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27/04/2023 | FRANCE | N°21/01856

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 27 avril 2023, 21/01856


PS/EL



Numéro 23/01461





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 27/04/2023









Dossier : N° RG 21/01856 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H4M3





Nature affaire :



Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail















Affaire :



[G] [R]



C/



S.A.R.L. V S INVEST (HOTEL A LA CROIX DE MALTE)








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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 27 Avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prév...

PS/EL

Numéro 23/01461

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 27/04/2023

Dossier : N° RG 21/01856 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H4M3

Nature affaire :

Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail

Affaire :

[G] [R]

C/

S.A.R.L. V S INVEST (HOTEL A LA CROIX DE MALTE)

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 27 Avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 25 Janvier 2023, devant :

Madame CAUTRES, Présidente

Madame SORONDO, Conseiller

Mme PACTEAU, Conseiller

assistées de Madame LAUBIE, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

Madame [G] [R]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me KLEIN de l'AARPI KLEIN AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TARBES

INTIMEE :

S.A.R.L. V S INVEST - HOTEL A LA CROIX DE MALTE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me BORDENAVE, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 11 MAI 2021

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE TARBES

RG numéro : F 18/00215

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [G] [R] a été embauchée par la Sarl V S Invest, qui exploite l'hôtel «'A la croix de Malte'» à [Localité 5], en qualité d'attachée marketing niveau 1 échelon 3, par deux contrats à temps partiel (20 heures par semaine)à durée déterminée régis par la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants, du 23 mars au 31 décembre 2015 puis du 1er janvier au 28 février 2016.

Elle a été embauchée le 1er mars 2016 contrat à durée indéterminée à temps partiel (28 heures par semaine) en qualité d'assistante de direction, niveau 4, échelon 1.

Les 26 septembre 2018 et 16 octobre 2018, elle a demandé à ce que soit conclue une rupture conventionnelle, la seconde fois par l'intermédiaire de son conseil et en invoquant notamment l'existence d'un harcèlement moral.

Le 18 décembre 2018, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste.

Le 20 décembre 2018, elle a saisi la juridiction prud'homale afin notamment de demander la résiliation de son contrat de travail.

Le 18 janvier 2019, elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par jugement du 11 mai 2021, le conseil de prud'hommes de Tarbes a :

- dit que le licenciement pour inaptitude ne peut être imputé à l'employeur,

- débouté Mme [R] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société V S Invest prise en la personne de son représentant légal de sa demande reconventionnelle.

Le 4 juin 2021, Mme [G] [R] a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 14 septembre 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, Mme [R] demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement pour inaptitude ne peut être imputé à l'employeur et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes,

- statuant à nouveau :

- dire qu'elle a subi un harcèlement moral ou à tout le moins des pressions incompatibles avec son statut de salarié,

- dire que l'employeur s'est rendu coupable de déloyauté dans la relation de travail,

- dire que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité,

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur,

- dire que la rupture s'analyse en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner l'employeur à :

. 1.500 € à titre d'indemnité de licenciement,

. 4.000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 400 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

. 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour résiliation du contrat produisant les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

. 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

. 10.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice dû au harcèlement,

- subsidiairement dire que le licenciement pour inaptitude est la conséquence du comportement de l'employeur qui a manqué à son obligation de sécurité, dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- en conséquence condamner l'employeur à :

. 1.500'€ à titre d'indemnité de licenciement,

. 4.000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 400 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

. 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour résiliation du contrat produisant les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

. 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

. 10.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice dû au harcèlement,

- en tout état de cause condamner la société V S Invest :

. à 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

. aux entiers dépens

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 29 septembre 2021, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, la société V S Invest demande à la cour de':

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [R] de ses demandes en résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur pour harcèlement moral,

- dire et juger le licenciement prononcé par inaptitude régulier et fondé,

- a titre reconventionnel, condamner Mme [R] à une indemnité de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive (article 1240 du code civil),

- la condamner aux dépens et à une indemnité de 2.000 € sur le fondement de 1'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de ce texte, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il résulte de ces textes que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Mme [R] soutient qu'elle fait l'objet d'un harcèlement moral aux motifs':

- qu'elle a été embauchée, pour subir, à la place de Mme [T] [N], gérante de la société, le harcèlement dont cette dernière était victime de la part de M. [L]-[A], son père et co-gérant, et de la comptable, Mme [H] [K], en raison des détournements d'espèces auxquels elle procédait';

- qu'elle a été mise à l'écart et dépossédée de toutes les missions afférentes à son poste';

- qu'alors même qu'elle n'était plus en responsabilité, elle a subi les critiques de son employeur pour des erreurs commises par d'autres';

- qu'épuisée moralement, elle a dû être arrêtée quelques jours puis se rendre aux urgences';

- que le nouveau directeur a changé le mot de passe de son ordinateur sans l'en informer';

- que Mme [N] a persisté à lui demander de lui donner de l'argent liquide de la caisse à l'insu de son père et de la comptable';

- que l'attitude de l'employeur a été la seule et unique cause de son inaptitude à son poste et de l'impossibilité de la reclasser selon les propres termes du médecin du travail.

L'employeur conteste tout harcèlement moral.

Concernant le fait d'avoir été embauchée, pour subir, à la place de la gérante de la société, Mme [T] [N], le harcèlement dont cette dernière était victime de la part de M. [L]-[A], son père et co-gérant et de la comptable, Mme [H] [K], en raison des détournements d'espèces auxquels elle procédait, Mme [R] produit':

- un mail de Mme [N] du 11 juin 2015 ainsi rédigé «'Ecoute [G], tu ne me réponds pas par message, je sais que tu veux bien faire et que c'est difficile pour toi de toujours devoir me couvrir pour l'argent. Mais je t'avais prévenue que si je te prenais c'est parce que tu es mon amie et que je n'en peux plus d'eux, au moins tu peux voir que je ne mentais pas quand je te parlais de la pression quotidienne qu'ils me mettent. Maintenant c'est toi qui fait tampon parce que je suis à bout. Je sais que c'est pas facile pour toi de supporter cette pression, je sais que [H] te téléphone sans arrêt tout comme mon père et que tu dois tout justifier et que c'est toi qu'ils engueulent mais tu sais que l'argent qui manque est pas pour moi, c'est pour [X], pour les enfants, eux aussi me harcèlent. Je te promets que ça ne durera pas longtemps et que je vais régler le problème, tiens bon ma biche je compte sur toi ne m'en veux pas please'»';

- un mail adressé par elle le 9 septembre 2016 à Mme [K], à M. [L]-[A], et à Mme [T] [N], par lequel':

. elle indique que Mme [N] a détourné 2.300 € en août 2016 et 220 € cette semaine et, de façon récurrente, encaisse des espèces qu'elle ne dépose pas en banque,

. elle justifie ces détournements par les problèmes financiers de Mme [N] et plaide pour une augmentation du salaire de 2.000 € de celle-ci,

. elle se dit très inquiète de l'état de santé psychologique de Mme [N]';

- un mail adressé par elle le 17 septembre 2016 à M. [L]-[A] par lequel elle renouvelle son inquiétude concernant l'état de santé psychologique de Mme [N]';

- un courrier manuscrit du 12 septembre 2016 adressé à Mme [N] émanant semble t'il de M. [L]-[A], par lequel il lui indique,

. que détourner à son profit les recettes de l'hôtel est pénalement répréhensible';

. qu'il est d'accord pour payer les dépenses nécessaires concernant ses enfants (scolarité, activités, vêtements, déplacements...) mais non celles qui ne le sont pas («'taxis, restaurants avec leurs potes parasites, bêtises'»),

. que son compagnon vit à ses crochets et qu'elle est beaucoup trop généreuse';

. un échange de SMS du 6 août 2018 avec Mme [N] (pièce 22)':

Mme [N]': «'est-ce qu'il y a des sous à l'hôtel genre 40 euros'»

Mme [R]': «'il y a 25 €'»

Mme [N]': «'Tu pourras les prendre STP'»

Mme [R]': «'oui'»

Mme [R]': «'pour manger'»

. un échange de SMS du 7 août 2018 (pièce 22) avec Mme [N] par lequel elle indique à cette dernière où elle a caché dans l'hôtel une enveloppe contenant 180 € en espèces';

Il résulte de ces éléments que Mme [R] a été embauchée parce qu'elle était une amie de Mme [N] et que cette dernière détournait des fonds au détriment de la société V S Invest, ce que n'ignoraient ni la comptable ni M. [L]-[A]. Il n'est en revanche produit strictement aucun élément relativement à des reproches qui auraient été faits par qui ce soit à Mme [R] ou à des pressions qu'elle aurait subies en rapport avec ces détournements.

Concernant sa mise à l'écart, et le retrait de toutes ses fonctions administratives par M. [O] [M], directeur embauché en février 2018, elle produit':

- un mail adressé par elle le 10 mars 2017 à M. [L] [A], par lequel elle indique qu'il lui demande de faire les chambres, qu'il ne s'agit pas là du travail d'une assistante de direction, qu'elle le fait pour dépanner, fait le service, nettoie les WC réception, lave le sol, sert les cafés...'; il n'est pas produit d'élément émanant de M. [L]-[A] par lequel il lui aurait demandé d'accomplir des tâches n'entrant pas dans ses fonctions';

- un mail adressé par elle le 6 février 2018 à l'agence de gestion sociale et administrative Bignalet, par lequel elle lui demande d'établir un avenant relatif à un contrat à temps plein la concernant, afin d'arrêter de lui payer des heures «'supplémentaires'», un mail du 8 février 2018 par lequel elle transmet cet avenant à M. [L]-[A], à Mme [K] et à Mme [N], et cet avenant, qui n'est pas signé'; il n'est produit aucun élément caractérisant que l'employeur a envisagé d'embaucher Mme [R] à temps complet, ce alors même que cette dernière échangeait régulièrement par SMS avec Mme [N]';

- des SMS échangés avec Mme [N] :

. le 8 avril 2018

Mme [R] «'Je viens de retrouver mon contrat puisque celui à l'hôtel a disparu... on va pouvoir couper court à toutes ces polémiques me concernant car j'en ai marre d'entendre ces rumeurs persistantes... je respecte ton souhait de ne plus gérer "les états d'âme'» du personnel donc je mettrai les choses au clair avec [O] demain matin comme ça tout sera clair...'»';

Mme [N]': «'Ok pas de soucis ' je t'ai mis plein de trucs à faire ' les caisses puis des papiers pour inspection'»

Mme [R]': «'Tant que je reste au poste pour lequel j'ai signé il n'y a aucun souci je suis là pour bosser et je ferai au mieux'!'»'

Mme [N] «'Voilà assistante puis marketing'»

Mme [R] «'Je trouve bien d'écrire noir sur blanc ce que vous voulez que je fasse'»';

Mme [R] «'le souci avec [O] si je peux me permettre c'est qu'il veut tout changer comme ça d'un coup trop vite'»';

. à une date indéterminée

Mme [R]': «'Moi par exemple je lui ai dit gentiment et poliment demain que non je ne serai pas femme de chambre je suis assistante de direction, j'ai proposé d'être polyvalente en salle à faire service nettoyer verres etc bien que dans mon contrat ce n'est pas marqué. Je suis bien gentille je vais aider.'»

Mme [N]': «'Oui c bien'»

Mme [R]':' «'malgré ma diminution de salaire et le non-respect des engagements de ton père envers moi... je vais le faire'»

Mme [N]': «'heureusement que tu comprends'»

Mme [R] «'mais je n'irai plus en chambre ' j'espère que tu comprends aussi ' pas de souci pour en salle'»

. à une date indéterminée

Mme [R]': «'Je vous laisse donc gérer la partie compta je me mets que le fichier clients ' sauf que [O] il ne sait pas non plus pour la compta'»

Mme [N]': «'Oui il vient d'arriver ' il a d'autres choses à gérer on le fera t'inquiètes pas ' il était chef de cuisine avant maintenant il doit vous gérer gérer la fin des travaux'»

Ces éléments ne permettent pas de déterminer ni quelles étaient les tâches effectives de Mme [R] ni une éventuelle évolution de celles-ci.

Concernant le fait qu'alors même qu'elle n'était plus en responsabilité, elle a subi les critiques de son employeur pour des erreurs commises par d'autres, elle produit :

- en pièce 18, un échange de SMS entre elle et Mme [N], à une date indéterminée, dont il n'est pas possible de déterminer l'objet exact et dont il ressort qu'il y a eu un malentendu entre elles (Mme [R] «'On s'est mal compris'»)'; Mme [N] écrit «'t'es bourrée ou quoi'» et plus loin, Mme [R] répond «'par contre tu m'as déjà vu boire à l'hôtel moi'' Me semble pas'! Alors les "t'es bourrée ou quoi" tu te les gardes'»';

- en pièce 19, un échange de SMS entre elle et Mme [N], à une date indéterminée, dont il n'est pas non plus possible de déterminer l'objet exact':

Mme [R]': «'quoi qu'il en soit tu m'as accusée à tort'»

Mme [N]': «'Mais lui aussi comme [W] ou [S] ils vont arrêter leurs menaces ça c'est sûr, - alors pardon si ce n'est pas toi qui a commencé cette bombe ' demain je suis en repos'»

Mme [R] «'tu t'en ai pris à moi pour rien ' c'est trop grave là'»

Mme [N] «'Ok c'est grave ' téléphone à inspection du travail ' aller [G] ' en tous les cas quelqu'un fout la merde'»

Mme [R] «'en fait tu t'en prends à moi'»

Mme [N] «'Fais comme [B]'»

Mme [R] «'pour rien'»

Mme [N] «'et je m'en suis prise à [B] à [W] à [S] à tous quand je trouve que trop c'est trop ' [S] avec ses commentaires de merde à longueur de jours'»

Mme [R] «'tu t'en prends à la mauvaise personne'»

Mme [N] «'[W] le profiteur ' bon pardon ' à jeudi'»

Outre qu'il n'est pas permis de déterminer qu'une erreur est imputée à Mme [R], toutes deux s'expriment manifestement très librement, sans aucune retenue.

Concernant le fait qu'épuisée moralement, elle a dû être arrêtée quelques jours puis se rendre aux urgences':

- deux SMS qu'elle a adressés à Mme [N] le 24 avril 2018 par lesquels elle lui indique, dans le premier, qu'elle va consulter aux urgences pour des douleurs au bas ventre, et dans le second, qu'elle a deux jours d'arrêt de travail, doit faire une échographie et qu'est suspectée une torsion ovarienne avec kyste'; elle ne produit aucun élément médical et rien ne permet de rattacher ce problème de santé à son travail.

Concernant le fait que le nouveau directeur a changé le mot de passe de son ordinateur sans l'en informer, elle produit un échange de SMS du 9 mai 2018 entre elle et Mme [N]':

Mme [R]': «'j'ai rangé partout je me mets sur mon ordi ' et là': mot de passe incorrect -'''''' - [O] avait mis': vidocq ' ça ne marche plus'''»

Mme [N] «'Oui c ça ' ça marchait hier'''»

Mme [R] «'hier il était déjà allumé ' c'est quoi encore là ' [D] sera là demain elle vient de me confirmer'»

Mme [N] «'je ne sais pas désolée j'ai mon PC portable maintenant je ne vais plus sur ton ordi ' [W] y va pour jouer au poker je l'ai vu ' jean claude ça marche pas'''».

Cet échange ne permet pas de déterminer que M. [M], directeur, a changé le mot de passe de l'ordinateur de Mme [R].

Concernant le fait que Mme [N] a persisté à lui demander de lui donner de l'argent liquide de la caisse à l'insu de son père et de la comptable, elle produit les échanges de SMS des 6 et 7 août 2018 (pièce 22) déjà évoqués ci-dessus. Ils établissent que Mme [N] a persisté à détourner des espèces au détriment de la société et que Mme [R] a persisté à l'aider à le faire. Comme déjà observé, il n'est pas établi qu'il en est résulté des conséquences négatives à l'égard de Mme [N].

Enfin, concernant un lien entre l'attitude de l'employeur et son inaptitude, elle produit l'avis d'inaptitude, qui mentionne «'inapte au poste'; pas de reclassement possible sur la structure'», et ne permet pas de déterminer un tel lien.

Ainsi, les éléments produits par Mme [R], pris dans leur ensemble, ne permettent pas de laisser supposer un harcèlement, et il résulte d'échanges de SMS entre Mme [R] et Mme [N] à compter du 20 août 2018 (pièce 27 de la salariée et 23 à 25 de l'employeur), d'un certificat médical de prolongation d'arrêt de travail du 17 novembre 2018 (pièce 5 de l'employeur), et d'un courrier adressé le 20 août 2018 par M. [O] [M] à Mme [N] (pièce 21 de l'employeur)':

- que lors d'un bal à [Localité 4] le 19 août 2018, aux dires de Mme [R], le fils de M. [M], directeur de l'hôtel, [B], âgé de 16 ans, l'a embrassée tandis qu'aux dires de M. [M], c'est cette dernière qui a contraint le mineur à un baiser'; il s'en est suivi un échange de coups entre le compagnon de Mme [R], cette dernière et des parents de M. [M], et des plaintes pénales ont été déposées';

- que suite à ces faits, survenus alors que Mme [R] était en congés, elle a poursuivi ses congés puis a été en arrêt maladie, ce, pour «'épisode dépressif'» du 17 novembre 2018 au 17 décembre 2018';

- que le 20 août 2018, Mme [R] a écrit à Mme [N], «'vu que [O] est mon directeur et que pour le moment et tant que les choses ne seront pas claires il me sera impossible de travailler avec lui'»,

- que ce n'est qu'alors que Mme [R] s'est plainte auprès de Mme [N] que M. [M], directeur, avait repris toutes ses tâches, que sa rémunération avait diminué car elle ne faisait plus d'heures complémentaires, qu'elle était poussée à la sortie à force de lui répéter à longueur de temps «'il y a trop d'employés, il y a trop de monde à la réception, tu sers à rien, tu fais mal ton travail..'»,

- qu'elle a souhaité son licenciement en ses termes «'je t'informais juste que cette histoire risque d'aller loin car nous on envisage peut-être même un licenciement économique puisque tout le monde s'emploie à me faire comprendre que je ne sers plus à rien depuis que [O] est là'»';

- que Mme [N], gérante, n'a pas pris partie ni imposé le départ de l'un ou l'autre salarié puisque, aux messages de la salarie, elle répond': «'Il s'est passé ce qui s'est passé - voilà'» «'tu arranges ces histoires avec [O] et son fils merci'» «'Bon donc tu es d'accord pour travailler avec [O] ' voilà parfait'».

En conséquence, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

- Sur le manquement à l'obligation de sécurité

En application de l'article L.4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Mme [R] invoque le fait qu'elle a été embauchée pour subir à la place de Mme [N] la pression de son père et de sa comptable. Il n'existe aucun élément de fait caractérisant qu'elle a effectivement subi quelque pression que ce soit.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.

- Sur la résiliation judiciaire

Mme [R] soutient qu'elle a subi un harcèlement moral ou à tout le moins une déloyauté dans la relation de travail de nature à justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail. Le harcèlement n'a pas été retenu. Mme [R] ne caractérise pas non plus ni d'engagement de l'employeur à l'embaucher à temps complet ni qu'elle faisait office de directeur avant l'embauche de M. [M].

La déloyauté alléguée de l'employeur n'est donc pas non plus caractérisée.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande de résiliation judiciaire.

- Sur le licenciement

Il n'est pas caractérisé que l'inaptitude résulte d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande tendant à le dire sans cause réelle et sérieuse, et le licenciement sera jugé justifié.

- Sur la demande reconventionnelle de la société V S Invest

Il n'est pas caractérisé d'abus par Mme [R] dans l'exercice du droit d'agir en justice. La demande reconventionnelle de la société V S Invest sera en conséquence rejetée.

- Sur les autres demandes

Mme [R], qui succombe, sera condamnée aux dépens exposés en appel, et à payer à la société VS Invest une somme de 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et déboutée de sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Tarbes du 11 mai 2021,

Y ajoutant,

Dit le licenciement de Mme [G] [R] fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Condamne Mme [G] [R] aux dépens exposés en appel,

Rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive de Mme [G] [R],

Condamne Mme [G] [R] à payer la somme de 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile à la société V S Invest (Hôtel A la Croix de Malte) et la déboute de sa demande de ce chef.

Arrêt signé par Madame CAUTRES, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/01856
Date de la décision : 27/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-27;21.01856 ?
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