N°
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PAU
L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
ORDONNANCE DU dix huit Juillet deux mille vingt quatre
Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/02096 - N° Portalis DBVV-V-B7I-I5DJ
Décision déférée ordonnance rendue le 16 JUILLET 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,
Nous, France-Marie DELCOURT, Conseillère, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 5 juillet 2024, assistée de Marie-Edwige BRUET, Greffier, en présence de [V] [M], greffière stagiaire,
APPELANT
Monsieur X SE DISANT [A] [B]
né le 02 Janvier 1993 à [Localité 6]
de nationalité Algérienne
Retenu au centre de rétention d'[Localité 3],
Comparant et assisté de Maître Djalil AHMADI, avocat au barreau de Pau et de Monsieur [D], interprète assermenté en langue arabe
INTIMES :
LE PREFET DE LA HAUTE-VIENNE, avisé, absent,
MINISTERE PUBLIC, avisé de la date et heure de l'audience,
ORDONNANCE :
- réputée contradictoire, après débats en audience publique,
*********
Par décision du 13 juillet 2024 notifiée le même jour à 15 h40, le préfet de la Haute-Vienne a ordonné le placement de [A] [B] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire. Il a saisi par requête réceptionnée le 15 juillet 2024 à 12 h21 et enregistrée le 15 juillet 2024 à 15h00 le juge des libertés et de la détention de Bayonne d'une demande tendant à la prolongation de la rétention pour une durée de 28 jours.
Parallèlement et par requête du 15 juillet 2024 réceptionnée le 15 juillet 2024 à 10h49 et enregistrée par le greffe du juge des libertés et de la détention le 15 juillet 2024 à 15h00, [A] [B] a contesté la régularité de la décision de son placement en rétention administrative.
Par ordonnance du 16 juillet 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne a ordonné la jonction des deux dossiers et statué en une seule et même ordonnance aux termes de laquelle il a :
- déclaré recevable la requête de [A] [B] en contestation de placement en rétention,
- rejeté la requête de [A] [B] en contestation de placement en rétention,
- déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le préfet de la Haute-Vienne,
- déclaré régulière la procédure diligentée à l'encontre de [A] [B],
- dit n'y avoir lieu à assignation à résidence,
- ordonné la prolongation de la rétention de [A] [B] pour une durée de vint-huit jours à l'issue du délai de 48 heures de la retention.
Vu la notification de cette décision faite à [A] [B] le 16 juillet 2024 à 16h52,
Vu la déclaration d'appel motivée transmise par la CIMADE pour le compte de [A] [B] et les pièces jointes, reçues le 17 juillet 2024 à 10h43 au greffe de la cour,
À l'appui de son appel, [A] [B] fait valoir que la décision de placement en rétention porte atteinte à sa vie privée et familiale. Il fait notamment observer qu'il vit en couple avec Madame [Y] [K], de nationalité française, et qu'ils ont un enfant en commun, [W] [B] qu'il a reconnu avant sa naissance. Il précise que sa compagne est majeure depuis le 3 mai 2024 et que si, jusqu'à présent ils ne vivaient pas sous le même toit puisque cette dernière était mineure, ils passaient l'intégralité de leurs journées ensemble. Il ajoute qu'ils sont désormais tous les trois installés chez son grand-père et ce, depuis près de trois mois et qu'ils ont effectué une demande de logement social.
À l'audience, le conseil de [A] [B] a maintenu le moyen développé dans la déclaration d'appel.
SUR QUOI
En la forme :
L'appel est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu par l'article R.743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur le fond :
Il ressort des pièces de la procédure que [A] [B], né le 2 janvier 1993 à [Localité 6] (Algérie) et de nationalité algérienne, a sollicité le 25 juillet 2023 auprès de la préfecture de la Haute-Vienne la délivrance d'une carte de séjour en raison de ses liens privés et familiaux en France.
Le 31 mai 2024, [A] [B] a fait l'objet d'un arrêté du préfet de la Haute-Vienne portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, notifié le 1er juin 2024.
Il a été interpellé le 13 juillet 2024 à 1h30 du matin, alors qu'il circulait dans le centre ville de [Localité 4] au volant d'un véhicule et qu'il était au téléphone. Il était dépourvu de tout document d'identité ou de voyage en cours de validité.
Lors de sa garde à vue, il a souhaité faire prévenir [L] [E], demeurant [Adresse 1] à [Localité 4] et donné son numéro de portable, en précisant que c'était 'la personne avec laquelle il vivait habituellement'. Les policiers ont tenté en vain de joindre cette personne à qui
ils ont laissé un message sur la boîte vocale. En outre, après vérification de ses empreintes digitales, il s'est avéré que [A] [B] était connu des services de police sous quatre identités différentes : [N] [H], né le 2 janvier 1998 à [Localité 7], [A] [B], né le 2 janvier 1993, [N] [T], né le 3 janvier 1994 à [Localité 5] et [N] [P], né le 2 janvier 1998 à [Localité 5].
Par ailleurs, lors de son audition, [A] [B] a indiqué être domicilié chez [G] [E] [Adresse 1] à [Localité 4], être occupant à titre gratuit du logement, 'être célibataire et avoir un enfant âgé de un an qui n'est pas à sa charge'. Sur interpellation, il a précisé que sa compagne [Y] [K] et son fils [W] vivaient au [Adresse 2] à [Localité 4]. Interrogé sur les raisons pour lesquelles il ne vivait pas avec eux, il a répondu qu'il avait 'des problèmes avec sa belle-mère qui ne voulait pas de lui au domicile car sa fille était mineure'. Il a précisé en outre qu'il était en France depuis 2017, reconnu qu'il s'était bien vu notifier l'obligation de quitter le territoire français le 1er juin 2024 et qu'il avait fait un recours contre cette décision. Il n'a pas contesté avoir plusieurs alias et a indiqué qu'il les avait donnés par 'peur de retourner au bled'.
Le 14 juillet 2024 à 11h39, le préfet de la Haute-Vienne a transmis aux autorités consulaires algériennes une demande de laissez-passer consulaire pour le compte de [A] [B]. Cette demande est en cours.
Même si [A] [B] ne vise pas expressément l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relative à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles, il fonde son recours sur ce texte et plus particulièrement sur l'article 6 - 4° de cet accord.
Les dispositions de cet article fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française.
Le certificat de résidence d'un an portant la mention 'vie privée et familiale' est délivré de plein droit : (...) 4° au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an'.
En l'espèce, si l'acte de naissance de [W] [B] qui figure au dossier mentionne que l'enfant est né le 21 juin 2023 à [Localité 4] de la relation de [A] [B] et de [Y] [K] et que ce dernier l'a reconnu le 4 janvier 2023, soit avant sa naissance en même temps que celle-ci, l'intéressé n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'il subviendrait aux besoins de son fils ou qu'il aiderait financièrement, même modestement, la mère de l'enfant.
Il ne sera accordé aucun crédit aux nouvelles déclarations de [A] [B] exposées dans sa déclaration d'appel selon lesquelles il aurait, selon ses dires, son fils à charge, dès lors qu'il avait déclaré spontanément lors de sa garde à vue, le 13 juillet dernier, qu'il était 'célibataire', qu'il avait un enfant de un an qui n'était 'pas à sa charge' et même précisé qu'il ne vivait pas avec eux.
Même si [Y] [K] est désormais majeure, depuis le 3 mai 2024, [A] [B] ne justifie pas davantage vivre avec elle et leur enfant, ni avoir déposé avec elle une demande de logement social.
Le moyen sera donc rejeté.
L'appelant ne soulevant aucun autre moyen, la décision déférée, motivée de façon pertinente et circonstanciée, sera en conséquence confirmée.
PAR CES MOTIFS :
Déclarons recevable en la forme l'appel formé par [A] [B],
Confirmons l'ordonnance entreprise,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture de la Haute-Vienne,
Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.
Fait au Palais de Justice de PAU, le dix-huit juillet deux mille vingt-quatre à
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Marie-Edwige BRUET France-Marie DELCOURT
Reçu notification de la présente par remise d'une copie
ce jour 18 juillet 2024
Monsieur [A] [B] par mail au centre de rétention d'[Localité 3]
Pris connaissance le : À
Signature
Maître Djalil AHMADI, par mail,
Monsieur le Préfet de la Haute-Vienne, par mail