SF/CD
Numéro 24/02273
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 09/07/2024
Dossier : N° RG 22/02961 - N° Portalis DBVV-V-B7G-ILOY
Nature affaire :
Demande relative à l'exécution d'une promesse unilatérale de vente ou d'un pacte de préférence ou d'un compromis de vente
Affaire :
[S] [L] [E] [P],
[A] [Y]
C/
[X] [M], [V] [B],
SARL OCI IMMOBILIER
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 09 Juillet 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 07 Mai 2024, devant :
Madame FAURE, Présidente
Madame de FRAMOND, Conseillère, magistrate chargée du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile
Madame BLANCHARD, Conseillère
assistées de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTS :
Monsieur [S] [L] [E] [P]
né le 31 décembre 1977 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 7]
Madame [A] [Y]
née le 22 février 1983 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentés et assistés de Maître DABADIE, avocat au barreau de PAU
INTIMES :
Madame [X] [M]
née le 25 septembre 1975 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 5]
Monsieur [V] [B]
né le 02 avril 1974 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentés et assistés de Maître MOUTET FORTIS de la SCP MOUTET-LECLAIR, avocat au barreau de PAU
SARL OCI IMMOBILIER, exerçant sous l'enseigne CENTURY 21, dont le siège social est [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal, prise en son établissement
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée par Maître MARIOL de la SCP LONGIN/MARIOL, avocat au barreau de PAU
Assistée de Maître OUTTERS-LEPAROUX, avocat au barreau de STRASBOURG
sur appel de la décision
en date du 04 OCTOBRE 2022
rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PAU
RG numéro : 19/01057
EXPOSE DU LITIGE
Selon mandat exclusif de vente du 11 mai 2018, M. [V] [B] et Mme [X] [M] ont confié à la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER la vente de leur appartement ainsi que d'une cave et d'une cour, situés à [Localité 7], composant les lots n° 7, 13 et 14 d'un immeuble en copropriété.
Suivant compromis de vente du 22 juin 2018 établi par la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER, M. [S] [P] et Mme [A] [Y] se sont portés acquéreurs du bien, pour le prix de 213 000 €, en ce compris les honoraires de l'agence immobilière à hauteur de 13 500 €, supportés par les vendeurs. Ils versaient à l'agence une somme de 10 000 € en garantie de la réitération de la vente.
Par exploit d'huissier de justice du 22 octobre 2018, M. [B] et Mme [M] ont fait sommation à M. [P] et Mme [Y] d'avoir à comparaître en l'étude de Me [H], notaire à [Localité 7], aux fins de régularisation de l'acte authentique de vente.
Les acquéreurs ne s'étant pas présentés au rendez-vous de signature, les consorts [B]/[M] les ont informés, par courrier recommandé avec accusé de réception du 6 novembre 2018, de leur volonté de ne pas faire constater la vente, mais d'obtenir l'indemnité résultant de la clause pénale figurant dans le compromis, et de leur intention de ne pas leur restituer le dépôt de garantie.
Par actes d'huissier de justice du 17 mai 2019, et après tentatives de résolution amiable du litige, M. [P] et Mme [Y] ont fait assigner M. [B], Mme [M] et la SARL Century 21 OCI Immobilier devant le tribunal judiciaire de Pau aux fins d'obtenir la nullité du compromis de vente, la restitution du dépôt de garantie et l'octroi de dommages et intérêts.
Suivant jugement contradictoire en date du 4 octobre 2022 (RG n° 19/01057), le tribunal a :
- débouté M. [P] et Mme [Y] de l'ensemble de leurs demandes,
- condamné M. [P] et Mme [Y] à payer à M. [B] et Mme [M] la somme de 15 000 € en application de la clause pénale avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, soit le 22 octobre 2018,
- condamné la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER à restituer à M. [B] et Mme [M] la somme de 10 000 € au titre du dépôt de garantie à valoir sur la clause pénale due par les acquéreurs défaillants,
- condamné M. [P] et Mme [Y] à payer à la SARL Century 21 OCI Immobilier la somme de 13 500 €,
- condamné M. [P] et Mme [Y] à payer à M. [B] et Mme [M] la somme de 3 000 € et à la SARL Century 21 OCI Immobilier la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné les mêmes aux entiers dépens,
- rejeté toute demande autre ou plus ample formée par les parties,
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.
Le tribunal a retenu :
- que M. [P] et Mme [Y] n'apportaient pas la preuve de l'existence d'un vice du consentement ou de tout autre comportement de la part des vendeurs de nature à engager leur responsabilité contractuelle ou délictuelle, ces derniers démontrant au contraire avoir loyalement communiqué toutes les informations en leur possession sur le bien vendu,
- que M. [P] et Mme [Y] avaient eu plusieurs fois la possibilité d'exercer leur droit de rétractation à la vente,
- qu'il ne ressortait du dossier aucune faute de la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER, ni aucun lien de causalité certain entre ses manquements prétendus et le préjudice dont les acquéreurs demandent la réparation,
- qu'il est établi que les acquéreurs n'avaient pas sollicité leur prêt dans le délai fixé à la condition suspensive du compromis de vente, et s'étaient volontairement abstenus de réitérer l'acte authentique de vente après mise en demeure, justifiant que la clause pénale soit acquise aux vendeurs,
- que de leur côté les vendeurs ne prouvaient pas l'existence d'un lien de causalité entre le comportement fautif des acquéreurs et les préjudices qu'ils allèguent,
- que la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER était tenue de verser aux vendeurs le dépôt de garantie en application du compromis de vente, à valoir sur la clause pénale due par les acquéreurs,
- que par leur refus abusif de signer l'acte authentique, M. [P] et Mme [Y] avaient privé l'agence immobilière du montant de ses honoraires en cas de vente, justifiant qu'ils soient condamnés à lui payer la somme de 13 500 € à ce titre,
- que la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER ne produisait aucun élément démontrant que M. [P] et Mme [Y] auraient agi dans l'intention de lui nuire.
M. [P] et Mme [Y] ont relevé appel par déclaration du 2 novembre 2022 (RG n° 22/02961), demandant l'annulation du jugement et à tout le moins sa réformation.
Aux termes de leurs dernières conclusions du 10 mai 2023, M. [S] [P] et Mme [A] [Y], appelants, entendent voir la cour :
In limine litis,
- annuler le jugement,
Sur le fond,
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté toute demande autre formée par les parties,
Statuant à nouveau,
- déclarer nul et de nul effet le compromis de vente,
En conséquence,
- voir condamner M. [B] et Mme [M] à leur payer les sommes de :
- 10.000 € en restitution du dépôt de garantie majoré des intérêts au taux légal, à compter de l'assignation et jusqu'à parfait paiement,
- 8 605 € correspondant au montant total des loyers qu'ils ont exposés,
- 197,20 € correspondant aux frais bancaires relatifs à l'annulation de leur emprunt immobilier,
- 724,44 € au titre des frais de garde meubles,
- 120 € au titre de l'annulation de leur déménagement,
soit une somme totale de 19 646,64 €,
- les voir condamner à leur payer au titre du préjudice moral la somme de 7 000 €,
- les débouter de toutes demandes,
- les débouter de leur appel incident,
- voir condamner la SARL CENTURY 21 au paiement des sommes de :
- 13 500 € en réparation du préjudice matériel,
- 7 000 € en réparation du préjudice moral,
- voir rejeter toutes demandes, tant des vendeurs, que de l'agence immobilière,
A titre subsidiaire,
- les voir garantis de toutes condamnations par la SARL Century 21 OCI Immobilier,
- débouter l'agence immobilière de ses demandes tant à titre principal, qu'à titre subsidiaire, ainsi qu'à titre infiniment subsidiaire, et de tout appel incident,
- déclarer irrecevable, et en tout état de cause, infondée sa demande fondée sur les dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- condamner, in solidum, les consorts [B]/[M], et la SARL CENTURY 21 représentée par M. [O] [U], au paiement d'une indemnité de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris le coût du procès-verbal de constat (pièce n° 21) et à tous frais subséquents.
Au soutien de leurs prétentions, M. [P] et Mme [Y] font valoir, au visa des articles 12 et 455 du code de procédure civile, et 1103, 1104, 1130, 1137 et suivants, 1240, et 1992 du code civil :
- que le premier juge n'a pas motivé sa décision, et le jugement encourt donc la nullité se contentant de formulation vague et imprécise ; que la lecture de la décision laisse penser qu'ils ont été défavorisés ;
- que les consorts [B]/[M] ont engagé leur responsabilité contractuelle en manquant à leur devoir d'information loyale et claire tant dans l'annonce commerciale flatteuse du bien, éloignée de la réalité, que concernant la présence d'amiante dégradée dans la toiture nécessitant des travaux, l'absence de remise des documents d'informations sur la copropriété ou des pages incomplètes, la présentation imprécise et erronée d'une servitude de passage grevant le bien, la défaillance du système électrique se révélant non conforme, l'impossibilité de visiter la cave avant la signature du compromis ;
- que ces manquements leur ont causé un préjudice dont ils leur doivent réparations ;
- S'agissant de la responsabilité de la SARL CENTURY 21, les appelants soutiennent que l'agence, qui a rédigé le compromis, a engagé sa responsabilité délictuelle à leur égard et n'a pas respecté son obligation de conseil et d'information en ne vérifiant pas l'exactitude et la présence des éléments obligatoires devant constituer le compromis de vente ;
- que les vendeurs et l'agence immobilière ont usé de stratagèmes pour les conduire à signer le compromis de vente et laisser passer le délai de rétractation, alors qu'ils sont novices en la matière, et ne se seraient pas engagés en l'absence de ces manoeuvres, ou l'auraient fait à un moindre prix ;
- qu'ils ne se sont pas rétractés dans le délai légal après avoir eu notification du compromis de vente car ils n'ont découvert l'ensemble des manquements de l'agent immobilier qu'après communication des documents par celui-ci, juste avant la signature de l'acte authentique ;
- qu'ils justifient de frais de loyers, de garde meubles, d'annulation de déménagement et de frais inhérents à l'annulation de leur prêt immobilier dont ils demandent le remboursement ;
- qu'ils ont subi un préjudice moral du fait des préoccupations incessantes à devoir demander les documents à plusieurs reprises, juste avant la régularisation de l'acte, et de la défiance qu'ils ont dû avoir à l'égard des vendeurs et de l'agent immobilier du fait de leurs nombreux manquements ;
- que la clause pénale prévue au compromis de vente n'est pas une indemnité d'immobilisation, et a pour but de sanctionner le cocontractant qui n'aurait pas rempli loyalement ses obligations, de sorte que si elle doit être appliquée, le comportement fautif des vendeurs doit être pris en compte et conduire à la réduire à la somme de 1 euro,
- que les vendeurs et l'agence immobilière ne justifient pas que le bien n'a pas été vendu, par la même agence immobilière ;
- qu'ils n'ont pas de lien contractuel avec l'agence immobilière de sorte que la clause pénale ne peut créer de droits à son profit.
Par conclusions notifiées par RPVA le 20 février 2023, M. [V] [B] et Mme [X] [M], intimés et appelants incident, demandent à la cour de :
- débouter les consorts [Y]/[P] de toutes leurs demandes,
- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il les a déboutés de leurs autres demandes,
Statuant à nouveau,
- condamner solidairement les consorts [Y]/[P] à leur payer une somme de 14 000 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2018 en réparation des préjudices subis,
- condamner la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER à leur payer la somme de 5 000 € titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- condamner solidairement les consorts [Y]/[P] et la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER à leur payer une somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les mêmes aux entiers dépens,
Subsidiairement et dans l'hypothèse où il serait fait droit aux réclamations des consorts [P]/[Y],
- condamner la SARL CENTURY 21 OCI IMMOBILIER à les relever indemnes de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre eux sur les demandes des consorts [Y]/[P],
- condamner la même à leur verser une somme de 15 000 € en réparation du préjudice né de sa faute.
Au soutien de leurs demandes, ils font valoir :
- que le jugement est parfaitement motivé en droit et en faits, et que les dispositions de l'article 12 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité ;
- que les griefs relatifs à l'annonce ne sauraient leur être imputés dès lors qu'elle a été rédigée et publiée par l'agence immobilière, et qu'ils n'expliquent pas en quoi l'annonce ne serait pas conforme à la réalité ;
- que les consorts [Y]/[P] allèguent un manque de loyauté dans le cadre de leur obligation précontractuelle d'information mais ne démontrent aucun vice du consentement, ni manquement de la part des vendeurs ;
- qu'ils ont loyalement communiqué toutes les informations en leur possession, de sorte que les acquéreurs ont eu toutes possibilités de changer d'avis avant la signature du compromis et dans le délai ;
- qu'aucun lien de causalité n'est établi entre les fautes qui leur sont reprochées et le préjudice dont les consorts [Y]/[P] demandent réparation ;
- que les consorts [Y]/[P] ne peuvent prétendre à la réparation d'un préjudice moral dès lors qu'ils ont usé de manoeuvres déloyales et de prétextes pour renoncer à l'acquisition ;
- qu'ils sont en droit de mettre en oeuvre la clause pénale prévue au compromis de vente dès lors qu'ils n'ont pas respecté leur engagement de solliciter un prêt et d'en justifier avant le 30 août 2018 ;
- que l'attitude des consorts [Y]/[P] leur a causé un préjudice du fait qu'ils ont libéré l'appartement en juillet 2018 dès l'expiration du délai de rétractation, que leur bien a été immobilisé plusieurs mois et qu'ils ont dû s'installer en location jusqu'en juin 2019, date à laquelle l'appartement a été vendu à des tiers sans difficulté, avec la même annonce et sans réclamation, ce qui justifie l'octroi d'une somme de 14 000 € correspondant aux loyers qu'ils ont dû supporter en plus du remboursement de leur emprunt ;
- que le compromis de vente a été rédigé par l'agence immobilière qui est tenue à une obligation de résultat quant à l'efficacité juridique de son acte, et devait vérifier que tous les documents nécessaires avaient bien été transmis, qu'elle est donc responsable de leur préjudice ;
- qu'elle a retenu abusivement le dépôt de garantie versé par les consorts [Y]/[P] malgré plusieurs demandes.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 17 juillet 2023, la SARL Century 21 OCI Immobilier, intimée et appelante incident, demande à la cour de :
- débouter les consorts [P]/[Y] de leur demande d'annulation du jugement dans la mesure où il sera constaté que celui-ci est parfaitement motivé tant en faits que sur le droit,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, excepté en ce qu'il a rejeté toute demande autre formée par les parties,
Par conséquent,
- débouter les consorts [Y]/[P] de l'ensemble de leurs demandes formulées à son encontre,
- débouter les consorts [B]/[M] de l'ensemble de leurs demandes formulées à son encontre,
A titre subsidiaire, si le jugement venait à être réformé,
- réduire à de plus justes proportions les montants sollicités,
- condamner les consorts [B]/[M] à la relever et garantir de toute condamnation pouvant intervenir à son encontre,
- lui donner acte de ce qu'elle a restitué le séquestre à hauteur de 10 000 € aux consorts [B]/[M] en date du 18 octobre 2022 en exécution du jugement,
- réformer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes formulées au titre de la procédure abusive,
Et statuant à nouveau,
- condamner les consorts [P]/[Y] à lui verser la somme de 4 000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,
En tout état de cause,
- condamner solidairement les consorts [Y]/[P], ou tout succombant, à lui verser la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner solidairement, ou tout succombant, en tous les frais et dépens de la présente procédure.
Au soutien de ses demandes, la SARL CENTURY 21 fait valoir, au visa des articles 1240 et 1231-6 du code civil, 32-1 du code de procédure civile et 46 de la loi du 10 juillet 1965 :
- que le jugement est parfaitement motivé en faits et en droit dès lors que le juge a rappelé les dispositions juridiques qu'il appliquait avant de motiver sa décision au regard des circonstances de l'espèce, et que l'article 12 alinéa premier du code de procédure civile n'est pas prescrit à peine de nullité ;
- qu'elle n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité, les consorts [Y]/[P] se contentant d'évoquer de prétendues fautes en des termes généraux, qui ne sont que des prétextes invoqués soit plusieurs mois après la signature du compromis, soit après l'introduction de l'instance ;
- que tout les documents leur ont été communiqués en temps utile et qu'ils ont pu visiter le bien à plusieurs avant la signature du compromis ;
- que les éventuels défauts constatés sont minimes et sans incidence sur la validité du compromis ;
- que le litige trouve son origine dans le comportement fautif des acquéreurs, qui n'expliquent pas quelle a été l'information nouvelle à l'origine de leur refus de réitérer la vente, et quel serait le lien de causalité entre son comportement et le préjudice qu'ils allèguent ;
- qu'elle ne saurait être responsable du dol des vendeurs s'il est retenu qu'ils ont caché des informations aux acquéreurs ;
- que le préjudice, tant matériel que moral, des consorts [Y]/[P] n'est pas justifié et ne résulte que de leur seule décision de ne pas acquérir ; qu'ils demandent une double indemnisation, aux vendeurs et à l'agence immobilière, pour un préjudice unique, qui au demeurant n'est pas justifié, et sans lien de causalité avec les fautes alléguées ;
- que leur comportement fautif lui a causé un préjudice du fait qu'elle n'a jamais perçu sa commission, la réitération de la vente n'ayant pas eu lieu ;
- qu'elle n'a commis aucun manquement ni résistance abusive, au vu du litige en cours, en conservant le dépôt de garantie dans l'attente d'une décision de justice, les consorts [B]/[M] ne rapportant pas la preuve de l'existence d'un préjudice particulier justifiant de l'appeler en garantie ;
- que la clause pénale ne trouve à s'appliquer qu'à l'encontre de l'acquéreur ou du vendeur qui refuserait abusivement de réitérer la vente ;
- que si les désordres étaient retenus, ils ne sauraient entraîner sa condamnation dès lors qu'ils auraient été cachés par les vendeurs qui en avaient connaissance ;
- que la présente action est constitutive d'un abus de droit dès lors qu'elle n'est intentée dans la seule intention de lui nuire, les consorts [Y]/[P] se contentant de soulever des éléments qu'ils ne démontrent pas et desquels ils ne tirent aucune conséquence quant à la validité du compromis de vente ou à leur refus de réitérer la vente.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 avril 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de nullité du jugement pour défaut de motivation :
L'article 455 du code de procédure civile prévoit que le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, et qu'il doit être motivé. Cette exigence est requise à peine de nullité aux termes de l'article'458, alinéa'1, du même code.
La motivation consiste à mentionner dans son jugement les raisons de sa décision, en fait comme en droit (Cass. 2e'civ., 16'févr. 2012, n°'11-12.570) ;
Or en l'espèce, si le 1er juge a visé les prétentions et moyens des parties par référence à leurs dernières conclusions, comme le permet l'article 455 susvisé, la Cour constate que dans sa motivation, aucun moyen de fait n'est développé au soutien de la décision, qui se contente, après avoir rappelé les textes applicables, de constater l'absence de preuve rapportée par les demandeurs et d'affirmer, sans s'appuyer sur des considérations circonstanciées tirées des faits ou pièces versés par les parties, que M. [P] et Mme [Y] avaient eu plusieurs fois la possibilité d'exercer leur droit de rétractation et ne rapportaient pas la preuve de l'existence d'un vice de consentement ou de tout autre comportement de nature à engager la responsabilité contractuelle ou délictuelle des vendeurs. De même, s'agissant de l'agence immobilière, le 1er juge se contente d'affirmer qu'il ne ressort de l'examen des pièces et de la procédure, examen dont il ne rend aucun compte, aucune faute de l'agence immobilière dans ses obligations.
En statuant ainsi sans exposer de manière circonstanciée son analyse des éléments de la cause, le tribunal n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé, et une telle motivation équivaut à une absence de motivation conduisant à prononcer l'annulation du jugement... (2e chambre civile 14 avril 2022 N° 20-22.174)
La cour évoque l'affaire au fond :
Sur la demande d'annulation du compromis de vente pour dol de M. [P] et Mme [Y] contre Mme [M] et M. [B] :
Selon l'article 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
En vertu de l'article 1130 du code civil l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
M. [P] et Mme [Y] soutiennent que leur consentement a été vicié par les man'uvres de M. [B] et Mme [M] et de la SARL CENTURY 21 pour les conduire à signer le compromis de vente en présentant faussement les qualités de l'immeuble dans l'annonce, et en retenant des informations déterminantes pour leur consentement ne leur permettant pas d'exercer utilement leur droit de rétractation.
Les appelants estiment avoir été trompés sur les points suivants :
- sur l'étendue d'une servitude de passage dans la cour,
- sur la présence d'amiante dégradée en toiture du garage,
- sur des désordres restant dans l'appartement suite à un dégât des eaux antérieur
- sur des installations électriques dégradées réparées après enlèvement des meubles,
- sur les erreurs de superficie loi Carrez,
- sur l'erreur relative au sol de la cave en terre battue au lieu de ciment,
- sur la remise tardive des diagnostics après signature du compromis.
Il est versé aux débats l'annonce publiée par la SARL CENTURY 21 relative à l'appartement de 6 pièces situées à [Localité 7], de 135,2 m² rédigée ainsi :
'Bel appartement bourgeois 6/7 p en 3e et dernier étage avec balcon plein sud, vaste pièce de vie avec cheminée marbre, hauts plafonds, parquets, cuisine équipée contemporaine, 4 chambres, un bureau, une salle de bains, possibilité salle d'eau. Double vitrage. Appartement très lumineux. Cour privative et grand garage sont les plus de cet appartement. État habitable sans travaux'.
Mme [Y] a visité l'appartement le 5 juin 2018, alors encore occupé par les vendeurs, la cour et le garage, puis avec M. [P] le 8 juin 2018.
Il est allégué par M. [P] et Mme [Y] qu'ils n'ont pas pu visiter la cave avant la signature du compromis, ce que contestent M. [B] et Mme [M].
Les pièces du dossier ne permettent pas de trancher ce point.
Il ressort des pièces versées aux débats que les diagnostics techniques réalisés en vue de la vente par ALLODIAGNOSTIC ont donné lieu à pas moins de 3 rapports :
- le 18 mai 2018 jour de la visite des biens par le diagnostiqueur, le rapport conclut à l'absence d'amiante et une installation intérieure électrique ne comportant aucune anomalie, et à la présence de plomb ; la cave est mentionnée comme ayant un sol en ciment ;
- le 18 juin 2018 un nouveau rapport mentionne la présence d'amiante dans la cave (sol en ciment) et le garage dont le matériau est dégradé nécessitant une évaluation périodique ;
- le 22 juin 2018, jour de la signature du compromis, un dernier rapport qui, sur l'amiante, mentionne finalement un matériau en amiante non dégradé dans le garage et annexes (cave).
Ce dernier rapport précise alors que la cave est en terre battue.
Or il ressort d'un mail adressé le 20 juin 2018 (pièce 14 des appelants), soit 2 jours avant la signature du compromis de vente, à Mme [Y] que la SARL CENTURY 21 lui a transmis 11 pièces jointes relatives à la copropriété :
- procès-verbal d'assemblée générale de mars 2015,
- communication de M. [B] pour l'assemblée générale 2016,
- carnet d'entretien de la copropriété,
- État daté, diagnostic actualisé DDT,
- Éléments de chiffrage couverture,
- Photos prise électrique garage,
documents transmis par le syndic à l'agence immobilière.
Dans ce mail, l'agence précise à Mme [Y] qu'elle joint 'le diagnostic actualisé avec le toit du garage ainsi qu'une photo montrant comme demandé la présence d'une prise électrique'.
Dans ce mail était aussi communiqué à Mme [Y] un mail (pièce 15 des appelants) adressé le 2 juin 2016 par M. [B] aux copropriétaires de l'immeuble en sa qualité de syndic en vue de l'assemblée générale clôturant l'exercice 2015.
Il aborde la question des factures des charges payées, des fuites d'eau constatées précédemment qui sont résolues, et à propos de l'immeuble :
Un représentant de la société Trait-carré est venu expertiser le toit jeudi 26 mai. Il a constaté un état de vétusté assez important (plus de 60 ans) même s'il n'est pas catastrophique. Il s'oriente vers une proposition de renouvellement complet de la couverture. Il est en train d'établir un devis en ce sens avec possibilité d'intervenir à partir de fin septembre.
Ces documents reçus avant la signature du compromis de vente informaient clairement M. [P] et Mme [Y], de l'état vétuste de la toiture, de l'absence de travaux engagés en 2015/2016 par la copropriété et de la nécessité de prévoir ceux-ci à court ou moyen terme dans leur budget, et la présence d'amiante sur le toit du garage.
Le compromis de vente a été signé entre les parties le 22 juin 2018.
Il est expressément rappelé dans ce compromis page 24 que le délai de rétractation de 10 jours ne court qu'à compter du lendemain de la communication des documents devant être remis à l'acquéreur en vertu de l'article L7212 du code de la construction et de l'habitation relatif à l'organisation de la copropriété.
A été joint au compromis, ainsi qu'il est dit en page 17 et paraphé par les signataires le dossier de diagnostics techniques réalisés par la société AlloDiagnostic qui mentionne une superficie du lot numéro 135,25 m².
Il est également précisé dans le compromis en page 18 que l'immeuble est raccordé au réseau public de collecte des eaux usées.
Il est enfin mentionné l'existence d'une servitude rédigée comme suit :
« les propriétaires vendeurs déclarent qu'une servitude de passage existe sur le lot 14 afin de donner accès au lot 9 (un WC) suivant plan joint aux présentes, appartenant à Mme [R] et loué à usage commercial avec le lot 8.
Dans les faits : dans la cour, le long du bâtiment A depuis la voie publique dénommée [Adresse 8] jusqu'au WC tel que matérialisé en traits discontinus teinte jaune sur le plan, existence d'une servitude grevant à titre perpétuel et réel le lot numéro 14 (fonds servant). Au bénéfice des occupants des lots numéro 8 et 9 et de leurs salariés (à l'exclusion de la clientèle).
La servitude de passage est limitée à un usage strictement piétonnier [...] du lundi au dimanche de 8 heures du matin à 20 heures du soir.»
Par un courrier recommandé du 26 juin reçu le 30 juin 2018 par Mme [Y], la SARL CENTURY 21 leur a adressé copie de :
- le compromis de vente,
- les rapports d'expertise,
- l'état des servitudes risquées informations sur les sols,
- un pré-état daté,
- le règlement de copropriété,
- le dernier procès-verbal d'assemblée générale,
- le carnet d'entretien de la copropriété,
Ce courrier rappelle qu'il ouvre un délai de 10 jours de rétractation à compter du lendemain de la réception de la lettre.
Puis un nouveau courrier recommandé du 3 juillet 2018 de l'agence immobilière reçu par Mme [Y] le 7 juillet 2018, lui adresse les rapports d'expertise sur l'amiante correspondant à la dernière version (mention de l'amiante non dégradée et du sol en terre battue de la cave), et fait expressément courir un nouveau délai de rétractation de 10 jours pour la rétractation.
S'agissant donc du grief sur la dissimulation que le sol de la cave était en terre battue, et que la toiture du garage comportait de l'amiante, les appelants ont obtenu cette information par la transmission du bon diagnostic le 7 juillet 2018 qui leur ouvrait un délai de 10 jours pour renoncer à l'acquisition du bien de M. [B] et Mme [M].
Et si la copie du règlement de copropriété s'est avérée transmise le 26 juin 2018 de manière incomplète (impression des seules pages impaires), il leur a été à nouveau envoyé le 24 juillet 2018 dont ils ont accusé réception sans demander à bénéficier d'un nouveau délai et sans manifester leur intention de se rétracter ou de renoncer à leur acquisition.
S'agissant de la servitude de passage :
La cour observe que dans le compromis figure bien la mention des deux lots 8 et 9 bénéficiaires du droit passage même si la première phrase mentionne que le lot numéro 8, mais le WC fait partie du lot numéro 9.
Il n'est pas justifié des pièces qui ont été jointes au compromis, et notamment du plan de situation des lots 8, 9 et 14, mais le plan de l'immeuble a ensuite été envoyé par le notaire à M. [P] et Mme [Y] le 24 juillet 2018, puis à nouveau par mail du 5 septembre 2018, plan plus précis concernant notamment les commerces locaux numéro 8 et 9 ne modifiant pas les éléments relatifs à cette servitude qui porte sur l'accès par les personnels des deux commerces à travers la cour numéro 14 en vente, au WC appartenant au lot numéro 9.
Dans les mails versés aux débats des 11 et 12 septembre 2018 M. [B] relate l'échange qu'il a eu avec les responsables de deux commerces (bijouterie et laverie), la très faible utilisation de cette servitude permettant d'envisager sa suppression. Par ailleurs M. [B] confirme que cette servitude ne figure pas dans le règlement de copropriété car elle a été créée lors de l'acquisition de son appartement et n'a pas fait l'objet d'une régularisation. Mais cette information donnée effectivement postérieurement à la signature du compromis et révélée par la lecture du règlement de copropriété ne porte aucun préjudice au candidat acquéreur, elle ne vient pas aggraver la servitude telle que mentionnée dans le compromis de vente ou dans le projet d'acte notarié. Ce n'est d'ailleurs pas son absence dans le règlement de copropriété qui déçoit M. [P] et Mme [Y] mais le fait que la suppression de la servitude, qui suppose l'accord des deux commerçants bénéficiaires, n'a aucun caractère certain.
M. [P] et Mme [Y] ne démontrent pas en quoi cette servitude, dont ils avaient pleinement connaissance lors de la signature du compromis, se serait révélée plus contraignante pour eux.
Dès lors que le compromis de vente ne contenait aucun engagement des vendeurs à la suppression de cette servitude, aucune dissimulation ou manquement au devoir de conseil ne peut être retenu contre eux ou contre l'agence immobilière.
Sur la superficie de l'appartement :
Contrairement à ce que soutiennent M. [P] et Mme [Y] il est spécifié dans le compromis de vente que le lot numéro 13 c'est-à-dire l'appartement mis en vente à une superficie de 135,25 carrés ainsi qu'il résulte d'une attestation établie par le cabinet ALLODIAGNOSTIC le 10 septembre 2013.
Il ne démontre pas que cette information est erronée, le fait qu'une chambre n'ait que 9 m² de surface dans le diagnostic ne rend pas la superficie totale de l'appartement erronée selon la loi CARREZ.
- Sur la nature du sol de la cave : avant la signature du compromis, les deux diagnostics techniques des 18 mai et 18 juin 2018 mentionnent que le sol de la cave est en ciment. Par contre, le diagnostic rédigé le 22 juin 2018 mentionne bien que la cave est en terre battue, ce que M. [P] et Mme [Y] savaient dès le 7 juillet 2018 avec la transmission du diagnostic corrigé, et donc avant leur dernière visite de l'appartement le 13 octobre 2018 puisqu'ils ont sollicité du notaire le 9 octobre 2018 un avis sur les travaux envisagés d'un montant total estimé de 27'000 € en vue de déposer et de traiter l'amiante dans la toiture du garage et de refaire la porte du garage.
Ainsi, il ressort de l'ensemble de ces pièces, qu'avant et après la signature du compromis de vente, M. [P] et Mme [Y] ont sollicité des informations complémentaires, des précisions qu'ils ont obtenues au plus tard fin juillet 2018 avant la date de réitération de l'acte devant le notaire prévue dans le compromis au 25 septembre 2018 ; que cette date a été repoussée au 16 octobre 2018 parce qu'ils n'avaient pas pu finaliser leur demande de prêt avant la date prévue du 30 août 2018, ainsi qu'ils s'en expliquent par mail du 6 septembre 2018 et qui démontre qu'à cette date, et avant leur dernière visite de l'appartement qui aura lieu le 13 octobre, ils ne formulent plus d'objections ou de réclamations et envisagent toujours d'acquérir l'immeuble puisqu'ils vont solliciter leur prêt et l'obtenir le 11 octobre 2018.
Par contre, M. [P] et Mme [Y] ont sollicité des vendeurs une baisse du prix de vente de 10'000 € ainsi qu'il résulte du mail qu'ils leur ont adressé le 9 octobre 2018 par l'intermédiaire du notaire juste avant la signature de l'acte authentique de vente faisant valoir les découvertes et déceptions depuis la signature du compromis portant sur :
- les caractéristiques de la servitude, n'ayant pas pu disposer du titre de propriété de M. [B], ni contacté l'exploitante du commerce bénéficiaire,
- l'ignorance sur le raccordement du réseau des eaux du garage à la copropriété,
- la présence de fibrociment amiante dans la toiture du garage révélée après leur première visite,
- la découverte d'un sol de cave en terre battue et non en dalle ciment.
Il a été vu ci-dessus que ces griefs sont infondés.
Les vendeurs ayant refusé de baisser leurs prix de vente, M. [P] et Mme [Y] ont néanmoins effectué la dernière visite de l'appartement du 13 octobre 2018, ayant obtenu leur prêt début octobre.
C'est à la suite de cette visite que les appelants décident de renoncer à cette acquisition.
M. [P] et Mme [Y] ont en effet adressé deux courriers recommandés versés aux débats :
- le lundi 15 octobre 2018 adressé au notaire Maître [H] dans lequel ils indiquent :
Cette visite nous a encore révélé de nombreuses anomalies qui ne pouvaient être décelées avant[...]le 17 septembre date où l'appartement a été totalement vidé par les propriétaires[...]
Concernant les réseaux ceux-ci devaient répondre aux normes actuelles selon les écrits de l'agent immobilier. Or force est de constater que ce n'est pas le cas. Les photographies prises lors de la visite du 13 octobre montrent des fils électriques apparents et des protections absentes révélant une dangerosité réelle et sérieuse pour une famille avec 2 enfants en bas âge[...]
Nous avons également constaté des dégâts des eaux sur le mur en face des toilettes. [...]Ce mur était caché lors de nos précédentes visites.[...]
Nous avons également constaté lors de cette visite une trace de voie d'eau au niveau de la toiture sur le plafond et nous n'avons aucune garantie de son ancienneté.
Enfin, nous avons découvert des arrachements de peinture en lieu et place des posters et autres éléments décoratifs qui ornaient certains murs de l'appartement. L'enlèvement de ces éléments a été fait semble-t-il sans ménagement.
Cet ensemble d'anomalies se rajoute aux précédentes découvertes et montre le caractère fautif de l'agence immobilière et du propriétaire quant à leur devoir d'informations. Ces éléments sont confortés par l'envoi d'un SMS de M. [B] à destination de l'agent immobilier en date du 14 septembre 2018 [...] : Bonjour M. [U], Avez-vous obtenu un rendez-vous avec le notaire avant que j'envoie une réponse minimaliste aux acquéreurs ' Bien à vous [V] [B].
Ainsi nous refusons de nous déplacer ce 18 octobre à 18 heures pour signer l'acte authentique de vente.
- le 23 octobre 2018 adressé à M. [B] et Mme [M] Intitulé 'opposition à la signature de l'acte authentique de vente'
Des éléments identifiés après la signature du compromis de vente et le constat fait de l'appartement lors de notre visite en date 13 octobre 2018 motivent notre décision ces éléments ont été présentés à plusieurs reprises dont certains dernièrement [...]
Les motifs de notre renoncement à l'achat de l'appartement et de ses annexes sont réels légitime et sérieux.[...]
En réalité donc c'est essentiellement l'état de l'appartement vide qui, avec le refus des vendeurs de baisser le prix de vente, les a conduits a renoncé à leur acquisition.
Cependant, la Cour considère que les défauts électriques invoqués par M. [P] et Mme [Y] découverts après l'enlèvement des meubles par les vendeurs, ne contredisent pas l'attestation du diagnostic sur la conformité de l'installation électrique générale de l'appartement, le diagnostiqueur rappelant dans une lettre du 25 juin 2019 que ce diagnostic ne porte que sur les éléments visibles de l'installation, sans déplacements de meubles ni démontage de l'installation électrique ni destruction des isolants des câbles ; l'agence avait adressé aux acquéreurs à leur demande le 6 juillet 2018 la facture attestant de la présence d'une prise de terre dans la copropriété et une facture de réfection de l'installation électrique mise aux normes NFC 15-100 qui n'est pas versée aux débats mais dont M. [P] a accusé réception, la facture datant de 2011 ;
Les désordres en cause sont minimes et ne nécessite que quelques petits travaux (une prise à nu, des fils électriques dénudés, un interrupteur déboîté, une multiprise pour le branchement d'un lave-linge), travaux qui ont d'ailleurs été réalisés par M. [B] ainsi qu'il en justifie par les photos envoyées à M. [P] et Mme [Y] par mail du 25 octobre 2018 montrant toutes les prises et les fils électriques dénudés réparés, preuves qu'ils tenaient à leur disposition chez le notaire pour la signature qui avait été prévue le 18 octobre 2018.
De même, sur les traces de dégâts des eaux constatés sur un mur en face des toilettes et au plafond, outre qu'elles sont très limitées au regard des photos produites, ne démontrent pas d'infiltrations toujours actives mais simplement que les revêtements n'ont pas été repris après le dégât des eaux qui a été mentionné dans le compromis de vente en page 18. En outre, au moins pour l'auréole située au plafond elle était apparente lors des visites.
L'annonce mentionnait certes un bel appartement très lumineux, mais n'affirmait pas qu'il était entièrement refait à neuf. Or le retrait du mobilier et des équipements d'un appartement mis en vente peut révéler l'état d'usage des revêtements sans que cela puisse être qualifié de dissimulation ou de man'uvres frauduleuses.
Ainsi M. [P] et Mme [Y] échouent à rapporter la preuve de man'uvres dolosives ayant vicié leur consentement ou d'un manquement au devoir d'informations que ce soit par l'agence ou par les vendeurs les empêchant de renoncer à la vente dans le délai qui leur était donné pour se rétracter, étant en outre observé que les trois diagnostics techniques de l'appartement ne relevaient que de la responsabilité de la société ALLODIAGNOSTIC.
Par conséquent, le compromis de vente signée le 22 juin 2018 entre les parties était parfaitement valide, et le refus de signer l'acte authentique prévu dans le compromis constitue une faute de la part de M. [P] et Mme [Y] justifiant l'attribution à M. [B] et Mme [M] de la clause pénale contractuelle prévue en page 20 et 21 du compromis d'un montant de 15'000 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 22 octobre 2018, le dépôt de garantie de 10'000 € conservée par l'agence puis remis aux vendeurs devant s'imputer sur cette clause pénale.
M. [P] et Mme [Y] étant déboutés de leur demande de nullité du compromis, leur demande de dommages intérêts sera également rejetée tant contre M. [B] et Mme [M] que contre la SARL CENTURY 21.
Sur la demande reconventionnelle en dommages intérêts de Mme [M] et M. [B] :
Selon l'article 1240 du code civil tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
- contre M. [P] et Mme [Y] :
M. [B] et Mme [M] démontrent avoir loué un logement à compter du 1er septembre 2018 alors qu'ils remboursaient l'emprunt immobilier souscrit pour l'acquisition du bien mis en vente en 2014 (268,93 € par mois).
Toutefois, cette location a été effectuée en Gironde à [Localité 6], pour la rentrée scolaire des enfants, et cette location n'apparaît donc pas liée à l'échec de la vente de leur bien, mais à un changement de région pour des raisons personnelles.
Ces frais sont donc sans lien avec la faute commise par les appelants, la clause pénale réparant suffisamment l'immobilisation de leur bien pendant une année.
Leur demande de ce chef doit donc être rejetée.
- contre la SARL CENTURY 21 :
Selon l'article 1231-6' du code civil :
Les dommages intérêts dus à l'occasion du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.
Le créancier auquel son débiteur a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages intérêts distincts de l'intérêt moratoire.
L'agence immobilière qui détient le dépôt de garantie à valoir sur la clause pénale en cas de non réitération de la vente par la faute des acquéreurs est redevable, à l'égard des vendeurs, de cette somme. En effet le compromis précise que dans ce cas (si la non réalisation de la vente est le fait de l'acquéreur), cette somme reste acquise de plein droit au vendeur, sous déduction des frais et débours pouvant être dus au rédacteur des présentes.
Quand bien même M. [P] et Mme [Y] avaient pris l'initiative d'engager une action contre M. [B] et Mme [M] et contre la SARL CENTURY 21, le dépôt de garantie revenait de plein droit aux vendeurs selon le compromis de vente.
Ceux-ci justifient avoir adressé plusieurs mails à la SARL CENTURY 21 pour obtenir restitution de cette somme le 27 novembre 2018, les 23 janvier, 13 février, 9 mai et 10 juin 2019 sans aucun effet.
Si ces lettres ne valent pas explicitement mises en demeure, l'agence immobilière a cependant commis une faute en retenant pendant 4 ans cette somme qui était due aux vendeurs selon le compromis signé.
Il y a donc lieu de condamner la SARL CENTURY 21 à indemniser M. [B] et Mme [M] en leur versant la somme de 2 000 €.
Sur la demande de la SARL CENTURY 21 contre M. [P] et Mme [Y] :
Il résulte des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut-être condamné à une amende civile d'un maximum de 10'000 €, sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés sur le fondement de l'article 1240 du code civil.
Selon l'article 1240 du code civil tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
L'agence immobilière n'ayant pas réalisé la vente, elle n'a droit à aucune rémunération de la part du vendeur pour son travail et les diligences accomplies.
Il ne peut être cependant fait grief à M. [P] et Mme [Y] de s'être mépris sur le bien-fondé de leur action ou sur l'étendue de leurs droits supposés, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'ils savaient pertinemment que leur action était vouée à l'échec, que rien ne la justifiait ou qu'elle traduisait une attitude procédurière exceptionnelle manifestant une intention malveillante.
Cette demande de dommages intérêts pour procédure abusive doit donc être rejetée.
Sur les mesures accessoires :
M. [P] et Mme [Y] seront condamnés aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel et indemniseront M. [B] et Mme [M] et la SARL CENTURY 21 de leurs frais irrépétibles à hauteur de la somme de 4 000 € pour les premiers et 2 000 € pour la seconde.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Annule le jugement rendu le 4 octobre 2022 ;
Evoquant l'affaire, statuant à nouveau,
Rejette la demande de nullité du compromis de vente signé le 22 juin 2018 ;
Rejette la demande de dommages intérêts présentée par M. [S] [P] et Mme [A] [Y] ;
Condamne M. [S] [P] et Mme [A] [Y] à payer à M. [V] [B] et Mme [X] [M] la somme de 15 000 € en application de la clause pénale avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, soit le 22 octobre 2018 ;
Dit que le dépôt de garantie de 10 000 € effectué par M. [S] [P] et Mme [A] [Y] à la signature du compromis s'impute sur la condamnation au paiement de la somme de 15 000 € au titre de la clause pénale ;
Condamne la SARL CENTURY 21 à payer à M. [V] [B] et Mme [X] [M] la somme de 2 000 € en réparation de leur préjudice pour résistance abusive de l'Agence à restituer le dépôt de garantie ;
Rejette la demande de dommages intérêts complémentaires formée par M. [V] [B] et Mme [X] [M] contre M. [P] et Mme [Y] ;
Rejette la demande de dommages intérêts pour procédure abusive présentée par la SARL CENTURY 21 contre M. [P] et Mme [Y] ;
Condamne M. [S] [P] et Mme [A] [Y] aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Condamne M. [S] [P] et Mme [A] [Y] à payer à M. [V] [B] et Mme [X] [M] la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [S] [P] et Mme [A] [Y] à payer à la SARL CENTURY 21 la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette la demande de M. [S] [P] et Mme [A] [Y] fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [S] [P] et Mme [A] [Y] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Carole DEBON Caroline FAURE