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03/05/2023 | FRANCE | N°23/01205

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 03 mai 2023, 23/01205


N°23/1513



REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,



ORDONNANCE DU trois Mai deux mille vingt trois





Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 23/01205 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IQJ6



Décision déférée ordonnance rendue le 28 Avril 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,



Nous, Cécile SIMON, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 15 décembre 2022, assistée...

N°23/1513

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

ORDONNANCE DU trois Mai deux mille vingt trois

Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 23/01205 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IQJ6

Décision déférée ordonnance rendue le 28 Avril 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Cécile SIMON, Présidente de chambre, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 15 décembre 2022, assistée de Catherine SAYOUS, Greffier,

Monsieur X SE DISANT [Z] [F]

né le 13 Janvier 1999 à [Localité 2]

de nationalité Roumaine

Retenu au centre de rétention d'[Localité 1]

Comparant et assisté de Maître Mikele DUMAZ ZAMORA, avocat au barreau de Pau.

INTIMES :

LE PREFET DE LA VIENNE, avisé, absent, qui a transmis ses observations

MINISTERE PUBLIC, avisé de la date et heure de l'audience,

ORDONNANCE :

- réputée contradictoire, après débats en audience publique,

*********

Vu l'ordonnance rendue le 28 avril 2023 par le juge des libertés et de la détention de Bayonne, qui a :

- ordonné la jonction du dossier RG 23/00460 au dossier RG 23/00459 et, statuant en une seule et même ordonnance,

- déclaré recevable la requête de [Z] [F] en contestation de placement en rétention,

- rejeté la requête de [Z] [F] en contestation de placement en rétention,

- déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le Préfet de la Vienne,

- dit n'y avoir lieu à assignation à résidence,

- ordonné la prolongation de la rétention de [Z] [F] pour une durée de vingt-huit jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention.

Vu la notification de l'ordonnance faite au retenu le 28 avril 2023 à 17 heures 27.

Vu la déclaration d'appel motivée, formée par [Z] [F], transmise par la CIMADE, reçue le 02 mai 2023 à 13 heures 12.

Vu les observations du préfet de la Vienne, reçues le 02 mai 2023 à 17 heures 08 et communiquées par le greffe avant l'audience au conseil de [Z] [F].

Vu les conclusions du conseil de [Z] [F], reçues le 03 mai 2023 à 12 heures 01.

****

Dans sa déclaration d'appel, pour soutenir l'irrégularité de son placement en rétention, [Z] [F] fait valoir deux moyens :

- l'acquisition de la nationalité française par [Z] [F], lequel soutient relever des dispositions de l'article 21-7 du code civil et avoir acquis automatiquement la nationalité française à sa majorité, puisqu'il est né en France et y a résidé habituellement jusqu'à ses dix-huit ans.

- l'impossibilité du placement en rétention sur une « ICTF » au vu des dispositions des articles L 731-1, L741-1, L622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le dernier de ces textes se rapportant à une interdiction de circuler sur le territoire français édictée à la suite d'une décision de réadmission du titre II du livre IV du même code et ne concernant donc pas les interdictions de circuler prises consécutivement à une obligation de quitter le territoire.

Par ses observations écrites, le préfet de la Vienne soutient que le moyen relatif à l'acquisition de la nationalité française doit être écarté puisqu'une telle acquisition sur le fondement de l'article 27-1 du code civil n'est pas automatique et se trouve notamment subordonnée à une condition de durée de résidence dont il n'est pas démontré qu'elle est en l'espèce remplie.

Le préfet de la Vienne, sur le moyen tiré du fondement du placement en rétention rappelle que [Z] [F] fait l'objet d'une interdiction de circulation sur le territoire français en application de l'article L 251-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'au vu des dispositions de l'article L 262-1, il pouvait être placé en rétention administrative sur le fondement de l'article L 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par ses conclusions, le conseil de [Z] [F], reprenant ce second moyen, conteste la légalité de l'arrêté de placement en rétention pour défaut de base légale, en relevant en premier lieu que le premier juge a confondu l'interdiction de retour sur le territoire français qui peut être édictée uniquement à l'encontre de ressortissants de pays tiers sur le fondement des articles L612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'interdiction de circulation sur le territoire français qui peut être édictée uniquement à l'encontre d'un ressortissant européen sur le fondement des articles L251-4 du même code ; qu'en l'espèce, [Z] [F] étant de nationalité roumaine, il est ressortissant européen.

Le conseil de [Z] [F] fait ensuite valoir que la décision de placement en rétention se contente de viser les articles L741-1 et L731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que [Z] [F] ne fait l'objet d'aucune des mesures d'éloignement limitativement énumérées par les dispositions de ces textes.

Il est ainsi soutenu que le préfet ne pouvait légalement placer [Z] [F] en rétention administrative et que de ce fait, l'arrêté de placement est illégal et doit être annulé.

Le conseil de [Z] [F] prétend « à titre superfétatoire » que le préfet ne saurait désormais se prévaloir de l'article L 262-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile évoqué dans ses observations en défense au motif d'une part que ce cet article n'est pas visé dans son arrêté et n'en constitue pas la base légale, d'autre part qu'il concerne les possibilités d'assignation à résidence des ressortissants européens et non les possibilités de placement en rétention.

A l'audience, le conseil de [Z] [F] a indiqué s'en rapporter à la déclaration d'appel quant au premier moyen et a développé ses conclusions écrites reprenant, selon ce conseil, de façon plus juridique, le second moyen de la déclaration d'appel.

[Z] [F] a été entendu en ses déclarations selon lesquelles il veut repartir en Roumanie et ne revient en France que tous les trois mois pour recevoir un traitement contre la mucoviscidose.

Sur ce :

En la forme, l'appel est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu par l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur le fond, l'examen de la procédure et des pièces communiquées par le conseil de l'appelant fait apparaître les éléments suivants quant à la situation de ce retenu.

[Z] [F], ressortissant roumain, né le 13 janvier 1999, titulaire d'une carte nationale d'identité roumaine en cours de validité, a été interpellé et placé en garde à vue le 9 février 2022 pour des faits de violences en réunion sous la menace d'une arme et extorsion. Il a dans ce cadre déclaré être entré sur le territoire français en septembre 2021.

A la suite de cette mesure de garde à vue, il a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai à destination de son pays d'origine la Roumanie, avec interdiction de circulation sur le territoire français pendant deux ans, pris le 10 février 2022 par le préfet de la Vienne et notifié le même jour. Il a également fait l'objet d'une mesure d'assignation à résidence à [Localité 3] par arrêté du 10 février 2022

En exécution de cet arrêté, [Z] [F] a été reconduit en Roumanie le 14 avril 2022.

Le 24 avril 2023, [Z] [F] a été interpellé par les services de police de [Localité 3] pour maintien irrégulier sur le territoire français. Il a alors déclaré être revenu en France dès le mois de mai 2022 et ne pas vouloir quitter ce pays. Puis, cette mesure de garde à vue a été reprise pour de nouveaux faits de tentative d'extorsion avec arme commis à [Localité 3] le 27 mars 2023. Cette garde à vue a été levée le 26 avril 2023.

Par arrêté du même jour pris par le préfet de la Vienne, [Z] [F] a été placé en rétention administrative au centre de [Localité 1].

Saisi par d'une requête en contestation de cette mesure et par le préfet de la Vienne d'une requête en prolongation de cette mesure, le juge des libertés et de la détention de Bayonne a rejeté la première et fait droit à la seconde par l'ordonnance entreprise.

***

[Z] [F] est recevable à contester la régularité de son placement en rétention administrative dès lors qu'il avait régulièrement déposé une requête en contestation de ce placement devant le premier juge.

Sur le premier moyen tiré de l'acquisition de la nationalité française.

Il est établi par les pièces de la procédure et notamment par les déclarations de [Z] [F] lui-même que ce dernier est de nationalité roumaine et que s'il est né en France, il n'a jamais effectué aucune démarche pour obtenir la nationalité française.

Par ailleurs, si l'article 21-7 du code civil dispose que tout enfant né en France de parents étrangers acquiert la nationalité française à sa majorité, cette acquisition n'a rien d'automatique puisque ce même texte subordonne à deux conditions : avoir sa résidence en France à cette date et avoir eu sa résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d'au moins cinq ans, depuis l'âge de onze ans. Il n'en est nullement justifié et en l'état n'a pas la nationalité française.

Dès lors, ce premier moyen est particulièrement inopérant et doit être écarté.

Sur le second moyen tiré du défaut de base légale du placement en rétention.

Ainsi que le relève le conseil de [Z] [F], le premier juge a opéré une confusion en l'espèce, en considérant que [Z] [F] avait fait l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français.

En réalité, la lecture de l'arrêté du 10 février 2022 établit que [Z] [F], ressortissant d'un Etat de l'Union européenne, a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, sur le fondement de l'article L251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'une interdiction de circulation sur le territoire français pendant deux ans, cette dernière ayant été prise sur le fondement de l'article L251-4.

L'obligation de quitter le territoire a été ramenée à exécution le 14 avril 2022, ce qui n'est pas contesté. L'interdiction de circulation sur le territoire français, d'une durée de deux ans, était donc toujours exécutoire lorsque le placement en rétention a été ordonné.

Par ailleurs, l'arrêté du 26 avril 2023 se fonde sur les dispositions des articles L741-1 et L731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour motiver le placement en rétention.

Le conseil de [Z] [F] soutient que ces textes ne sont pas applicables dans le cas de [Z] [F], ressortissant roumain, lequel fait l'objet d'une interdiction de circulation sur le territoire français.

Or, l'article L 263-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que « Les étrangers dont la situation est régie par le présent livre [livre II : dispositions applicables aux citoyens de l'Union européenne] peuvent être placés en rétention administrative dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles L741-1, L 741-4, L 741-5 et L 741-7 lorsqu'ils ont fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une interdiction de circulation prise en application du chapitre I du titre IV ».

Ainsi donc, les dispositions de l'article L741-1, et celles de l'article L731-1 auxquelles elles renvoient, sont bien applicables au cas d'espèce et pouvaient servir de fondement à la décision de placement en rétention administrative.

Le fait que l'article L263-1 ne soit pas mentionné dans l'arrêté de placement en rétention ne suffit pas à priver cette décision de base légale dès lors que les textes visés étaient applicables.

Il en résulte que l'arrêté de placement en rétention administrative du 26 avril 2023, n'est pas entaché d'irrégularité et que le moyen doit être écarté.

Pour ces motifs, la contestation du placement en rétention administrative doit être rejetée.

Pour le reste, la procédure est régulière. En revenant sur le territoire français quelques jours seulement après avoir été reconduit en Roumanie, [Z] [F] n'a pas respecté la mesure d'éloignement prise à son encontre et a fait clairement état de sa volonté de rester en France.

Dans ces conditions, la prolongation de la rétention constitue l'unique moyen de parvenir à un nouvel éloignement.

En conséquence, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS :

Déclarons recevable l'appel en la forme.

Confirmons l'ordonnance entreprise.

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture de la Vienne.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de PAU, le trois Mai deux mille vingt trois à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Catherine SAYOUS Cécile SIMON

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 03 Mai 2023

Monsieur X SE DISANT [Z] [F], par mail au centre de rétention d'[Localité 1]

Pris connaissance le : À

Signature

Maître Mikele DUMAZ ZAMORA, par mail,

Monsieur le Préfet de la Vienne, par mail


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 23/01205
Date de la décision : 03/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-03;23.01205 ?
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