PS/BE
Numéro 23/01870
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 2
Arrêt du 30 mai 2023
Dossier : N° RG 20/02577 - N° Portalis DBVV-V-B7E-HVSR
Nature affaire :
Demande relative à la liquidation du régime matrimonial
Affaire :
[G] [F]
C/
[I] [N] épouse [P]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 30 mai 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 03 Avril 2023, devant :
Monsieur SERNY, Magistrat honoraire chargé du rapport,
assisté de Madame BARREAU, Greffière, présente à l'appel des causes,
Monsieur [J], en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Monsieur GADRAT, Président,
Madame DELCOURT, Conseiller,
Monsieur SERNY, Magistrat honoraire,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
Grosse délivrée le :
à :
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [G] [F]
né le 16 février 1970 à [Localité 5] (92)
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Nouhou DIALLO, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMEE :
Madame [I] [N] épouse [P]
née le 01 Août 1972 à [Localité 6] (62)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Lydie VILAIN-ELGART de la SELARL ASTREA, avocat au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 21 SEPTEMBRE 2020
rendue par le JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES DE DAX
RG numéro : 19/00628
Vu l'acte d'appel initial du 05 novembre 2020 ayant donné lieu à l'attribution du présent numéro de rôle,
Vu le jugement dont appel rendu le 21 septembre 2020 par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal Judiciaire de DAX qui a
- 'constaté que la récompense de 4.000 euros due par la communauté à Mme [L] a été reconnue par la cour d'appel de PAU'
- dit que la créance de [I] [N] sur [G] [F] (restant dû au titre des dépens d'un arrêt de 2001) doit être ramenée à 399,55 euros ;
- condamné [G] [F] à payer 2.000 euros en compensation de frais irrépétibles
- passé les dépens en frais privilégiés de partage.
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 04 février 2021 par [G] [F],
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 février 2021 par [I] [N],
Vu l'ordonnance de clôture délivrée le 20 mars 2023,
Le rapport ayant été fait oralement à l'audience.
MOTIFS
La situation
[G] [W] [D] [F] né le 16 février 1970 à [Localité 5] et [I] [N] née le 01 août 1972 se sont mariés le 26 octobre 1993 à [Localité 7] sous le régime légal.
La procédure de divorce a été entamée en 2009 ; l ' Ordonnance de Non Conciliation remonte au 07 mai 2009.
Par jugement du 24 mars 2010 confirmé par arrêt du 23 août 2011, [I] [N] a reçu une avance sur sa part d'un montant de 5.000 euros, [G] [F] étant condamné aux dépens.
Leur divorce a été prononcé le 29 mai 2013.
L'immeuble commun a été vendu le 29 juin 2009 sur le prix duquel est demeuré un solde à partager d'un montant de 39.037 euros, qui est l'objet du litige ; les tiers ont été désintéressés à l'exception des proches qui avaient prêté et dont les créances sont portées en principal au passif de l'indivision, sans aucun intérêt moratoire. Comme la présente instance n'est pas une instance en homologation d'état liquidatif, le notaire séquestre devra vérifier si ces tiers exigent ou non des intérêts.
En l'état, il est raisonné sans leur intégration dans les comptes.
Par jugement du 19 août 2015, le tribunal de grande instance de PAU a statué sur divers articles de comptes sans dresser d'état définitif.
Par arrêt du 18 septembre 2018, la cour a fait de même, en complétant certains postes et a renvoyé devant Me [A] [X], mandaté par décision judiciaire.
Le 29 mars 2019, Me [A] [X] a dressé l'état liquidatif en exécution de l'arrêt du 19 septembre 2018 et l'a vainement soumis aux copartageants qui n'ont pas donné leur accord ; il a dressé un procès-verbal de difficulté, la voie procédurale d'un état liquidatif à soumettre à homologation n'a pas été choisie. Cet acte contient l'état liquidatif suivant qui est aujourd'hui discuté.
Date de dissolution du régime matrimonial
07/03/2001
Date du divorce
29/05/2013
Date de jouissance divise- Vente bien indivis
29/06/2009
Compte de récompense du mari
Euros
Crédit
Récompense pour achat véhicule Ford
Total Crédit
Débit
Réparation motocyclette
500,00
Solde
500,00
Compte de récompense de l'épouse
Crédit
Apport PEL 07767803321 en juin 2006
14 213,27
Total Crédit
14 213,27
Débit
Indemnité d'occupation
Total Débit
Solde
14 213,27
Actif indivis
Solde prix de vente
39 037,52
Indemnité d'assurance véhicule
1 890,00
Récompense due par le mari
500,00
Total
41 427,52
Passif indivis
Prêt familial par Epoux [N]
3 000,00
Prêt consenti par Mme [L]
4 000,00
Prêt [V] [M]
2 600,00
Frais d'acte de partage
2 300,00
Dette envers l'épouse récompense
14 213,27
Total
26 113,27
Actif net
15 314,25
Droits de chacun sur l'actif net
7 657,13
Attributions au mari
Ses droits
Droits sur l'actif net
7 657,13
Droit de prélèvement pour créance sur l'indivision
Total
Reçoit
En moins prenant sa dette de récompense
500,00
A prélever sur les deniers consignés pour la partage
7 157,13
Diminuée d'une dette hors partage envers l'épouse
-1 401,31
Soit à recevoir
5 755,82
Attributions à l'épouse
Ses droits
Droits sur l'actif net
7 657,13
Droit de prélèvement pour créance sur l'indivision
14 213,27
Total
21 870,40
Reçoit
A prélever sur les deniers consignés pour la partage
21 870,40
Augmenté de la créance hors partage sur le mari
1 401,31
Soit à recevoir
23 271,71
Diminuée de la provision de 5.000 euros allouée par arrêt 2011
- 5000,00
Le paiement de la dette de 1.401,31 euros procède de l'exécution d'une décision de justice de 2011 rendue avant l'ouverture des opérations de partage et non de la gestion de l'indivision ; en droit, il s'agit d'une délégation de paiement entre les parties, le mari déléguant à l'épouse les fonds à due concurrence.
[G] [F] a refusé de signer l'acte en soulevant trois difficultés :
- il invoque une créance de récompense de 4.000 euros provenant de la vente d'une automobile lui ayant appartenu en propre qui a servi à acquérir au prix de 11.632 euros
- il soutient que la somme de 1.401,31 euros aurait déjà été réglée
- il soutient que le prêt consenti par [V] [M] s'est élevé à 3.600 euros et non 2.600 euros
Ces trois points sont ceux en litige.
Sa position revient donc à proposer l'état liquidatif suivant :
Date de dissolution du régime matrimonial
07/03/2001
Date du divorce
29/05/2013
Date de jouissance divise- Vente bien indivis
29/06/2009
Compte de récompense du mari
Euros
Crédit
Récompense pour achat véhicule Ford 4.000 sur 11.632
4 000,00
Total Crédit
4 000,00
Débit
Réparation motocyclette
500,00
Solde à porter au passif indivis
3 500,00
Compte de récompense de l'épouse
Crédit
Apport PEL 07767803321 en juin 2006
14 213,27
Total Crédit
14 213,27
Débit
Indemnité d'occupation
Total Débit
Solde à porter au passif indivis
14 213,27
Actif indivis
Solde prix de vente
39 037,52
Indemnité d'assurance véhicule
1 890,00
Total
44 427,52
Passif indivis
Prêt familial par Epoux [N]
3 000,00
Prêt consenti par Mme [L] (grand-mère)
4 000,00
Prêt [V] [M]
3 600,00
Frais d'acte de partage
2 300,00
Récompense du au mari
3 500,00
Récompense due à l'épouse
14 213,27
Total
30 613,27
Actif net
18 714,25
Droits de chacun sur l'actif net
9 357,13
Attributions au mari
Ses droits
Droits sur l'actif net
9 357,13
Droit de prélèvement pour créance sur l'indivision
Total
Reçoit
A prélever sur les deniers consignés pour la partage
5 857,13
Soit à recevoir
4 455,82
Attributions à l'épouse
Ses droits
Droits sur l'actif net
9 357,13
Droit de prélèvement pour créance sur l'indivision
14 213,27
Total
23 570,40
Reçoit
A prélever sur les deniers consignés pour le partage
23 570,40
Soit à recevoir
24 971,71
dont déjà perçu
5 000,00
1er point litigieux : la récompense
Le jugement a dit que les précédentes décisions avaient reconnu un droit de récompense de la grand-mère de [G] [F]. Or, en droit, il n'y a de récompenses qu'entre époux pour transfert de valeur entre patrimoines propres et patrimoine commun durant la vie du régime ; c'est le terme de dette qui aurait dû être employé ; [G] [F] s'est emparé de cette qualification erronée pour se prévaloir d'un droit dont il ne justifie pas et il a refusé de signer.
[G] [F] justifie avoir vendu une automobile lui ayant appartenu en propre au prix de 4.000 euros qui a été utilisé pour l'achat en communauté d'un autre véhicule de type FORD FIESTA au prix de 11.632 euros, qui a été accidenté et pour lequel l'assureur a versé l'indemnité de 1.890 euros portée à l'actif.
L'arrêt du 18 septembre 2019 n'a pas tranché sur l'existence de cette récompense car il n'y avait pas débat. Aucune autorité de la chose jugée ne peut donc être opposée sur ce point à [G] [F].
Le 28 janvier 2006, [G] [F] a bien reçu de la MACIF le virement d'une somme de 4.000 euros à la suite d'un accident ayant détruit un véhicule et il produit la facture de rachat de l'autre véhicule au prix de 11.632 euros. Pour prétendre à la récompense, il lui faut prouver que le véhicule détruit pour lequel la MACIF a payé 4.000 euros était un bien propre ou qu'il avait été financé par un don manuel d'un proche. Il est défaillant dans cette preuve pour les raisons suivantes :
- la date de l'acquisition du véhicule détruit n'est pas situable par rapport à la date du mariage qui est antérieure de 13 ans ;
- rien ne démontre un don manuel de ce véhicule par un proche (aucun historique de carte grise) ;
- une somme de 4.000 euros a bien été remise le 27 janvier 2006 par sa grand-mère mais ce montant correspond au prêt porté au passif (avec autorité de la chose jugée) par le précédent arrêt et il n'y a pas trace d'autre virement de ce montant ;
- si la remise de fonds de sa grand-mère est qualifiable de don manuel donnant droit à récompense, il faut supprimer le prêt du passif, et l'état liquidatif est inchangé.
[G] [F] sera débouté de ce chef de demande.
Sur le montant du prêt consenti par les époux [M]
L'arrêt du 18 septembre 2019 statue en relevant que le montant du prêt consenti par les époux [M] s'élevait à 2.600 euros et que dans ses conclusions [G] [F] avait lui-même mentionné cette somme. L'autorité de la chose jugée fait obstacle à sa demande actuelle qui n'a pour effet que de réduire l'actif net à distribuer qui se réduit de 5.755,82 euros à 7.657,13 euros à 7.157,13 euros. Il n'a pas intérêt à invoquer l'augmentation de la dette.
Sur le paiement de 1.401,31 euros
Cette somme correspond de manière incontestée à des dépens mis à la charge de [G] [F] par l'arrêt du 23 août 2011 ayant alloué à l'épouse une avance sur part de 5.000 euros. Ces dépens restent à la charge exclusive de [G] [F] et n'entrent pas en frais privilégiés de partage puisque le divorce n'avait pas encore été prononcé et que le juge du partage n'avait pas été saisi.
Le juge a constaté le paiement de 4 chèques et [G] [F] les produit mais estime que le solde de 399,55 euros non couvert par le montant ainsi payé à hauteur de 1001,76 euros viendrait compenser le coût d'un acte injustifié.
Chèque
Montant
Date
N°0000045
400,00
11/01/2018
N°0000046
201,76
28/02/2018
N°0000047
200,00
28/03/2018
N°0000048
200,00
28/04/2018
1.001,76
Le paiement en numéraires n'est que partiel ; le paiement partiel a été accepté sans aucune contestation concernant le rattachement de ces paiements aux dépens de l'arrêt 2011 ; la prétendue compensation résulte d'une décision unilatérale du débiteur sans valeur juridique puisque la cour n'est pas mise en situation d'apprécier la pertinence du poste de dépens dont l'inutilité est invoquée pour justifier la compensation. Prenant en considération la constatation judiciaire du paiement de 4 chèques, la cour limitera la créance à 1.401,31 - 1.001,76 = 399,55 euros.
[G] [F] ne démontre toujours pas le bien-fondé de cette compensation réduite à 395,55 euros.
Sur l'état liquidatif à retenir
L'état liquidatif devient ainsi le suivant :
Date de dissolution du régime matrimonial
07/03/2001
Date du divorce
29/05/2013
Date de jouissance divise- Vente bien indivis
29/06/2009
Compte de récompense du mari
Euros
Crédit
Récompense pour achat véhicule Ford
Total Crédit
Débit
Réparation motocyclette
500,00
Solde
500,00
Compte de récompense de l'épouse
Crédit
Apport PEL 07767803321 en juin 2006
14 213,27
Total Crédit
14 213,27
Débit
Indemnité d'occupation
Total Débit
Solde
14 213,27
Actif indivis
Solde prix de vente
39 037,52
Indemnité d'assurance véhicule
1 890,00
Récompense due par le mari
500,00
Total
41 427,52
Passif indivis
Prêt familial par Epoux [N]
3 000,00
Prêt consenti par Mme [L] (grand-mère)
4 000,00
Prêt [V] [M]
2 600,00
Frais d'acte de partage
2 300,00
Dette envers l'épouse récompense
14 213,27
Total
26 113,27
Actif net
15 314,25
Droits de chacun sur l'actif net
7 657,13
Attributions au mari
Ses droits
Droits sur l'actif net
7 657,13
Droit de prélèvement pour créance sur l'indivision
Total
7 657,13
Reçoit
En moins prenant sa dette de récompense
500,00
A prélever sur les deniers consignés pour la partage
7 157,13
Diminuée d'une dette hors partage envers l'épouse
-399,55
Deniers à recevoir
6 757,58
Attributions à l'épouse
Ses droits
Droits sur l'actif net
7 657,13
Droit de prélèvement pour créance sur l'indivision
14 213,27
Total
21 870,40
Reçoit
A prélever sur les deniers consignés pour la partage
21 870,40
Augmenté de la créance hors partage sur le mari
399,55
Deniers à recevoir
22 269,95
Distributions des deniers
Du
Fonds disponibles vente et indemnité d'assurance véhicule
Deniers à verser au notaire - frais d'acte
2 300,00
Deniers à verser aux prêteurs
9 600,00
Deniers revenant au mari dans le partage
6 757,58
Deniers revenant l'épouse dans le partage
22 269,95
Vérification
40 927,52
A parfaire en fonction des intérêts servis sur les fonds consignés et en fonction d'une éventuelle procédure de taxe de la rémunération du notaire.
Sur les dépens
[G] [F] succombe dans ses demandes ; les dépens de première instance et d'appel liés à la présente procédure seront prélevés en moins prenant sur les sommes lui revenant.
Il devra en outre payer 1500 euros à [I] [N] par application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire en dernier ressort :
* infirme le jugement
* dit que les dépens de l'arrêt rendu le 23 août 2011 n'ont pas à entrer dans les comptes de partage et modifie en conséquence l'état liquidatif
* déboute [G] [F] de toutes ses contestations
* en conséquence, répartit la somme de 40.927,52 euros consignée en principal à raison de
- 6.757,58 euros en principal revenant à [G] [F]
- 22.269,95 euros en principal revenant à [I] [N]
- 11.900,00 euros revenant aux tiers créanciers
* dit que les intérêts servis sur le prix accroîtront à la masse à partager par moitié.
* dit que les dépens de première instance et d'appel entrent en frais privilégiés de partage mais qu'ils seront supportés entièrement par [G] [F] en moins prenant sur sa part
* le condamne à payer à [I] [N] une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Xavier GADRAT, Président et Julie BARREAU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
Julie BARREAU Xavier GADRAT