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14/03/2023 | FRANCE | N°21/01277

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 14 mars 2023, 21/01277


BR/MS



Numéro 23/00951





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRÊT DU 14/03/2023







Dossier : N° RG 21/01277 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H24X





Nature affaire :



Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix







Affaire :



[O] [L]



C/



S.A. CHAUSSON MATÉRIAUX























Grosse délivrée le :



à :

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 14 Mars 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxi...

BR/MS

Numéro 23/00951

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 14/03/2023

Dossier : N° RG 21/01277 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H24X

Nature affaire :

Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

Affaire :

[O] [L]

C/

S.A. CHAUSSON MATÉRIAUX

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 14 Mars 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 16 Janvier 2023, devant :

Madame REHM, magistrate honoraire chargée du rapport,

assistée de Madame HAUGUEL, greffière présente à l'appel des causes,

Madame REHM, en application des articles 805 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame FAURE, Présidente

Madame ROSA-SCHALL, Conseillère

Madame REHM, Magistrate honoraire

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [O] [L]

né le 14 Décembre 1966 au Maroc

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté et assisté par Maître KAROUBI, avocat au barreau de PAU

INTIMEE :

SAS CHAUSSON MATÉRIAUX

[Adresse 3]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée et assistée par Maître TORTIGUE de la SELARL TORTIGUE PETIT SORNIQUE RIBETON, avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 04 FÉVRIER 2021

rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PAU

RG numéro : 11-19-000517

EXPOSE DU LITIGE

Dans le cadre de la construction de sa maison d'habitation sise [Adresse 6] à [Localité 4] (64), Monsieur [O] [L] a commandé à la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX, une charpente selon devis accepté en date du 14 juin 2018, pour un montant de 7 038,26 euros TTC.

La pose de la charpente devait être réalisée par un charpentier indépendant en la personne de Monsieur [S] [G].

La charpente a été livrée le 25 octobre 2018 par la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX.

L'artisan qui devait procéder à la pose a alors constaté que la charpente n'était pas conforme aux plans réalisés par l'architecte qui prévoyaient des débords droits alors que la charpente livrée avait des débords 'queue de vache'.

Après avoir demandé à son artisan d'arrêter de monter la charpente, Monsieur [O] [L] a protesté auprès de la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX en lui demandant de lui livrer une charpente conforme aux plans de l'architecte qu'il lui avait fournis, sous peine de résolution du contrat, mais la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX a répondu que la charpente réalisée était conforme à la commande.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 28 novembre 2018 du conseil de Monsieur [O] [L], la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX a été mise en demeure d'exécuter ses obligations contractuelles, rappel lui étant fait dans ce courrier, des dispositions de l'article 1226 du code civil et du fait qu'à défaut d'exécution, il serait procédé à la résolution du contrat de vente conclu entre les parties.

Par courrier en réponse du 14 décembre 2018, la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX a maintenu sa position et a sollicité le paiement de la somme de 7 044,26 euros TTC correspondant à sa facture du 31 octobre 2018 au titre de la charpente fournie.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 21 décembre 2018, le conseil de Monsieur [O] [L] a notifié à la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX la résolution de la vente.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 22 janvier 2019, la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX a indiqué contester la résolution de la vente et maintenir sa demande de paiement de sa facture.

Le 23 mars 2019 la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX a adressé à Monsieur [O] [L] une mise en demeure de procéder au règlement de la somme de 7 044,26 euros TTC mais elle s'est heurtée au refus de son client.

Par ailleurs, la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX ayant refusé de venir enlever la charpente litigieuse se trouvant sur le terrain de Monsieur [O] [L], ce dernier a restitué les éléments de la charpente en les déposant sur le parking de l'agence de la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX de [Localité 7] (64) le 10 juin 2019.

Aucune solution amiable au litige n'ayant pu être trouvée entre les parties, le 1er avril 2019, la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX a déposé une requête en injonction de payer à l'encontre de Monsieur [O] [L] auprès du tribunal d'instance de Pau.

Par ordonnance en date du 19 juillet 2019, le juge d'instance de Pau a enjoint à Monsieur [O] [L] de payer à la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX la somme de 7044,26 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 mars 2019, ainsi que 5,02 euros au titre de frais accessoires et 15,00 euros au titre de la clause pénale.

Le 12 août 2019, Monsieur [O] [L] a, par l'intermédiaire de son avocat, formé opposition à cette ordonnance d'injonction de payer qui lui avait été signifiée par huissier le 1er août 2019.

Par jugement réputé contradictoire en date du 4 février 2021, la chambre des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Pau a :

- dit recevable l'opposition à injonction de payer de Monsieur [O] [L],

- débouté Monsieur [O] [L] de l'intégralité de ses demandes,

- condamné Monsieur [O] [L] à payer à la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX la somme de 7 044,26 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 mars 2019 outre 5,02 euros au titre des frais accessoires,

- condamné Monsieur [O] [L] à enlever les éléments de charpente stockés à l'agence de [Localité 7] de la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification du jugement à intervenir,

- débouté la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX de sa demande au titre de la clause pénale,

- condamné Monsieur [O] [L] à payer à la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX la somme de 1 200,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [O] [L] aux entiers dépens,

- débouté les parties de toutes autres demandes non satisfaites,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Le premier juge a considéré que la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX avait exécuté la prestation qui lui avait été commandée sans commettre de faute et sans manquer à son devoir de conseil, en se conformant aux plans établis le 26 juin 2018, lesquels correspondaient à la fiche de fabrication valant devis établie le même jour et signée par Monsieur [O] [L] sur laquelle apparaît la mention 'Nouveau plan de masse arases toutes à la même hauteur' et mentionnant une charpente avec débord de toit 'queue de vache'.

Par déclaration du 14 avril 2021, Monsieur [O] [L] a relevé appel de cette décision, en sollicitant la réformation du jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Aux termes de ses conclusions déposées le 13 juillet 2021, Monsieur [O] [L] demande à la cour de :

- confirmer la décision en ce qu'elle a déclaré l'opposition de Monsieur [L] recevable,

- infirmer pour le surplus,

Et statuant à nouveau :

- mettre à néant l'ordonnance d'injonction de payer,

Sur le fondement des articles 1226 et suivants du code civil,

- faire droit aux demandes de Monsieur [L],

- dire et juger la résolution du contrat liant Monsieur [L] à l'entreprise CHAUSSON MATÉRIAUX bien fondée,

- ordonner la restitution du prix de la charpente de 7 044,26 euros,

- condamner la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX au paiement de la somme de 6 000,00 euros au titre du préjudice matériel et 2 000,00 euros au titre du préjudice moral,

- débouter la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX de ses demandes,

- condamner la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX aux entiers dépens de l'instance d'appel et de première instance conformément à l'article 696 du code de procédure civile,

- condamner la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX à la somme de 4 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions déposées le 24 septembre 2021, la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX demande à la cour sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil, de :

- rejeter les demandes, fins et conclusions de Monsieur [O] [L] comme étant autant irrecevables qu'infondées,

- dire et juger que le contrat liant les parties, né du bon de commande du 26 juin 2018, produit tous ses effets,

- confirmer le jugement dont appel lequel a condamné Monsieur [O] [L] à verser à la société CHAUSSON MATÉRIAUX les sommes suivantes :

* 7 044,26 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 mars 2019,

* 5,02 euros au titre des frais accessoires,

- réformer le jugement dont appel et statuant à nouveau, condamner Monsieur [O] [L] à verser à la société CHAUSSON MATÉRIAUX la somme de 1 056,64 euros au titre de la clause pénale,

- condamner Monsieur [O] [L] à la somme de 5 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en réparation des frais de justice exposés par la société CHAUSSON MATÉRIAUX devant le tribunal et en cause d'appel,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SELARL TORTIGUE-PETIT-SORNIQUE-RIBETON, avocat au barreau de Bayonne, qui sera autorisée à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 décembre 2022.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour observe que le jugement entrepris a été par erreur qualifié de réputé contradictoire alors que chacune des parties était représentée par un avocat, de sorte que la décision aurait dû être qualifiée de contradictoire.

Il convient dès lors, conformément aux dispositions de l'article 462 du code de procédure civile, de rectifier cette erreur matérielle et de dire que le jugement rendu le 19 novembre 2020 par le tribunal judiciaire, chambre des contentieux de la protection de Pau, doit être qualifié de jugement contradictoire.

1°) Sur la demande de résolution du contrat de vente

Il n'est pas contesté que le contrat liant les parties est un contrat de vente conclu entre Monsieur [O] [L] et la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX et portant sur une charpente fournie par la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX.

Selon l'article 1217 du code civil, 'la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement peut notamment refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation et provoquer la résolution du contrat.'

Selon l'article 1224 du code civil, 'la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire, soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.'

Selon l'article 1226 du code civil, 'le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.

La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.

Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.

Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution.'

L'article 1228 du même code complète : 'Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.'

Par ailleurs, aux termes de l'article 1353 du code civil, 'Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.'

En l'espèce, il convient à titre liminaire de rappeler qu'il n'est pas contesté que Monsieur [O] [L] est profane en matière de construction de charpente ; également, il résulte d'un bilan de compétences concernant Monsieur [O] [L] établi par l'agence CIBC Sud Aquitaine, qu'il parle mal et lit tout aussi mal le français, l'auteur de ce bilan invitant Monsieur [O] [L] à prendre contact avec un organisme destiné à remédier à son illettrisme.

Il est constant que la charpente livrée par la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX à Monsieur [O] [L] comporte des débords 'queue de vache', c'est-à-dire qu'en l'espèce, comme cela ressort d'un constat d'huissier établi le 21 novembre 2018, le débord du bas de la pente de la charpente descend au niveau du coffre du volet de l'ouverture, les angles de la charpente descendent jusqu'aux fenêtres et elles masquent les poutres extérieures apparentes.

Or, sur les plans de l'architecte établis le 22 janvier 2018 dans le cadre du dossier de demande du permis de construire, il était prévu un montage de la charpente avec un débord droit, conformément aux autres maisons du lotissement toutes construites sur le même modèle, comme cela ressort également du constat d'huissier susvisé.

Il n'est pas contesté que ces plans ont subi une modification au mois de juin 2018 comme le précise Monsieur [S] [G] dans son attestation en indiquant qu'une modification des plans établis par l'architecte avait été demandée par Monsieur [O] [L] concernant un rehaussement de 3cm de l'arase du garage pour l'aligner sur l'arase générale ; de fait, cette modification figure sur un plan versé aux débats indiquant qu'il existe une modification au niveau du faîtage et que les arases sont toutes à la même hauteur sur le nouveau plan de masse.

En revanche, la preuve n'est pas rapportée que les plans établis par l'architecte aient été modifiés concernant les débords de toit qui ont toujours été droits.

La SAS CHAUSSON MATÉRIAUX ne conteste pas que les plans établis par l'architecte dans le cadre du dossier de demande de permis de construire lui ont bien été communiqués par Monsieur [O] [L] en vue de la réalisation de la charpente de sa maison, y compris après la modification sollicitée par Monsieur [O] [L].

Elle ne conteste pas non plus que la charpente qu'elle a livrée à Monsieur [O] [L] ne correspond pas à ce qui était prévu sur les plans de l'architecte, mais elle affirme qu'elle est conforme à celle qui lui a été commandée par Monsieur [O] [L] qui aurait, selon elle, sollicité des débords 'queue de vache' pour des raisons financières, les débords 'queue de vache' étant moins onéreux que des débords droits.

Or, non seulement elle ne rapporte pas la preuve des exigences de Monsieur [O] [L] ni du moindre coût de fabrication d'une charpente avec un débord 'queue de vache' mais Monsieur [O] [L] a produit un devis établi par une entreprise TILHET MATÉRIAUX établissant que le coût d'une charpente à débord droit est moindre que celui facturé par la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX pour une charpente à débord 'queue de vache.'

La SAS CHAUSSON MATÉRIAUX ne peut non plus sérieusement soutenir que les plans établis par l'architecte n'auraient aucune utilité pour la conception de la charpente, alors qu'ils définissent incontestablement l'apparence de la future construction et que c'est sur la base de ces documents qu'est examinée la demande du permis de construire par les services de l'urbanisme.

Cet argument de la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX est d'autant moins pertinent qu'elle revendique par ailleurs la modification des plans du permis de construire pour justifier le fait que la charpente commandée différait de celle figurant sur ces plans.

Si, comme le prétend la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX, c'est à la demande expresse de Monsieur [O] [L] que la charpente a été fabriquée avec des débords 'queue de vache', il lui appartient dès lors de prouver qu'elle a respecté l'obligation d'information et de mise en garde qui pèse sur elle en sa qualité de professionnelle, en informant préalablement Monsieur [O] [L] de la différence existant entre ces deux modes de débords et d'autre part, en attirant son attention sur les conséquences que son choix pourrait avoir relativement au dossier de permis de construire déposé, notamment sur la nécessité de solliciter une demande de permis modificatif.

Force est de constater que la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX ne prétend nullement avoir mis en garde son client, profane, sur les conséquences de son choix de faire construire une charpente différente de celle prévue par l'architecte sur les plans communiqués aux services de l'urbanisme en vue de l'obtention du permis de construire ; a fortiori, elle ne produit aucun document justifiant de l'exécution de son obligation de conseil.

Elle soutient au contraire, que l'accord des parties sur le choix de la charpente s'est fait exclusivement à partir des documents suivants :

- des plans 3D, dont la preuve n'est cependant pas rapportée, en l'absence de signature de Monsieur [O] [L] apposée sur ces documents, qu'ils aient été portés à sa connaissance ; ces documents n'ont donc aucune valeur probante de l'accord donné par Monsieur [O] [L] sur la fabrication d'une charpente à débord 'queue de vache';

- une photocopie d'une étude estimative valant descriptif technique de la charpente datée du 14 juin 2018 avec la mention 'Devis n° 18 190 84562 PLAN 2" au nom de Monsieur [L], portant la mention en caractères majuscules et gras 'Attention devis fait avec nouveau plan et toutes les arases à la même hauteur - plan ne correspondant pas au permis de construire' concernant une 'charpente fermettes combles perdus entraxe 60 cm - pente 60 %- débord queue de vache 50 cm' et comportant à la fin du document, la mention 'Bon pour commande' suivie de la date écrite à la main du 26 juin 2018 et de la signature de Monsieur [O] [L]; force est de constater que ce document, qui de plus n'est qu'une copie, l'original n'étant pas communiqué, ne peut, contrairement à son intitulé, être considéré comme un devis alors qu'il ne comporte strictement aucun chiffrage et qu'il ne peut donc avoir valablement renseigné Monsieur [O] [L] sur les travaux envisagés, ni l'avoir valablement engagé envers la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX pour la fabrication d'une charpente à débord 'queue de vache', ce document ne comportant par ailleurs aucun élément explicatif sur la signification d'un débord 'queue de vache', pour un client non seulement profane mais dont il est établi qu'il parle mal et lit mal le français ;

- une photocopie d'une fiche de fabrication charpente portant la date du 26 février 2018 décrivant les différents débords de façade soit le débord 'droit', le débord 'queue de vache' et le débord 'chevron rapporté'; ce document qui n'est pas non plus communiqué en original, ne comporte pas la signature de Monsieur [O] [L] et rien ne prouve qu'il lui ait été communiqué ; la cour constate en effet que le verso de ce document sur lequel figure une signature supposée être celle de l'acquéreur, ne peut en aucun cas faire partie intégrante de cette fiche de fabrication, le verso n'étant que la photocopie de la dernière page de l'étude estimative susvisée du 14 juin 2018 qui comportait la mention 'Bon pour commande' suivie de la date écrite à la main du 26 juin 2018 et de la signature de Monsieur [O] [L] ; ce document ne peut donc établir la preuve que Monsieur [O] a donné son accord pour la fabrication d'une charpente avec débord 'queue de vache'.

- une photocopie d'un devis n°22358713 en date du 14 juin 2018 portant la signature de Monsieur [O] [L], lequel devis se réduit à la seule phrase suivante : 'CHARP [L] C PERDUS 18 190 84562 - transport inclus détail ci-joint- quantité 1 - prix HT 5 865,22' - TVA 20% : 1 173,04 euros - Total TTC : 7 038,26 euros.'

Ce devis au dos duquel figure de manière surprenante, comme pour la fiche de fabrication, la photocopie de la dernière page de l'étude estimative du 14 juin 2018 qui comportait la mention 'Bon pour commande' suivie de la date écrite à la main du 26 juin 2018 et de la signature de Monsieur [O] [L], ne fait aucune référence à une charpente comprenant un débord 'queue de vache'; ce document, totalement imprécis sur les prestations fournies, ne peut donc en aucun cas établir la preuve de l'accord donné par Monsieur [O] [L] pour la fabrication d'une charpente à débord 'queue de vache.'

En revanche, Monsieur [O] [L] a versé aux débats un autre document intitulé 'Fiche de fabrication charpente', fiche établie au nom de Monsieur [L] et portant sa signature apposée le 08 juin 2018, qui ne comporte aucune mention de l'existence de différents débords de toit, ni aucune explication sur la signification d'un débord de toit 'queue de vache'.

Il résulte donc de ce qui précède que non seulement la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX ne rapporte pas la preuve que c'est à la demande de Monsieur [O] [L] qu'elle a fabriqué une charpente non conforme aux plans établis par l'architecte, avec des débords 'queue de vache' et non avec des débords de toit droits, comme cela était prévu sur ces plans, mais qu'il est au contraire établi que la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX n'a pas respecté les demandes de son client qui correspondaient à la fabrication d'une charpente avec des débords droits conformément aux plans établis par l'architecte, ce qui constitue une faute d'autant plus grave qu'en sa qualité de professionnelle du bâtiment, elle ne pouvait ignorer les conséquences que cette modification pouvait avoir tant sur l'aspect des débords du toit que sur les contraintes administratives que cela était susceptible d'engendrer, notamment au niveau de la nécessaire harmonisation avec les autres maisons du lotissement et de l'éventuelle nécessité d'obtenir un permis de construire modificatif, conséquences dont elle ne rapporte pas la preuve qu'elle les a signalées à Monsieur [O] [L].

Il convient dans ces conséquences de prononcer la résolution du contrat de vente conclu le 14 juin 2018 entre Monsieur [O] [L] et la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX aux torts exclusifs de la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX.

Le jugement entrepris sera dès lors infirmé de ce chef.

La résolution entraînant l'anéantissement rétroactif du contrat, la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX ne peut prétendre au paiement de sa facture et sera en conséquence déboutée de cette demande.

Elle sera en revanche condamnée à restituer à Monsieur [O] [L] la somme de 7 044,26 euros TTC.

La cour constate qu'elle n'est saisie par aucune des parties d'une demande concernant la restitution de la charpente litigieuse, dont la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX soutient, sans en rapporter la preuve, que Monsieur [O] [L] serait venue la récupérer le 03 mars 2021 dans ses locaux.

2°) Sur les demandes indemnitaires présentées par Monsieur [O] [L]

Sur le préjudice matériel

Monsieur [O] [L] sollicite une somme de 800,00 euros au titre des frais de main d'oeuvre du montage et du démontage de la charpente non conforme.

Cette demande sera rejetée, la facture d'un montant de 4 800,00 euros en date du 24 octobre 2018 de la société Aquitaine Sud Gouttière Toiture fournie à l'appui de cette prétention concernant la pose de l'ensemble d'une charpente et non les frais de main d'oeuvre de la dépose de la charpente litigieuse.

Monsieur [O] [L] sollicite par ailleurs une somme de 1 296,00 euros correspondant à une facture de ce montant en date du 25 septembre 2019 établie par la SARL RAM Environnement pour la location d'un semi porte char pour le rapatriement de la charpente sur le site de la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX.

Outre le fait que cette facture porte la date du 25 septembre 2019 alors que les éléments de la charpente ont été restitués le 10 juin 2019, il appartenait à Monsieur [O] [L], avant de procéder à la restitution des éléments de charpente à la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX, de saisir le tribunal pour obtenir une décision sur une éventuelle résolution du contrat et une éventuelle restitution de la charpente et d'attendre cette décision pour procéder, s'il y avait lieu, à cette restitution.

Cette demande sera rejetée.

S'agissant de ses autres prétentions, aucun document n'étant produit à l'appui de sa demande au titre du coût d'un lieu de stockage pour les menuiseries commandées et le nouveau déplacement de l'installateur, ni au titre du paiement du crédit allégué, elles seront également rejetées.

Sur le préjudice moral

Monsieur [O] [L] sollicite la somme de 2 000,00 euros en réparation de son préjudice moral.

L'analyse des pièces du dossier fait apparaître que Monsieur [O] [L] subit les désagréments d'un litige depuis le mois d'octobre 2018 et a ensuite été dans l'obligation de mettre en oeuvre des démarches nécessaires pour faire valoir ses droits en justice; il justifie donc d'un préjudice moral pour lequel il lui sera alloué la somme de 1 000,00 euros.

3°) Sur les demandes annexes

Le jugement de première instance sera infirmé en ce qui concerne les condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La SAS CHAUSSON MATÉRIAUX sera condamnée à payer à Monsieur [O] [L] la somme de 3 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande formée à ce titre.

La SAS CHAUSSON MATÉRIAUX sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel avec application au profit des avocats qui en ont fait la demande des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Rectifie le jugement rendu le 19 novembre 2020 par le tribunal judiciaire, chambre des contentieux de la protection de Pau en ce sens qu'il y a lieu de dire qu'il s'agit d'un jugement contradictoire,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer formée par Monsieur [O] [L],

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Met à néant l'ordonnance d'injonction de payer du tribunal d'instance de Pau en date du 19 juillet 2019 le présent arrêt s'y substituant,

Prononce la résolution aux torts exclusifs de la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX du contrat de vente d'une charpente conclu le 14 juin 2018 entre Monsieur [O] [L] et la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX,

Déboute la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX de sa demande de paiement d'une somme de 7 044,26 euros au titre de la facture établie pour la charpente livrée à Monsieur [O] [L],

Condamne la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX à restituer à Monsieur [O] [L] la somme de 7 044,56 euros correspondant au prix de la charpente qui lui a été livrée,

Déboute Monsieur [O] [L] de ses demandes au titre du préjudice matériel,

Condamne la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX à payer à Monsieur [O] [L] la somme de 1 000,00 euros en réparation de son préjudice moral,

Condamne la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX à payer à Monsieur [O] [L] la somme de 3 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS CHAUSSON MATÉRIAUX aux dépens de première instance et d'appel avec application au profit des avocats qui en ont fait la demande des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme HAUGUEL, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Sylvie HAUGUEL Caroline FAURE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01277
Date de la décision : 14/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-14;21.01277 ?
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