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10/03/2024 | FRANCE | N°24/00768

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 10 mars 2024, 24/00768


N° 834 /24



REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,



ORDONNANCE DU dix Mars deux mille vingt quatre





Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/00768 - N° Portalis DBVV-V-B7I-IZG6



Décision déférée ordonnance rendue le 08 Mars 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

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Nous, Alexandra BLANCHARD, Conseillère, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 18 décembre 2023, assistée d...

N° 834 /24

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

ORDONNANCE DU dix Mars deux mille vingt quatre

Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 24/00768 - N° Portalis DBVV-V-B7I-IZG6

Décision déférée ordonnance rendue le 08 Mars 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Alexandra BLANCHARD, Conseillère, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 18 décembre 2023, assistée de Régine PALU, Greffier

APPELANT

X se disant [C] [I]

né le 24 Mai 1993 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Retenu au centre de rétention d'[Localité 2]

Comparant par le truchement de Monsieur [B] [V], interprète assermenté en langue Arabe, et assisté de Maître Selvinah PATHER, avocat au barreau de PAU

INTIMES :

Le PREFET DE LA CHARENTE MARITIME, avisé, absent

MINISTERE PUBLIC, avisé de la date et heure de l'audience

ORDONNANCE :

- réputée contradictoire, après débats en audience publique,

*********

M. [I] [C], se disant de nationalité algérienne, a été interpellé à [Localité 6] (17) le 4 mars 2024 pour vols de téléphones portables et de parfums ; les enquêteurs ont relevé qu'il faisait l'objet d'une fiche de recherches pour mise à exécution d'un mandat de dépôt à effet différé du 12 janvier 2024, en exécution d'une condamnation du tribunal correctionnel de Poitiers à 6 mois

d'emprisonnement et interdiction d'entrer en contact avec la victime pendant deux ans, pour violences commises sur sa compagne [U] [M], ressortissante Urkrainienne, autorisée à séjourner en France.

Après avoir fait l'objet d'un arrêté pris par le préfet de la Vienne le 21 mars 2023 réputé notifié le 27 mars 2023 à l'intéressé, portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ, assorti d'une interdiction de retour d'une durée de deux ans, il s'était vu notifier le 10 janvier 2024 une décision portant interdiction de retour de deux ans sur le territoire et une assignation à résidence d'une durée de 45 jours.

Cette décision n'étant pas respectée, le Préfet de la Charente Maritime a pris une mesure de placement de M. [I] [C] en rétention administrative suivant décision du 6 mars 2024 notifiée à 10 h 45 le même jour à l'intéressé, admis au centre de rétention administrative d'[Localité 2] (64).

1) Indiquant n'avoir pu éloigner l'étranger dans le délai de rétention initial de quarante-huit heures, le préfet de la Charente-Maritime a sollicité du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne la prolongation du maintien de M. [I] [C] en rétention pour une durée de vingt-huit jours, suivant requête du 7 mars 2024 parvenue au greffe du tribunal le même jour à 17 h 27.

2) M. [I] [C] a pour sa part saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne par requête parvenue au greffe le 7 mars 2024 à 12 h 07 pour contester la régularité de la procédure et de l'arrêté en placement en rétention.

Ce magistrat a ordonné la jonction des procédures, constaté leur régularité et ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du 8 mars 2024 à 16 h 47.

M. [I] [C] a interjeté appel de cette décision, par télécopie au greffe de la cour le 9 mars 2024 à 12 h 50.

À l'appui de son recours, dans son acte d'appel M. [I] [C] , a soutenu que :

- sa femme accouchait le jour-même,

- il souhaitait passer le Ramadan chez sa soeur à [Localité 4],

- il était dans l'attente d'un jugement concernant sa femme le 17 avril prochain.

M. [I] [C] a demandé à comparaître, il a maintenu à l'audience ses moyens d'appel et ses demandes.

Le conseil de M. [I] [C] a :

- soulevé une difficulté quant à la validité de l'arrêté portant OQTF qui n'a jamais été personnellement notifié à M. [I] [C], car la lettre recommandée avec AR est revenue à la préfecture avec la mention 'non réclamée',

- indiqué que le Préfet et le JLD avaient fait une mauvaise appréciation de la situation personnelle et familiale de M. [I] [C], étant précisé que son enfant est né hier, et que la mesure de rétention administrative porte atteinte de manière disproportionnée à sa vie privée et familiale.

Le préfet de la Charente-Maritime, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.

Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.

M. [I] [C], assisté d'un interprète, a eu la parole en dernier. Il demande au magistrat de lui laisser une chance de rester en France et de voir sa fille, indiquant qu'il attend l'audience d'appel du 17 avril 2024 sur l'affaire de violences conjugales, que les conditions de rétention sont difficiles et qu'il devrait subir une opération chirurgicale à [Localité 5], non encore programmée.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

- Sur la régularité du placement en rétention et les garanties de représentation :

M. [I] [C], dépourvu de tout titre de séjour, allègue être de nationalité algérienne et être hébergé au domicile de sa compagne [M] [U], [Adresse 1] à [Localité 5] (86), alors qu'il fait l'objet d'une interdiction de contact avec elle, prononcée par le tribunal correctionnel de Poitiers le 12 janvier 2024 à la suite de violences conjugales.

Il est relevé que M. [I] [C] a été interpellé dans le cadre de vols commis à [Localité 6] le 4 mars 2024 ; qu'il ressort de ses propres déclarations à l'occasion de cette procédure qu'il est sans profession ni aucun moyen d'existence, n'indique pas quel est son domicile véritable puisqu'il ne peut demeurer chez sa compagne, et a déclaré vouloir rester en France pour faire le Ramadan à [Localité 4] chez sa soeur et s'occuper de son enfant qu'il a reconnu de manière anténatale.

La carte d'identité de sa soeur, Mme [C] [P], est produite aux débats, mais il n'est versé ni attestation d'hébergement de sa part, ni justificatif de domicile.

M. [I] [C] avait déjà fait l'objet d'un premier arrêté portant obligation de quitter le territoire français le 21 mars 2023, réputé notifié à lui le 27 mars 2023, qu'il n'a pas respecté.

Contrairement aux indications de son conseil, cette notification est régulière même si le courrier recommandé adressé à M. [I] [C] est revenu avec la mention 'non réclamé'.

Au demeurant la contestation d'un arrêté portant OQTF, dont la nullité n'est cependant pas sollicitée, relèverait de la compétence du juge administratif.

De plus M. [I] [C] n'a pas non plus respecté l'assignation à résidence, ni l'interdiction de retour sur le territoire français qui lui ont été notifiées le 9 janvier 2024.

La décision de placement en rétention administrative du 6 mars 2024 a tenu compte de ces différents éléments.

Aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ».

Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

Il convient d'apprécier si le placement en rétention de l'intéressé porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie familiale ou se justifie au contraire par des nécessités de sûreté publique.

La décision initiale de placement a été prise par le « représentant de l'État dans le département», sur le fondement d'une mesure d'éloignement de moins d'un an. Elle est motivée en fait et en droit.

La motivation du préfet indique de manière suffisamment caractérisée par les éléments de l'espèce les circonstances de fait à l'origine de sa décision de placement en rétention.

Elle prend en compte la situation de M. [I] [C] et ne porte pas atteinte de manière disproportionnée au droit à la vie familiale de M. [I] [C], ainsi que l'a pertinemment relevé le premier juge, dont les motifs sont adoptés.

M. [I] [C] ne dispose pas de garanties suffisantes de représentation alors qu'il a déclaré ne pas vouloir quitter le territoire français. Il ne produit aucun élément médical alors qu'il évoque son état de santé à l'audience.

Les éléments débattus ne permettent donc pas de caractériser un manquement de l'administration dans l'appréciation de la situation de l'intéressé susceptible d'affecter la régularité de la décision de placement en rétention administrative.

L'ordonnance entreprise sera ainsi confirmée en ce qu'elle a estimé que l'autorité administrative avait justement motivé sa décision.

- Sur les perspectives d'éloignement et la prolongation de la rétention administrative :

Selon l'article L.741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) :

« Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toutes diligences à cet effet ».

Si les perspectives raisonnables d'éloignement doivent s'entendre comme celles qui peuvent être réalisées dans le délai maximal de rétention applicable à l'étranger, ces dernières doivent être appréciées au regard de la situation concrète de chaque étranger, et des diligences effectives et adaptées à l'évolution des conditions juridiques et matérielles des modalités d'exécution forcée de la mesure d'éloignement que l'administration a la charge de mettre en oeuvre.

Il doit ainsi être admis que l'identité et la nationalité de M. [I] [C] ne sont à ce jour pas déterminées avec certitude, de sorte qu'avant d'apprécier l'état des perspectives d'éloignement vers l'Algérie, encore faut-il s'assurer de la réalité de la nationalité algérienne alléguée qui ne pourra être établie que par la reconnaissance par les autorités algériennes diligemment saisies à cet effet par les autorités françaises le 6 mars 2024.

Enfin, c'est à juste titre que le premier juge, constatant que M. [I] [C] n'était pas titulaire d'un passeport en cours de validité et que ses garanties de représentation étaient insuffisantes, a estimé qu'il ne pouvait bénéficier d'une assignation à résidence.

La décision entreprise sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant, au terme de débats tenus publiquement, par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties ;

Confirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Bayonne le 8 mars 2024 ;

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la PRÉFECTURE DE LA CHARENTE-MARITIME, service des étrangers, à M. [I] [C] , ainsi qu'à son conseil et communiquée au Ministère Public.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de PAU, le dix Mars deux mille vingt quatre à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Régine PALU Alexandra BLANCHARD

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 10 Mars 2024

X se disant [C] [I], par mail au centre de rétention d'[Localité 2]

Pris connaissance le : À

Signature

Maître Selvinah PATHER, par mail,

Monsieur le Préfet de la CHARENTE-MARITIME, par mail


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 24/00768
Date de la décision : 10/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-10;24.00768 ?
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