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25/06/2024 | FRANCE | N°23/01195

France | France, Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 25 juin 2024, 23/01195


LB/ND



Numéro 24/2134





COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1







ARRÊT DU 25/06/2024







Dossier : N° RG 23/01195 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IQJG





Nature affaire :



Prêt - Demande en remboursement du prêt







Affaire :



[R] [C]



C/



[E] [J]



































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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 Juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de ...

LB/ND

Numéro 24/2134

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRÊT DU 25/06/2024

Dossier : N° RG 23/01195 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IQJG

Nature affaire :

Prêt - Demande en remboursement du prêt

Affaire :

[R] [C]

C/

[E] [J]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 Juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 02 Mai 2024, devant :

Madame Laurence BAYLAUCQ, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame Nathalène DENIS, greffière présente à l'appel des causes,

Laurenc eBAYLAUCQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente

Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [R] [C]

né le [Date naissance 2] 1994 à [Localité 7]

de nationalité française

[Adresse 6]

[Localité 4]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C-64445-2023-02112 du 22/12/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Pau)

Représenté par Me Katia DUCUING, avocat au barreau de Pau

INTIMEE :

Madame [E] [J]

née le [Date naissance 1] 1996 à [Localité 8]

de nationalité française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Florence HEGOBURU, avocat au barreau de Pau

sur appel de la décision

en date du 04 AVRIL 2023

rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PAU

RG : 22/720

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [E] [J] et M. [R] [C] ont eu une relation sentimentale du mois de janvier 2021 au mois de novembre 2021 sans vivre ensemble.

Mme [J] a effectué deux virements bancaires sur le compte de Mr [C], l'un d'un montant de 11.000 euros le 30 mars 2021, l'autre d'un montant de 4.000 euros le 7 mai 2021.

Par acte d'huissier de justice du 14 avril 2022, Mme [E] [J] a attrait M. [R] [C] devant le tribunal judiciaire de Pau en remboursement de la somme totale de 15.000 euros qu'elle indiquait avoir versée à titre de prêt.

Par jugement du 4 avril 2023, le tribunal judiciaire de Pau a :

Condamné M. [R] [C] à verser à Mme [E] [J] la somme de 15.000 euros,

Débouté M. [R] [C] de sa demande de délais de paiement,

Condamné M. [R] [C] à verser à Mme [E] [J]

La somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts,

La somme de 1.800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné M. [R] [C] aux dépens ainsi qu'à rembourser à Mme [E] [J] les frais de la sommation interpellative du 16 décembre 2021 et du constat d'huissier du 4 mars 2022,

Rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration en date du 28 avril 2023, M. [R] [C] a interjeté appel de ce jugement.

***

Dans ses conclusions notifiées le 6 juillet 2023 auxquelles il convient de se référer expressément en ce qui concerne l'exposé de ses moyens et prétentions, M. [R] [C] demande à la Cour de :

Vu l'article 1343-5 du code civil

Vu la jurisprudence afférente,

Vu les pièces versées aux débats,

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

Infirmer le Jugement rendu le 04.04.2023 par le Tribunal judiciaire de Pau

A titre principal :

- Constater l'inexistence d'un contrat le liant à Mme [J],

- Dire et juger que Madame [J] était animée d'une intention libérale

En conséquence,

- Dire et juger qu'il n'y a pas obligation de remboursement à sa charge

A titre subsidiaire :

Dire et juger que Mr [C] bénéficiera d'un échelonnement du paiement de la dette sur une durée de 24 mois.

En tout état de cause :

Condamne Mme [J] à lui verser la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

M. [R] [C] fait valoir que :

Madame [J] lui a versé des fonds pour un montant total de 15.000 euros en 2021 à titre de don manuel, sans contrepartie,

Elle ne rapporte pas la preuve du prêt qu'elle invoque, en l'absence de contrat de prêt,

Il est faux de prétendre qu'elle était dans l'impossibilité morale de se procurer un écrit,

L'intention libérale se présumant, il appartient à madame [J] de prouver qu'elle n'avait pas l'intention libérale, ce qu'elle échoue à prouver, et alors que son intention libérale ne fait aucun doute.

Au regard de ses revenus et de ses charges il dispose d'un solde quasiment nul de sorte qu'il est fondé à solliciter l'échelonnement de sa dette sur une durée de 24 mois sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil.

*

Dans ses conclusions notifiées le 2 août 2023 auxquelles il convient de se référer expressément en ce qui concerne l'exposé complet de ses moyens et prétentions, Mme [E] [J] demande à la cour de :

Déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par Monsieur [C],

Y faisant droit,

Vu les articles 1360 et 1362 du Code civil,

Vu les articles 1902 et 1240 du Code civil,

Confirmer1a décision entreprise et, statuant à nouveau,

Constater l'existence d'un contrat de prêt la liant à Monsieur [C],

condamner Monsieur [C] à lui rembourser la somme de 15 000 euros au titre du remboursement des contrats de prêts,

condamner Monsieur [C] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de la résistance abusive

Vu l'article 700 du Code de procédure civile,

condamner Monsieur [R] [C] à lui payer la somme de 5 000 par application de 1'article 700 du Code de procédure civile.

Vu l'article 699 du Code de procédure civile,

condamner Monsieur [R] [C] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par Maître Florence Hegoburu.

Mme [J] soutient que :

à la demande de M. [R] [C] elle lui a consenti deux prêts, l'un de 11.000 euros le 30 mars 2021, l'autre de 4.000 euros le 7 mai 2021, afin de l'aider dans la concrétisation de ses projets personnels d'achats d'un appartement et d'une voiture,

elle était dans l'impossibilité morale de se procurer un écrit au regard de la relation de couple qui l'unissait à Mr [C], de sorte qu'elle est dispensée de l'exigence d'un écrit pour apporter la preuve de l'existence des prêts qu'elle invoque, conformément aux dispositions de l'article 1360 du code civil,

elle prouve que les virements qu'elle a effectués au profit de M. [C] l'ont été à titre de prêt en produisant des commencements de preuve par écrit complétés par d'autres moyens de preuve, conformément à l'article 1361 du code civil,

elle n'avait pas d'intention libérale et a été victime d'un dol, car sans les man'uvres dolosives mises en 'uvre par M. [C] elle n'aurait pas consenti à ces deux prêts.

La résistance opposée par M. [C] à ses demandes de remboursement est fautive et a entrainé une perte de temps et de moyens conséquents d'autant qu'il prétend de mauvaise foi être dans l'incapacité de payer la somme qu'il lui doit.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 avril 2024.

MOTIFS :

Sur l'existence de prêts

Conformément à l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, Mme [J] réclame le paiement de la somme totale de 15.000 euros invoquant deux prêts consentis à Mr [C].

En conséquence, il lui appartient de démontrer l'existence de ces prêts.

Il résulte des dispositions de l'article 1359 du code civil que l'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant 1.500 euros doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique.

Cette règle reçoit exception, en application de l'article 1360 du même code, en cas d'impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit.

Selon les articles 1361 et 1362 du code civil, il peut être suppléé à l'écrit par l'aveu judiciaire, le serment décisoire ou un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de preuve. Constitue un commencement de preuve par écrit tout écrit qui, émanant de celui qui conteste un acte ou de celui qu'il représente, rend vraisemblable ce qui est allégué.

En l'espèce, il est constant qu'aucun écrit n'a pas été établi entre M. [R] [C] et Mme [E] [J] tandis que les contrats de prêt allégués portent sur une somme supérieure à 1.500 euros.

Pour autant, les sentiments amoureux de Mme [J] à l'égard de M. [C] avec lequel elle entretenait une relation sentimentale depuis quelques mois ainsi que sa fragilité psychologique et sa crédulité démontrés par les attestations circonstanciées de mesdames [P], [U] et [Z], amies de l'intimée, ainsi que par les sms envoyés par Mme à Mr produits par l'appelant dans lesquelles elle se dit « prête à tout » pour que « ça refonctionne entre » eux, ont placé Mme [J] dans l'impossibilité morale de se procurer un tel écrit.

Mme [J] verse aux débats les avis de virement du Crédit Mutuel démontrant qu'elle a effectué deux virements au bénéfice du compte bancaire de monsieur [C], l'un de 11.000 euros le 30 mars 2021, l'autre de 4.000 euros le 7 mai 2021, ce qui n'est pas contesté.

Il lui appartient de démontrer que ces fonds ont été remis à titre de prêt, c'est à dire à charge de lui être remboursés et partant, son absence d'intention libérale.

Ainsi que l'a relevé par des motifs précis et pertinents le premier juge, Mme [J] produit un commencement de preuve par écrit à savoir des sms émanant de M. [C], constatés dans un acte d'huissier du 4 mars 2022, dans lesquels M. [C] reconnaît implicitement mais par des propos dénués d'ambiguité qu'il doit rembourser Mme [J], indiquant notamment qu'il ne peut pas le faire « d'un coup » mais que « je vais te le rendre mais là c'est pas possible pour l'instant et tu le savais » et que « Tu auras en temps voulu car j'ai pas ».

Ces messages sms constituent bien un commencement de preuve par écrit en ce qu'ils émanent de celui à qui on les oppose.

Ils sont corroborés par les attestations précises et circonstanciées de Mmes [P], [U] et [Z] qui relatent dans quelles conditions Mme [J] leur a confié avoir prêté la somme totale de 15.000 euros à M. [C].

Il en résulte que Mme [J] rapporte la preuve que les versements qu'elle a effectués au profit de M. [C] les 30 mars et 7 mai 2021 l'ont été à titre de prêt et à charge pour lui de lui rembourser ces sommes, et non à titre de don.

Il s'en suit qu'en application de l'article 1892 du code civil, monsieur [C] doit rembourser à Mme [J] la somme de 15.000 euros qu'elle lui a prêtée.

Par conséquent, le jugement de première instance sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [C] à verser à Mme [J] la somme de 15.000 euros.

Sur la demande en dommages et intérêts pour résistance abusive

Mme [J] sollicite sur le fondement de l'article 1240 du code civil la condamnation de M. [C] à lui verser la somme de 3.500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus que dans des circonstances particulières le rendant fautif.

En l'espèce, M. [C] a persisté à refuser de commencer à apurer sa dette envers Mme [J] alors que les éléments du dossier démontraient qu'il avait reconnu auprès d'elle devoir lui rembourser la somme qu'elle lui avait prêtée. Le seul versement de 100 euros qu'il a effectué entre les mains de l'huissier chargé de recouvrer la créance de Mme [J] à la suite du prononcé du jugement de première instance, l'a été à la suite à l'opposition formée par l'huissier sur la carte grise du véhicule que M. [C] cédait et à la saisie pratiquée à son domicile. Ce versement est néanmoins resté isolé.

Ces éléments démontrent que M. [C] a opposé une résistance fautive et abusive à la demande de remboursement de Mme [J], contraignant cette dernière à effectuer diverses démarches et lui occasionnant une perte de temps. Cette faute a causé à l'intimée un préjudice qui a été justement réparé par le premier juge par l'allocation de la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.

Il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. [C] à payer à Mme [J] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur la demande de délais de paiement

L'article 1343-5 du code civil permet au juge, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, de reporter ou d'échelonner le paiement des sommes dues dans la limite de deux années, à l'exception des dettes d'aliments.

En l'espèce M. [C] justifie qu'il percevait un salaire net de 1.400 euros environ en mars et avril 2022 en qualité de mécanicien auto. Il explique être entré en contrat d'apprentissage à compter du 6 mars 2023 et en justifie. Il ne précise pas dans quelles conditions son précédent contrat de travail a pris fin et ne justifie pas que la baisse de revenus qui en a résulté a été subie. Son contrat d'apprentissage mentionne un salaire équivalent à 100% du SMIC du 6 mars au 5 septembre 2023. Les salaires dont il justifie correspondent au mois de février 2023 (761 euros) et à trois jours de travail du 1er au 3 mars (234,04 euros). Il ne produit pas de bulletin de salaire correspondant à un mois complet à compter du 6 mars 2023. Il justifie qu'il assume le remboursement d'un crédit à hauteur de 483,84 euros outre un crédit voiture de 301,80 euros et les charges courantes.

M. [C] ne s'explique pas sur la mise en vente de ses véhicules et du produit de celles-ci, étant précisé qu'il a en toute hypothèse vendu un des véhicules à sa voisine qui a transmis un certificat de cession à l'huissier mandaté par Mme [J], ainsi que l'indique maître [V], commissaire de justice, le 9 mai 2023. M. [C] n'a effectué qu'un seul versement de 100 euros pour commencer à apurer sa dette.

Au regard de ces éléments, de l'opacité de la situation de M. [C] qui ne justifie pas de la totalité de ses capacités financières, ne démontre pas une réelle volonté d'apurer sa dette et ne formule pas de proposition précise de mensualités de remboursement, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de sa demande de délais de paiement.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Eu égard à la solution du litige il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. [C] aux dépens de première instance et au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [C], partie perdante, sera également condamné aux dépens d'appel, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Il y a lieu d'accorder à Maître Florence Hegoburu, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il convient de condamner M. [C] à payer à Mme [J] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

La demande formulée par M. [C] sur ce fondement sera en revanche rejetée.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 4 avril 2023 par le tribunal judiciaire de Pau en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [R] [C] aux dépens d'appel.

Accorde à Maître Florence Hegoburu, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Condamne M. [R] [C] à payer à Mme [E] [J] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [R] [C] de sa demande formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 2ème ch - section 1
Numéro d'arrêt : 23/01195
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;23.01195 ?
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