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13/06/2024 | FRANCE | N°24/01670

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 13 juin 2024, 24/01670


N°24/01991



REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,



ORDONNANCE DU treize Juin deux mille vingt quatre





Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/01670 - N° Portalis DBVV-V-B7I-I34Y



Décision déférée ordonnance rendue le 11 JUIN 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

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Nous, Véronique GIMENO, Vice-Présidente placée, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 18 décembre 2023, ...

N°24/01991

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

ORDONNANCE DU treize Juin deux mille vingt quatre

Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/01670 - N° Portalis DBVV-V-B7I-I34Y

Décision déférée ordonnance rendue le 11 JUIN 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Véronique GIMENO, Vice-Présidente placée, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 18 décembre 2023, assistée de Julie FITTES-PUCHEU, Greffier,

APPELANT

Monsieur X SE DISANT [T] [U]

né le 18 Octobre 1993 à [Localité 5]

de nationalité Algérienne

Retenu au centre de rétention d'[Localité 2]

Comparant et assisté de Maître Carine BAZIN, avocat au barreau de Pau

INTIMES :

Le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES , avisé, absent, ayant transmis un mémoire le 12 juin 2024 à 18h36 par voie électronique

MINISTERE PUBLIC, avisé de la date et heure de l'audience, n'ayant pas transmis d'avis

ORDONNANCE :

- réputée contradictoire, après débats en audience publique,

*********

Monsieur [T] [U] est né le 18/10/1993 en Algérie, il est de nationalité algérienne. Il est arrivé sur le territoire français en 2013, a obtenu des titres de séjour, le dernier étant un "certificat résidence algérien" valable du 22 février 2023 au 21 février 2024, dont il n'a pas demandé le renouvellement.

 

Le 1er mai 2024, le préfet de la Moselle a pris à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français avec interdiction de retour pour une durée de 2 ans, qui lui a été notifiée le jour même à 15h40.

 

Par décision en date du 8 juin 2024, notifiée le jour-même à 17h40, l'autorité administrative a ordonné le placement de Monsieur [T] [U] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et saisi, par requête en date du 10 juin 2024, reçue à 12h27, le juge des libertés et de la détention de Bayonne d'une demande tendant à la prolongation de la rétention.

 

 

Selon ordonnance du 11 juin 2024, notifiée à Monsieur [T] [U] à 17h27, le juge des libertés et de la détention de Bayonne a :

 

- Déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le préfet des Pyrénées Atlantiques.

 

- Déclaré la procédure diligentée à l'encontre de Monsieur [T] [U] régulière.

 

- Dit n'y avoir lieu à assignation à résidence.

 

- Ordonné la prolongation de la rétention de Monsieur [T] [U] pour une durée de vingt-huit jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention.

 

Selon déclaration formée le 12 juin à 12h28 Monsieur [T] [U] a interjeté appel.

 

 

A l'appui de son appel, Monsieur [T] [U] fait valoir les moyens suivants  :

Sur le fondement de l'article L.741-7 du CESEDA  qui prévoit que le délai légal entre deux placements en rétention est de sept jours à compter du terme d'un précédent placement ou, en cas de circonstance nouvelle de fait ou de droit, d'un délai de quarante-huit heures.

En 1'espece, il reproche à la décision du préfet de ne pas motiver sa décision au vu du fait qu'il a été placé au centre de rétention administrative de [Localité 4] le 31/05/2024 et libéré 48 H après, soit moins de 7 jours avant son placement au centre de rétention d'[Localité 2].

Sur le fondement de l'article 78-2 du Code de procédure pénale, il conteste la régularité du contrôle d'identité à l'origine de son placement en rétention au motif que les éléments du dossier ne permettent pas de déterminer l'heure à laquelle le délai de 12 heures a débuté.

 

S'agissant de la régularité de la requête en prolongation, il oppose à la décision du préfet un défaut de motivation et d'examen personnel de sa situation. Il rappelle que faute d'une telle motivation le juge est placé dans 1'incapacite d'apprécier le caractère nécessaire et proportionné du placement en rétention et se retrouve ainsi privé de l'exercice de son pouvoir de contrôle.

Il rappelle qu'il n'a pas été pris en considération qu'il est père d'un enfant français âgé de 6 ans, [O] [U], né le 20/12/2017, pour lequel il exerce un droit de visite tous les dimanches. Il considère que son placement en rétention porte atteinte à son droit de mener une vie familiale normale et porte atteinte à l'intérêt supérieur de son fils.

Il précise qu'il est titulaire d'un passeport en cours de validité et de garanties de représentation effectives et qu'en conséquence son placement en rétention apparait comme disproportionné et porte une atteinte grave à sa liberté individuelle. Il demande en conséquence l'infirmation de l'ordonnance entreprise.

 

A l'audience, le conseil de Monsieur [T] [U] a été entendu en ses explications

 

Vu les observations de la préfecture des Pyrénées Atlantiques en date du 12 juin 2024.  

MOTIFS DE LA DECISION :

En la forme, l'appel est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu par l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

 

Sur la recevabilité des moyens nouveaux :

Aux termes de l'article 74 alinéa 1er du code de procédure civile : « Les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public ».

Dès lors que cette règle s'applique aux règles d'ordre public, même une atteinte caractérisée aux droits fondamentaux, ne permet pas de déroger à la règle selon laquelle les moyens nouveaux ne sont pas recevables en cause d'appel.

En l'espèce, les moyens tirés de la violation des dispositions de l'article 78-2 du code de procédure pénale et de la régularité du placement en rétention conformément aux dispositions de l'article L.741-7 du CESEDA, qui constituent des exceptions de procédure n'ont pas été soulevés en première instance.  Ces moyens ne sont donc pas recevables en cause d'appel.

 

Sur le fond :

 

La décision initiale de placement a été prise par le représentant de l'État dans le département, sur le fondement d'une mesure d'éloignement de moins d'un an.  La motivation du préfet des Pyrénées Atlantiques indique que M. [T] [U] est défavorablement connu du fichier de traitement des antécédents judiciaires ; que lors de son audition il fait état de ses attaches à [Localité 3], sans toutefois en apporter la preuve.

Il n'est pas contesté que M. [T] [U] est muni d'un passeport algérien original valable jusqu'au 05 février 2029 et d'une carte nationale d'identité algérienne originale valable jusqu'au 04 mars 2029, mais il est indiqué qu'il ne dispose pas d'un domicile fixe avéré sur le territoire français, ni de ressources stables issues d'une activité professionnelle exercée régulièrement.

En conséquence, il considère qu'une décision d'assignation à résidence ne peut être mise en 'uvre car il ne présente pas de garanties de représentation effectives au regard des dispositions de l'article L.741-1 du CESEDA, présentant un risque de fuite qu'il qualifie de non négligeable au vu notamment de son maintien sans demander le renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré et sans avoir entrepris de démarches en vue de régulariser sa situation administrative.

Cette motivation ne fait pas état de l'ensemble de la situation de fait de Monsieur [T] [U], mais retient les éléments utiles permettant de comprendre la position retenue par l'administration.

 

Il est justifié au dossier de la préfecture que Monsieur [T] [U] dispose d'un passeport valide et que le 9 juin 2024, un premier routing a été sollicité.

Dès lors l'administration justifie des diligences accomplies nécessaires à l'éloignement de l'étranger et c'est de non droit que le premier juge a déclaré la requête en prolongation recevable.

 

Monsieur [T] [U] justifie par la production d'un avis d'imposition 2023 et d'une attestation de la CPAM qu'il dispose d'un logement régulier au [Adresse 1] de sorte qu'il ne peut lui être opposé qu'il ne justifie pas de son adresse.

La préfecture des Pyrénées Atlantique affirme sur la seule référence à un fichier TAJ qu'il constitue une menace pour l'ordre public, sans aucun autre élément permettant de caractériser cette menace. Or, la consultation de ce fichier fait apparaître une seule procédure datant de 2016 et pour laquelle il n'a pas été justifié qu'elle a réellement donné lieu à condamnation.

Dès lors, la menace évoquée, n'est étayée par aucun élément objectif.

 

Aux termes de l'article L 731-1 :

L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;

2° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;

3° L'étranger doit être éloigné pour la mise en 'uvre d'une décision prise par un autre État, en application de l'article L. 615-1 ;

4° L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ; 5° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l'article L. 622-1 ;

6° L'étranger fait l'objet d'une décision d'expulsion ;

7° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ;

8° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction administrative du territoire français.

L'étranger qui, ayant été assigné à résidence en application du présent article, ou placé en rétention administrative en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2, n'a pas déféré à la décision dont il fait l'objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette décision est toujours exécutoire, peut être assigné à résidence sur le fondement du présent article ».

 

En l'espèce, la préfecture des Pyrénées Atlantiques n'apportant aucun élément permettant d'écarter la mise en 'uvre de l'article susvisé, la mesure de placement en rétention apparaît par conséquent disproportionnée.

 

L'ordonnance querellées sera par conséquent infirmée sur ce point.

PAR CES MOTIFS :

 

Déclarons l'appel recevable en la forme.

Déclarons irreccevables les exceptions de procédure soulevées en cause d'appel

 

Infirmons l'ordonnance entreprise en ce qu'elle dit n'y avoir lieu à assignation à résidence et ordonné la prolongation de la rétention de Monsieur [T] [U] pour une durée de vingt-huit jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention.

 

Mettons fin à la rétention de Monsieur [T] [U] et ordonnons sa mise en liberté.

Rappelons que l'intéressé a l'obligation de quitter le territoire français en application de l'article L742-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture des Pyrénées-Atlantiques.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de PAU, le treize Juin deux mille vingt quatre à 11h45

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Julie FITTES-PUCHEU Véronique GIMENO

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 13 Juin 2024

Monsieur [T] X SE DISANT [U], par mail au centre de rétention d'[Localité 2]

Pris connaissance le : À

Signature

Maître Carine BAZIN, par mail,

Monsieur le Préfet des Pyrénées-Atlantiques, par mail


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 24/01670
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;24.01670 ?
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