CF/ED
Numéro 23/01040
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 21/03/2023
Dossier : N° RG 21/00996 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H2GD
Nature affaire :
Demande en réparation des dommages causés par l'activité des auxiliaires de justice
Affaire :
[G] [W]
C/
[S] [D]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 21 Mars 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 07 Février 2023, devant :
Madame FAURE, Présidente, magistrate chargée du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile
Madame ROSA-SCHALL, Conseillère
Madame de FRAMOND, Conseillère
assistées de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [G] [W]
né le [Date naissance 2] 1955
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté et assisté de Maître LOYCE-CONTY de la SELARL BLAZY & ASSOCIES, avocat au barreau de BAYONNE
INTIME :
Monsieur [S] [D]
né le [Date naissance 5] 1950 à [Localité 6] (92)
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 3]
Représenté et assisté de Maître LAMOURET de la SELARL LAMOURET-LAHITETE, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN
sur appel de la décision
en date du 10 FEVRIER 2021
rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONT DE MARSAN
RG numéro : 18/01187
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [G] [W] était le propriétaire de la jument Lara de Candelon, jument poulinière de race pur-sang arabe, immatriculée le 20 avril 1994 sous le numéro 93 006 358 G.
Cette jument était un cheval de course provenant de la lignée de Pehrxilla IBN Xelio et de Djouras Tu.
En 1999, elle a donné naissance à deux chevaux mâles.
En avril 2004, la jument Lara de Candelon a été confiée au Haras de [Localité 7] pour être inséminée.
En mai 2004, la jument, après avoir vu son état s'aggraver a été prise en charge par les vétérinaires de la société Barascud-[P] puis hospitalisée en clinique sous les soins du Docteur [K].
Le 29 mai 2004, la jument a été euthanasiée.
Considérant que la SCP Barascud-[P] avait commis des fautes dans les soins prodigués à la jument, Monsieur [W] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Cahors lequel a organisé une mesure d'expertise judiciaire confiée à Monsieur [Y]. Celui-ci a déposé son rapport le 28 novembre 2006.
Par acte d'huissier du 7 mai 2007, Monsieur [W] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Cahors la SCP Barascud-[P] pour la voir condamner à réparer son préjudice du fait de la perte de la jument.
Par ordonnance du 23 janvier 2008, le juge de la mise en état a ordonné une expertise pour évaluer la valeur de la jument. Monsieur [R], après changement d'expert, a été désigné et a fixé la valeur résiduelle de la jument à 2 000-3 000 €.
Contestant les termes du rapport, Monsieur [W] a saisi le juge de la mise en état d'une demande d'une nouvelle expertise.
Le Dr [D] a alors été désigné, lequel a déposé son rapport le 1er février 2010.
Par jugement du 21 février 2014, le tribunal de grande instance de Cahors a notamment condamné la SCP Barascud-[P] au paiement de la somme de 8 000 € à titre de dommages-intérêts au titre de la valeur de la jument Lara de Candelon.
La cour d'appel d'Agen a, par arrêt du 6 janvier 2016 confirmé le jugement en toutes ses dispositions.
Par acte d'huissier du 24 octobre 2018, Monsieur [G] [W] a assigné Monsieur [S] [D] devant le tribunal de grande instance de Mont de Marsan devenu le tribunal judiciaire pour voir engager sa responsabilité délictuelle et le voir condamner au paiement de la somme de 210.000 € en réparation de son préjudice.
Par jugement du 10 février 2021, le tribunal judiciaire de Mont de Marsan a :
Déclaré irrecevable comme prescrite l'action en responsabilité dirigée par Monsieur [G] [W] à l'encontre de Monsieur [S] [D],
Débouté Monsieur [D] de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts,
Condamné Monsieur [W] à payer à Monsieur [D] une somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejeté les autres demandes,
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Le juge de première instance a constaté :
La prescription de l'action en responsabilité contre l'expert judiciaire est soumise au droit commun qui est de cinq ans,
La prescription d'une action court à compter de la réalisation du dommage ou la date à laquelle il est révélé à la victime,
Le dommage invoqué est une perte économique consécutive à la sous-évaluation de la valeur de la jument liée au diagnostic de stérilité, ce dommage s'est manifesté lorsqu'il a eu connaissance des conclusions du rapport d'expertise, le 2 février 2010. L'action initiée le 24 octobre 2018 est prescrite.
Le 23 mars 2021, Monsieur [G] [W] a interjeté appel contre ce jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de Monsieur [W] et l'a condamné à une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Les conclusions de Monsieur [G] [W] du 13 septembre 2022 tendent à :
Vu les articles 1240 et 1241 du Code civil,
Vu le rapport de Monsieur [D],
Déclarer Monsieur [G] [W] recevable et bien fondé en son appel,
Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :
- Déclaré irrecevable comme prescrite l'action en responsabilité dirigée par M. [G][W] à l'encontre de M. le Docteur [S] [D] concernant son rapport d'expertise judiciaire déposé le 1er février 2010 au tribunal de grande instance de Cahors,
- Condamné M. [G] [W] à verser à M. le Docteur [D] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné M. [G] [W] aux dépens,
- Rejeté les prétentions plus amples ou contraires.
Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le Docteur [S] [D] de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,
Rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions du Docteur [D],
Et statuant à nouveau :
A titre principal :
Déclarer Monsieur [W] recevable et bien fondé en ses demandes,
Déclarer le Docteur [D] responsable du préjudice subi par Monsieur [W] et le condamner ainsi au paiement de la somme de 210 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.
A titre subsidiaire,
Nommer un expert agréé à la Cour de cassation qui, partant du principe que la jument n'est pas stérile, indiquera sa valeur
En tout état de cause,
Condamner Monsieur [D] à verser à Monsieur [G] [W] la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Monsieur [W] considère que la prescription de son action n'est pas encourue car son préjudice n'a été effectif que lorsque les juges de première instance et d'appel se sont fondés sur ce rapport pour rendre leur décision.
Sur le fond, il fait observer que le Dr [D] était tenu à une obligation de moyens et ne s'est pas comporté en expert diligent et attentif, et qu'il s'est fondé sur des pièces erronées pour conclure à la stérilité de la jument.
Les conclusions de Monsieur [S] [D] du 30 mai 2022 tendent à :
A titre principal sur l'appel de M. [W],
Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan, le 10 février 2021 en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite, en application de l'article 2224 du code civil, l'action en responsabilité dirigée par M. [W] à l'encontre du Dr [D] concernant son rapport d'expertise judiciaire déposé le 1er février 2021 au tribunal de grande instance de Cahors,
Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan, le 10 février 2021 dont appel en ce qu'il a condamné M. [W] aux dépens,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour ne déclarait pas prescrite l'action de M. [W],
Juger que l'action engagée par M. [W] est dénuée de tout fondement,
débouter M. [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions comme infondées au titre de ses demandes indemnitaires,
Débouter M. [W] de ses demandes d'expertise complémentaire,
A titre d'appel incident,
Déclarer recevable l'appel incident du Dr [D],
Dire que le Dr [D] a subi un incontestable préjudice moral du fait de l'atteinte portée par M. [W] à sa réputation d'expert judiciaire,
Condamner M. [W] à payer au Dr [D] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et atteinte grave à sa réputation,
En toute hypothèse,
Condamner M. [W] à payer au Dr [D] une somme complémentaire de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Monsieur [D] oppose que :
L'action de M. [W] est prescrite, le délai de prescription ayant commencé à courir lorsque ce dernier s'est trouvé en possession du rapport du Dr [D],
Le rapport d'expertise ne conclut pas à la stérilité de la jument mais fait état d'une hypofertilité et d'une jument vide au jour de son décès,
L'expert a une obligation de moyens et le juge n'est pas lié par les conclusions de l'expert.
Vu l'ordonnance de clôture du 5 octobre 2022.
MOTIFS
Sur la prescription :
L'instance ayant été initiée antérieurement au 1er janvier 2020, la fin de non recevoir était recevable devant le juge du fond, les dispositions du décret du 11 décembre 2019 étant en l'espèce inapplicables.
Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles, telles que la recherche de la responsabilité délictuelle de droit commun, se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Il s'agit de la recherche de la responsabilité délictuelle d'un expert judiciaire dans le cadre de sa mission dont il convient de rappeler qu'en vertu de l'article 246 du code de procédure civile, le juge n'est pas lié par les constatations ou les conclusions du technicien.
Ainsi, contrairement à ce qu'a décidé le premier juge, le jour de la réalisation du dommage invoqué par Monsieur [W] se situe non à la date du rapport de Monsieur [D] en date du 1er février 2010 qui a estimé la valeur commerciale de la jument avant son décès à la somme de 8 000 €, mais à la date de l'arrêt de la cour d'appel d'Agen du 6 janvier 2016 date à laquelle le dommage dont il réclame réparation s'est définitivement manifesté par l'utilisation de l'évaluation à laquelle Monsieur [D] a procédé. En effet, par cet arrêt confirmatif, la cour d'appel d'Agen a statué définitivement sur le préjudice de Monsieur [W] en relation avec la valeur de la jument perdue alors que cette valeur était très contestée par Monsieur [W] à l'origine de l'appel.
Aussi, ce n'est qu'à la date du 6 janvier 2016 que Monsieur [W] a connu la réalisation de son dommage manifesté par l'exploitation du rapport d'expertise de Monsieur [D] par la cour d'appel d'Agen. Tant qu'une décision de justice n'avait pas arrêté le montant du préjudice de Monsieur [W] au vu du rapport de Monsieur [D], Monsieur [W] ne connaissait pas la réalité du dommage qu'il invoque puisqu'il ne savait pas si l'avis de l'expert serait suivi par la juridiction saisie. L'action en responsabilité contre l'expert [D] dont la mission était d'estimer la valeur de la jument ayant été engagée par acte d'huissier du 24 octobre 2018 devant le tribunal de grande instance de Mont de Marsan devenu tribunal judiciaire n'est donc pas prescrite.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action en responsabilité diligentée contre Monsieur [D] et l'action en responsabilité sera donc examinée par la présente cour d'appel en vertu de son pouvoir d'évocation.
Sur la responsabilité de Monsieur [D].
Il appartient à Monsieur [G] [W] de démontrer l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité à l'occasion de l'exercice de la mission de Monsieur [D].
La faute de l'expert judiciaire peut résider dans le fait de ne pas s'être comporté comme l'aurait fait un homme de l'art normalement prudent, diligent, compétent et informé.
L'article 237 du code de procédure civile énonce les qualités minimales de l'expert qui doit accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité.
Il convient de rappeler qu'une première expertise a été confiée à Monsieur [Y] par ordonnance de référé du 15 juin 2005 afin de déterminer si les soins prodigués par la SCP Barascud [P] avaient été attentifs, consciencieux et conformes aux données acquises de la science.
Après dépôt du rapport et saisine du tribunal de grande instance de Cahors pour voir reconnaître responsable la SCP Barascud-[P], le juge de la mise en état a, par une ordonnance du 23 janvier 2008 désigné Monsieur [Z] aux fins d'évaluer la jument. Monsieur [R] a été désigné en remplacement de celui-ci et a conclu à une valeur résiduelle de 2 000-3 000 €.
Par ordonnance du 27 mars 2009, le juge de la mise en état, saisi par Monsieur [W] qui contestait les conclusions de Monsieur [R] et notamment la conclusion de l'inaptitude à la reproduction, a désigné Monsieur [D] dont le rapport est l'objet du présent litige.
Ainsi, Monsieur [W] doit rapporter la preuve que Monsieur [D] a commis une erreur dans son appréciation de la valeur et notamment sur la capacité de reproduction de la jument, erreur qui aurait influé sur la décision du juge du tribunal de Cahors puis de la cour d'appel d'Agen.
Monsieur [D] n'est intervenu que sur la question de la valeur de la jument et non sur les fautes commises par la SCP Barascud-[P]. Le débat que Monsieur [W] poursuit devant la présente cour selon lequel Monsieur [D] aurait commis une faute en déclarant que la SCP Barascud-[P] n'était pas en charge du suivi gynécologique de la jument litigieuse n'a aucun objet puisqu'il concerne l'appréciation de la faute de la SCP Barascud-[P] et que ce n'était pas l'objet de la mission de Monsieur [D]. De surcroît, le directeur des affaires juridiques des Haras Nationaux interrogé par l'expert a rappelé le 30 septembre 2009 que le suivi de l'ovulation par échographie est mis en place que sur demande expresse du propriétaire, ce qui n'a pas été le cas. L'attestation de l'éleveur de chevaux [F] et du Dr [Z] ne sont pas suffisantes pour contredire la lettre du directeur du service juridique.
Monsieur [D] a analysé la valeur de la jument selon ses origines, ses performances en compétition, sa production, la réputation de son éleveur et son état au moment de la vente.
Il a souligné que les origines de Lara de Candelon avaient d'excellentes souches, que ses performances en compétition étaient bonnes.
Il est reproché à Monsieur [D] d'avoir conclu que Monsieur [W] ne justifiait pas de bonnes qualités d'éleveur, ce qui n'aurait aucune influence sur la stérilité de la jument.
Il ne peut être reproché à Monsieur [D] d'avoir analysé les conditions d'élevage de la jument pour déterminer si celle-ci bénéficiait de soins appropriés dès lors que les conditions d'élevage et la réputation de l'éleveur sont un des critères d'appréciation de la valeur d'une jument. Les constats d'absence de vaccination de la jument depuis 1997 jusqu'en 2004, date de son décès, le recours à une pratique illicite d'achats de vermifuge en Espagne et son absence d'inscription au syndicat des éleveurs de PAr de courses (AFAC) sont des éléments de nature à considérer que l'élevage pratiqué sur cette jument ne correspondait pas aux pratiques habituelles d'élevage. Monsieur [W] a contesté l'absence de notoriété relevée par Monsieur [D]. S'il est établi par le palmarès produit par Monsieur [W] que celui-ci se situe en 4ème position sur les 40 premiers éleveurs par les gains en France, il convient de noter que seulement deux chevaux sont concernés avec seulement quatre victoires sur l'année 2004 pour les pur-sang arabes de courses et sans qu'il ne soit établi la diffusion de ce palmarès, ce qui n'est pas suffisant pour démontrer des performances d'éleveur notoire et renverser ainsi la conclusion de l'expert [D] que les conditions d'élevage ne concouraient pas à une augmentation de la valeur des produits issus de son élevage.
Sur l'état de fertilité de la jument, Monsieur [D] a analysé à juste titre le parcours de production de la jument Lara de Candelon née en 1993 pour rappeler que sa production était irrégulière et se distinguait par la naissance de deux chevaux excellents Sidi de Candelon né en 1999 et vendu au Qatar pour 8 000 €, et Souk de Candelon, né en 2000 et vendu au Qatar pour 122 000 €.
Il a remarqué que durant les années 2000, 2001 et 2002 , la jument n'avait pas été saillie en raison de l'indisponibilité de l'éleveur. Il en a conclu que le faible nombre de produits et l'interruption de carrière constituait une dévaluation et une incohérence. Aucun grief ne peut être retiré contre Monsieur [D] de ces constatations objectives même si elles ont été accompagnées de propos bruts en critiquant le comportement de l'éleveur qui avait laissé plusieurs années sa jument au pré et qui ne l'avait pas vendue malgré des offres intéressantes.
Monsieur [W] n'apporte aucun élément venant contredire ces éléments concrets de nature à renverser la conclusion de dévaluation de ce chef.
Il ne peut non plus être reproché à Monsieur [D] de s'être livré à une analyse de la fertilité de la jument alors que celle-ci était destinée à la reproduction compte tenu de l'excellence de ses origines, de la naissance de deux mâles dont les performances ont été reconnues notamment au Qatar, et alors qu'il est constant que la vente d'une jument pleine amplifie sa valeur.
Monsieur [D] a procédé à la vérification de l'authenticité des documents fournis en prenant contact avec le service juridique de l'établissement public des Haras nationaux ce qui manifeste son souhait de prudence sur les éléments fournis par les parties. Le directeur du service juridique a confirmé par lettre du 30 septembre 2009 (annexe 4 du rapport) que les renseignements portés sur la fiche de suivi de la jument sont tout à fait exacts et que Lara de Candelon a bien été l'objet de seize inséminations consécutives entre le 21 avril et 17 mai 2004.
En outre, le pré-rapport de Monsieur [R] produit par l'appelant, premier expert judiciaire désigné pour estimer la valeur de Lara de Candelon fait état d'un suivi gynécologique mais en 2003.
Il n'existe ainsi aucune ambiguïté sur l'absence de fiches de suivi gynécologique dont Monsieur [W] souligne qu'elles sont manquantes et pour lequel il produit des modèles en pièces 31 et 32, puisqu'il n'est pas démontré l'existence d'un tel suivi en 2004.
Par ailleurs, il sera observé que le sort de la plainte pour faux de Monsieur [W] sur le planning de monte établi à l'occasion des inséminations de Lara de Candelon qui ont précédé sa mort, n'a pas donné lieu à des poursuites pénales en l'absence de production d'une saisine du tribunal correctionnel ou d'une décision de condamnation. Il ne peut donc être retenu comme le prétend Monsieur [W] que le planning de monte a été modifié pour les circonstances et que les documents examinés par Monsieur [D] sont faux.
Il ne peut être tiré aucune conséquence de la convention signée entre le Haras National et le vétérinaire [P], conclue pour l'année 2004, dont la page 1 uniquement est produite par Monsieur [D] en pièce 7 qui fait état de constat de gestation ou constat de l'état folliculaire et qui traite de la mise à disposition par le Haras National de Rodez de l'installation pour réaliser des échographies, et de la fréquence des visites du Dr [P] durant la saison de monte, et alors qu'il ne s'agit en aucun cas d'une quelconque convention entre le vétérinaire et Monsieur [W].
Il convient de constater que les conclusions du premier expert [R] aboutissent au même constat que Monsieur [D] à savoir une inaptitude à la reproduction au moment du sinistre, et à une valeur résiduelle de cheval de loisir de 2 000/3 000 € inférieure à celle de Monsieur [D] qui l'a fixée à 8 000 €.
Aussi, deux experts judiciaires ont conclu de façon identique, les conclusions de Monsieur [D] étant étayées en tant que de besoin par celle de Monsieur [R].
En outre, le prix de vente des deux poulains de Lara de Candelon de 6 755,34 € pour Sidi de Candelon en 2003, et de 121 972,64 € pour Souk de Candelon en 2004 ne peuvent servir de termes de comparaison, compte tenu de leur disparité.
Pas plus les deux attestations de proposition d'achat de Monsieur [B], directeur des écuries du cheik [A] [J] [V] à hauteur de 1.000.000 de francs en 1997 et celle de Monsieur [M] [U] à hauteur de 250 000 € en 2003 ne peuvent être retenues, l'une trop ancienne par rapport à la date du décès, et l'autre trop incomplète pour préciser le sort de cette proposition et les caractéristiques sur l'état de la jument et les critères retenus.
L'appréciation de la valeur de la jument à 8 000 € effectuée par Monsieur [D] n'est donc contredite par aucun élément.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, aucune faute dans l'exercice de sa mission ne peut être retenue contre Monsieur [S] [D].
Monsieur [G] [W] sera donc débouté de l'ensemble de ses demandes.
Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts :
Le tribunal a débouté Monsieur [D] de sa demande en dommages-intérêts faute de préjudice et de mauvaise foi de Monsieur [W].
Or, il est avéré que Monsieur [W] a mis en doute la probité de l'expert en déclarant que celui-ci avait dissimulé une pièce essentielle dans la recherche de la vérité alors même qu'elle était en sa possession (convention avec le Haras) et qu'il avait bâti un rapport d'expertise mensonger biaisant par là même l'interprétation des juges.
Ces propos de Monsieur [W] sont de nature à atteindre à la réputation et à l'honneur de l'expert qui exerce sa mission dans un cadre judiciaire. La responsabilité de Monsieur [W] est donc engagée et il sera alloué à Monsieur [D] une somme de 1 500 € à titre de dommages-intérêts pour réparer son préjudice moral. Le jugement sera donc infirmé sur ce point.
Les dispositions du jugement concernant l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens seront confirmés.
En cause d'appel, il sera alloué à Monsieur [D] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement en ses dispositions sur l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau :
Déclare recevable l'action en responsabilité dirigée par Monsieur [G] [W] contre Monsieur [S] [D],
Déboute Monsieur [G] [W] de ses demandes contre Monsieur [S] [D],
Condamne Monsieur [G] [W] à payer à Monsieur [S] [D] la somme de 1 500 € à titre de dommages-intérêts,
et y ajoutant :
Condamne Monsieur [G] [W] à payer Monsieur [S] [D] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Monsieur [G] [W] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme HAUGUEL, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Sylvie HAUGUEL Caroline FAURE