit 3.933,18 E correspondant

au remboursement du voyage et des frais au Canada. Le comportement désobligeant de Mr. X... à l' égard d' un important et fidèle client de la société S est constitutif d' une faute et a causé à l 'employeur un grave préjudice. Sur les propos diffamatoires, l 'attitude irrespectueuse et le comportement très inquiétant de Mr. X... à l 'égard des collaborateurs, de la direction générale et commerciale de l' entreprise : Mr. X... a fait l' objet d' un avertissement le 12 octobre 1998 en raison de son attitude irrespectueuse non conforme à sa fonction et à ses responsabilités lors d' une réunion de travail du 3 octobre 1998. Il lui était reproché d' avoir perdu le contrôle de lui-même puis de s' être réfugié dans un mutisme absolu, refusant toute participation active dans la poursuite de la réunion. Le directeur commercial, Mr. H, précise "vous avez délibérément choisi de vous isoler dans votre chambre à partir de ce moment là... toute la journée du dimanche et le lundi matin vous n' avez adressé la parole à personne... L' ensemble du personnel S présent et certains clients ont remarqué votre attitude anormale, votre isolement... Nous comptons sur votre intelligence pour assumer un comportement digne de votre fonction.". Par lettre du 2 novembre 1998 Mr. Z, salarié de l' entreprise, a informé Mr. H d' un désaccord qu' il a eu avec Mr. X... lequel était alors entré dans une colère incontrôlable en lui tenant un discours des plus agressifs à son égard. Mr. D, collègue de travail, responsable de formation, écrit à M. X... le 10 novembre 1998 qu' il ne peut accepter les insultes proférées par ce dernier à son endroit lors de l 'entretien du 2 novembre 1998. Il lui écrit encore le 21 février 2000 "Il serait important de consolider nos positions et nos actions communes afin de pouvoir réagir positivement, efficacement et professionnellement. Je suis surpris par vos réactions plus qu' impulsives ainsi que de la teneur de certains de vos propos. Par lettre du 28 avril 1999, quatre VRP font part à Mr. H

de leur inquiétude concernant les méthodes de management de Mr. X... dénonçant le harcèlement moral et écrit permanent de ce dernier. Ils réclament que des directives soient données afin que les relations avec Mr. X... aient un caractère plus humain, sans agressivité ni persécution. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 avril 1999, le PDG du groupe D, Mr. P, important client de la société S, rappelle à Monsieur X... qu' il avait été convenu qu' il ne devait pas contacter les salons qui travaillent avec l' Oréal et ce afin d' éviter tout problème avec ce fournisseur principal. Mr. P indique "Discrètement, et sûrement sournoisement, vous nr avez pas joué le jeu avec mon listing client..., vous allez dans mes salons maison-mère pour pratiquer de la vente forcée.... ces problèmes proùvent votre manque de parole.... Je vous interdis d rentrer en contact de quelque manière que ce soit avec les franchisés qui sont l rOréal....". Les attestations dr anciens collègues de travail versées au débat par Mr X... font état du respect de ce dernier tant à leur égard qu' à l' égard de la direction. Cependant elles émanent d'une part de Mr Y... dont les relations datent de 1996 et 1997 et sont par conséquent antérieures aux problèmes de comportement posés par Mr X... dans les deux dernières années, d' autre part de Mr E dont les relations avec Mr X... remontent à plus de 8 années, enfin de Mr S qui a cependant été le témoin du différend ayant opposé Mr X... au gardien de nuit de l' hôtel Novotel dans la nuit du 20 au 21 juin 1998. Il résulte d' un jugement du tribunal de police de Nancy du 1er juin 1999 que Mr X... a été déclaré coupable de rixes, voies de fait ou violences légères sur la personne de Mr W, gardien de nuit à l' hôtel Novotel et condamné à une amende pour ces faits. La société S précise que Mr X... descendait dans cet hôtel en son nom dans le cadre d' un déplacement professionnel. Par courrier du 10 mars 2000 Mr D reconnaît avoir été témoin, le 24 janvier 2000, lors d' un déjeuner à

l 'hôtel Les Célestins de Vichy en présence de MM. Y..., directeur régional, et P, représentant S, de propos irrespectueux tenus à l' encontre de la direction par Mr X... lequel a déclaré: "Lors de mon passage à Boulogne.... j' ai vu Mr H cigare à la bouche et pieds sur le bureau ; quant à Mr Y..., à deux ans de la retraite, on le sent éloigné des problèmes.... il s' occupe à "tapoter" sur son ordinateur.". Il résulte de l' ensemble de ces éléments que Mr X... a dénigré les dirigeants de la société S en tenant des propos injurieux en public à leur égard, mettant en cause leur compétence; qu'en outre, malgré l' avertissement du 12 octobre 1998, il a manifesté une attitude irrespectueuse à l 'égard de ses collaborateurs qui dénoncent de façon concordante son agressivité, laquelle s' est en outre manifestée au cours d' un déplacement professionnel et a été sanctionnée pénalement. Ce comportement de Mr X..., ajouté à la répétition de faits fautifs susvisés, est d 'une gravité telle que le maintien de la relation de travail n' était plus possible même pendant la durée limitée du préavis. Mr X... prétend que son licenciement est un "coup monté", la SA S ayant voulu se débarrasser de lui en raison de sa restructuration puisqu' elle a été reprise par le groupe H. La société S oppose que son rachat par le groupe H est antérieur de trois années au licenciement de Mr X... En tout état de cause, au vu de l' ensemble des éléments de l' espèce, rien ne permet objectivement de dire que la société S avait des raisons de se séparer de Mr X... différentes des motifs énoncés dans la lettre de licenciement. Le jugement entrepris sera réformé en ce qu' il a dit le licenciement pour cause réelle et sérieuse et non pour faute grave et en ce qu' il a alloué à Mr X... une indemnité de licenciement, une indemnité de préavis et une somme au titre des frais irrépétibles de première instance. Enfin l'équité commande de ne pas faire application en l 'espèce des dispositions de l article 700 du nouveau

code de procédure civile. PAR CES MOTIFS.

La Cour, *

Réforme le jugement entrepris, *

Dit le licenciement pour faute grave fondé, *

Déboute, Monsieur X... de ses demandes, *

Déboute la société S de sa demande au titre des frais irrépétibles, *

Condamne M. Z... aux dépens de première instance et d' appel. Ainsi prononcé publiquement par Madame Annick A..., conseiller. Signé par Monsieur Yves DUBOIS, président, et Monsieur Michel GENITEAU, greffier, qui a assisté au prononcé de l 'arrêt.

Le greffier,

Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006940355
Date de la décision : 18/06/2002
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement disciplinaire

Le fait, pour un salarié, de dénigrer les dirigeants de la société en leur tenant des propos injurieux mettant en cause leur compétence en public, de manifester une attitude irrespectueuse à l'égard de ses collaborateurs qui dénoncent son agressivité d'ailleurs concrétisée lors d'un déplacement professionnel et sanctionnée pénalement constitue un comportement d'une gravité telle que le maintien de la relation de travail n'était plus possible même pendant la durée du préavis.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2002-06-18;juritext000006940355 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award