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23/05/2024 | FRANCE | N°24/01468

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 23 mai 2024, 24/01468


N° 2024/1754



REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,



ORDONNANCE DU vingt trois Mai deux mille vingt quatre





Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/01468 - N° Portalis DBVV-V-B7I-I3IS



Décision déférée ordonnance rendue le 21 mai 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,




Nous, Joëlle GUIROY, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 18 décembre 2023,...

N° 2024/1754

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

ORDONNANCE DU vingt trois Mai deux mille vingt quatre

Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/01468 - N° Portalis DBVV-V-B7I-I3IS

Décision déférée ordonnance rendue le 21 mai 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Joëlle GUIROY, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 18 décembre 2023, assistée de Nathalène DENIS, Greffier,

APPELANT

M. [O] X SE DISANT [E]

né le 30 Mars 1992 à [Localité 3]

de nationalité Tunisienne

Retenu au centre de rétention d'[Localité 2]

Comparant et assisté de Maître Marie-Claude LABORDE-APELLE et de M.

INTIMES :

Le PREFET de la Vienne, avisé, absent

MINISTERE PUBLIC, avisé de la date et heure de l'audience,

ORDONNANCE :

- réputée contradictoire, après débats en audience publique,

*********

Vu les dispositions des articles L 614-1 à L 614-15, L 732-8, L 743-5, L 743-10 , L 743-20, L.741-1, 741-4-5-7-9, L 7441, L 751-9 et -10, L .743-14, -15 et L 743-17, L 743-19 et L 743-25, et R.743-1 à R 743-8 et R 743-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (ceseda)

Vu l'obligation de quitter le territoire français avec interdiction de retour pour une durée de 2 ans prise par le préfet de la Vienne, le 17 mai 2024 notifiée à M. [O] [E]

Vu la décision de placement en rétention administrative prise le 17/05/2024 par le Préfet de la Vienne à l'encontre de M. [O] [E],

Vu la requête de l'autorité administrative en date du 19/05/2024 reçue le 19 mai 2024 à 17H31 et enregistrée le 20 Mai 2024 à 11H00 tendant à la prolongation de la rétention de M. [O] [E] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de vingt huit jours,

Vu l'extrait individualisé du registre prévu à l'article L.744-2 du CESEDA émargé par l'intéressé,

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Bayonne en date du 21 mai 2024 qui, par décision assortie de l'exécution provisoire, a :

- déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le Préfet de la Vienne,

- dit n'y avoir lieu à assignation à résidence

- fait droit à la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le Préfet de la Vienne et ordonnons la prolongation de rétention de M. [O] [E] pour une durée de vingt- huit jours a l'issue du délai de 48 heures de la rétention.

Vu la notification de l'ordonnance faite au retenu le 21 mai 2024 à 12 h 50 ;

Vu la déclaration d'appel formée par M. [O] [E] reçue le 22 mai 2024 à 11 h 09 ;

Au soutien de son appel, M. [O] [E] expose qu'il dispose de garanties de représentation en France, qu'il est père d'une enfant française, a déposé une demande de titre de séjour en cours d'examen et que son placement en rétention le prive d'un droit à la vie privée et familiale.

A l'audience, M. [O] [E], régulièrement convoqué, a repris les termes de son appel et a eu la parole en dernier. Il sollicite le rejet de la requête et sollicite son assignation a résidence au domicile de sa soeur dans l'attente de la réponse du tribunal administratif qu'il a saisi pour contester le refus de délivrance d'un titre de séjour. Il dit vouloir prendre soin de sa fille et conteste les violences qui lui sont reprochées sur sa compagne.

Le conseil de M. [O] [E] demande l'infirmation de l'ordonnance entreprise et son placement en rétention administrative car il est père d'une enfant française et que sa compagne, qui est visée comme victime dans le cadre des poursuites pénales dont il fait l'objet, est revenue sur ses accusations et a indiqué avoir menti aux services de police. Il ajoute que Monsieur propose désormais d'être hébergé chez sa soeur dans l'Essone et qu'il a travaillé comme il le justifie.

Au soutien de ses dires, il est remis à la cour un ensemble de documents établissant les liens que M. [O] [E] entretient avec sa fille et la possibilité dont il fait état d'être hébergé par sa soeur.

[G] [U], mère de la fille de M. [O] [E], est présente à l'audience.

Le préfet de la Vienne, absent, n'a pas fait valoir d'observations.

Sur ce :

En la forme,

L'appel est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu par l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur le fond,

S'agissant de la situation de l'appelant, l'examen de la procédure fait apparaître les éléments d'appréciation suivants :

Monsieur [E] [O], né le 30/03/1992 à [Localité 3] (Tunisie), de nationalité tunisienne est entré irrégulièrement en France le 01/08/2017.

Le 11 mai 2024, il a fait l'objet de décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire sans délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi avec interdiction de retour de 2 ans prises par la préfecture de la Vienne, notifies le même jour ;

En 2023, il a fait l'objet d'une convocation devant le délégué du procureur de la république de [Localité 1] à la suite de violences commises sur sa conjointe.

Il a cependant été interpellé et placé en garde à vue le 16/05/2024 pour des faits initialement qualifiés de tentative de meurtre par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité et d'atteinte au secret des correspondances émises par voie électronique par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité.

Ces faits font l'objet de poursuites pénales en cours.

Il déclare être père d'un enfant mineur de nationalité française mais il n'est pas contesté que la demande de délivrance d'un titre de séjour « parent d'enfant français » qui a été déposée auprès de la préfecture de la Vienne le 16/01/2024 lui a été, en l'état, refusée.

Il déclare être sans emploi et ne justifie pas de ressources issues d'une activité légale.

Il n'est pas en possession d'un document d'identité ou de voyage et il a fait état de sa volonté de rester en France.

Il n'est pas mis en évidence un état de vulnérabilité particulier qui s'opposerait à un placement en rétention.

Il a produit des documents qui l'établissent au même domicile que sa conjointe et affirme n'avoir pas été violent envers elle.

Cependant, les procédures pénales jointes à la requête font état de témoignages de son voisinage et entourage relatant un contexte de violences psychologiques et physiques récurrent et de fortes inquiétudes pour l'enfant commun au couple.

A hauteur d'appel, il produit une attestation d'hébergement de [W] [Z] qui serait son beau-frère. Il ne justifie cependant pas de son lien avec lui et de la communauté qui existerait avec sa soeur et l'attestation ne comporte aucun engagement d'hébergement pour l'avenir.

L'administration justifie de la saisine des autorités consulaires tunisiennes le 17 mai 2024 en vue de la délivrance d'un laissez-passer consulaire pour pallier le défaut de document de voyage Monsieur [E] [O].

En droit,

L'article L731-1 du CESEDA décide que :

"L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ;

2° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français prise en application des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 ;

3° L'étranger doit être éloigné pour la mise en 'uvre d'une décision prise par un autre État, en application de l'article L. 615-1 ;

4° L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre État en application de l'article L. 621-1 ;
5° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction de circulation sur le territoire français prise en application de l'article L. 622-1 ;

6° L'étranger fait l'objet d'une décision d'expulsion ;

7° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire prononcée en application du deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ;

8° L'étranger doit être éloigné en exécution d'une interdiction administrative du territoire français.
L'étranger qui, ayant été assigné à résidence en application du présent article, ou placé en rétention administrative en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2, n'a pas déféré à la décision dont il fait l'objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette décision est toujours exécutoire, peut être assigné à résidence sur le fondement du présent article".

L'article L 741-1 du CESEDA dispose que : "L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3. "

L'article L 741-1 du CESEDA dispose que "Le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative".

Au cas présent, les mesures portant obligation de quitter le territoire national visées par l'arrêté de placement en rétention ont été régulièrement notifiées à Monsieur [E] [O].

En outre, il résulte des pièces communiquées que malgré les démarches dont il allègue l'existence, il ne dispose pas d'un document lui permettant de séjourner régulièrement en France à ce jour.

Or, il n'appartient pas à l'autorité judiciaire de se prononcer sur la régularité des décisions administratives dont il conteste le bien-fondé.

Or, en contestant l'atteinte à la vie privée et familiale que constituerait la mesure prise à son encontre, Monsieur [E] conteste les mesures fondant son placement en rétention étant précisé que toute privation de liberté constitue en soi une atteinte à la vie privée ou familiale de la personne qui en fait l'objet, il dispose, au centre de rétention administrative, en application des dispositions de l'article L 744-4 du CESEDA d'un large droit de visite et de contact familiaux.

En conséquence, le seuil d'application de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui protège le droit au respect à la vie privée et familiale de chaque personne ne trouve pas au cas présent à s'appliquer.

M. [E] fait l'objet de poursuites pénales pour des faits qu'il conteste et, compte tenu de sa volonté de rester en France, il existe un risque qu'il se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.

De fait, il était jusqu'à son interpellation domicilié chez sa compagne, le tribunal correctionnel a été saisi par le procureur de la république de Poitiers notamment du chef de violences sur elle.

A hauteur d'appel, il produit une attestation d'hébergement qui ne comporte cependant aucun engagement d'hébergement pour l'avenir et il n'est pas établi l'existence d'un lien familial ou autre entre son rédacteur, dont il n'est pas établi qu'il s'agirait de son beau-frère et M. [E], ceci d'autant que les pièces communiquées ne comportent pas d'identité féminine.

Dès lors son placement en rétention n'encourt pas d'irrégularité et ne constitue pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale.

En parallèle, l'administration justifie avoir effectué les diligences utiles pour éviter que la rétention administrative de l'étranger ne dure pas plus que le temps nécessaire.

Et, force est de constater que M. [O] [E] ne remplit pas les conditions d'une assignation à résidence telles que fixées par l'article L 743-13 du CESEDA en ce sens qu'il n'a pas préalablement remis à un service de police ou à une unité de gendarmerie l'original d'un passeport en cours de validité ou de documents justifiant de son identité et qu'il a fait part de son intention de rester sur le territoire national.

En conséquence, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS :

Déclarons l'appel recevable en la forme.

Confirmons l'ordonnance entreprise.

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture de la Vienne.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de Pau, le vingt trois Mai deux mille vingt quatre à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Nathalène DENIS Joëlle GUIROY

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 23 Mai 2024

Monsieur [O] X SE DISANT [E], par mail au centre de rétention d'[Localité 2]

Pris connaissance le : À

Signature

Maître Marie-Claude LABORDE-APELLE, par mail,

Monsieur le Préfet de la Vienne, par mail


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 24/01468
Date de la décision : 23/05/2024
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;24.01468 ?
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