LB/VC
Numéro 24/2165
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 1
ARRET DU 27/06/2024
Dossier : N° RG 22/03236 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IMHO
Nature affaire :
Demande en exécution ou en dommages-intérêts pour mauvaise exécution d'un contrat non qualifié
Affaire :
S.A.R.L. UP CONSEILS
C/
S.A.R.L. LES VIANDES DU HAUT BEARN
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 27 Juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 25 Mars 2024, devant :
Madame Laurence BAYLAUCQ, magistrat chargée du rapport,
assistée de Madame Catherine SAYOUS, Greffière présente à l'appel des causes,
Laurence BAYLAUCQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Joëlle GUIROY et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Joëlle GUIROY, Conseillère, faisant fonction de Présidente
Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.A.R.L. UP CONSEILS
anciennement SUBVENTIS,
immatriculée au RCS de Pau sous le numéro n°830 435 772
[Adresse 1],
[Localité 2]
Représentée par Me Mathieu APPAULE, avocat au barreau de Pau
INTIMEE :
S.A.R.L. LES VIANDES DU HAUT BEARN
immatriculée au RCS de Pau sous le numéro n°317 706 802
dont le siège social, [Adresse 4],
[Localité 3],
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Jean Michel GALLARDO, avocat au barreau de Pau
sur appel de la décision
en date du 22 NOVEMBRE 2022
rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE PAU
RG : 2021005365
EXPOSE DU LITIGE :
La sarl Les Viandes du Haut Béarn a signé le 19 mai 2020 avec la sarl Subventis Pau devenue société Up Conseils une convention aux termes de laquelle la première a confié à la seconde la mission de rechercher pour son compte toutes subventions, financements publics ou privés, exonérations fiscales sociales auxquelles elle pourrait être éligible, puis de mettre en 'uvre tous les moyens afin d'obtenir les subventions ciblées.
Un premier dossier de subvention a été déposé le 17 novembre 2020 auprès de BPI France.
La société Up Conseils a transmis une facture de 4000 € HT à la société Les viandes du Haut Béarn et a prélevé la somme de 4800 € TTC le 30 décembre 2020.
Par courriel du 18 janvier 2021 la société Les Viandes du Haut Béarn a été informée du refus de sa demande de subvention déposée auprès de BPI France.
La société Subventis nouvellement dénommée société Up Conseils a alors préparé un second dossier de subvention relatif à un investissement dans un outil de production.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 10 mai 2021, la société les viandes du Haut Béarn a demandé à la société Up Conseils la restitution de l'acompte versé de 4800 € TTC, demande qu'elle a réitérée le 26 mai 2021.
Par courrier du 7 juillet 2021 la société Up Conseils a mis en demeure la société les viandes du Haut Béarn de lui régler une facture en date du 29 mars 2021 d'un montant de 4.800 euros TTC correspondant à l'envoi d'un second dossier de demande de subvention.
Par courriel du 16 juillet 2021 la société les viandes du Haut Béarn a informé la société Up Conseils qu'elle abandonnait le projet et la demande de subvention relative à un investissement dans un outil de production.
Par courrier du 13 août 2021 la société les viandes du Haut Béarn a contesté avoir donné son accord quant à la présentation du second dossier et a remis en cause la qualité de la prestation de la société Subventis devenue Up Conseils. Elle a refusé de payer la deuxième facture d'acompte émise par la société Subventis devenue Up Conseils et a demandé qu'elle rembourse l'acompte versé.
Dans ce contexte, la société les viandes du Haut Béarn a assigné la société Up Conseils anciennement Subventis devant le tribunal de commerce de Pau.
Par jugement du 22 novembre 2022, le tribunal de commerce de Pau a :
condamné la société Up Conseils à restituer à la société Les Viandes du Haut Béarn le prélèvement du premier acompte de 4000 € hors-taxes soit 4800 € TTC,
débouté la société Les Viandes du Haut Béarn de sa demande de voir résilier le contrat conclu entre les parties,
débouté la société Up Conseils de sa demande de condamnation de la société Les Viandes du Haut Béarn à lui verser la somme de 4000 € HT au titre de son inexécution contractuelle,
dit ne pas faire droit à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté les parties de leurs autres demandes, fins et conclusions,
condamné à parts égales la société Les Viandes du Haut Béarn et la société Up Conseils aux entiers dépens dont les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 60,22 euros en ce compris l'expédition de la présente décision.
Par déclaration en date du 2 décembre 2022, la sarl Up Conseils a interjeté appel de ce jugement.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 février 2024.
***
Vu les dernières conclusions notifiées le 30 août 2023 de la sarl Up Conseils anciennement Subventis aux termes desquelles elle demande à la Cour de :
Vu les Articles 1134, 1353 du Code Civil ;
Vu les pièces versées au débat ;
Annuler le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Pau en date du 22 novembre 2022 en ce qu'il :
- l'a condamnée à restituer à la société Les Viandes du Haut Béarn le prélèvement du premier acompte de 4.000 € hors-taxes soit 4.800 €TTC,
- l'a déboutée de sa demande de condamnation de la société Les Viandes du Haut Béarn à lui verser la somme de 4.000€ HT au titre de son inexécution contractuelle,
- l'a déboutée de sa demande de condamnation de la société Les Viandes du Haut Béarn à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de la procédure abusive.
Statuant de nouveau,
condamner la société Les Viandes du Haut Béarn à lui payer une somme de 4.000€ HT au titre de l'inexécution contractuelle ;
condamner la société Les Viandes du Haut Béarn à lui payer une somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
rejeter l'ensemble des demandes incidentes de la société Les Viandes du Haut Béarn ;
condamner la société Les Viandes du Haut Béarn à lui payer une somme de 3500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamner la société Les Viandes du Haut Béarn aux entiers dépens,
*
Vu les conclusions notifiées le 31 mai 2023 de la sarl Les Viandes du Haut Béarn aux termes desquelles elle demande à la Cour de :
Vu l'article 1788 du code civil,
Vu l'article 1221 du code civil,
Voir confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Up Conseils
à lui restituer la somme de 4.800 € T.T.C. (4.000 € H.T.) indument prélevée.
A titre incident,
Voir réformer le jugement entrepris de ce chef et prononcer la résolution du contrat
d'entreprise conclu entre les parties.
Voir réformer le jugement entrepris et condamner la société Up Conseils à lui régler
une indemnité de 5.000 € au titre de la perte de chance de recevoir la subvention sollicitée.
Voir réformer le jugement entrepris de ce chef et condamner la société Up Conseils
à lui régler une indemnité de 5.000 € au titre de la résolution du marché.
Voir condamner la société Up Conseils à lui régler une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première et de la seconde instance.
La voir condamner aux entiers dépens.
MOTIFS :
Il convient de préciser à titre liminaire que si l'appelante sollicite l'annulation du jugement déféré, elle n'articule aucun moyen pour étayer sa demande d'annulation, qui est en réalité une demande tendant à l'infirmation ou la réformation de cette décision.
Sur la demande tendant à la restitution de l'acompte versé
La société Up Conseils s'oppose à la demande de restitution de l'acompte de 4.800 euros TTC versé le 30 décembre 2020 par la société Les Viandes du Haut Béarn au motif que :
- cette somme est contractuellement due en rémunération du dépôt du premier dossier de demande de subvention auprès de BPI France car la convention prévoit le paiement de la somme de 4.000 euros HT pour le dépôt de chaque dossier aux organismes en honoraires fixes, lesquels s'ajoutent aux honoraires de résultat lorsque la subvention est octroyée ; en outre si la présentation de la grille tarifaire apparaît maladroite, il convient de lui redonner le sens que les parties ont voulu conformément aux principes du code civil rappelés aux articles 1188 et suivants.
- Elle a respecté son obligation contractuelle de moyen car sa présentation du premier dossier reprend bien tous les critères de subvention, ce qui est démontré par les pièces produites contrairement aux assertions de la partie adverse qui ne sont aucunement démontrées.
La société Les Viandes du Haut Béarn soutient que l'obligation de la partie appelante de lui rembourser l'acompte est établie en ce que :
- en application de l'article 1788 du code civil et dans le silence des contrats, il est jugé que dans le cadre des marchés à prix forfaitaires, l'entrepreneur est tenu de restituer les acomptes reçus si la mission n'est pas achevée,
- Elle fait valoir que selon le contrat et la grille tarifaire l'acompte de 4.000 euros HT ne s'ajoute pas à la rémunération « au résultat », il en fait partie et que le résultat n'ayant pas été atteint, il doit être restitué.
- la société Up Conseils n'a pas satisfait à son obligation de moyens en déposant un dossier incomplet, indigent et qui ne rentrait pas dans le champ matériel de la subvention et ne répondait pas aux critères d'octroi de celle-ci.
L'article 1788 du code civil n'a pas vocation à s'appliquer au cas d'espèce car il concerne les cas de perte de la chose fournie par l'ouvrier.
Les articles 1103 et 1193 du même code applicables en l'espèce (et non l'article 1134 au regard de la date de conclusion de la convention litigieuse postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016) disposent que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.
Selon les articles 1188 et 1189 du code civil, le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes. Lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s'interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation. Toutes les clauses d'un contrat s'interprètent les unes par rapport aux autres, en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l'acte tout entier. Lorsque, dans l'intention commune des parties, plusieurs contrats concourent à une même opération, ils s'interprètent en fonction de celle-ci.
En l'espèce, la convention de mission conclue entre les parties le 19 mai 2020 stipule en son « article 3. Tarification et mode de règlement » :
« - Phase 1 : Frais d'ouverture de dossier : ils sont à régler une seule fois dans la vie de l'entreprise et obligatoires pour le démarrage de notre collaboration : règlement par chèque ou virement (RIB sur la facture).
Phase 2 : Envoi des dossiers aux organismes :TPE : acompte de 500 euros à l'envoi de chaque dossier pour le passage en Commission Permanente.
° Industrie : de 1 000 euros à 4 000 euros selon la taille de l'entreprise (cf grille tarifaire)
° Pas d'acompte pour les montants sollicités inférieurs à 500 euros.
Phase 3 : les honoraires liés au résultat : Tous les règlements seront effectués à la réception du courrier de l'organisme spécifiant le montant de la subvention allouée et non pas à la réception des fonds par les organismes,
° subvention obtenue
50% des honoraires prélevés à 50 jours à la date d'émission de la facture
50% des honoraires prélevés à 60 jours à la date d'émission de la facture
° subvention obtenue $gt; 100 000 euros :
50% des honoraires prélevés à 50 jours à la date d'émission de la facture
25 % des honoraires prélevés à 60 jours à la date d'émission de la facture
25 % des honoraires prélevés à 90 jours à la date d'émission de la facture ».
Les termes de l'article 3 de la convention sont clairs en ce que les parties ont convenu que les sommes à payer au titre de la phase 1 (frais d'ouverture de dossier) et à la phase 2 (correspondant à l'envoi des dossiers aux organismes) sont des honoraires fixes, distincts des honoraires liés au résultat prévus par la phase 3 qui s'y ajoutent en cas d'obtention de la subvention sollicitée.
La présentation de la grille tarifaire signée par les parties est toutefois source d'ambiguité et doit être interprétée. Elle mentionne en effet dans la colonne pour une société « au-delà de 21 salariés » relative au paiement, « immédiat » s'agissant de la prise en charge du dossier, « au résultat » s'agissant de « TPE : Acompte de 500 € HT Industrie 4.000 HT (art3) » ; les termes « immédiat » ou « au résultat » concernant le paiement, qui doivent s'interpréter par rapport aux termes clairs de l'article 3 de la convention précité, s'interprètent donc comme visant le moment du paiement de l'acompte de 4.000 € HT et non comme qualifiant la nature des honoraires qu'il vise.
Il s'en déduit que les honoraires de 4.800 euros TTC prélevés le 30 décembre 2020 sur le compte de la société Les Viandes du Haut Béarn étaient dus par cette dernière en vertu du contrat en rémunération du dépôt par la société Up Conseils de la première demande de subvention le 17 novembre 2020 quand bien même la subvention n'a pas ensuite été obtenue.
La société Les Viandes du Haut Béarn oppose ensuite l'inexécution contractuelle de la société Subventis devenue Up Conseils pour justifier la restitution de l'acompte versé. Elle oppose ainsi implicitement mais nécessairement l'exception d'inexécution pour refuser d'exécuter sa propre obligation contractuelle.
La convention conclue entre les parties stipule en son article 2-2 que « le prestataire a dans le cadre des présentes, une obligation de moyens simples. Il mettra tout en 'uvre et fera toutes diligences à l'effet de solliciter les subventions potentielles. »
Le courriel du 17 janvier 2021 émanant du secrétariat de l'appel à projet mentionne « à l'issue du processus de sélection, il n'a pas été possible de donner une suite favorable à votre dossier. Les candidatures étant très nombreuses, le très haut niveau de qualité des autres projets présentés au regard des critères et objectifs établis dans le cahier des charges ne nous ont pas permis de retenir le projet de votre entreprise malgré son intérêt. » Si ce courriel ne fait pas état de manquement, il est rédigé comme un courrier type, en terme généraux, pouvant être transmis à tout candidat dont la demande a été rejetée.
Il n'en va pas de même du courriel en date du 24 mars 2021, émanant de Mme [L] [V], chargée de mission auprès de la Région Nouvelle-Aquitaine, qui suite à la demande de la société Les Viandes du Haut Béarn, a transmis le premier dossier déposé sur la plateforme de BPI france et précisé « que le dossier n'a jamais été complété (aucune annexe financière, aucun chiffrage du dossier, aucune pièce justificative). » (pièce 11 de l'intimée).
Cette pièce n'est pas contredite de manière probante par l'extrait de la plateforme de remise des documents pour ce premier dossier de demande de subvention (pièce 7 de l'appelante) produit par l'appelante qui vise diverses pièces lesquelles ne sont pas communiquées in extenso aux débats. En effet les pièces produites numérotées 4 dans le bordereau de l'intimée concernent le second dossier de subvention avec un formulaire de demande du 20 mars 2021 et ses annexes. L'entier dossier joint à la première demande n'est pas produit. Par ailleurs le courriel de BPI France du 21 décembre 2020 indiquant à la société Les Viandes du Haut Béarn que son dossier avait été verrouillé le 26 novembre 2020 ne signifiait pas que le dossier était complet à cette date.
Le courriel précité du 24 mars 2021 émanant du service ayant instruit le dossier de demande de subvention déposé par la société Subventis devenue Up Conseils établit l'existence d'un manquement de cette société à son obligation de moyen de tout mettre en 'uvre pour solliciter les subventions potentielles en ce qu'elle a remis un dossier très incomplet.
Ce manquement est suffisamment grave pour justifier le non-paiement par la société Les Viandes du Haut Béarn de l'acompte de 4.800 euros TTC prélevé le 30 décembre 2020 en raison du dépôt du premier dossier de demande de subvention.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Up Conseils à restituer à la société Les Viandes du Haut Béarn le prélèvement du premier acompte de 4.000 euros hors-taxes soit 4.800 euros TTC.
Sur la demande de la société Up Conseils de condamnation pour inexécution contractuelle
La société Up Conseils sollicite la condamnation de la société Les Viandes du Haut Béarn à lui payer une somme de 4.000 euros HT au titre de l'inexécution contractuelle.
Elle fait valoir que la société Les Viandes du Haut Béarn n'a pas respecté son obligation contractuelle de lui transmettre tous les renseignements et informations permettant l'octroi de la subvention de sorte qu'elle entend faire application de la clause pénale prévue à l'article 2-4 du contrat stipulant en ce cas que les prestations « seront facturées et dues ».
A défaut elle demande la condamnation de la société intimée à lui verser la somme de 3.000 euros HT sur le fondement de l'article 4 de la convention.
La société Les Viandes du Haut Béarn répond sur ce point que d'une part, la société Up Conseils a pu réunir tous les éléments qu'elle jugeait utiles, et que d'autre part l'article 2.4 du contrat ne prévoit pas le droit de conserver l'acompte puisqu'il fait partie de la rémunération variable.
L'article 2-4 de la convention de mission signée le 19 mai 2020 stipule que « le client s'engage à répondre et/ou se présenter auprès des divers organismes auxquels il sera éligible si nécessaire. Il s'engage également à transmettre à SUBVENTIS PAU une copie de tous les échanges de courriers, emails, et documents indispensables aux dossiers de subventions en cours d'élaboration. A défaut, les prestations seront facturées et dues. »
En l'occurrence par courriel du 6 avril 2021, la société Subventis devenue Up Conseils a transmis au nom de la société Les Viandes du Haut Béarn à M. [Y] représentant de la Région Nouvelle Aquitaine le formulaire de la seconde demande de subvention complété et accompagné de pièces. Ce message listait en outre les pièces restant à joindre dont la communication était annoncée dans les prochains jours. La société Subventis devenue Up Conseils a demandé à la société Les Viandes du Haut Béarn à plusieurs reprises la transmission de pièces complémentaires en vain, par courriels des 29 mars, 14 avril, 28 avril, 5 juillet 2021, avant la date limite de dépôt qui était le 18 juillet 2021.
Par courriel du 16 juillet 2021, la société Les Viandes du Haut Béarn a indiqué à la société Subventis que faute d'avoir trouvé un accord pour l'acquisition du bâtiment qui aurait dû porter leur projet, celui-ci était abandonné.
Elle sollicitait en conséquence la restitution par la société Subventis des avoirs correspondant aux avances sur subventions obtenues qu'elle avait prélevés.
Par conséquent, la société Les Viandes du Haut Béarn n'a pas respecté son obligation de transmettre à la société Subventis devenue Up Conseils tous les documents nécessaires à la constitution du second dossier de subvention en cours d'élaboration.
Elle était au courant de la constitution d'un second dossier par la société Subventis devenue Up Conseils mais ne démontre pas s'y être opposée. Les pièces produites démontrent en effet qu'il avait été anticipé par les parties qu'en cas d'échec de la première demande de subvention auprès de Bpi France un second dossier serait transmis à Monsieur [Y] représentant de la Région Nouvelle Aquitaine, ainsi que cela était explicitement exprimé par M. [O] pour le compte de M. [S] dans un courriel du 19 novembre 2020 ; en outre des demandes de transmission de pièces complémentaires lui ont été ultérieurement adressées sans que la société Les Viandes du Haut Béarn n'exprime un refus du dépôt d'un second dossier jusqu'à son courriel du 16 juillet 2021 où elle informe la société Subventis devenue Up Conseils de son abandon du projet pour une cause extérieure au travail de cette dernière.
Le prix de la prestation normalement dû pour l'envoi de ce second dossier s'élevait à un honoraire fixe de 4.000 euros HT qui n'était pas conditionné à l'obtention de la subvention, ainsi que cela résulte des développements qui précèdent.
La demande de la société Up Conseils anciennement Subventis de condamnation de la société Les Viandes du Haut Béarn à lui payer la somme de 4 000 euros HT pour inexécution de son obligation contractuelle de transmettre les documents nécessaires à la constitution du second dossier de subvention est donc fondée en application de l'article 2.4 de la convention liant les parties.
Le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point et la société Les Viandes du Haut Béarn condamnée à payer à la société Up Conseils anciennement Subventis la somme de 4.000 euros HT.
Sur les demandes formulées à titre incident par la société Les Viandes du Haut Béarn
A titre incident la société Les Viandes du Haut Béarn sollicite la résolution du contrat d'entreprise conclu entre les parties pour trois motifs :
Il y a lieu de déduire du refus opposé à la demande déposée que l'exécution du contrat est achevée ;
Le second dossier a été déposé en violation de son refus et a été mal construit, compliquant sa tâche dans ses projets d'investissement,
Les dossiers étaient superficiels et inadaptés et n'auraient jamais permis d'obtenir une subvention.
Ces fautes lui ont causé un préjudice au titre de la perte de chance de recevoir la subvention sollicitée dans le cadre du plan de relance de l'économie 2020 ainsi qu'un préjudice moral consécutif à la résolution du contrat.
Faisant valoir que la société Les Viandes du Haut Béarn ne démontre pas l'existence de manquements graves justifiant le prononcé de la résiliation, la société Up Conseils répond que :
Le refus de la première demande de subvention en date du 18 janvier 2021 n'est pas fondé sur une incomplétude du dossier qu'elle a formalisé avec le plus grand soin, la société intimée n'apportant pas la preuve d'un manque de diligence de sa part,
la société Les Viandes du Haut Béarn n'a jamais mentionné son opposition au dépôt du second dossier de subvention, mais l'a laissée au contraire le constituer en toute connaissance de cause,
le caractère incomplet du second dossier est uniquement imputable à la société Les Viandes du Haut Béarn qui n'a pas daigné transmettre les pièces sollicitées, et le grief relatif à sa présentation ne repose sur aucune obligation contractuelle.
La société Les Viandes du Haut Béarn demande tout d'abord en conséquence des fautes qu'elle allègue l'allocation d'une indemnité de 5.000 euros au titre de la perte de chance de recevoir la subvention sollicitée dans le cadre du plan de relance de l'économie de 2020, c'est-à-dire la première subvention demandée.
La société appelante fait valoir qu'elle a parfaitement rempli sa mission et qu'aucun manquement à ses obligations contractuelles ne peut lui être reproché.
Il résulte toutefois des développements qui précèdent que la société Subventis devenue Up Conseils a manqué à son obligation de moyen de tout mettre en 'uvre pour solliciter les subventions potentielles en ce qu'elle a remis un dossier très incomplet.
Ce manquement fautif est directement en lien avec un préjudice consistant pour la société Les Viandes du Haut Béarn en une perte de chance de recevoir la subvention sollicitée qu'il convient d'évaluer en l'espèce à la somme de 3.000 euros.
Le manquement à son obligation de moyen de la société Subventis devenue Up Conseils dans le cadre du premier dossier de subvention n'est pas suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat alors qu'elle n'a pas été mise en demeure de respecter ses obligations, qu'elle a tenté en vain de réunir les pièces nécessaires pour constituer un second dossier et s'est heurtée à la carence et au silence de son cocontractant qui l'a néanmoins laissée poursuivre sa mission.
Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts
La société Up Conseils sollicite la condamnation de la société Les Viandes du Haut Béarn à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus que dans des circonstances particulières le rendant fautif.
En l'espèce, eu égard à la solution du litige dont il résulte que les demandes de l'intimée étaient pour partie fondées, la société Up Conseils ne démontre pas en quoi l'exercice par la société Les Viandes du Haut Béarn de son droit d'ester en justice est fautif.
Il convient par conséquent de débouter la société Up Conseils de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Eu égard à la solution du litige il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a statué sur les dépens mais de le confirmer en ce qu'il a dit ne pas faire droit aux demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Up Conseils sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile.
Il convient de rejeter les demandes formulées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Constate que la demande d'annulation formulée par la société Up Conseils est en réalité une demande d'infirmation ou de réformation de la décision déférée ;
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Up Conseils à restituer à la société Les Viandes du Haut Béarn le prélèvement du premier acompte de 4.000 euros hors-taxes soit 4.800 euros TTC, débouté la société Les Viandes du Haut Béarn de sa demande de voir résilier le contrat conclu entre les parties et dit ne pas faire droit à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Infirme le jugement déféré pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Les Viandes du Haut Béarn à payer à la société Up Conseils anciennement Subventis la somme de 4.000 euros HT au titre de l'inexécution contractuelle,
Condamne la société Up Conseils anciennement Subventis à payer à la société Les Viandes du Haut Béarn la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte de chance d'obtenir une subvention ;
Déboute la société Les Viandes du Haut Béarn de ses demandes de résolution judiciaire du contrat et de dommages et intérêts y afférent ;
Déboute la société Up Conseils anciennement Subventis de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Condamne la société Up Conseils anciennement Subventis aux dépens de première instance et d'appel ;
Déboute les parties de leurs demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Joëlle GUIROY, Conseillère, faisant fonction de Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière La Présidente