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27/04/2023 | FRANCE | N°23/01150

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 27 avril 2023, 23/01150


23/1473

REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



L 743-22 et R743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,



ORDONNANCE du vingt sept Avril deux mille vingt trois







Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 23/01150 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IQE5



Décision déférée ordonnance rendue le 25 avril 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,



Nous, Cécile SIMO

N, Président de Chambre à la Cour d'Appel de PAU, désigné par Ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 15 décembre 2022, assisté de Catherine SAYOUS, Gre...

23/1473

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

L 743-22 et R743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

ORDONNANCE du vingt sept Avril deux mille vingt trois

Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 23/01150 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IQE5

Décision déférée ordonnance rendue le 25 avril 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Cécile SIMON, Président de Chambre à la Cour d'Appel de PAU, désigné par Ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 15 décembre 2022, assisté de Catherine SAYOUS, Greffier,

Appelant

Monsieur le Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Bayonne

Intimé

Monsieur X SE DISANT [U] [W]

né le 05 Mars 1990 à [Localité 4]

de nationalité Georgienne

Retenu au centre de rétention de [Localité 2]

Assisté de Maître MARCEL, avocat au barreau de Pau

Suite à l'appel suspensif du parquet de Bayonne

Après avoir entendu les observations de Monsieur BOUVIER, Avocat Général, de Maître MARCEL, avocat, et celles de Monsieur X SE DISANT [U] [W], qui a eu la parole le dernier ;

*********

Vu l'ordonnance rendue le 25 avril 2023 par le juge des libertés et de la détention de Bayonne, qui a :

- déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le Préfet de la Vienne,

- fait droit à l'exception de nullité soulevée.

- rejeté la requête en prolongation du maintien en rétention de [U] [W]

- rappelé que l'intéressé a l'obligation de quitter le territoire français en application des articles L 742-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu la notification de l'ordonnance faite au retenu le 25 avril 2023 à 17 heures 32.

Vu la notification de l'ordonnance faite au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Bayonne le 25 avril 2023 à 17 heures 42.

Vu la déclaration d'appel motivée, formée le 25 avril 2023 à 19 heures 19 par le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Bayonne avec saisine du premier président de la Cour d'appel de Pau aux fins de voir déclarer cet appel suspensif.

Vu l'ordonnance rendue le 25 avril 2023 par le magistrat délégué par le premier président de la Cour d'appel de Pau, déclarant recevable la demande formée par le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Bayonne tendant à voir déclarer son appel suspensif, et y faisant droit, disant que [U] [W] restera maintenu à la disposition de la justice jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond, à l'audience de la Cour d'appel de Pau qui se tiendra le jeudi 27 avril 2023 à 10 heures 00.

****

A l'appui de l'appel, pour demander l'infirmation de l'ordonnance entreprise, le procureur de la République rappelle que le juge des libertés et de la détention a rejeté la requête en prolongation du maintien en rétention de [U] [W] au motif du défaut de justification d'information immédiate du procureur de la République du placement en rétention administrative de [U] [W] et fait valoir que, comme il en justifie par la production d'un courriel, l'autorité préfectorale l'avait bien informé du placement en rétention de [U] [W] dès le 22 avril 2023 à 10 heures 53, le placement en lui-même étant intervenu à 10 heures 22.

Le représentant du ministère public a soutenu ce moyen à l'audience.

Le conseil de [U] [W] a été entendu en ses observations au terme desquelles le ministère public ne peut produire au stade de l'appel des pièces essentielles comme c'est le cas de la preuve de l'avis fait au procureur de la République du placement en rétention administrative, que cette production ne serait possible que si le préfet avait été dans l'impossibilité de joindre à sa requête la pièce en question et que dans le cas présent, une telle impossibilité n'est pas démontrée. Il ajoute que cet oubli de l'autorité administrative fait dans la production des pièces utiles ne peut être régularisé en ce que cela porte atteinte aux droits de la défense.

[U] [W] a été entendu en ses explications sur sa situation personnelle. Il a indiqué être arrivé en France à l'âge de 9-10 ans, être de père de trois enfants, résider avec ses parents et sa s'ur au [Adresse 1], être titulaire d'un passeport dont la préfecture avait fait une photocopie avant qu'il ne rentre en prison. Il a ajouté que ses parents et sa s'ur étaient de nouveau titulaires d'un titre de séjour.

Sur ce :

En la forme, l'appel est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu par l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur le fond, l'examen de la procédure et des pièces communiquées par le conseil de l'appelant fait apparaître les éléments suivants quant à la situation de ce retenu.

[U] [W], ressortissant géorgien né le 5 mars 1990 à [Localité 4], qui serait arrivé en France vers l'âge de 10 ans, a été incarcéré au centre pénitentiaire de [3] à compter du 14 janvier 2022 en exécution de deux peines d'emprisonnement prononcées le 8 février 2021 par la Cour d'appel de Poitiers et le 14 janvier 2022 par le tribunal correctionnel de Poitiers.

Le 22 novembre 2022, le préfet de la Vienne a pris à l'encontre de [U] [W] un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai, avec fixation du pays de renvoi et interdiction de retour pendant trois ans. Cet arrêté a été notifié à l'intéressé le 24 novembre 2022.

Un laissez-passer consulaire a été délivré par les autorités consulaires de Géorgie suite à une demande de l'autorité préfectorale du 30 mars 2023.

A sa levée d'écrou le 22 avril 2024, [U] [W] a été placé en rétention administrative au centre d'[Localité 2] par arrêt du préfet de la Vienne du même jour, notifié à 10 heures 40.

Par requête en date du 23 avril 2023, enregistrée le 24 avril 2023, le préfet de la Vienne a saisi le juge des libertés et de la détention de Bayonne d'une demande de prolongation de la mesure de rétention pour une durée de vingt-huit jours.

Par l'ordonnance entreprise, le juge des libertés et de la détention a fait droit à l'exception de nullité soulevée par le conseil de [U] [W] résultant de l'absence au dossier de document attestant de l'heure à laquelle le procureur de la République avait été avisé du placement en rétention administrative de [U] [W] et a rejeté la requête en prolongation.

****

Selon les dispositions de l'article R 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge des libertés et de la détention est saisi aux fins de prolongation de la rétention par simple requête de l'autorité administrative, dans les conditions prévues au chapitre III, avant l'expiration, selon le cas de la période de quarante-huit heures mentionnée à l'article L742-1 ou de la période de prolongation ordonnée en application des dispositions des articles L742-4, L 742-5, L742-6 ou L742-7.

Parmi ces conditions, l'article R 743-2 dispose qu'à peine d'irrecevabilité, la requête formée par l'autorité administrative doit être accompagnée de toutes pièces utiles, notamment une copie du registre prévue à l'article L 744-2.

En outre par application des dispositions de l'article R 743-4, la requête et les pièces qui y sont jointes sont, dès leur arrivée au greffe du tribunal judiciaire, mises à la disposition de l'avocat de l'étranger et de l'autorité administrative et peuvent également être consultées, avant l'ouverture des débats par l'étranger lui-même assisté, le cas échéant d'un interprète.

Il est de jurisprudence constante qu'il ne peut être suppléé à l'absence du dépôt de pièces justificatives par leur seule production à l'audience, sauf s'il est justifié de l'impossibilité de joindre les pièces à la requête.

Par ailleurs, il résulte des dispositions des articles L. 741-8 et L 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le procureur de la République doit être immédiatement informé de la décision du représentant de l'Etat dans le département de placer un étranger en rétention et que, pendant toute la durée de la mesure, il peut se transporter sur les lieux, vérifier les conditions de celle-ci et se faire communiquer le registre mentionnant l'état civile des personnes placées ou maintenues en rétention ainsi que les conditions de leur placement ou leur maintien. Au regard du rôle de garant de la liberté individuelle conféré par ce dernier texte au procureur de la République, son information immédiate sur la décision de placement en rétention doit être effective.

Il est de jurisprudence constante que cette information immédiate est à ce point essentielle que le défaut d'information du procureur de la République ou son caractère tardif constitue une cause de nullité d'ordre public de la procédure sans que le retenu qui l'invoque ait à démontrer l'existence d'une atteinte portée à ses droits.

Il doit en outre être rappelé que doit s'entendre comme étant une pièce utile au sens de l'article R 743-2 précité toute pièce nécessaire à l'appréciation par le juge des libertés et de la détention des éléments de fait et de droit dont l'examen lui permet d'exercer pleinement ses pouvoirs, et toute pièce lui permettant notamment de s'assurer de la régularité de la procédure.

Il en résulte que doit être considéré comme une pièce utile, devant accompagner à peine d'irrecevabilité une requête en prolongation d'une mesure de rétention administrative, le justificatif établissant que l'avis au procureur de la République a bien été délivré et renseignant sur l'heure d'accomplissement de cette formalité.

En l'espèce, l'examen des pièces produites par le préfet de la Vienne à l'appui de la requête en prolongation de la rétention administrative de [U] [W] établit, comme l'a relevé le premier juge, que la preuve de l'avis au procureur de la République relatif au placement en rétention de [U] [W] ainsi que de l'heure de délivrance de cet avis fait défaut, ce qui a pour conséquence immédiate l'irrecevabilité de la requête.

Le fait que le ministère public produise en cause d'appel le courriel de la préfecture de la Vienne, établissant que le procureur de la République de Bayonne a bien été avisé le 22 avril 2023 à 10 heures 53 du placement de [U] [W] en rétention dans son ressort, ne saurait être considéré comme pouvant régulariser la procédure, dès lors d'une part, que la recevabilité d'une requête s'apprécie au moment de son dépôt et que d'autre part, le préfet de la Vienne, qui est en l'espèce le requérant, aurait dû produire ce document à l'appui de sa requête, puisqu'il l'avait nécessairement en sa possession pour en être l'expéditeur.

Il découle de ces motifs que la décision entreprise doit être infirmée en ce qu'elle a rejeté et non déclaré irrecevable la requête, que cette dernière doit être déclarée irrecevable et que la remise en liberté immédiate de [U] [W] doit être ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Déclarons l'appel recevable en la forme.

Infirmons l'ordonnance entreprise.

Déclarons irrecevable la requête du préfet de la Vienne en prolongation de la rétention administrative de [U] [W].

Ordonnons la remise en liberté immédiate de [U] [W].

Rappelons que l'intéressé a l'obligation de quitter le territoire français en application de l'article L 742-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture de la Vienne, et au procureur général.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de PAU, le vingt sept Avril deux mille vingt trois à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Catherine SAYOUS Cécile SIMON

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 27 Avril 2023

Monsieur X SE DISANT [U] [W],par mail au centre de rétention d'[Localité 2]

Pris connaissance le : À

Signature

Maître MARCEL, par mail

Monsieur le Procureur Général, par mail

Monsieur le Procureur de Bayonne, par mail

Monsieur le Préfet de la Vienne,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 23/01150
Date de la décision : 27/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-27;23.01150 ?
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