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17/02/2023 | FRANCE | N°23/00533

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre des étrangers-jld, 17 février 2023, 23/00533


N° 23/00378



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE PAU



L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,



ORDONNANCE DU dix sept Février deux mille vingt trois





Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 23/00533 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IOOY



Décision déférée ordonnance rendue le 15 Février 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonn

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Nous, Christel CARIOU, Conseillère, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 15 décembre 2022, assi...

N° 23/00378

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE PAU

L743-21, L743-23, R743-10, R743-11 et R743-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

ORDONNANCE DU dix sept Février deux mille vingt trois

Numéro d'inscription au répertoire général N° RG 23/00533 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IOOY

Décision déférée ordonnance rendue le 15 Février 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne,

Nous, Christel CARIOU, Conseillère, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Pau en date du 15 décembre 2022, assistée de Sylvie HAUGUEL, Greffier,

Monsieur X SE DISANT [U] [F]

né le [Date naissance 1] 2001 à [Localité 6]

de nationalité Roumaine

Retenu au centre de rétention d'[Localité 7]

Comparant et assisté de Maître Laure ROMAZZOTTI, avocat au barreau de Pau

INTIMES :

LE PRÉFET DU LOT ET GARONNE, avisé, absent, qui a transmis un mémoire

MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et heure de l'audience,

ORDONNANCE :

- réputée contradictoire, après débats en audience publique,

*********

Vu l'ordonnance rendue le 15 février 2023 par le juge des libertés et de la détention de Bayonne, qui a :

- ordonné la jonction du dossier N°RG 23/00161 au dossier N°23/00160,

- déclaré recevable la requête de M. [U] [F] en contestation de placement en

rétention,

- rejeté la requête de M. [U] [F] en contestation de placement en rétention,

- déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative présentée par le

Préfet du Lot et Garonne,

- rejeté les exceptions de nullité soulevées,

- dit n'y avoir lieu à assignation à résidence,

- ordonné la prolongation de la rétention de M. [U] [F] pour une durée de vingt-

huit jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention.

Vu la notification de l'ordonnance faite au retenu le 15 février 2023 à 13 heures 44.

Vu la déclaration d'appel motivée, formée par M. [U] [F] reçue le 16 février 2023 à 11 heures 15.

****

A l'appui de son appel, pour demander l'infirmation de l'ordonnance entreprise, M. [U] [F] fait valoir soulève :

- la notification irrégulière de ses droits

- la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme,

- l'erreur manifeste d'appréciation quant aux garanties de représentation,

- la possibilité de bénéficier d'une assignation à résidence compte tenu de son statut de

ressortissant européen.

A l'audience, son conseil fait également valoir l'absence de diligences de l'Administration postérieurement à son placement en rétention.

SUR CE :

En la forme, l'appel est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu par l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur le fond, l'examen de la procédure et des pièces communiquées par le conseil de l'appelant fait apparaître les éléments suivants quant à la situation de ce retenu.

Le 11 février 2023 à 17h45, les services de gendarmerie procédaient au contrôle d'un véhicule VOLKSWAGEN signalé volé conduit par M. [U] [F] qui présentait sur son téléphone la photographie de sa carte d'identité roumain qu'il indiquait avoir perdue tout comme son permis de conduire. Il s'avérait que M. [U] [F] faisait l'objet de plusieurs fiches de recherche dont une suite à un arrêté du 24 décembre 2022 obligeant l'intéressé à quitter le territoire français sans délai.

M. [U] [F] était placé en retenue à compter du 11 février 2023 à 18h00.Lors de son audition, M. [U] [F] indiquait qu'il avait bien eu connaissance de son obligation de quitter le territoire mais qu'il attendait sa comparution devant un tribunal en mars 2023 pour quitter ensuite la France ; il était par ailleurs connu en France pour plusieurs faits de délinquance dont trafic de stupéfiants. Il précisait avoir perdu sa carte d'identité, être hébergé par ses parents à [Adresse 4] (33) et être sur le point de signer un CDD. Il disait être prêt à retourner dans son pays d'origine.

Par arrêté du 12 février 2023, le préfet de Lot et Garonne prononçait le maintien de M. [U] [F] en rétention pour une durée de 48 heures.

Par requête du 13 février 2023, le Préfet de Lot et Garonne saisissait le juge des libertés et de la détention de BAYONNE d'une demande de prolongation.

Par requête du même jour, M. [U] [F] saisissait le juge des libertés et de la détention de BAYONNE d'une contestation de la décision de placement en rétention.

La mesure de rétention a été prolongée par l'ordonnance entreprise.

***

Sur le moyen pris de la notification tardive des droits

Aux termes de l'article L744-4 du CESEDA, « l'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend.»

La lecture attentive de la procédure nous apprend que :

- le procès-verbal du 11 février 2023 (pièce n°1) fait état de ce que la mesure de rétention

prend effet le 11 février à 18h00 et que la notification des droits intervient immédiatement

après, le formulaire de notification des droits d'une personne placée en retenue a bien été

émargée par M. [U] [F] le 11 février 2023 à 18h

Il ressort ainsi des ces deux pièces de la procédure que M. [U] [F] s'est vu notifier ses droits immédiatement après son placement en rétention et non 1h15 après.

Ce moyen sera rejeté.

Sur la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme

Aux termes de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme, «1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. »

Il convient de rappeler que le placement en rétention ne constitue pas en soi une atteinte à la vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la CEDH ; qu'il convient que requérant fasse état de circonstances de fait précises permettant de caractériser, dans son cas spécifique les raisons pour lesquelles l'atteinte serait disproportionnée.

En l'espèce, il ressort des éléments du dossier et des déclarations du retenu :

- qu'il aurait un enfant de 2 ans né de son union avec Mme [I] [H] sans autre précision

et notamment un acte de naissance de l'enfant ;

- qu'il vivrait chez ses parents dont le nom est inconnu tout comme l'adresse exacte le retenu

ne produisant aucune attestation d'hébergement,

- qu'il serait sur le point de signer un contrat de travail avec Chronopost sans justification, cet

élément étant invérifiable en l'état,

Le conseil de M. [U] [F] fait état d'attestations et justificatifs non versés au dossier et non communiqués à la préfecture.

Quoi qu'il en soit, alors que M. [F] demeurait assez succinct, lors de son audition, concernant cette vie privée indiquant vivre chez ses parents, avoir un enfant de deux ans comme étant né le [Date naissance 2] 2021 (qu'il dit à l'audience avoir rencontré à l'âge de 11 mois lorsqu'il est sorti de détention) et entretenir «des relations compliquées» avec sa compagne, il affirme désormais vivre à [Localité 5] la semaine pour le travail et le week-end à [Localité 3] avec sa famille dont il subviendrait aux besoins.

Dès lors, au vu de simples déclarations qui se sont précisées au fil de la procédure, la vie privée et familiale prétendue de M. [U] [F] n'est aucunement démontrée.

Au vu de ces éléments, M. [U] [F] ne justifie d'aucun élément permettant de considérer que le placement en rétention serait disproportionné au regard de l'article 8 de la CEDH ; au surplus, la durée peu importante du placement en rétention doit être considéré comme un facteur atténuant d'une éventuelle atteinte.

Sur les garanties de représentation

Aux termes de l'article L 741-1 du CESEDA, « l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision. Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L 612- 3 . »

M. [U] [F] indique que le Préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ne prenant pas en compte ses garanties de représentation.

En effet, le préfet fait observer dans son arrêté de maintien en rétention que :

- il ne justifie pas de liens personnels et familiaux durables et stables en France même s'il

indique avoir un enfant née de sa relation avec une jeune femme avec laquelle il ne vit pas

et qu'il serait hébergé chez ses parents ;

- il ne justifie pas plus d'une insertion professionnelle avérée et n'est pas en mesure de

subvenir à ses besoins sur le territoire national.

Il ressort des éléments du dossier et des déclarations du retenu :

- qu'il aurait un enfant de 2 ans né de son union avec Mme [I] [H] sans autre précision

et notamment un acte de naissance de l'enfant ;

- qu'il vivrait chez ses parents dont le nom est inconnu tout comme l'adresse exacte le retenu

ne produisant aucune attestation d'hébergement,

- qu'il serait sur le point de signer un contrat de travail avec Chronopost sans autre précision,

cet élément étant invérifiable en l'état.

La préfecture n'a jamais été destinataire des pièces évoquées à l'audience par M. [U] et son conseil ; il ne peut dès lors lui être raisonnablement reproché de ne pas les avoir pris en compte dans sa décision de placement en rétention.

Ainsi, au regard de l'imprécision des renseignements donnés et de l'absence de justificatifs fournis à l'Administration, il n'apparaît pas que les services de la Préfecture aient commis une erreur manifeste d'appréciation.

Ce moyen sera rejeté.

Sur l'assignation à résidence

En vertu de l'article 743-13 du CESEDA, « le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives. L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par la juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution. »

Contrairement à ce qu'il indique, M. [U] [F] n'a jamais fourni aux service de gendarmerie une pièce d'identité en original mais seulement une photographie sur téléphone de cette dernière ; il indique d'ailleurs avoir perdu cette pièce d'identité lors de son audition pour finalement affirmer à l'audience qu'il se l'est faite voler.

En l'absence de document d'identité en original, l'assignation à résidence est dès lors impossible au regard du texte susvisé.

Ce moyen sera rejeté.

Sur l'absence de diligences de l'Administration

Aux termes de l'article L 741-3 du CESEDA, « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. »

Le conseil de M. [U] [F] affirme qu'aucune diligence n'a été effectuée après le placement en rétention contrairement aux dispositions de l'article L 554-1 CESEDA et à la jurisprudence de la cour de cassation.

Outre que l'article L 554-1 du CESEDA concerne les conditions d'accès au marché du travail pour les demandeurs d'asile, il apparaît que par courrier du 13 février 2023, soit postérieurement au placement en rétention de l'étranger, la préfecture de Lot-et-Garonne a saisi les services de l'Ambassade de Roumanie à [Localité 8] sollicitant la délivrance d'un laissez-passer consulaire au bénéfice de M. [U].

Dès lors, l'exigence de diligence a bien été respectée par l'Administration et ce moyen sera rejeté.

En conséquence, l'ordonnance entreprise sera confirmée.

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARONS recevable l'appel en la forme de Monsieur [U] [F].

CONFIRMONS l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions

Déclarons recevable la requête en prolongation de rétention présentée le 13 février 2023 par le Préfet de Lot-et-Garonne.

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à l'étranger, à son conseil, à la préfecture du Lot et Garonne.

Rappelons que la présente ordonnance peut être frappée d'un pourvoi en cassation dans le délai de deux mois à compter de sa notification, par déclaration déposée au greffe de la Cour de Cassation par l'intermédiaire d'un Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation.

Fait au Palais de Justice de PAU, le dix sept Février deux mille vingt trois à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Sylvie HAUGUEL Christel CARIOU

Reçu notification de la présente par remise d'une copie

ce jour 17 Février 2023

Monsieur X SE DISANT [U] [F], par mail au centre de rétention d'[Localité 7]

Pris connaissance le : À

Signature

Maître Laure ROMAZZOTTI, par mail,

Monsieur le Préfet du Lot et Garonne, par mail


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre des étrangers-jld
Numéro d'arrêt : 23/00533
Date de la décision : 17/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-17;23.00533 ?
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