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14/03/2023 | FRANCE | N°21/01242

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 14 mars 2023, 21/01242


SF/ MS



Numéro 23/00942





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRÊT DU 14/03/2023







Dossier : N° RG 21/01242 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H22W





Nature affaire :



Demande en réparation des dommages causés par d'autres faits personnels















Affaire :



[R] [N]



Compagnie d'assurance MAIF



C/



[B] [D]



[O] [W]



[M

] [L]



SA BPCE IARD



Compagnie d'assurance MMA IARD









Grosse délivrée le :



à :

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 14 Mars 2023, les parties...

SF/ MS

Numéro 23/00942

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRÊT DU 14/03/2023

Dossier : N° RG 21/01242 - N° Portalis DBVV-V-B7F-H22W

Nature affaire :

Demande en réparation des dommages causés par d'autres faits personnels

Affaire :

[R] [N]

Compagnie d'assurance MAIF

C/

[B] [D]

[O] [W]

[M] [L]

SA BPCE IARD

Compagnie d'assurance MMA IARD

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 14 Mars 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 24 Janvier 2023, devant :

Madame FAURE, Présidente

Madame ROSA-SCHALL, Conseillère

Madame de FRAMOND, Conseillère, magistrate chargée du rapport conformément à l'article 785 du Code de procédure civile

assistées de Madame HAUGUEL, Greffière, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTES :

Madame [R] [N]

née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 16]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 8]

MUTUELLE ASSURANCE INSTITUTEUR FRANCE (MAIF)

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 13]

Représentées et assistées de Maître DARZACQ de la SELARL LAURE DARZACQ, avocat au barreau de DAX

INTIMES :

Madame [B] [D]

née le [Date naissance 6] 1974 à [Localité 17]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 11]

Monsieur [O] [W]

né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 14] (Ghana)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 11]

SA BPCE IARD

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 15]

[Localité 13]

Représentés et assistés de Maître FRANCOIS de la SELARL AQUI'LEX, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN

Monsieur [M] [L]

[Adresse 10]

[Localité 9]

Compagnie d'assurance MMA IARD

[Adresse 3]

[Localité 12]

Représentés et assistés de Maître GACHIE de la SELARL THOMAS GACHIE, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN

sur appel de la décision

en date du 17 FEVRIER 2021

rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONT DE MARSAN

RG numéro : 19/00204

Le 25 juillet 2014, M. [O] [W] et Mme [B] [D] ont donné à bail une maison à usage d'habitation à Mme [R] [N].

L'immeuble a été assuré auprès de la compagnie d'assurances BPCE IARD, par Mme [D] en sa qualité de propriétaire, et Mme [N] a contracté assurance auprès de la MAIF.

Le 30 octobre 2014, M. [G] [L] a remplacé le chapeau en béton de la cheminée et procédé au ramonage du conduit de l'insert.

Le 2 février 2015, l'EURL SLCM, dont M. [L] est le gérant, a fabriqué et posé une plaque dans la cheminée.

Un premier incendie s'est déclaré le 21 novembre 2015 vers 22h30 obligeant Mme [N] et sa famille a quitté les lieux. L'incendie était maîtrisé par les pompiers vers 0 heure 30.

Un second incendie se déclarait dans la matinée suivante vers 8 heures du matin.

La MAIF mandatait son expert habituel, le cabinet SARETEC pour rechercher les causes des deux incendies.

Par actes d'huissier en date des 16 et 18 avril 2016, M. [W], Mme [D] et la compagnie d'assurances BPCE IARD ont fait assigner Mme [N], la MAIF et le SDIS des Landes, aux fins d'obtenir d'une mesure d'expertise.

Les opérations d'expertise ont été rendues communes et opposables à M. [L] en charge du ramonage et à son entreprise l'EURL SLCM et à son assureur, la MMA IARD.

Aucune solution amiable n'ayant été trouvée, M. [W], Mme [D] et la compagnie d'assurances BPCE IARD ont saisi le tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan aux fins de :

- déclarer Mme [N] responsable du second incendie survenu le 22 novembre 2015,

- condamner in solidum Mme [N] et la MAIF à payer à M. [W] et Mme [D] la somme de 2 223,96 €,

- dire que la compagnie BPCE est subrogée dans les droits de Mme [D] sur le fondement de l'article L.121-12 du code des assurances,

- condamner in solidum Mme [N] et la MAIF à payer à la BPCE la somme de 60 992,37 €,

- déclarer M. [L] responsable du départ du 1er feu,

- condamner in solidum M. [L] et la compagnie MMA IARD à payer à la compagnie BPCE IARD la somme de 6 996,12 €,

- débouter Mme [N] et la MAIF de toutes leurs demandes dirigées contre eux,

- condamner in solidum M. [L] et la compagnie MMA IARD à garantir Mme [D] et M. [W] et la compagnie BPCE IARD de toutes condamnations prononcées à leur encontre au profit de Mme [N] et de la MAIF au titre du premier feu,

- condamner in solidum Mme [N] et la MAIF, M. [L] et la compagnie MMA IARD à leur payer une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Par jugement contradictoire en date du 17 février 2021, le juge de première instance a :

- déclaré Mme [N] responsable du second incendie survenu le 21 novembre 2015,

- condamné in solidum Mme [N] et la MAIF à payer à M. [W] et Mme [D] la somme de 2 223,96 €,

- dit que la compagnie BPCE est subrogée dans les droits de Mme [D] sur le fondement de l'article L.121-12 du code des assurances,

- condamné in solidum Mme [N] et la MAIF à payer à la BPCE la somme de 60 992,37 €,

- déclaré M. [L] responsable du premier incendie survenu le 21 novembre 2015,

- condamné in solidum M. [L] et la compagnie MMA à payer à Mme [D] et M. [W] la somme de 1 625,11 €,

- dit que la compagnie BPCE est subrogée dans les droits de Mme [D] sur le fondement de l'article L.121-12 du code des assurances,

- condamné in solidum M. [L] et la compagnie MMA à verser la somme de 6 996,12 € à la compagnie d'assurance BPCE IARD,

- condamné in solidum M. [W], Mme [D] et la compagnie BPCE IARD à payer à Mme [N] la somme de 125 € au titre de la franchise d'assurance,

- dit que la MAIF est subrogée dans les droits de Mme [N] sur le fondement de l'article L.121-12 du code des assurances,

- condamné in solidum M. [W], Mme [D] et la compagnie BPCE IARD à payer à la MAIF la somme de 28 675,75 €,

- condamné in solidum M. [L] et la compagnie MMA à relever indemne et garantir Mme [D], M. [W] et la compagnie BPCE IARD de toutes condamnations prononcées à leur encontre au profit de Mme [N] et de la compagnie MAIF au titre du premier départ de feu,

- débouté M. [W], Mme [D] et la BPCE IARD du surplus de ses demandes,

- débouté Mme [N] et la MAIF du surplus de leurs demandes,

- débouté M. [L] et la compagnie MMA du surplus de leurs demandes,

- laissé à chacun des parties la charge de ses propres frais et dépens en ce compris les frais d'expertise,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

Le juge de première instance a notamment constaté que Mme [N], en sa qualité de locataire, est responsable de l'incendie, qu'elle n'apporte pas la preuve du fait du tiers constituant un fait imprévisible et irrésistible qui lui serait extérieur, l'acte de malveillance comme cause du second incendie étant insuffisamment établi et alors qu'elle a commis une négligence en omettant de fermer une porte-fenêtre de la maison trouvée ouverte par les pompiers lors de la seconde intervention ; par ailleurs, le juge retient que le bailleur doit répondre de tous les vices ou défauts de la chose louée, quand bien même il ne les aurait pas connus lors du bail, et que M. [L], ramoneur professionnel, ne conteste pas avoir commis une faute avérée en matière de sécurité ayant provoqué le premier départ de feu résultant de la pyrolyse d'un élément de charpente (coffrage de la hotte en bois) généré par une exposition répétée à une température élevée.

Mme [N] et la compagnie d'assurance MAIF ont relevé appel par déclaration du 9 avril 2021, critiquant le jugement dans l'ensemble de ses dispositions.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 12 octobre 2021, Mme [N] et la compagnie d'assurance MAIF, appelantes, demandent à la Cour de :

s'agissant du premier incendie,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné in solidum Mme [D], M. [W] et leur assureur BPCE à payer au titre du préjudice matériel :

. à Mme [N] la somme de 125 € au titre de la franchise contractuelle restée à sa charge,

. à la MAIF la somme de 28 675,75 € ;

s'agissant du second incendie,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré Mme [N] responsable du second incendie intervenu le 21 novembre 2015 et l'a condamnée, in solidum avec la compagnie d'assurance MAIF au paiement de :

. 2 223,96 € à M. [W] et Mme [D],

. 60 992,37 € à la BPCE ;

- réformer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [N] de sa demande de dommages intérêts au titre de son préjudice moral,

- condamner M. [W] et Mme [D], in solidum avec la compagnie d'assurance BPCE IARD, à verser à Mme [N] la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts,

- réformer le jugement dont appel sur les mesures accessoires et condamner in solidum Mme [D], M. [W] et leur assureur BPCE au paiement d'une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, s'agissant de la procédure de première instance,

- condamner in solidum Mme [D], M. [W] et leur assureur BPCE, s'agissant de la procédure d'appel, au paiement d'une indemnité de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum Mme [D], M. [W] et leur assureur BPCE aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise,

- débouter M. [L] et l'assureur MMA IARD de leur demande portant sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens d'appel,

- débouter Mme [D], M. [W] et leur assureur BPCE de leurs demandes de condamnation in solidum de Mme [N] et de la MAIF,

- débouter Mme [D], M. [W] et leur assureur BPCE de leur demande portant sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens d'appel.

Au soutien de leurs prétentions et sur le fondement des articles 1733, 1719, 1721 du code civil L121-12 du code des assurances et 545 du code de procédure civile, elles font valoir, sur le second incendie qu'il ressort des constatations de l'expert que le second feu n'a pas pu trouver son origine dans un défaut d'extinction du premier feu, qu'aucun défaut électrique ne peut expliquer cet incendie alors que des éléments matériels confirment un acte de vandalisme notamment les traces de 4 départs de feu distincts dans les combles de la maison, constituant bien un fait imprévisible et irrésistible pour l'appelante, et qu'il n'est pas démontré qu'elle a laissé une porte-fenêtre ouverte en quittant la maison lors du 1er feu.

Si le jugement doit être confirmé sur les sommes allouées en réparation de leurs préjudices matériels et les condamnations des bailleurs et de leur assureur, il sera réformé sur leur préjudice moral résultant de la perte de leurs affaires et des circonstances violentes de la cause de cette destruction.

Par conclusions notifiées le 18 novembre 2021, Mme [D], M. [W] et la BPCE IARD, entendent voir la cour :

au titre du second départ de feu,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

. déclaré Mme [N] responsable du second incendie survenu le 21 novembre 2015,

. condamné in solidum Mme [N] et la compagnie MAIF à payer à Mme [D] et M. [W] la somme de 2 223,96 €,

. dit que la compagnie d'assurances BPCE IARD est subrogée dans les droits de Mme [D] sur le fondement de l'article L.121-12 du code des assurances,

. condamné in solidum Mme [N] et la compagnie MAIF à payer à la compagnie d'assurance BPCE IARD la somme de 60 392,37 € ;

au titre du premier départ de feu,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

. déclaré M. [L] responsable du premier incendie survenu le 21 novembre 2015,

. condamné in solidum M. [L] et la compagnie MMA à payer à Mme [D] et M. [W] la somme de 1 625,11 €,

. dit que la compagnie d'assurance BPCE IARD est subrogée dans les droits de Mme [D] sur le fondement de l'article L.121-12 du code des assurances,

. condamné in solidum M. [L] et la compagnie MMA à payer à la compagnie d'assurance BPCE IARD la somme de 6 996,12 €,

. condamné in solidum M. [W], Mme [D] et la compagnie BPCE IARD à payer à Mme [N] la somme de 125 € au titre de la franchise d'assurance,

. dit que la MAIF est subrogée dans les droits de Mme [N] sur le fondement de l'article L.121-12 du code des assurances,

. condamné in solidum M. [W], Mme [D] et la compagnie BPCE IARD à payer à la MAIF la somme de 28 675,75 €,

. condamné in solidum, M. [L] et la compagnie MMA à relever indemne et garantir Mme [D], M. [W] et la compagnie BPCE IARD, de toutes condamnations qui seraient prononcées à leur encontre au profit de Mme [N] et de la compagnie MAIF au titre du premier départ de feu,

. débouté Mme [N] de sa demande de dommages-intérêts au titre de son préjudice moral considérant qu'aucune preuve n'était rapportée à ce titre,

. débouté Mme [N] et la MAIF du surplus de leurs demandes ;

au titre des demandes accessoires,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Mme [D], M. [W] et la compagnie BPCE IARD de leurs demandes de condamnation in solidum de Mme [N] et la compagnie MAIF au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens en ce compris les frais d'expertise,

- condamner en conséquence in solidum aux entiers dépens Mme [N], la compagnie MAIF, M. [L] et la compagnie MMA IARD en ce compris les frais d'expertise ;

y ajoutant,

- condamner in solidum aux entiers dépens de la procédure d'appel Mme [N], la compagnie MAIF, M. [L] et la compagnie MMA IARD ;

en tout état de cause,

- condamner in solidum Mme [N], la compagnie MAIF, M. [L] et la compagnie MMA IARD à payer à Mme [D], M. [W] et la compagnie BPCE IARD la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de leurs prétentions et sur le fondement des dispositions des articles 1733, 1231-1 et suivants du code civil, l'article L.121-12 du code des assurances et les articles 696 et 700 du code de procédure civile, Mme [D], M. [W] et la compagnie BPCE IARD font valoir que si Mme [N] n'est en rien responsable du 1er feu, sa responsabilité de locataire est par contre engagée pour le second feu en ayant laissé une porte ouverte en quittant la maison, permettant la réalisation du 2ème feu malveillant qui ne constitue pas un cas de force majeure pour elle. Ils ne contestent pas les dispositions relatives à la responsabilité de plein droit du bailleur à l'égard de sa locataire au titre de la non conformité de l'installation de l'insert, cause du 1er feu, dès lors que M. [W] et Mme [D] et leur assureur sont garantis par M. [L] et sa propre assurance dont la responsabilité pour faute est également retenue et non contestée.

Par conclusions notifiées le 12 août 2021, M. [L] et la MMA IARD, entendent voir la cour :

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan du 17 février 2021 en toutes ses dispositions ;

ajoutant au jugement dont appel,

- condamner solidairement Mme [N] et la MAIF à payer à M. [L] et à la MMA IARD ensemble la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 30 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité au titre du 1er feu':

Les parties ne critiquent pas le jugement qui a retenu la responsabilité de M. [L], ni :

- les condamnations in solidum prononcées contre ce dernier et la compagnie MMA IARD au profit de Mme [D], M. [W] et de la compagnie BPCE IARD,

- les condamnations in solidum de Mme [D] et M. [W] et de la compagnie BPCE IARD au profit de Mme [N] et de la MAIF,

- et les condamnations in solidum de M. [L] et la compagnie MMA IARD à garantir Mme [D] et M. [W] et la compagnie BPCE IARD des condamnations précédentes.

Il n'y a pas non plus de contestation sur l'application des contrats d'assurance au profit de chaque assuré dans ce litige, ni sur les subrogations invoquées.

Le jugement est donc confirmé sur ces condamnations au titre du 1er feu.

Sur la demande de Mme [N] contre Mme [D] et M. [W] et La Société BPCE IARD au titre de son préjudice moral':

Le 1er juge a rejeté la demande de Mme [N] de dommages intérêts de ce chef faute de justificatif.

Il ressort des circonstances de fait des deux incendies successifs, que le 1er feu, de la responsabilité de M. [L] qui avait ramoné et contrôlé la cheminée mais engageant aussi la responsabilité des bailleurs pour l'installation ancienne inadaptée, a obligé Mme [N] et sa famille avec 4 enfants, en pleine nuit, à se reloger. La destruction matérielle liée à ce 1er feu a cependant été très limitée, en comparaison des dégâts provoqués par le 2ème feu qui n'est pas imputable aux bailleurs. Toutefois, sans la survenance du 1er feu et le départ des locataires, il n'y aurait pas eu de second feu.

Il est donc légitime d'accorder une indemnisation pour ce préjudice moral de voir détruire ses affaires et de devoir partir en pleine nuit, à hauteur de la somme de 1 500 €, cette condamnation relevant du préjudice lié au 1er feu.

Cette nouvelle condamnation in solidum de Mme [D] et M. [W] et de la compagnie d'assurance BPCE IARD doit être également garantie in solidum par M. [L] et la compagnie d'assurance MMA IARD au titre de leur responsabilité dans ce 1er feu jugée et non contestée en 1ère instance.

Sur les demandes d'indemnisation au titre du 2ème incendie':

L'article 1733 du code civil dispose que le preneur (locataire) répond de l'incendie à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou par vice de construction, ou que le feu a été communiqué par une maison voisine.

Il appartient au locataire qui veut s'exonérer de la responsabilité de plein droit dans l'incendie de la maison qu'il occupe, de démontrer l'existence du cas fortuit ou d'un cas de force majeure.

Le cas fortuit ou la force majeure suppose un fait imprévisible et irrésistible pour le locataire, ce qui exclut une négligence ou imprudence de sa part ayant favorisé ou permis l'incendie.

En l'espèce, dans son expertise judiciaire, M. [P] constate, s'agissant du feu survenu dans les combles de la maison d'habitation, la présence de plusieurs foyers distincts sans continuité entre eux, a minima 4 foyers identifiés, dont un en hauteur, à l'origine de la combustion de pièces de charpente. L'expert exclut toute continuation par propagation de matière incandescente du 1er feu au regard des opérations réalisées par les pompiers (évacuation de la ouate de cellulose) et des deux contrôles effectués (par caméra thermique). Le rapport du SDIS rédigé par M. [Y] le 6 janvier 2016 confirme les mesures de sécurité prises limitant la zone du 1er feu autour des fermettes de la cheminée.

De même, il exclut toute origine électrique en l'absence de fusion, perlage ou autre échauffement ou amorçage électrique, et retient comme seule explication possible un acte de vandalisme, confortée par les nombreuses projections sur les murs et le plafond du salon. Il appuie cette hypothèse sur la découverte d'une porte de la maison non fermée lors de la seconde intervention des pompiers.

Le rapport du SDIS précité mentionne que les locataires étaient présents lors de leur intervention et ont quitté leur maison en même temps que les pompiers à 0h13, la maison devant être fermée à clé selon leurs prescriptions.

Un autre rapport rédigé le 4 janvier 2016 par le pompier [H] concernant la 2ème intervention à 7h30 pour la visite de contrôle après le 1er feu mentionne qu'une porte de la maison n'était pas verrouillée, et que voyant de la fumée sortant du toit, le pompier pouvait pénétrer dans la maison pour constater le 2ème incendie.

Ainsi, même si les auteurs de ce second incendie n'ont pu être identifiés, et même si les locataires avaient quitté les lieux après le 1er incendie, la circonstance que la maison avait conservé une porte ouverte malgré les recommandations du SDIS constitue une négligence de la locataire qui a favorisé la possibilité de ce second incendie, sa survenue n'étant dès lors ni imprévisible, ni irrésistible pour elle et ne lui permet pas de s'exonérer de la responsabilité pesant sur elle à l'égard de ses bailleurs.

Il s'ensuit que c'est à juste titre que le 1er juge a retenu la responsabilité de Mme [N] au titre de ce 2ème incendie et sa condamnation, ainsi que celle de la MAIF en vertu de son contrat d'assurance et de sa garantie non contestée, à indemniser Mme [D], M. [W] et la compagnie d'assurance BPCE IARD et le jugement sera confirmé sur ces dispositions.

Le tribunal a exactement statué sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dont il a fait une équitable application.

La Cour statuant à nouveau sur les dépens dit que la MAIF et la compagnie d'assurance MMA IARD seront condamnées aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise, chacune pour moitié.

Les autres demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 17 février 2021 en ce qu'il a rejeté la demande de dommages intérêts présentée par Mme [N] au titre de son préjudice moral et sur la disposition relative aux dépens ;

Confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant':

Condamne in solidum Mme [D], M. [W] et la compagnie d'assurance BPCE IARD à payer à Mme [N] la somme de 1 500 € au titre de son préjudice moral lié au 1er incendie';

Dit que cette condamnation doit être également garantie in solidum par la compagnie d'assurance MMA IARD et M. [L] à l'égard de Mme [D], M. [W] et la compagnie d'assurance BPCE IARD ;

Rejette les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile y compris pour les frais exposés en appel ;

Condamne la MAIF et la compagnie d'assurance MMA IARD chacune pour moitié aux entiers dépens de première instance y compris les frais d'expertise judiciaire et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Carole DEBON Caroline FAURE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01242
Date de la décision : 14/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-14;21.01242 ?
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