La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/05/2024 | FRANCE | N°23/02035

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 15 mai 2024, 23/02035


CF/CD



Numéro 24/01635





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRÊT DU 15/05/2024







Dossier : N° RG 23/02035 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IS5F





Nature affaire :



Demande sanctionnant le dysfonctionnement de l'état civil







Affaire :



AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT



C/



[W] [I],



DEPARTEMENT DES [Localité 3] AIDE SOCIALE A L'ENFANCE,



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURAN

CE MALADIE DE [Localité 9]-[Localité 10]

















Grosse délivrée le :



à :

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour...

CF/CD

Numéro 24/01635

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 15/05/2024

Dossier : N° RG 23/02035 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IS5F

Nature affaire :

Demande sanctionnant le dysfonctionnement de l'état civil

Affaire :

AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

C/

[W] [I],

DEPARTEMENT DES [Localité 3] AIDE SOCIALE A L'ENFANCE,

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE [Localité 9]-[Localité 10]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 15 Mai 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 21 Février 2024, devant :

Madame FAURE, magistrate chargée du rapport,

assistée de Madame HAUGUEL, greffière présente à l'appel des causes,

Madame FAURE, en application des articles 805 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame FAURE, Présidente

Madame de FRAMOND, Conseillère

Madame REHM, Magistrate honoraire

qui en ont délibéré conformément à la loi.

Le dossier a été communiqué au Ministère Public le 28 novembre 2023

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur l'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT disposant aux termes de l'article 38 de la loi n° 55-366 du 3 avril 1955 d'un monopole légal de représentation de l'État devant les tribunaux de l'ordre judiciaire, domicilié

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représenté et assisté de Maître UHALDEBORDE-SALANNE de la SCP UHALDEBORDE-SALANNE GORGUET VERMOTE BERTIZBEREA, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMES :

Madame [W] [I]

née le 28 novembre 1960 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C-64445-2023-004591 du 21/02/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)

Représentée et assistée de Maître CAZEAU de la SCP DELMA AVOCATS, avocat au barreau de BAYONNE

LE DEPARTEMENT DES [Localité 3], Aide Sociale à l'Enfance

pris en la personne du Président du Conseil Départemental en exercice, domicilié, ès qualités audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représenté par Maître BONNET, avocat au barreau de BAYONNE

Assisté de Maître VERRIER, avocat au barreau de NICE

La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE [Localité 9]-[Localité 10]

prise en la personne de son représentant légal, savoir son Directeur Monsieur [T] [C] domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée et assistée par Maître BARNABA, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 27 AVRIL 2023

rendue par le JUGE DE LA MISE EN ETAT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BAYONNE

RG numéro : 22/00415

EXPOSE DU LITIGE

Madame [W] [I] est née le 28 novembre 1960 à [Localité 8] de père et mère inconnus. Elle a été recueillie par la DDASS des [Localité 3] à sa naissance. Selon acte d'état civil, elle était prénommée [Y].

En 1996, elle a appris, à l'occasion d'une demande de la Caisse d'allocations familiales lui réclamant de l'argent, qu'elle avait un homonyme.

En décembre 2002, Mme [I] a engagé des démarches auprès des services d'Etat civil de la mairie de [Localité 8] afin d'obtenir une copie intégrale d'acte de naissance dans le but de renouveler sa carte d'identité.

En février 2003, Mme [I] a reçu une copie intégrale d'un acte de naissance comportant le n° 2781 alors que l'acte détenu par elle depuis sa naissance comportait le n°1447.

Le 7 juillet 2005, les services de l'Etat civil de la sous-préfecture de [Localité 5] ont saisi le parquet de Bayonne d'une difficulté relative à la demande de carte d'identité sécurisée au nom d'[Y] [I] née le 28 novembre 1960 à [Localité 8] et demeurant à [Localité 5] puisqu'il apparaissait qu'une carte d'identité en cours de validité avait déjà été délivrée à une personne présentant la même identité et vivant à [Localité 7].

Le 21 février 2008, une information a été ouverte contre X du chef de tentative d'obtention d'une carte nationale d'identité au nom d'[Y] [I].

Le 8 janvier 2010, une ordonnance de non-lieu a été rendue en retenant notamment que le responsable de l'Etat civil avait précisé que selon les premiers renseignements recueillis, les deux personnes avaient eu un parcours similaire d'enfants abandonnés confiés au service de la DDASS, qu'une erreur aurait pu être commise lors de la déclaration de naissance, et que l'administration avait fait savoir que c'était par erreur que l'extrait n° 2781, qui aurait dû être annulé suite à la déclaration de naissance n° 1447, avait été adressé au mois de février 2003 à Mme [I].

Le 18 octobre 2010, une requête a été déposée par le parquet de Nice aux fins de jugement déclaratif de naissance.

Par jugement du 1er décembre 2010, il a été déclaré que le 28 novembre 1960, à 10h30, était née, [Adresse 11], Mme [W] [I].

Continuant, malgré ce jugement à rencontrer des difficultés en lien avec ses cotisations de retraite, elle a sollicité de l'agence régionale de santé des [Localité 3], une indemnisation des préjudices qu'elle a estimé avoir subis depuis vingt ans.

Par requête du 1er juin 2017, elle a saisi le tribunal administratif de Nice aux fins notamment de voir ordonner une expertise médicale et une expertise financière afin de déterminer les préjudices subis en raison des erreurs de l'administration.

Par ordonnance du 7 juin 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête comme portée devant un ordre de juridiction incompétent, la demande relevant de la compétence des juridictions judiciaires, ce que la Cour administrative d'appel de Marseille a confirmé par ordonnance du 27 juillet 2017, au motif que le litige se rapporterait au fonctionnement des services de l'état civil, placé sous le contrôle de l'autorité judiciaire.

Par actes des 18 et 20 mars 2019, Mme [I] a alors assigné devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bayonne, l'Aide sociale à l'enfance - le Département des [Localité 3], l'Agent Judiciaire de l'Etat et la Caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 9] aux fins de voir ordonner une mesure d'expertise médicale afin d'évaluer le retentissement psychologique des erreurs commises par l'administration et une expertise financière afin d'évaluer les conséquences financières de ces mêmes erreurs.

Par ordonnance du 17 septembre 2019, le juge des référés, après avoir à son tour relevé la compétence des juridictions judiciaires pour connaître du litige, a ordonné d'une part, une expertise médicale confiée au docteur [M] et d'autre part, une expertise à caractère économique confiée à Monsieur [V].

Le 11 juin 2020, le Docteur [M] a rendu son rapport.

Le 24 février 2021, M. [V] a déposé son rapport.

Par actes des 7 et 11 février 2022, Mme [I] a assigné au fond devant le tribunal judiciaire de Bayonne, l'Aide Sociale à l'Enfance - le Département des [Localité 3], l'Agent Judiciaire de l'Etat et la Caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 9] aux fins de voir déclarer le département des [Localité 3] entièrement responsable de ses préjudices et condamner l'Agent Judiciaire de l'Etat à lui payer différentes sommes au titre de ses préjudices.

Suivant ordonnance contradictoire du 27 avril 2023 (RG n° 22/00415), le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bayonne a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par le département des [Localité 3] - Aide sociale à l'enfance ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par l'Agent Judiciaire de l'Etat ;

- condamné l'Agent Judiciaire de l'Etat à payer à Mme [W] [I] une indemnité de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné le département des [Localité 3] - Aide sociale à l'enfance à payer à Mme [W] [I] une indemnité de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum l'Agent Judiciaire de l'État et le département des [Localité 3] - Aide sociale à l'enfance à supporter la charge des dépens de l'incident ;

- renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience du juge de la mise en état du 22 juin 2023 et enjoint à l'Agent Judiciaire de l'Etat et le département des [Localité 3] - Aide sociale à l'enfance de conclure pour cette date.

Les motifs du juge de la mise en état sont les suivants :

- Sur l'exception d'incompétence, bien que la faute puisse être imputable aux services de la DDAS lors de la déclaration de naissance de Mme [I], le litige soulevé se rapporte au fonctionnement des services de l'état civil, placé sous le contrôle de l'autorité judiciaire, de sorte que le juge judiciaire est compétent en la matière.

- Sur la prescription, les préjudices allégués par Mme [I] ont continué après le jugement du 1er décembre 2010 du tribunal de grande instance de Nice qui a mis fin à l'homonymie. En ce sens, le rapport du docteur [M] confirme que la consolidation de la requérante est intervenue le 26 février 2020 et qu'elle fait état de difficultés nouvelles auprès des organismes de retraite afin de reconstituer sa carrière. Ainsi, l'exception de prescription soulevée par l'Agent Judiciaire de l'Etat doit être rejetée dès lors que les préjudices présentent un caractère évolutif et continu qui s'est poursuivi jusqu'à une date proche de la saisine du tribunal.

Monsieur l'Agent Judiciaire de l'Etat a relevé appel par déclaration du 18 juillet 2023 (RG n° 23/2035), critiquant l'ordonnance en ce qu'elle a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par l'Agent Judiciaire de l'Etat ;

- condamné l'Agent Judiciaire de l'Etat à payer à Mme [W] [I] une indemnité de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum l'Agent Judiciaire de l'État et le département des [Localité 3] - Aide sociale à l'enfance à supporter la charge des dépens de l'incident ;

- renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience du juge de la mise en état du 22 juin 2023 et enjoint à l'Agent Judiciaire de l'Etat et le département des [Localité 3] - Aide sociale à l'enfance de conclure cette date.

Suivant avis de fixation adressé par le greffe de la cour, l'affaire a été fixée selon les modalités prévues aux articles 905 et suivants du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions du 15 septembre 2023, Monsieur l'Agent Judiciaire de l'Etat, appelant, entend voir la cour :

Vu la loi 68-1250 du 31 décembre 1968,

Vu la jurisprudence de la cour de cassation ci-dessus exposée,

Vu les moyens de fait et de droit,

- Déclarer l'Agent Judiciaire de l'Etat recevable et bien fondé en son appel,

- Infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bayonne du 27 avril 2023,

- Constater la prescription de l'action de Mme [W] [I],

- Déclarer Mme [W] [I] irrecevable en son action en raison de la prescription,

- Condamner Mme [W] [I] aux entiers dépens de l'instance.

Par ses dernières conclusions du 10 octobre 2023, Mme [W] [I], intimée, entend voir la cour :

- Confirmer les dispositions de l'ordonnance rendue le 27 avril 2023 par le juge de la mise en état du TRIBUNAL JUDICIAIRE de Bayonne ;

- Rejeter les demandes, fins et conclusions de l'Agent Judiciaire de l'Etat.

En conséquence,

- Juger l'action de Mme [I] recevable.

- Renvoyer le dossier au juge de la mise en état aux fins de conclusions au fond.

- Condamner le Département des Alpes Maritimes et l'Agent Judiciaire de l'Etat au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions du 11 janvier 2024, la Caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 9]-[Localité 10], intimée, entend voir la cour :

Sur la forme,

- Voir statuer ce que de droit quant à la recevabilité de l'appel interjeté par l'Agent Judiciaire de l'Etat.

Sur le fond,

- Voir rejeter l'intégralité des demandes de l'Agent Judiciaire de l'Etat et les dire non fondées.

- En conséquence, voir confirmer dans toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge de la mise en etat du tribunal judiciaire de Bayonne en date du 27 avril 2023.

Y ajoutant,

- Voir condamner le même à payer à la CPAM de [Localité 9]-[Localité 10] la somme de 500 euros supplémentaire en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- Voir condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel, et voir autoriser Maître Alexandrine Barnaba à procéder à leur recouvrement au visa de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions du 16 octobre 2023, le Département des [Localité 3] - Aide sociale à l'enfance, intimé, entend voir la cour :

Vu les articles 74, 75 et 789 du code de procédure civile ;

Vu la jurisprudence susvisée ;

- Infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bayonne en date du 27 avril 2023 en ce qu'elle a débouté le Département des Alpes Maritimes de son exception d'incompétence du Juge judiciaire ;

Et, statuant à nouveau,

- Déclarer le juge judiciaire incompétent pour connaître du présent litige et partant le tribunal judiciaire de Bayonne et renvoyer Mme [W] [I] à mieux se pourvoir ;

- Ordonner que seul le tribunal administratif de Nice est compétent pour statuer sur la responsabilité du Département des [Localité 3] ;

- Condamner Mme [W] [I] à verser au Département des Alpes Maritimes la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par des conclusions du 9 janvier 2024, le parquet général s'en rapporte à supposer que l'action ne soit pas prescrite.

Vu l'ordonnance de clôture du 21 février 2024.

MOTIFS

Sur la compétence du tribunal judiciaire :

La compétence du tribunal judiciaire fait l'objet de l'appel incident du département des Alpes Maritimes.

La responsabilité d'une personne publique relève en général de la juridiction administrative.

Cependant, le contentieux de l'état des personnes et plus particulièrement du fonctionnement des services de l'état civil touche à la liberté individuelle dont l'article'66 de la Constitution a confié le contentieux au juge judiciaire.

Dès lors que le contentieux du fonctionnement défectueux des services de l'état civil relève du juge judiciaire, il englobe les actions indemnitaires relatives à la responsabilité des personnes publiques que ce soit l'Etat et/ou le département.

Par ailleurs, en l'espèce, la responsabilité de l'Etat comme celle du département étant en jeu et le département contestant l'engagement de celle-ci dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance, au détriment de la responsabilité de l'Etat, l'attribution du litige à deux juridictions différentes pourrait entraîner une contrariété de décisions.

Ainsi, le litige introduit par Mme [W] [I] relevant du fonctionnement défectueux du service de l'état civil, doit être traité de manière global, par le tribunal judiciaire, sans distinction de la qualité des parties.

L'ordonnance du juge de la mise en état qui a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par le département des Alpes Maritimes sera donc confirmée sur ce point.

Sur la prescription :

L'article 1 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968, relative à la prescription des créances sur l'Etat, prévoit que sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements, des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis.

Le point de départ de la prescription quadriennale des créances sur l'Etat et les collectivités publiques est constitué par la date du fait générateur de la créance dans le cadre d'une action en responsabilité (Cass assemblée plénière 06/07/2001 n° 98-17.001).

L'article 3 de la même loi de 1968 prévoit que la prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement.

Il appartient à celui qui invoque la suspension de la prescription d'établir qu'il était resté légitimement dans l'ignorance de l'existence de sa créance, c'est-à-dire qu'il n'avait aucun moyen de connaître le fait générateur dans le délai de prescription (1ère Civ. 23 septembre 2015, pourvoi n 14-18.863).

En l'espèce, Mme [I] ne peut invoquer une jurisprudence administrative sur la continuité du préjudice, appliquée à tort par le juge de la mise en état, dès lors que le point de départ de la prescription est le fait générateur du dommage ce qui ne peut être assimilé à la réalisation du préjudice et elle ne pouvait ignorer sa créance en germe lors de la saisine du parquet le 7 juillet 2005 par le service de l'état civil et à tout le moins lors du jugement déclaratif du tribunal de grande instance de Nice du 1er décembre 2010 qui a rétabli son identité [W] [I].

Le caractère évolutif et continu de son préjudice n'a aucune incidence sur la date du fait générateur, à savoir, une erreur sur l'enregistrement de son état civil lequel se situe au plus tard le 1er décembre 2010.

Aussi, en application des dispositions de la loi du 31 décembre 1968 précitées, Mme [I] devait agir en justice avant le 1er janvier 2015.

Or, en formant une assignation en référé expertise devant la juridiction administrative le 2 février 2017, puis en assignant devant le tribunal judiciaire par acte du 18 mars 2019, Mme [I] a effectué ces diligences après cette date. Son action est donc prescrite donc irrecevable.

L'ordonnance sera donc infirmée sur ce point ainsi que sur les mesures accessoires et sur le renvoi à la mise en état pour conclusions au fond.

L'équité ne commande pas l'allocation aux parties d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par le département des Alpes Maritimes-aide sociale à l'enfance,

L'infirme pour le surplus des dispositions soumises à la cour,

statuant à nouveau et y ajoutant :

Déclare l'action de Mme [W] [I] irrecevable comme prescrite,

Dit n'y avoir lieu à une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [W] [I] aux dépens qui seront recouvrés conformément à la législation sur l'aide juridictionnelle, dont distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Carole DEBON Caroline FAURE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/02035
Date de la décision : 15/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-15;23.02035 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award