CF/CD
Numéro 24/01862
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 04/06/2024
Dossier : N° RG 23/00282 - N° Portalis DBVV-V-B7H-INYT
Nature affaire :
Demande tendant à la démolition ou la mise en conformité d'un ouvrage édifié ou installé en violation des règles d'urbanisme
Affaire :
[D] [H]
C/
SARL PETEGENE
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 Juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 12 Mars 2024, devant :
Madame FAURE, Présidente, magistrate chargée du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile
Madame BLANCHARD, Conseillère
Madame REHM, Magistrate honoraire
assistées de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l'appel des causes,
en présence de Madame FOURCADE, Greffière stagiaire
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [D] [H]
né le 29 octobre 1963 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 10]
[Localité 3]
Représenté par Maître LEDAIN du Cabinet ABL ASSOCIES, avocat au barreau de PAU
Assisté de Maître LAVAUD, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMEE :
SARL PETEGENE
représentée par son gérant, Monsieur [V] [P], domicilié ès qualités audit siège
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée et assistée de Maître FESCHOTTE de la SCP GUILHEMSANG - DULOUT, avocat au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 11 JANVIER 2023
rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DAX
RG numéro : 18/01456
EXPOSE DU LITIGE
La SARL PETEGENE est propriétaire d'une maison d'habitation sise à [Localité 3] (40), [Adresse 5], voisine de la parcelle appartenant à Monsieur [D] [H], sise au [Adresse 10].
Ces propriétés dépendent du lotissement '[8]' disposant d'un cahier des charges déposé en l'étude de Maître [Y] [U], notaire à [Localité 12], approuvé par arrêté préfectoral du 27 octobre 1964.
Par courrier recommandé du 28 août 2018, M. [H] a, par l'intermédiaire de son conseil, mis en demeure Monsieur et Madame [P], gérants de la SARL PETEGENE, de procéder à la démolition de la construction réalisée sur leur propriété, de ses aménagements et de l'abri situé à l'avant de la maison, l'ensemble de ces éléments ayant été édifiés en violation du cahier des charges du lotissement.
Par acte d'huissier de justice du 25 octobre 2018, M. [H] a fait assigner la SARL PETEGENE devant le tribunal de grande instance de Dax sur le fondement de l'article 1143 ancien code civil, aux fins notamment de voir démolir les constructions érigées sur la parcelle.
Suivant jugement contradictoire en date du 11 janvier 2023 (RG n° 18/01456), le tribunal a :
- débouté M. [H] de ses demandes,
- condamné M. [H] à payer à la SARL PETEGENE la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.
Pour rejeter les demandes de M. [H], le juge a retenu, sur le fondement de l'article L. 442-11 du code de l'urbanisme,
- que le cahier des charges d'un lotissement est un document contractuel qui engage les colotis entre eux pour toutes les stipulations qu'il contient, mais qu'il peut être modifié par l'autorité compétente pour être mis en concordance avec le plan local d'urbanisme ou le document d'urbanisme en tenant lieu,
- que par délibération du 13 mars 2014, le conseil municipal de [Localité 11] a approuvé la mise en conformité du cahier des charges du lotissement '[8]' avec les règles du plan local d'urbanisme,
- que M. [H] ne justifie pas que les dispositions du cahier des charges du lotissement demeurent applicables suite à sa mise en conformité avec les règles du plan local d'urbanisme.
Par déclaration du 24 janvier 2023 (RG n° 23/0282) M. [H] a relevé appel, critiquant le jugement dans l'ensemble de ses dispositions.
Aux termes de ses dernières conclusions du 3 novembre 2023, M. [H], appelant, entend voir la cour infirmer le jugement en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :
- condamner la SARL Petegene à remettre sa propriété intégralement en conformité avec le cahier des charges du lotissement,
- la condamner à démolir de manière générale toutes les constructions qui contreviennent aux dispositions du cahier des charges du lotissement, et plus particulièrement les constructions et aménagements visés dans le corps des conclusions,
- débouter la SARL Petegene de toutes ses demandes, y compris celle visant à régulariser sa construction en faisant de la maison arrière une annexe,
- la condamner à lui payer une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens, dont distraction est requise au profit de Me Emmanuel Lavaud.
Au soutien de ses prétentions, M. [H] fait valoir, au visa de l'article 1143 ancien du code civil,
- que son action est recevable puisqu'en tant qu'indivisaire, il a qualité à agir seul pour faire respecter l'exécution d'un contrat conclu par l'indivision ; qu'il est désormais seul propriétaire,
- que le cahier des charges fait loi entre les colotis, s'impose de manière perpétuelle à eux, sans que le nouvel article 442-9 du code de l'urbanisme n'est remis en cause ce principe, et est opposable à la SARL Petegene car il a été mentionné dans son titre de propriété et été régulièrement publié,
- que la délibération de la commune de [Localité 11] du 13 mars 2014 ne permet pas d'écarter les dispositions du cahier des charges, qui ne peuvent être modifiées et mises en concordance avec le nouveau PLU que par un arrêté municipal, qui n'a jamais été pris, en application des dispositions de l'article L442-11 du code de l'urbanisme et de la réponse ministérielle du 4 avril 2017 ;
- que la délibération ne concerne aucunement les dispositions du cahier des charges du lotissement ; qu'il appartient à la SARL Petegene de prouver qu'une clause du cahier des charges serait incompatible avec le PLU,
- que la violation du cahier des charges du lotissement justifie à elle seule la démolition des constructions,
- qu'il subit un préjudice du fait de cette violation dès lors que la qualité de vie du lotissement est inhérente à la faible densité des habitations, au caractère végétalisé et aéré des propriétés, au faible trafic ; que l'esthétique des constructions, sans rapport avec celle imposée par le cahier des charges dévalue l'ensemble du lotissement,
- qu'il a informé la SARL Petegene des difficultés en amont de la réalisation des constructions,
- que le cahier des charges doit s'appliquer peu important la présence ou non des voisins,
- que les non-respects du cahier des charges consistent en la création d'un nouvel accès pour véhicules à l'arrière de la parcelle, en violation de l'article 5 du cahier des charges ; en la construction d'une deuxième maison de 113 m², en violation de l'article 23, et de l'article 18 ; en la construction d'une annexe qui ne fait pas corps avec l'immeuble principal, en violation de l'article 23 alinéa 2, et de l'article 18 relatif aux emplacements imposés pour les constructions ; en la modification du niveau naturel du sol, en violation de l'article 14 ; en la construction d'un garage et d'une extension en violation de l'article 18 ; en l'implantation de clôtures en violation des articles 12, 27 et 28 ; et en la présence de surfaces dallées sur plus de 20 % de la superficie de la parcelle, en violation de l'article 20 du cahier des charges,
- que la construction arrière ne peut être régularisée, étant indépendante de la maison principale, ne respectant pas le style architectural de la maison principale, et du fait du nivellement du terrain qui a été fait pour cette deuxième maison en contradiction avec le cahier des charges,
- que la cession par la commune d'une bande de terrain à la SARL PETEGENE ne régularise pas la situation puisque le plan du cahier des charges du lotissement ne peut pas être modifié, ni par la commune, ni par la SARL Petegene de manière unilatérale.
Par conclusions notifiées par RPVA le 26 janvier 2024, la SARL Petegene, intimée, demande à la cour de confirmer le jugement dans toutes ses dispositions et, y ajoutant,
- débouter M. [H] de ses demandes,
- le condamner à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens,
A titre subsidiaire,
- débouter M. [H] de ses demandes de démolition comme étant disproportionnées,
- le condamner à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens,
A titre infiniment subsidiaire,
- constater que l'abri à l'avant de la parcelle et la voie d'accès à la seconde maison ont d'ores et déjà été supprimés,
- débouter en conséquence M. [H] de ses demandes tendant à la démolition de ces ouvrages, comme étant sans objet,
- dire et juger qu'il ne reste à démolir que la seconde maison située en fond de parcelle, la clôture intérieure séparant les deux maisons et la clôture en bois donnant sur rue,
- dire et juger que le projet de démolition de la seconde maison tel qu'il a été conçu par M. [L] (SARL NOV'ARCHI), architecte DPLG, avec transformation en annexe sans pièces habitables, est conforme au cahier des charges du lotissement,
- dire et juger en conséquence que la seconde maison sera transformée en annexe de 50 m² sans pièces habitables conformément au projet architectural susvisé,
- débouter M. [H] de sa demande tendant à la démolition intégrale de cet ouvrage,
- octroyer à la SARL Petegene un délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir pour démolir la seconde maison conformément au projet susvisé,
- débouter M. [H] de ses demandes tendant à la remise en état du nivellement du terrain et à la démolition du garage, de la prétendue extension de la maison principale, de la clôture située en fond de parcelle et des dallages comme étant irrecevables et/ou mal fondées,
- le débouter de toutes ses demandes autres ou plus amples, en particulier sa demande au titre des frais irrépétibles ou la ramener à de plus justes proportions.
Au soutien de ses demandes, la SARL Petegene fait valoir, sur le fondement de l'article L. 442-11 du code de l'urbanisme, et à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 1221 du code civil :
- que les clauses du cahier des charges ont valablement été modifiées par la procédure de mise en concordance décidée par le maire de [Localité 11], par la délibération du 13 mars 2014 qui a approuvé la mise en concordance du cahier des charges de 20 lotissements avec le nouveau PLUI, et par celle de la nouvelle mairie du 15 décembre 2016, approuvant à nouveau la mise en concordance,
- que la légalité de la procédure de mise en concordance ne peut être contestée que devant le tribunal administratif, ce qui n'a pas été fait dans les délais,
- que la mise en concordance a eu pour effet de rendre caduques les dispositions du cahier des charges qui sont plus restrictives que les règles d'urbanisme applicables sur la commune,
- qu'il revient à M. [H] de prouver que les clauses du cahier des charges qu'il invoque sont encore applicables après la mise en concordance,
- que ses constructions et aménagements respectent le PLUI en vigueur,
- que M. [H] ne subit aucun préjudice dès lors que les ouvrages litigieux sont peu ou pas visibles depuis sa propriété ou ne lui causent un trouble, alors qu'il ne réside pas dans cette maison,
- que la deuxième maison est en bois et respecte l'environnement naturel du site, qu'elle a été faite avec l'accord de l'architecte des bâtiments de France, mais qu'elle a mandaté un architecte pour concevoir un projet visant à la démolition de cette construction avec conservation d'une partie de 50 m² qui servira exclusivement d'annexe sans pièces d'habitation, respectant ainsi le cahier des charges du lotissement, et ne dépassant pas les 20 % de superficie bâtie de son terrain, et construite à 9,40 m de la maison principale,
- que la démolition des bâtiments aura un coût excessivement élevé,
- que l'abri dont il est demandé la démolition avait été installé par son locataire et a été démonté à son départ,
- que le plan du lotissement produit par M. [H] est tronqué, et que l'article 18 prévoit aussi qu'aucun propriétaire ne peut s'opposer à ce qu'un voisin obtienne des services de l'urbanisme une dérogation pour l'implantation de son immeuble,
- que l'article 23 ne peut être interprété comme obligeant à construire des annexes selon le type architectural de la maison principale, mais a simplement pour but d'interdire les installations de fortune dans les jardins, d'autant que l'article 21 stipule qu'aucun type de construction particulière n'est imposé,
- que M. [H] ne prouve pas que le nivellement du terrain serait irrégulier, ou aurait été modifié significativement,
- que la voie d'accès à la seconde maison a été supprimée, de sorte qu'il ne subsiste qu'un chemin piétonnier auquel on accède par un portillon, ce qui n'est pas interdit,
- que la clôture de séparation des deux maisons sera démolie, que celle en bois pourra être remplacée par une clôture conforme, mais que celle construite sur le fond de la parcelle, sur le morceau cédé par la commune ne fait pas partie du périmètre du lotissement, de sorte que le cahier des charges ne s'applique pas,
- qu'il n'existe pas d'extension de la maison au sud-ouest, le carré apparaissant au cadastre correspondant à l'abri édifié par le locataire et désormais démoli,
- que le garage existait lorsqu'elle a acquis la maison en 2005, soit avant que M. [H] devienne propriétaire en 2016, de sorte que toute demande concernant ce garage est prescrite, et en tout état de cause, un permis de construire incluant ce garage ayant été valablement délivré en 1996, et le cahier des charges stipulant que les propriétaires voisins ne peuvent s'opposer à la décision des services de l'urbanisme, aucune demande relative à ce garage ne saurait prospérer,
- qu'elle n'a jamais été informée des difficultés soulevées par les projets de constructions initiés par son locataire, alors que le cahier des charges n'est pas mentionné dans son acte de vente.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2024.
MOTIFS
La qualité à agir de M. [H] n'est pas remise en cause en appel et en tout état de cause, aux termes d'un partage par acte notarié du 30 novembre 2021, il s'est vu attribué en pleine propriété la maison d'habitation située à [Adresse 10].
Sur l'application du cahier des charges du lotissement [8] :
Le cahier des charges du lotissement [8] a été déposé en l'étude de Me [U], notaire à [Localité 12] et approuvé par arrêté préfectoral du 27 octobre 1964, et il a été régulièrement publié au service de la publicité foncière de [Localité 7] le 30 mars 1965.
Ce cahier des charges prévoit 'il est 'imposable', non seulement aux acquéreurs, mais à leurs héritiers, ayants droit ou ayants cause, à quelque titre que ce soit. Il devra obligatoirement en être fait mention dans tout acte de vente, tant par les lotisseurs originaires que par les acquéreurs successifs'.
Alors même qu'il n'en est pas fait mention dans l'acte d'acquisition par la SARL Petegene, ce cahier des charges ayant fait l'objet d'une publication, est opposable à la SARL Petegene, acquéreur en 2005.
Le cahier des charges, quelle que soit sa date, constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues (Civ 3e 21/01/2016 n°15-10.566). Il convient de rappeler que ce sont des règles contractuelles de droit privé. Elles ne sont pas prises en compte par l'autorité compétente pour délivrer les permis de construire. Toutefois, la violation de ces règles contractuelles par un coloti expose celui-ci à un risque de recours que les autres colotis peuvent former devant le juge civil.
Tel est le cas en l'espèce, l'obtention d'un permis de construire par la SARL Petegene n'empêchant pas l'action de M. [H].
L'article L 442-9 du code de l'urbanisme modifié par la loi Alur du 24 mars 2014 et la loi du 25 novembre 2018 prévoit que les règles d'urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s'il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s'il n'a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu.
De même, lorsqu'une majorité de colotis a demandé le maintien de ces règles, elles cessent de s'appliquer immédiatement si le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu, dès l'entrée en vigueur de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.
Les dispositions du présent article ne remettent pas en cause les droits et obligations régissant les rapports entre colotis définis dans le cahier des charges du lotissement, ni le mode de gestion des parties communes.
Compte tenu de ce 3e alinéa de cet article qui n'a jamais été remis en cause par les lois successives, les deux autres alinéas ne s'appliquent pas dans les relations entre colotis, ce qui est cohérent dans la mesure où les dispositions relatives à la caducité des lotissements portent uniquement sur les règles d'urbanisme, elles ne sauraient remettre en cause les stipulations du cahier des charges de lotissement régissant les rapports entre les colotis.
Toutefois, le cahier des charges peut néanmoins être modifié selon une procédure spécifique.
Ainsi l'article L 442-11 du code de l'urbanisme prévoit que lorsque l'approbation d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu intervient postérieurement au permis d'aménager un lotissement ou à la décision de non-opposition à une déclaration préalable, l'autorité compétente peut, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement et délibération du conseil municipal, modifier tout ou partie des documents du lotissement, et notamment le règlement et le cahier des charges, qu'il soit approuvé ou non approuvé, pour mettre en concordance ces documents avec le plan local d'urbanisme ou le document d'urbanisme en tenant lieu, au regard notamment de la densité maximale de construction résultant de l'application de l'ensemble des règles du document d'urbanisme.
Ainsi, la procédure prévoit la nécessité d'une enquête publique et d'une délibération du conseil municipal en l'espèce, mais également d'un arrêté, puisque la décision de l'autorité compétente se traduit par un arrêté.
En l'espèce, une délibération du conseil municipal de la ville de [Localité 11] est intervenue le 13 mars 2014 en vertu de laquelle le conseil municipal a approuvé la mise en concordance des dispositions du cahier des charges des lotissements... Pins Lac Océan avec les règles du PLU d'Hossegor. Il est constant que cette délibération n'a pas été suivie d'effet, même s'il est mentionné que le Maire certifie sous sa responsabilité le caractère exécutoire de cet acte qui sera affiché au siège de la collectivité et informe la voie de recours devant le tribunal administratif.
La délibération du conseil municipal de la ville de [Localité 11] produite par la SARL Petegene du 15 décembre 2016 reprend à l'identique les termes de la délibération du 13 mars 2014.
Le fait que cette dernière comporte en outre l'encart 'envoyé en préfecture le 4 janvier 2017 et reçu en préfecture le 4 janvier 2017 puis 'publié du notifié le 4 janvier 2017", ne signifie pas comme le prétend à tort la SARL Petegene que l'autorité compétente qui serait alors le préfet a pris une décision par arrêté.
Aussi, aucune mise en concordance du cahier des charges du lotissement avec le PLU n'est effective en l'absence d'arrêté préfectoral et seules les prescriptions du cahier des charges doivent être prises en considération dans le présent litige et ne peuvent être considérées comme caduques.
Sur la violation des dispositions du cahier des charges du lotissement :
Il est constant que la charge de la preuve de démontrer que les constructions de la SARL Petegene violent le cahier des charges revient à M. [H] puisqu'il est demandeur à la procédure.
- l'abri à l'avant de la parcelle : il résulte du constat d'huissier du 29 mars 2021 que l'abri voiture a été enlevé et que la demande de M. [H] à cet effet devient donc sans objet.
- la seconde maison située en fond de parcelle :
L'article 18 du cahier des charges du lotissement prévoit qu'aucune construction ne pourra être édifiée dans le lotissement en dehors des emplacements figurants au plan visé à l'article 1er ;
L'article 20 prévoit qu'il ne pourra y avoir qu'un seul immeuble par lot. L'ensemble de la superficie bâtie au sol ne pourra excéder 20 % de la surface totale du terrain.
L'article 23 prévoit que les bâtiments annexes ne pourront en aucun cas comporter des pièces d'habitation. Il ne pourra y avoir qu'une seule annexe par lot et sa surface ne pourra excéder 50 m² avec une hauteur de 3,50 m.
Il est constant que la SARL Petegene a fait édifier une maison d'habitation avec un permis de construire, d'une surface de plancher de 113 m². Ces seuls éléments traduisent la violation manifeste de ces trois articles du cahier des charges du lotissement. Il n'y a pas lieu de se prononcer sur le nivellement du terrain, celui-ci ayant été invoqué par M. [H] à titre surabondant.
- nouvel accès :
L'article 5 du cahier des charges du lotissement prévoit qu'il est interdit aux acquéreurs d'ouvrir sur leur terrain, d'autres voies, accès ou passages que les voies prévues au lotissement.
Il est constant que pour accéder à cette seconde maison d'habitation située au fond du lot, un chemin d'accès a été édifié le long de la clôture de M. [H], à l'examen des vues aériennes avant les travaux de 2015-2016 et après les travaux (pièces 5 et 6 [H]) ; que dans le prolongement de ce chemin situé sur la propriété de la SARL, un portail a été mis en place avec un portillon pour piétons et un portail pour voiture, tel que révélé par le constat du 29 mars 2021. Il convient d'observer que l'accès à la parcelle de la SARL à l'origine se fait par un portail à proximité de la parcelle située au n° [Adresse 9] de la [Adresse 9] et donc à l'opposé du second accès créé situé à proximité du n° 10 de la rue appartenant à M. [H].
Cet accès sur la voie publique et ce chemin nouvellement créé sont donc en totale contradiction avec les dispositions de l'article 5 précité.
La SARL Petegene ne peut prétendre qu'elle a supprimé cette voie d'accès après le départ de son locataire et qu'il ne s'agit que d'un aménagement paysager alors que le portail d'ouverture permettant le passage de voiture et le portillon des piétons sont encore en place et qu'il n'est pas démontré que la facture de M. [Z] [R] du 20 septembre 2019 qui fait état d'une démolition soit afférente à ce chemin d'accès.
Aussi, il convient de retenir le maintien de la violation de l'article 5 du cahier des charges du lotissement.
Sur le garage et l'extension :
Il est fait état d'une extension édifiée par la SARL, en avant de la parcelle, laquelle est indiquée sur le plan cadastral en pièce 3 [H]. Cependant, eu égard à la vue aérienne en pièce 6 [H], après travaux, et au cliché photographique en pièce 10 [H] qui révèle un bais en bois, cette extension correspond à ce qui a été appelé 'abri à l'avant de la parcelle' et il ne peut donc être argué à ce titre par M. [H] d'un élément en sus de cet abri gazebo.
La demande de M. [H] sera rejeté à ce titre et le jugement confirmé sur ce point.
Concernant le garage situé au nord en mitoyenneté avec le n° 6 de l'avenue de l'Orée, il convient de constater que celui-ci existait lors de l'acquisition de l'immeuble par la SARL Petegene le 7 juillet 2005 puisqu'il en est fait mention dans l'acte. Par ailleurs, il existait avant la réalisation des travaux litigieux eu égard aux vues aériennes précitées.
Aussi, la contestation de son existence au regard de sa conformité au cahier des charges du lotissement se trouve prescrite, n'ayant pas été introduite dans le délai quinquennal de sa réalisation.
La demande de M. [H] à ce titre sera rejetée comme irrecevable.
Sur les clôtures :
M. [H] invoque l'article 12 du cahier des charges du lotissement qui prévoit que la division pure et simple d'une parcelle est rigoureusement interdite.
Or, la mise en place d'une clôture même au sein d'une parcelle ne correspond pas à une division laquelle est un terme d'urbanisme qui prévoit qu'il s'agit de découper une unité foncière pour en faire plusieurs morceaux. La demande de démolition des clôtures ayant pour effet de diviser le terrain sera rejetée et le jugement confirmé sur ce point.
L'article 27 du cahier des charges du lotissement prévoit que les clôtures en bordure des voies seront constituées par un mur bahut de 0,40 m de hauteur au moins et de 0,80 m au plus, non compris fondations, et surmontées d'une grille ou treillage ; les clôtures en bordure des voies publiques ne pourront être édifiées qu'après délivrance, par l'autorité compétente, soit de [Localité 3], soit d'Hossegor, de l'alignement ou du nivellement.
L'article 28 prévoit que sur les limites séparatives des clôtures seront édifiées comme celles sur rue ou constituées en fil de fer lisse, grillage ou haies. C'est à dire que, en sus du fil de fer lisse, grillage ou haies, la clôture sur la limite séparative de M. [H] peut être constituée d'un mur bahut de 0,40 m de hauteur au moins et de 0,80 m au plus, non compris fondations, et surmontées d'une grille ou treillage.
Il est constant que toutes les clôtures édifiées sur rue ou séparant les deux propriétés sont en bois et que la SARL Petegene indique qu'elles peuvent être démolies et édifiées en conformité avec le cahier des charges du lotissement. Il est donc admis que ces clôtures sont en violation du cahier des charges du lotissement.
Concernant la parcelle AP [Cadastre 2], il est fait état par la SARL Petegene de ce qu'elle aurait été acquise auprès de la commune et qu'elle ne ferait pas partie du lotissement, sans pour autant produire l'acte d'acquisition. M. [H] ne peut exiger que la clôture qui a été apposée après acquisition, soit remise à la limite de la parcelle [Cadastre 4] dès lors que la commune n'est pas en la cause et qu'il ne peut donc être considéré que la parcelle relève encore du domaine public alors qu'elle est clairement identifiée sur le plan cadastral.
M. [H] sera débouté de sa demande à ce titre et le jugement confirmé sur ce point.
Sur les dallages :
M. [H] invoque à cet effet les dispositions de l'article 20 du cahier des charges du lotissement déjà précitées et en outre l'article 32 du cahier des charges du lotissement qui prévoit que les marges de reculement réservées par le plan, le long des voies devront être traitées en jardin d'agrément et affectées aux plantes, arbustes ou arbres à l'exclusion de toutes cultures potagères. Néanmoins, cet article est relatif aux marges de reculement sur rue et le grief de M. [H] portant sur les dallages au sein de la parcelle ne peut être soumis à cet article.
La demande de M. [H] à cet effet doit être rejetée et le jugement confirmé sur ce point.
Sur la sanction :
M. [H] sollicite la démolition des ouvrages édifiés en violation des dispositions du cahier des charges du lotissement et la SARL Petegene y oppose la disproportion de cette sanction.
Il n'est pas totalement disproportionné de demander la démolition de la maison d'habitation, des clôtures en bois et du nouvel accès alors qu'il ne s'agit pas d'un seul désagrément du voisinage mais de l'implantation d'un second logement avec ses accessoires en contradiction avec l'esprit du lotissement qui est de limiter le nombre d'immeubles et de préserver une partie végétalisée, alors que la bande nouvelle construite était auparavant boisée, à l'instar des parties arrières des lots avoisinants tels que cela résulte des vues aériennes, le lotissement se trouvant à l'orée d'un bois.
Par ailleurs, la SARL Petegene est un professionnel de l'immobilier puisque l'extrait k bis de la SARL Petegene révèle que son activité exercée est celle de 'loueur en meublé professionnel la réalisation de prestations accessoires à l'hébergement l'acquisition de biens immobiliers la gestion et l'administration desdits biens'. Elle ne peut donc s'abriter derrière le comportement de son locataire M. [S] qui aurait procédé aux constructions illégales alors que le permis de construire est au nom de la SARL et qu'elle ne produit aucun élément relatif à ce comportement. Il s'agit en réalité d'une division déguisée d'une parcelle à des fins commerciales destinée à alimenter son activité de loueur ou de vendeur d'immeubles.
La sanction de démolition n'est donc pas disproportionnée et il convient de faire droit à la demande de M. [H] sur ces points. Le jugement sera donc réformé sur ces points.
Il ne peut être fait droit à la demande subsidiaire de la SARL Petegene de conserver dans le cadre de la démolition de la seconde maison une annexe de 50 m² pour lequel elle a établi un projet de demande de permis de construire avec une destination de pièces de rangement. Or, il convient de rappeler que l'article 23 du cahier des charges du lotissement prévoit qu'il ne pourra y avoir qu'une annexe par lot. Or, le garage pour lequel aucun grief n'a été retenu par la présente décision constitue déjà une annexe et une annexe supplémentaire ne peut donc être édifiée.
En conséquence, la demande de la SARL Petegene à cet effet sera rejetée.
Les demandes accessoires de première instance relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront également réformées, la SARL Petegene succombant.
L'équité commande d'allouer à M. [H] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [D] [H] de ses demandes de démolition de l'extension, des clôtures qui ont pour effet diviser le terrain, de la clôture relative à la parcelle AP [Cadastre 2] et des dallages,
Infirme le jugement pour le surplus des dispositions soumises à la cour,
statuant à nouveau :
Déclare irrecevable la demande de démolition du garage comme prescrite,
Ordonne la démolition du nouvel accès en proximité du [Adresse 1], de la maison d'habitation située en fond de lot, des clôtures en bois sur la rue et en limite séparative de propriété,
Constate que la demande de démolition de l'abri à l'avant de la parcelle est devenue sans objet,
Déboute la SARL Petegene de sa demande portant sur l'édification d'une annexe de 50 m²,
y ajoutant :
Condamne la SARL Petegene à payer à M. [D] [H] une indemnité de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Petegene aux dépens de première instance et d'appel dont distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Carole DEBON Caroline FAURE