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21/03/2024 | FRANCE | N°24/00886

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 21 mars 2024, 24/00886


N°24/1007



REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



Articles L 743-22 et R743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

ORDONNANCE DU vingt et un Mars deux mille vingt quatre



Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/00886 - N° Portalis DBVV-V-B7I-IZRQ



Décision déférée ordonnance rendue le 20 MARS 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,



Nous, Véronique GIMEN

O, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 18 décembre 2023, assistée de Cather...

N°24/1007

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

Articles L 743-22 et R743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

ORDONNANCE DU vingt et un Mars deux mille vingt quatre

Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/00886 - N° Portalis DBVV-V-B7I-IZRQ

Décision déférée ordonnance rendue le 20 MARS 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Véronique GIMENO, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 18 décembre 2023, assistée de Catherine SAYOUS, Greffier,

APPELANT

Monsieur le Procureur de la République de Bayonne

INTIMES :

Monsieur [Z] [W] [H]

né le 06 Octobre 1979 à [Localité 2]

de nationalité Algérienne

Retenu au centre de rétention d'[Localité 1]

Comparant et assisté de Maître MASSOU DIT LABAQUERE, avocat au barreau de Pau

LE PREFET DE LA VIENNE, avisé, absent,

Suite à l'appel suspensif du parquet de Bayonne

*********

Vu l'ordonnance rendue le 20 mars 2024 à 16 heures 14 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne, qui a :

- Ordonné la jonction du dossier N° RG 24100364 - N° Portalis DBZ7-W-B7I-FOL6 au dossier N° RG 24100363 - N° Portalis DBZ7-W-B7l-FOL6 statuant en une seule et même ordonnance.

- Déclaré recevable la requête de M. [Z] [W] [H] en contestation de placement en

rétention.

- Rejeté la requête de M. [Z] [W] [H] en contestation de placement en rétention.

- Déclaré recevabte la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par

le Préfet de la Vienne.

- Fait droit aux exceptions de nullité soulevées.

- Rejeté la requête en prolongation du maintien en rétention de M. [Z] [W] [H]

- Rappelé que l'intéressé à l'obligation de quitter le territoire français en application de l'article L742-10 du CESEDA.

- Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions relatives aux dépens.

 

Vu la notification de l'ordonnance faite au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Bayonne le 20 mars 2024 à 16 heures 24.

Vu la déclaration d'appel motivée du procureur de la République près le tribunal judiciaire de Bayonne avec saisine du premier président de la Cour d'appel de Pau aux fins de voir déclarer cet appel suspensif, reçue au greffe de la Cour le 20 mars 2024 à 17 heures 49.

 

Vu la notification de cette déclaration d'appel faite à [Z] [W] [H], le 20 mars 2024 à 18 heures 08 et à son conseil, Maître Eva LAFORGUE, le 20 mars à 18 heures 09 et à 18 heures 49.

Vu l'ordonnance rendue le 20 mars 2024 à 20 heures 25 par le magistrat délégué par le premier président de la Cour d'appel de Pau :

- Déclaré recevable la demande formée par le Procureur de la République près le Tribunal de judiciaire de BAYONNE tendant à voir déclarer son appel suspensif,

Y faisant droit,

- Dit que M. [Z] [W] [H] restera maintenu à la disposition de la justice jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond, à l'audience de la Cour d'appel de PAU qui se tiendra le jeudi 21 mars 2024 à 9 heures 30.

Monsieur [W] [H] est entré en France en 2018. Il est de nationalité algérienne. Il vit depuis 2019 avec Madame [D] [X] avec laquelle il indique s'être marié le 12 juin 2021.

Le 18 novembre 2022, le Préfet de la Vienne lui a délivré un premier refus de certificat de résidence algérien, et le 17 juin 2023, il s'est vu notifié un arrêté portant obligation de quitter le territoire avec délai de départ volontaire de trente jours fixant le pays de renvoi et portant interdiction de retour sur le territoire français pendant trois ans pris par le Préfet de la Vienne en date du 15 juin 2023.

Suite à son placement en garde à vue le 16 mars 2024 pour des faits de violences sur conjoint, l'autorité administrative a ordonné le placement de M. [Z] [W] [H] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire à 12 h 55. La décision lui a été notifiée le même jour à 12 h 57.

Par requête en date du 18/03/2024 réceptionnée le 18/03/2024 à 16h22 et enregistrée par le greffe du juge des libertés et de la détention le 19/03/2024 a 13h30, M. [Z] [W] [H] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne aux fins de contester la régularité de la décision de placement en rétention administrative ;

Par requête en date du 19/03/2024 reçue le 19/03/2024 à 10h01 et enregistrée le 19/03/2024 à 14h00 l'autorité administrative a saisi le juge des libertés et de la détention de Bayonne aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours ;

Par ordonnance du 20 mars 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne a rejeté la requête de Monsieur le préfet de la Vienne visant à la prolongation du maintien en rétention de M. [Z] [W] [H].

Le parquet de BAYONNE a relevé appel de cette décision avec demande d'effet suspensif le 20 mars 2024 à 16 h 24 ;

Vu la déclaration d'appel avec demande d'effet suspensif d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention statuant en matière de rétention administrative d'un étranger, formée dans les délais et notifiée à l'autorité administrative, à l'étranger et à son conseil à 18 h 09 et à 18h 49.

Des observations du conseil de M. [Z] [W] [H] ont été envoyées en réponse à la demande de déclaration d'appel suspensif à 20 h 42.

Lors de l'audience, le représentant du Ministère public a sollicité la confirmation des deux premiers moyens de l'ordonnance querellée en ce qu'elle a rejeté les moyens soulevés par M. [Z] [W] [H] au soutien de sa contestation.

S'agissant du troisième moyen qu'il souhaite voir infirmer, il rappelle que M. [Z] [W] [H] a été convoqué à la gendarmerie dans le cadre d'une enquête de flagrance faisant suite à l'audition de Madame [X] qui dans l'après-midi du 16 mars 2024 a dénoncé des faits de violences conjugales et que c'est à l'occasion de vérifications réalisées dans le cadre de l'enquête qu'il est apparu qu'il était inscrit au fichier des personnes recherchées (Gestion des dossiers des ressortissant étrangers en France). Il résulte du procès verbal de synthèse qu'il a été contacté par téléphone pour se rendre à la brigade afin d'être entendu sur les faits dénoncés par sa compagne et que c'est à l'occasion de son arrivée à la brigade qu'il a été placé en garde à vue.

Le fait que le parquet de Poitiers ait décidé, après avoir eu connaissance de la mesure d'éloignement de classer l'affaire au motif qu'une autre sanction de nature non pénale, est sans conséquence sur la régularité de la procédure initiale et le placement en garde à vue.

Entendu, en sa plaidoirie le conseil de Monsieur [W] [H] rappelle qu'un recours est actuellement en cours devant le Tribunal Administratif à l'encontre de l'arrêté portant Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF) et que M. [Z] [W] [H] a obtenu deux récépissés qui lui ont permis de travailler légalement sur le territoire français durant l'instruction de ses demandes de titre de séjour, qu'il a occupé les fonctions d'agent polyvalent dans un EHPAD, et d'agent d'entretien auprès du centre pénitentiaire de [3] (86).

Au visa de l'article 5 de la CEDH, il note que les circonstances dans lesquelles Monsieur [W] [H] a été placé en garde à vue manquent de précisions ; qu'aucune convocation n'a été jointe à la procédure et aucun procès-verbal ne relate l'heure ou le motif de cette convocation et enfin que le procès-verbal ne décrit pas les circonstances de son interpellation.

En conséquence, estimant que la procédure est déloyale, il sollicite la confirmation de l'ordonnance ayant déclaré la garde à vue était irrégulière, car fondée sur une interpellation déloyale, attentatoire au droit à la sûreté.

Lors de l'audience Monsieur [W] [H] explique qu'il a été contacté par téléphone par les services de Gendarmerie, qui lui ont ordonné de se rendre en leur unité sous 30 minutes, à défaut de quoi un avis de recherche serait lancé contre lui.

Sur le fond :

Il ressort des éléments de la procédure judiciaire que le 16 mars 17h45 Mme [X] [D] se présentait à la gendarmerie pour dénoncer des faits de violence à l'encontre de son conjoint, fait de nature délictuelle ; qu'à l'issue de son audition qui se terminait à 20H00, elle précisait qu'elle n'entendait pas déposer plainte et refusait de communiquer l'identité de son compagnon.

Il ressort également du PV de synthèse, confirmé par les déclarations de M. [Z] [W] [H] à l'audience, qu'il a été contacté par téléphone et invité à se présenter à la brigade pour être entendu par les faits dénoncés par sa compagne.

Il convient de rappeler que s'agissant d'une enquête de flagrance, les dispositions de l'article 61 du code de procédure pénale ne sont pas applicables et que comme indiqué dans la procédure, M. [Z] [W] [H] s'est présenté dans la demi-heure suivant l'appel téléphonique pour être placé en garde à vue, sans qu'il n'ait été nécessaire pour les gendarmes de procéder à son interpellation, de sorte qu'il ne peut être reproché à la procédure de ne pas contenir de PV d'interpellation.

Enfin, conformément aux dispositions de l'article 62-2 du code de procédure pénale, « la garde à vue est une est une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, par laquelle une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs ». Par conséquent, il n'incombait pas aux gendarmes d'obtenir l'accord du procureur pour procéder au placement en garde à vue, mais de le tenir informé dans les meilleurs délais, ce qui a été fait, comme en atteste le PV relatif à la notification des droits de la personnes placée en garde à vue.

Par conséquent, il résulte des éléments de la procédure que le placement en garde à vue n'est pas entaché d'une irrégularité et qu'il convient d'infirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a déclaré la requête de l'administration irrégulière sur la base de cette nullité.

Et statuant à nouveau ;

Il ressort des éléments de la procédure, que la requête en prolongation de l'autorité administrative est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles.

La procédure administrative atteste que la situation familiale et sociale et notamment son mariage et ses expériences professionnelles ont été prises en compte par l'administration lors de l'évaluation de sa situation et notamment qu'il déclare être marié avec une ressortissante française, Madame [D] [L] [X] et ne pas avoir d'enfant.

Il a été pris en compte qu'il indique résider avec son épouse et qu'il a été placé en garde à vue pour des faits de violences à son égard.

Il a également été pris en compte qu'il ne se prévaut de la présence en France d'aucun autre membre de sa famille hormis des cousins et un oncle avec lesquels il ne démontre pas entretenir des liens anciens, stables et intenses; il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, l'Algérie, ou résident son père ainsi que ses 6 frères et s'urs selon ses déclarations ; il déclare être sans emploi et ne justifie pas de ressources financières propres issues d'une activité légale;

Il est également relevé que M. [Z] [W] [H] s'est soustrait à l'exécution de deux précédentes mesures d'éloignement et qu'il a déclaré ne pas envisager de quitter le territoire français.

Par ailleurs, en vertu des dispositions de |'article L 741-4 du CESEDA, le placement en rétention a été décidé en prenant en compte l'état de vulnérabilité M. [Z] [W] [H] et de tout handicap ; l'étude approfondie de sa situation n'ayant pas permis de mettre en évidence un état de vulnérabilité particulier que ce soit à titre personnel ou relativement e son état de santé ; il ne ressort donc d'aucun élément du dossier que |'intéressé présenterait un état de vulnérabilité qui s'opposerait à un placement en rétention.

Enfin, M. [Z] [W] [H] ne remplit pas les conditions d'une assignation à résidence, telles que fixées par l'article L743-13 du CESEDA, en ce sens qu'il n'a pas préalablement remis un service de police ou à une unité de gendarmerie un passeport en cours de validité et ce quelles que soient les garanties de représentation effectives dont elle se prévaut.

Il résulte de tous ces éléments que son placement en rétention ne constitue pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie familiale.

M. [Z] [W] [H] ne présente pas de garanties de représentations effectives propres à prévenir un risque de soustraction a l'exécution de la décision d'éloignement et aucune autre mesure n'apparait suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision ;

Enfin que l'autorité administrative a justifié de ses diligences pour mettre en 'uvre la mesure d'éloignement.

La mesure de rétention administrative est donc la seule de nature à permettre l'exécution de la décision d'éloignement et il convient de faire droit à la requête ;

PAR CES MOTIFS :

Infirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Bayonne du 20 mars 2024 en ce que elle a déclaré irrégulière la requête de la préfecture de la Vienne.

Statuant à nouveau :

Déclarons recevable en prolongation de la rétention administrative présentée par Monsieur le Préfet de la Vienne.

Déclarons diligentée à l'encontre de M. [Z] [W] [H] régulière.

Disons à avoir lieu à assignation à résidence.

Ordonnons la prolongation de la rétention de M. [Z] [W] [H] pour une durée de vingt huit jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention.

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture de la Vienne.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de PAU, le vingt et un Mars deux mille vingt quatre à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Catherine SAYOUS Véronique GIMENO

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 21 Mars 2024

Le parquet général, par mail

Monsieur procureur de la République de bayonne, par mail

Maître MASSOU DIT LABAQUERE, par mail,

Monsieur le Préfet de la Vienne, par mail


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 24/00886
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;24.00886 ?
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